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Title: Leçons de cosmographie - à l'usage des lycées et collèges et de tous les établissements d'instruction publique
Author: Guilmin, Adrien
Language: French
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*** Start of this LibraryBlog Digital Book "Leçons de cosmographie - à l'usage des lycées et collèges et de tous les établissements d'instruction publique" ***


http://dp.rastko.net. This file was produced from images
generously made available by the Bibliothèque nationale
de France (BnF/Gallica)



                                  LEÇONS

                                    DE

                               COSMOGRAPHIE

                                À L'USAGE

                         DES LYCÉES ET COLLÈGES
           ET DE TOUS LES ÉTABLISSEMENTS D'INSTRUCTION PUBLIQUE;

                              PAR A. GUILMIN,
                       PROFESSEUR DE MATHÉMATIQUES.

                            QUATRIÈME ÉDITION,
             Revue et améliorée avec figures dans le texte,
               gravées en relief sur cuivre par E. SALLE.

                                  PARIS.
                        AUGUSTE DURAND, LIBRAIRE,
                            Rue des Grès, 7.
                                  1860



                           TABLE DES MATIÈRES.


Définition de la cosmographie; division générale du cours.

CHAPITRE PREMIER.

LES ÉTOILES.

Étoiles.--Sphère céleste.--Distances angulaires.
Mouvement diurne apparent des étoiles.
Étoiles circumpolaires.--Étoile polaire.
Verticale, plan vertical, zénith, nadir, horizon.
Lunette astronomique.--Théodolithe.
Hauteur d'une étoile.--Distance zénithale.
Culmination des étoiles.--Plan méridien; méridienne.
Lunette méridienne, horloge sidérale, mural.
Axe du monde.--Cercles décrits par les étoiles.
Jour sidéral.
Hauteur du pôle à Paris.
Mouvement de rotation de la terre autour de la ligne des pôles.
Différences des étoiles en ascension droite.--Déclinaisons.
Globes célestes.--Catalogues d'étoiles.
Constellations et principales étoiles.--Étoiles de diverses
grandeurs.--Combien on en voit à l'œil nu.
Description du ciel.
Étoiles variables ou périodiques, temporaires, colorées.
Étoiles doubles; leurs révolutions.
Distance des étoiles à la terre.
Voie lactée.--Nébuleuses.--Nébuleuses résolues.

CHAPITRE II.

DE LA TERRE.

Phénomènes qui donnent une première idée de la forme de la terre.
Pôles, parallèles, équateur, méridien.
Longitudes géographiques.
Détermination des longitudes géographiques.
Valeurs numériques du degré mesuré en France, en Laponie, au Pérou,
rapportées à l'ancienne toise; leur allongement quand on va du pôle
à l'équateur.
Rayon et aplatissement de la terre.
Longueur du mètre.
Cartes géographiques; globe terrestre.
Projection orthographique.
Projection stéréographique.
Système de développement en usage dans la construction de la carte
de France.
APPENDICE.--_Cartes marines.--Système de Mercator--De l'atmosphère
terrestre--Réfraction astronomique_.

CHAPITRE III.

LE SOLEIL.

Mouvement annuel apparent du soleil.
Écliptique.--Points équinoxiaux.--Solstices.
Constellations zodiacales.
Diamètre apparent du soleil variable avec le temps.
Le soleil paraît décrire une ellipse autour de la terre.
Principe des aires; ses conséquences.
Origine des ascensions droites; ascension droite du soleil.
Moment précis de l'équinoxe. Comment on règle une horloge sidérale.
Origine du jour sidéral.
Variations de l'ascension droite du soleil; inégalités des jours
solaires--Temps solaire vrai; temps moyen. Mesure du temps.
Principes élémentaires des cadrans solaires; leur construction.
Année tropique; sa valeur en jours moyens.
Calendrier; réforme Julienne et Grégorienne.
Des saisons; inégalité de leurs durées.
Du jour et de la nuit en un lieu déterminé de la terre, et de leurs
durées à diverses époques de l'année,--en des lieux différents.
Crépuscules.
_Causes principales des variations de la température en un lieu
donné. Climats_.
Distance du soleil à la terre.--Parallaxe.
Rapport du volume du soleil à celui de la terre; rapport des masses.
--Densité moyenne du soleil rapportée à celle de la terre.
Taches du soleil.--Sa rotation.
_Lumière zodiacale_. Longitude et latitude célestes.
Idée de la précession des équinoxes.
Conséquences de la précession des équinoxes.
Mouvement réel de la terre autour du soleil.
Appendice. _Calcul des parallaxes_; leur usage.
_Addition au chapitre de la précession des équinoxes.--Changement de
direction de l'axe du monde; nutation.--Changement d'aspect du ciel.
--Variations de l'année tropique, de la durée des saisons, etc_.

CHAPITRE IV.

LA LUNE.

Diamètre apparent. Phases.
Syzygies, quadrature, lumière cendrée.
Mouvement propre de la lune.
Orbite décrite par la lune autour de la terre.
Révolution sidérale et synodique.
Distance de la lune à la terre.--Diamètre réel et volume de la lune.
--Sa masse.
Taches.--Rotation.
Librations de la lune.
Libration en longitude.
_Libration en latitude; libration diurne_.
Montagnes de la lune; leurs hauteurs.
Constitution volcanique de la lune.
Absence d'eau et d'atmosphère.
Éclipses; leur cause.--Ombre et pénombre.
Éclipses de lune totales et partielles; explication de leurs phases.
Les éclipses de lune n'ont lieu qu'à l'opposition; pourquoi il n'y
en a pas à chaque opposition.
Influence de l'atmosphère terrestre sur les éclipses de lune.
Éclipses de soleil, totales, annulaires, partielles.
Elles n'ont lieu qu'à l'époque de la conjonction de la lune; pourquoi
il n'y en a pas à toutes les conjonctions.
Phénomènes physiques d'une éclipse totale de soleil.
_Occultations d'étoiles par la lune_.
Détermination des longitudes terrestres par les distances lunaires.
APPENDICE.--_Irrégularités du mouvement de la lune.--Ligne des nœuds;
leur rétrogradation; nutation de l'axe lunaire_.
_Explication des librations_.
_Prédiction des éclipses.--Période chaldéenne_.
_Fréquence relative des éclipses de lune et de soleil_.

CHAPITRE V.

DES PLANÈTES ET LEURS SATELLITES, ET DES COMÈTES.

Des planètes. Noms des principales. Leurs distances moyennes au
soleil.
Mouvements apparents des planètes.
Mouvements des planètes vus du soleil.
Lois de Kepler.
Principe de la gravitation universelle.
Définitions concernant le mouvement des planètes.
Planètes inférieures.--Digressions orientales et occidentales de Vénus
et de Mercure.
VÉNUS. Détails particuliers.
Phases de Vénus.
_Passages de Vénus sur le soleil_.
_Monographie de Mercure_.
PLANÈTES SUPÉRIEURES.--_Mouvements apparents des planètes supérieures
(vus de la terre); mouvements directs; stations; rétrogradations_.
_Monographie de_ MARS.
JUPITER.--Détails particuliers.
Rotation, aplatissement de son disque.
Satellites de Jupiter; leurs éclipses.
Longitudes géographiques déterminées par l'observation de ces
éclipses.
Vitesse de la lumière.
SATURNE; bandes, rotation, aplatissement.
Anneau et satellites.--Dimensions des différentes parties de ce système.
_Monographie d'_URANUS.
_Monographie de_ NEPTUNE.
_Perturbations des mouvements planétaires_.
Petites planètes situées entre Mars et Jupiter.
_Remarque générale du mouvement du système solaire_.

DES COMÈTES.

Leur aspect; noyau, chevelure, queue.
Petitesse de la masse des comètes.
Nature de leurs orbites.
Comètes périodiques.
Comète de Halley.
Comète de Biéla.--Son dédoublement.
PHÉNOMÈNE DES MARÉES.--Flux et reflux; haute et basse mer.
Circonstances principales du phénomène.--Sa période.
Marées des syzygies et des quadratures.
Les marées sont dues aux actions combinées de la lune et du soleil.
APPENDICE.--_Détermination de la parallaxe du soleil à l'aide des
passages de Vénus sur le soleil_.
NOTE.--_Explication des alternatives de jour et de nuit, des
inégalités des jours et des nuits, etc., dans l'hypothèse du double
mouvement de la terre_.


FIN DE LA TABLE DES MATIÈRES.



                                    COURS

                                     DE

                                COSMOGRAPHIE.

                                ------------

=1=. La _Cosmographie_ a pour objet la description des corps célestes,
c'est-à-dire des corps répandus dans l'espace indéfini, de leurs
positions relatives, de leurs mouvements, et en général de tous les
phénomènes qu'ils peuvent nous présenter.

Nous nous occuperons de ces corps dans l'ordre suivant: les _étoiles_,
la _Terre_, le _Soleil_, la _Lune_, les _planètes_ et les _comètes_.


------------------------------------------------------------------------

                              CHAPITRE PREMIER.

                                 LES ÉTOILES.


=2=. On donne, en général, le nom d'ÉTOILES à cette multitude de corps
célestes que, durant les nuits sereines, nous apercevons dans l'espace
sous la forme de points lumineux, brillants.

=3=. Sphère céleste. Les étoiles sont isolées les unes des autres; leurs
distances à la terre doivent être différentes; cependant elles nous
paraissent également éloignées; elles nous font l'effet d'être attachées
à une sphère immense dont notre œil serait le centre. Pour plus de
simplicité dans l'étude des positions relatives et des mouvements des
corps célestes, on considère, en cosmographie, cette sphère, apparente
sous le nom de _sphère céleste_, comme si elle existait réellement.

La _sphère céleste_ est donc une _sphère idéale_ de rayon immense, ayant
pour centre l'œil de l'observateur, à la surface de laquelle on suppose
placées toutes les étoiles.

O étant le lieu d'observation, OE, OE', OE",..., les directions dans
lesquelles sont vues les étoiles E, E', E",.,.,(fig. 1), on imagine sur
ces directions de très-grandes distances Oe, Oe', Oe",... égales entre
elles. Au lieu des positions réelles E, E',E",... des étoiles, on
considère leurs projections e', e", e‴,... sur la sphère céleste.

[Illustration: 007, Fig.1]

[Illustration: 007, Fig.2]

=4.= DISTANCES ANGULAIRES. Cette conception de la sphère céleste n'a que
des avantages sans inconvénients; car les distances rectilignes absolues
OE, OE',... des étoiles à la terre nous étant en général inconnues, on
ne considère que leurs _distances angulaires_.

La _distance angulaire_ de deux étoiles E, E', _est l'angle_ EOE' _des
directions dans lesquelles on les voit_. Or, cet angle EOE' est
précisément le même que la distance angulaire _eoe'_ de leurs
projections sur la sphère céleste.

Pour déterminer les distances angulaires on se sert d'un cercle divisé
(fig.2) sur lequel se meut une _alidade_, c'est-à-dire une règle qui
tourne autour du centre. Cette alidade porte une lunette astronomique
avec laquelle on vise successivement les deux étoiles, après avoir
disposé le cercle de manière à ce que son plan passe à la fois par les
deux astres. L'arc qui sépare les deux lignes de visée mesure la
distance angulaire cherchée.

C'est par les distances angulaires que nous nous rendons compte des
positions relatives des étoiles; ce sont les arcs _ee', e'e",..._
(_fig_. 1) qui forment sur la voûte céleste les figures, telles que
_ee'e"e‴,_ que nous attribuons aux groupes d'étoiles nommés
_constellations_.

=5=. MOUVEMENT DIURNE APPARENT DES ÉTOILES. Au premier abord les étoiles
nous paraissent immobiles. Mais prenons des points de repère, une
maison, un arbre, au-dessus desquels se trouvent des étoiles, et
observons celles-ci pendant un temps assez long, une heure par exemple.
Au bout de ce temps, ces étoiles ne sont plus au-dessus de l'arbre ou de
la maison; elles s'en sont éloignées d'une manière sensible, toutes
ensemble et du même côté. Le même mode d'observation, appliqué à tous
les astres, nous les fait voir animés, relativement à nous, d'un
mouvement continu, plus ou moins rapide.

Ce mouvement des astres n'est pas réel; ce n'est qu'une apparence due,
comme nous l'expliquerons plus tard, à ce que la terre tourne sur
elle-même. Mais ce qui est vrai, c'est que les positions des étoiles,
relativement à nous et aux objets qui nous environnent, changent
continuellement, et de la même manière que si ces astres se mouvaient
réellement autour de la terre immobile. Étudier le mouvement apparent
des astres comme nous allons le faire, c'est tout simplement étudier de
la manière la plus commode ces changements de positions relatives.

Voici d'abord la description générale de ce mouvement apparent, tel que
chacun en France peut l'observer sans instruments, en se plaçant le
soir, par un temps serein, dans un lieu découvert.

=6=. DESCRIPTION GÉNÉRALE DU MOUVEMENT DIURNE. La terre nous présente
l'aspect d'une grande surface plane, terminée de tous côtés par une
courbe circulaire qu'on appelle _l'horizon_, sur laquelle semble
s'appuyer la voûte céleste parsemée d'un nombre immense d'étoiles [1].
Tournons le dos à l'endroit du ciel où est le soleil à midi; le côté de
l'horizon qui est à notre droite s'appelle l'_orient_; à gauche est
l'_occident_, devant le _nord_, derrière le _sud_ ou _le midi_. A notre
droite des étoiles se lèvent, c'est-à-dire apparaissent au bord de
l'horizon, montent progressivement dans le ciel jusqu'à une certaine
hauteur, puis s'abaissent vers l'_occident_, jusqu'au bord de l'horizon
où elles se couchent, c'est-à-dire disparaissent. Le lendemain, à la
même heure de l'horloge astronomique, les mêmes étoiles se lèvent à
l'orient, aux mêmes points, décrivent la même courbe dans le ciel, et se
couchent aux mêmes endroits que la veille.

[Note 1: Il est à peu près inutile de dire que cette voûte n'existe pas,
que c'est une simple apparence. Les étoiles sont répandues dans l'espace
infini, à des distances de la terre très-grandes, et généralement
très-différentes les unes des autres.]

Si nous considérons des points de _lever_ de plus en plus avancés vers
le nord, à partir de notre droite, nous remarquons que les étoiles
observées restent de plus en plus longtemps au-dessus de l'horizon dans
leur course diurne. L'intervalle entre le lever et le coucher devient de
plus en plus court et, à une certaine distance, les étoiles sont à peine
couchées qu'elles reparaissent pour recommencer la même course au-dessus
de l'horizon.

Plus loin encore, vis-à-vis de nous, vers le nord, il y a des étoiles
qui ne se lèvent ni ne se couchent, mais restent perpétuellement
au-dessus de l'horizon. Ces étoiles se meuvent néanmoins dans le même
sens que les autres; chacune d'elles décrit en vingt-quatre heures, une
courbe fermée. Toutes ensemble nous paraissent tourner autour d'un point
central du ciel, très-voisin de l'étoile vulgairement connue sous le nom
d'_étoile polaire_. Celle-ci, à première vue, paraît immobile dans ce
mouvement général, mais en l'observant, d'une manière plus précise, on
reconnaît qu'elle se meut comme les autres, mais très-lentement.

Voilà ce qu'on remarque vers le nord. Tournons-nous vers le midi. De ce
côté aussi, les étoiles se lèvent à l'orient (qui est à notre gauche)
tous les jours, aux mêmes points et aux mêmes heures, décrivent chacune
une courbe au-dessus de l'horizon, et vont se coucher à l'_occident_. Si
nous considérons des points de lever de plus en plus avancés vers le
_sud_, nous voyons que les étoiles observées restent de moins en moins
longtemps au-dessus de l'horizon dans leur course diurne. Au plus loin,
devant nous, les étoiles décrivent un très-petit arc au-dessus de
l'horizon et se couchent très-peu de temps après s'être levées.

Telles sont les apparences du mouvement diurne observé dans ses détails.
Ce mouvement, considéré dans son ensemble, est tel que la voûte céleste,
comme une sphère immense couverte de points étincelants, paraît tourner
tout d'une pièce autour d'une droite fixe allant à peu près de l'œil de
l'observateur à l'_étoile polaire_.

Toutes les phases de ce mouvement général s'accomplissent dans
l'intervalle d'un jour et d'une nuit; de là son nom, _mouvement diurne_.
Si on observe une étoile à partir d'une certaine position précise
(au-dessus d'une maison, d'un arbre), on la voit revenir au même point,
au bout de vingt-quatre heures; elle nous paraît ainsi décrire dans cet
intervalle, autour de la terre, une courbe fermée qui n'est autre chose
qu'une circonférence de cercle comme nous le verrons bientôt[2].

[Note 2: L'aspect du ciel, le spectacle qu'offre le mouvement diurne, ne
varient jamais pour l'observateur qui ne change pas de résidence. Il en
est autrement dès qu'il se transporte dans un lieu plus méridional. Du
côté du nord, quelques-unes des étoiles, qui restaient perpétuellement
au-dessus de l'horizon du premier lieu, se lèvent et se couchent sur le
nouvel horizon. Du côté du midi, on aperçoit de nouvelles étoiles
invisibles dans la première résidence. Les étoiles visibles à la fois de
l'un et de l'autre lieu ne restent pas les mêmes temps au-dessus des
deux horizons.]

Nous venons de décrire le mouvement diurne tel qu'on peut l'observer
sans instruments. On se rend compte de la nature précise de ce mouvement
et de ses principales circonstances, à l'aide de quelques instruments
que nous allons décrire, après avoir défini certains termes d'astronomie
que nous aurons besoin d'employer.

=7=. VERTICALE. On appelle _verticale_ d'un lieu la direction de la
pesanteur en ce lieu; cette direction est indiquée par le _fil à plomb_,
petit appareil que tout le monde connaît.

ZÉNITH, NADIR. La verticale prolongée perce la sphère céleste en deux
points opposés, l'un situé au-dessus de nos têtes et visible, appelé
_zénith_; l'autre invisible, appelé _nadir_.

PLAN VERTICAL. On nomme _plan vertical_, ou simplement _vertical_, tout
plan qui passe par la verticale.

PLAN HORIZONTAL. On appelle ainsi tout plan perpendiculaire à la
verticale; toute droite située dans un pareil plan est une
_horizontale_.

HORIZON. On appelle _horizon_ d'un lieu la courbe circulaire qui, limite
sur la terre la vue de l'observateur. Quand celui-ci est à la surface
même de la terre, cette courbe est l'intersection de la sphère céleste
par le plan horizontal qui passe par l'œil de l'observateur.

Quand on s'élève à une certaine hauteur, la partie visible de la terre
s'agrandit; les rayons visuels qui vont aux divers points de l'horizon
apparent ne sont plus dans le plan horizontal qui passe par l'œil de
l'observateur, mais au-dessous, et forment avec ce plan un angle qui est
toujours très-petit; cet angle s'appelle _la dépression de l'horizon
apparent_.

Le plan parallèle à l'horizon, qui passe par le centre de la terre, se
nomme l'horizon _rationnel_ ou _astronomique_.

En cherchant à connaître avec précision les lois du mouvement diurne on
est naturellement conduit à considérer les diverses positions que prend
une étoile au-dessus de l'horizon. Ces positions se déterminent à l'aide
d'un instrument nommé _théodolithe_.

Avant de décrire le théodolithe, nous dirons quelques mots de la lunette
astronomique qui fait partie de cet appareil comme de plusieurs autres
instruments d'observation.

[Illustration: 011, Fig. 3]

=8.= LUNETTE ASTRONOMIQUE. Elle se compose d'un tube aux extrémités
duquel sont deux verres lenticulaires (_fig._ 3), un grand verre O
dirigé vers l'objet, et qui, pour cette raison, se nomme _objectif_;
l'autre, très-petit, derrière lequel on place l'œil, et qu'on nomme
_oculaire_. Les rayons lumineux envoyés par un objet se brisent en
traversant l'objectif, et viennent former dans l'intérieur de la
lunette, à l'endroit qu'on nomme foyer, une image renversée de l'objet;
à l'aide de l'oculaire on regarde cette image comme avec une loupe[3].

RÉTICULE. Afin de donner plus de précision à la visée, on place au foyer
de la lunette, en _a_, près de l'oculaire, une petite plaque percée d'un
trou circulaire dans lequel sont tendus deux fils _très-fins_,
perpendiculaires entre eux, qui se croisent au centre (V. dans la figure
le cercle _rr_'); ce petit appareil se nomme _réticule_. Quand on vise
une étoile, on fait mouvoir la lunette de manière que l'image de
l'astre, venant se placer exactement au point _a_ de croisement des fils
du réticule, soit occultée par ce point _a_.

La direction du rayon visuel suivant lequel nous voyons l'étoile,
coïncide alors avec l'_axe optique_ de la lunette. Cet axe optique,
_a_O, qui joint le point _a_, de croisée des fils, à un point déterminé
O de l'objectif, a une position précise par rapport aux parois solides
du tube. Il est donc facile de suivre la direction du rayon visuel sur
un cercle divisé placé à côté de la lunette, parallèlement à cet axe; il
est également facile de donner à la ligne de visée une direction
indiquée, _à priori_, sur le cercle[4].

[Note 3: V. les Traités de physique pour la description plus détaillée
des lunettes et l'explication des phénomènes de la vision.]

[Note 4: Quand nous parlerons de l'axe d'une lunette astronomique, il
s'agira toujours de l'axe optique qu'il ne faut pas confondre avec, son
axe géométrique; mais, comme il importe pour la netteté de la vision que
ces deux axes soient aussi rapprochés que possible, on peut fort bien,
quand il ne s'agit que de se figurer approximativement la direction des
rayons visuels, les supposer dirigés suivant l'axe géométrique de la
lunette.]

L'emploi de la lunette astronomique augmente la puissance de la vision
et fait connaître avec une très-grande précision les directions dans
lesquelles se trouvent les objets observés.

Dans les observations de nuit on est obligé d'éclairer le réticule. Pour
cela on dispose, à l'extrémité de la lunette, en avant de l'objectif,
une plaque inclinée, percée d'une ouverture circulaire qui laisse entrer
dans la lunette les rayons lumineux émanés de l'astre. Une lampe placée
à côté, à une certaine distance de la lunette, éclaire cette plaque qui,
recouverte d'une couche d'un blanc mat, éclaire légèrement par réflexion
le réticule.

[Illustration: 013, Fig. 4.]

=9.= THÉODOLITHE. Le _théodolithe_ se compose _essentiellement_ d'un
cercle vertical divisé, qu'on nomme limbe _vertical_, mobile autour d'un
axe vertical AB qui passe par son centre O, et d'un autre cercle
_horizontal_, également divisé, ayant son centre I sur l'axe (_fig._ 4);
une lunette astronomique L'L est mobile autour d'un axe _g_O_g_'
perpendiculaire au limbe vertical. L'_axe_ de la lunette perpendiculaire
à _g_O_g_' se meut parallèlement au limbe vertical. Une vis de pression
permet de fixer la lunette quand on veut, de manière que, immobile sur
le limbe, elle soit seulement emportée par lui dans un mouvement commun
autour de l'axe AB. Une ligne horizontale H'OH est gravée sur le limbe
vertical; le zéro des divisions est en H. Le cercle horizontal peut être
rendu fixe; à l'enveloppe mobile de l'axe AB est attachée une aiguille
IE qui se meut avec le limbe vertical, dans le plan duquel elle se
trouve et reste constamment. Le mouvement angulaire de cette aiguille IE
sur le limbe horizontal mesure le mouvement angulaire du limbe vertical
autour de l'axe. Par exemple, supposons que l'aiguille ait la position
IE, au commencement d'un mouvement du limbe vertical; si, à la fin de ce
mouvement, elle a la position ID, l'angle DIE mesure l'angle dièdre des
deux positions extrêmes du limbe vertical (V. la note ci-après).

On peut, au commencement du mouvement, faire tourner le limbe horizontal
de manière à amener le zéro de ce limbe sous l'aiguille; alors on _fixe_
le limbe horizontal; puis on fait mouvoir comme il convient le limbe
vertical; il est clair qu'on pourra lire alors immédiatement sur le
limbe horizontal l'angle décrit par le limbe vertical. Le limbe
horizontal est souvent appelé _cercle azimutal_[5].

Le théodolithe peut d'abord nous servir à mesurer la hauteur d'une
étoile au-dessus de l'horizon.

=10.= HAUTEUR D'UNE ÉTOILE. On appelle hauteur d'une étoile E, (_fig._
5) au-dessus de l'horizon d'un lieu, l'angle EOC que fait avec le plan
horizontal le rayon visuel allant du lieu à l'étoile; ou bien c'est
l'arc de grand cercle, EC, de la sphère céleste qui mesure cet angle. La
hauteur d'une étoile varie de 0 à 90°.

[Note 5: Nous avons réduit le théodolithe à sa plus simple expression,
afin de mieux faire comprendre ses usages. Pour plus de commodité dans
la manœuvre de l'instrument, il est en réalité disposé comme il suit
(_fig._ 4 _bis_); le limbe vertical est fixé perpendiculairement, et par
son centre, à l'extrémité d'une barre horizontale. Cette barre s'appuie
par son milieu sur le haut d'une colonne verticale AB, de l'autre côté
de laquelle elle porte un contre-poids à sa deuxième extrémité. On fait
tourner le limbe vertical autour de cette colonne AB, en poussant la
barre ou le limbe lui-même. Le mouvement angulaire de ce limbe autour
d'une verticale quelconque est exactement le même que celui d'un limbe
vertical fictif, qui passant, comme dans notre première description
ci-dessus, par l'axe AB, serait dans toutes ses positions parallèle au
limbe réel. L'aiguille IE du limbe horizontal, qui est et reste toujours
parallèle au limbe vertical réel, mesure donc par son mouvement
angulaire celui de ce limbe vertical.]

[Illustration: 014, Fig. 4 bis.]

DISTANCE ZÉNITHALE. La _distance zénithale_ d'une étoile, E, est l'angle
EOZ de la verticale et du rayon visuel OE allant du lieu à l'étoile
(_fig._ 5); ou bien c'est l'arc de grand cercle ZE qui mesure cet angle.
La hauteur et la distance zénithale sont des angles complémentaires; EC
+ EZ = 90°. L'un d'eux étant connu, l'autre s'en déduit.

[Illustration: 015, Fig. 5.]

_Azimuth d'une étoile._ On nomme _azimuth_ d'une étoile l'angle que fait
le demi-cercle vertical ZEN qui contient cette étoile avec un plan
vertical convenu, nommé _premier vertical_, que nous supposerons être
ZOH (_fig._ 5). Cet angle dièdre est mesuré par l'angle HOC des traces
horizontales de ces plans; l'azimuth est donc aussi l'arc HC qui sépare
sur l'horizon le premier vertical et le vertical de l'étoile.

=11.= Les trois angles que nous venons de définir peuvent se mesurer en
même temps avec le théodolithe.

[Illustration: 015, Fig. 6.]

On fait tourner le limbe vertical jusqu'à ce que son plan passe par
l'étoile. Cela étant, on fait tourner la lunette jusqu'à ce qu'on voie
l'étoile arriver, dans le champ de l'instrument, à la croisée des fils,
en E. L'angle EOC, ou l'arc EC, est la hauteur cherchée (_fig._ 6).

La distance zénithale s'obtient par la même opération; c'est l'angle AOE
ou l'arc AE.

Supposons que le limbe horizontal étant maintenu fixe, le zéro de ses
divisions, que nous supposerons en _h_, soit dans le premier vertical
qui est alors Z_oh_; l'étoile étant vue en E, l'azimuth est l'angle
_hoc_ ou l'arc _hc_.

La hauteur ainsi observée est ce qu'on appelle la _hauteur apparente_ de
l'étoile; la _hauteur vraie_ est altérée par la _réfraction_ qui est une
déviation des rayons lumineux, due à l'interposition de l'air
atmosphérique entre nous et l'étoile. Il y a des tables pour corriger
l'erreur ainsi commise et déduire la hauteur vraie de la hauteur
apparente observée (V. la réfraction).

L'azimuth et la hauteur d'une étoile déterminent sa position par rapport
à l'observateur au moment de l'observation; c'est ce que montre la
figure 5 (l'observateur est placé en O).

À l'aide du théodolithe on peut déjà étudier quelques circonstances
importantes du mouvement diurne.

CULMINATION DES ÉTOILES; PLAN MÉRIDIEN; PASSAGE AU MÉRIDIEN.

=12.= Quand un observateur suit avec le théodolithe le mouvement d'une
étoile qui _s'élève_, à partir d'une certaine hauteur, 15° par exemple,
l'aiguille du limbe horizontal (_fig._ 8) ayant la position IE, il voit
cet astre monter constamment jusqu'à une certaine hauteur, puis, au delà
de ce point culminant, descendre continuellement. D'après le mouvement
de la lunette sur le limbe vertical, il remarque que les hauteurs de
l'étoile, dans le mouvement descendant, sont égales chacune à chacune à
celles du mouvement ascendant, mais se retrouvent dans un ordre inverse;
cette circonstance attire naturellement son attention sur la position
culminante de l'étoile. Supposons qu'il cesse d'observer quand l'étoile
est revenue à la hauteur de 15°, l'aiguille du limbe horizontal ayant la
position ID; la position culminante de l'étoile qui paraît tenir le
milieu entre toutes les positions observées doit se trouver dans le plan
vertical moyen, celui dont la trace sur le limbe horizontal divise
l'angle DIE en deux parties égales. En effet, si l'observateur, ayant
tracé sur le limbe cette bissectrice IM, recommence le lendemain à
observer l'étoile, il la voit constamment monter jusqu'à ce que
l'aiguille ait la direction IM, puis descendre continuellement, et cela,
quelle que soit la hauteur à laquelle il recommence l'observation.

Bien plus, s'il observe ensuite de la même manière le mouvement d'une
autre étoile _quelconque_, à partir d'une de ses positions les plus
rapprochées de l'horizon, il la voit monter constamment jusqu'à ce
qu'elle soit arrivée dans ce même plan vertical AIM, puis descendre
continuellement quand elle l'a traversée.

De semblables observations constatent ce qui suit:

=13.= PLAN MÉRIDIEN. _Il existe pour chaque lieu un plan vertical,
nommé_ _plan méridien_, _qui contient les positions culminantes de
toutes les étoiles, et divise en deux parties égales et symétriques
chacune des courbes qu'elles décrivent au-dessus de l'horizon._

=14.= PASSAGES AU MÉRIDIEN. Chaque étoile dans sa révolution diurne
traverse deux fois le plan méridien: la première fois au point le plus
élevé de sa courbe diurne, c'est le _passage supérieur_ ou la
_culmination_ de l'étoile; la seconde fois au point le plus bas de la
même courbe, c'est le _passage inférieur_.

Si on observe une étoile _qui se lève_, on la voit monter depuis son
lever jusqu'à son passage supérieur, puis descendre jusqu'à son coucher;
son passage inférieur a lieu au-dessus de l'horizon.

Si on observe une étoile _circumpolaire_, c'est-à-dire une des étoiles
qui ne se lèvent ni ne se couchent, à partir d'un _passage inférieur_,
on la voit monter à l'orient, d'un côté du plan méridien, jusqu'à son
passage supérieur, puis descendre de l'autre côté de ce plan jusqu'à un
nouveau passage inférieur[6].

[Note 6: Dans l'une et l'autre observations, la durée du mouvement
descendant est précisément égale à celle du mouvement ascendant.]

=15.= On appelle _méridienne_ d'un lieu l'intersection du plan méridien
et du plan horizontal.

Le plan méridien joue un très-grand rôle en astronomie; pour le
connaître, il suffit de déterminer la méridienne, puisque ce plan passe
par une ligne déjà connue, la _verticale_.

La manière de déterminer la méridienne est, à la rigueur, suffisamment
indiquée nº 12; mais à cause de l'importance de cette détermination,
nous croyons devoir l'exposer à part, pour plus de précision.

=16.= DÉTERMINATION DE LA MÉRIDIENNE. On vise, avec la lunette du
théodolithe, une étoile déjà arrivée à une certaine hauteur au-dessus de
l'horizon du lieu, à 15° par exemple, mais non encore parvenue à sa
culmination. On serre la vis de pression de manière que la lunette
conserve sa position actuelle, LOH = 15°, sur le limbe vertical (_fig._
8); en même temps on note bien exactement la position de l'aiguille sur
le limbe horizontal; soit IE, par exemple. Puis, l'étoile continuant son
mouvement, on la suit des yeux, jusqu'à ce que, ayant dépassé son point
de culmination, elle soit sur le point de revenir à la même hauteur de
15°. Alors on fait mouvoir le limbe vertical de manière à être en mesure
de viser l'étoile quand elle sera revenue à cette hauteur, ce qui arrive
quand le plan vertical passant par l'étoile, on retrouve celle-ci à la
croisée des fils de la lunette dont la direction est toujours telle que
LOH = 15°.

[Illustration: 018, Fig. 8.]

L'aiguille horizontale occupe alors une certaine position ID sur le
limbe horizontal. On divise l'arc ED en deux parties égales au point M;
on tire IM; la ligne IM est la direction de la méridienne.

Si on recommence l'opération en visant l'étoile à une hauteur différente
de 15°, on trouvera un angle horizontal différent D'IE'; mais cet angle
a la même bissectrice IM que DIE. En observant de la même manière une
étoile quelconque, on trouve toujours la même bissectrice IM.

La méthode que nous venons d'indiquer pour trouver la méridienne est
connue sous le nom de méthode des hauteurs égales ou correspondantes[7].

[Note 7: La méridienne peut aussi se déterminer à l'aide du _gnomon_.
(V. à l'article des cadrans.)]

=17.= PASSAGE D'UN ASTRE AU MÉRIDIEN. Une des opérations les plus
importantes de l'astronomie consiste à déterminer exactement l'heure du
passage d'une étoile ou d'un astre quelconque au méridien d'un lieu.

On se sert pour cela de la _lunette méridienne_ et de l'_horloge
sidérale_.

LUNETTE MÉRIDIENNE. Cet instrument se compose essentiellement d'une
lunette fixée au milieu d'un axe de rotation horizontal, dont les
extrémités s'appuient par deux tourillons, sur deux massifs de pierre
(_fig._ 11). C'est à peu près comme un canon sur son affût.

[Illustration: 019, Fig. 11.]

La lunette est disposée de manière que son axe, perpendiculaire à l'axe
de suspension, décrive un plan vertical qui n'est autre que le plan
méridien du lieu; on conçoit alors qu'en inclinant convenablement la
lunette, l'observateur puisse apercevoir les différents astres à mesure
qu'ils arrivent dans le plan méridien.

Quand une étoile arrive dans le champ de la lunette, on fait mouvoir
celle-ci jusqu'à ce que l'étoile touche le fil horizontal; quand elle
arrive à la croisée des fils, elle est à son point précis de
culmination, elle passe au méridien. On note l'heure que marque en ce
moment une horloge sidérale placée à côté de la lunette méridienne.

Une _mire_, ou ligne de visée verticale, dont la direction est
rencontrée par la méridienne, est ordinairement gravée sur une colonne
ou monument solide quelconque, à une assez grande distance de
l'observatoire. Pour être sûr que l'axe de la lunette méridienne décrit
exactement le plan méridien, on dirige horizontalement cette lunette
vers la mire; puis on la fait tourner dans les deux sens; la mire doit
toujours être vis-à-vis de la croisée des fils. Si on la voit à droite
ou à gauche, c'est que la lunette ne décrit pas exactement le plan
méridien.

Cette vérification s'applique à toute lunette qui doit décrire le plan
méridien, soit d'une manière permanente, soit momentanément pour une
observation particulière; exemples: le cercle mural et le théodolithe.

=18.= REMARQUE. Un moyen précis de déterminer l'heure du passage d'un
astre au méridien, consiste à l'observer, le même jour, à des hauteurs
égales au-dessus de l'horizon, à 15° par exemple, en notant l'heure de
chaque observation à l'horloge sidérale. La moyenne arithmétique,
c'est-à-dire la demi-somme des deux heures ainsi remarquées, est l'heure
précise du passage de l'étoile au méridien. Cette observation peut se
faire avec le théodolithe.

=19.= HORLOGE SIDÉRALE. On nomme ainsi une horloge d'une grande
précision disposée de manière à marquer le temps sidéral. Un cadran
divisé en vingt-quatre parties égales est parcouru par une aiguille dans
l'espace d'un jour sidéral; cette aiguille parcourt donc une division
dans une heure sidérale. Deux autres aiguilles marquent les minutes et
les secondes sidérales; leurs extrémités se meuvent sur une
circonférence divisée en soixante parties égales, que la première
parcourt en entier dans une heure sidérale (une division par minute), et
la seconde en une minute sidérale (une division par seconde). Chaque
oscillation du pendule s'effectue en une seconde, en sorte que le
commencement des secondes successives est marqué par le bruit que fait
l'échappement de l'horloge à chaque oscillation du pendule.
L'observateur qui a l'œil à la lunette méridienne, et qui a regardé
d'avance la position qu'occupaient les aiguilles de l'horloge, peut
compter les secondes successives à l'aide de ce bruit, et connaître à
chaque instant l'heure marquée par l'horloge sans se déranger de son
observation.

En outre de la lunette méridienne et de l'horloge sidérale, chaque
observatoire possède principalement un _cercle mural_.

=20.= CERCLE MURAL. Cet instrument se compose d'un cercle
très-exactement divisé, situé précisément dans le plan méridien. Il
porte à son centre une lunette astronomique qui, tournant autour d'un
axe horizontal, décrit ce même plan méridien comme la lunette des
passages; ce cercle est fixé contre un mur d'une grande solidité; de là
son nom de cercle mural.

[Illustration: 021, Fig. 12.]

La trace de l'horizon, H'H, étant invariablement marquée sur le mural
(_fig._ 13), cet instrument peut servir, comme le théodolithe, à mesurer
la hauteur EOH d'une étoile, E, au-dessus de l'horizon, quand elle passe
au méridien, ce qu'on nomme la _hauteur méridienne_ de l'astre; par
suite, il sert au même instant à déterminer la distance zénithale
méridienne.

[Illustration: 021, Fig. 13.]

=21.= AXE DU MONDE.--VÉRIFICATION DES LOIS DU MOUVEMENT DIURNE.--Nous
avons dit, en finissant la description générale du mouvement diurne, que
les étoiles nous paraissent tourner autour d'une ligne droite idéale
allant à peu près de l'œil de l'observateur à l'étoile polaire.

On appelle _axe du monde_ la ligne droite idéale autour de laquelle nous
paraissent tourner tous les corps célestes.

On peut déterminer, comme il suit, sa direction à l'aide du mura.

On vise une étoile circompolaire à son passage inférieur, puis à son
passage supérieur au méridien; on marque chaque fois la division précise
du limbe rencontrée par la direction de l'axe de la lunette; soient N et
L (fig. 14) les deux points marqués; on divise l'arc LN en deux parties
égales au point P; puis on tire le rayon OP qui est la direction de
l'axe du monde.

[Illustration: 022 Fig. 14]

On peut observer pour cette détermination telle étoile circompolaire que
l'on veut; on trouve toujours la même bissectrice OP. C'est
ordinairement l'étoile polaire qu'on observe en cette occasion.

Le point P et par suite la direction de l'axe du monde peuvent être
marqués invariablement sur le cercle mural; c'est ce que nous
supposerons.

=22.= LOIS DU MOUVEMENT DIURNE. La direction de l'axe du monde étant
connue, on peut vérifier les lois du mouvement diurne dont voici
l'énoncé:

_Tous les corps célestes paraissent tourner autour d'une droite fixe
qu'on appelle_ AXE DU MONDE. _Chaque_ ÉTOILE _paraît décrire une_
CIRCONFÉRENCE _dont le centre est sur cet axe et dont le plan est
perpendiculaire à cette ligne. Tous ces cercles sont décrits d'un
mouvement uniforme, et la révolution entière s'effectue dans un temps,
le_ MÊME _pour toutes les étoiles, qu'on nomme_ JOUR SIDÉRAL. _De là le
nom de_ MOUVEMENT DIURNE _donné à ce mouvement général de tous les corps
célestes._

On peut vérifier ces lois à l'aide d'un instrument connu sous le nom de
_machine parallactique_ ou _équatorial_, qui n'est autre chose qu'un
théolodithe dont l'axe, au lieu d'être vertical, est dirigé
parallèlement à l'axe du monde (fig. 15 bis).

On vise une étoile E avec la lunette de cet appareil (_fig._ 15);
l'étoile étant derrière la croisée des fils, on serre la vis de
pression, afin que, durant le mouvement imprimé au limbe vertical,
l'angle AOL reste invariable. En même temps on met l'appareil en
communication avec un mécanisme d'horlogerie, identiquement le même que
celui qui met en mouvement l'aiguille des secondes d'une horloge
sidérale; ce mécanisme fait tourner le limbe vertical ALC et tous les
points invariablement liés à ce limbe, ex. _la lunette_, autour de
l'axe, d'un mouvement de révolution tel que chaque point du système
mobile décrit un arc de 15" à chaque battement du pendule (observez le
mouvement de l'aiguille IL sur le limbe inférieur); 15" en une seconde
sidérale, cela fait une circonférence en 24 heures. Après chaque
mouvement de la lunette, on retrouve constamment l'étoile E derrière la
croisée des fils, sur la direction de l'axe optique L'L; soit _e_ le
point de cet axe OL prolongé avec lequel coïncide d'abord l'étoile;
après chaque seconde sidérale, nous retrouvons toujours l'étoile sur la
direction OL_e_, coïncidant avec le point _e_ (sphère céleste, nº 3). Le
point _e_ tournant autour de l'axe AB, l'étoile E nous paraît donc
tourner avec lui autour de cet axe, décrivant un arc de 15" en une
seconde de temps, par suite une circonférence tout entière en 86400
secondes, ou un jour sidéral[8].

[Illustration: 023, Fig. 15.]

[Note 8: L'extrémité L de l'aiguille IL décrit sur le limbe horizontal
des arcs exactement égaux (en degrés) à ceux que décrit le point _e_; il
suffit donc d'observer le mouvement de cette aiguille sur le limbe pour
déterminer la vitesse et constater l'uniformité du mouvement apparent de
l'étoile.]

L'expérience donne le même résultat _à quelque point de son cercle
diurne_ que l'on commence à observer l'étoile; les résultats obtenus
sont également les mêmes pour toute étoile observée. Le mouvement diurne
apparent des étoiles est donc uniforme; les lois de ce mouvement sont
bien celles que nous avons exposées tout à l'heure, nº 22.

[Illustration: 024, Fig. 15bis.]

=23.= JOUR SIDÉRAL. Nous avons appelé _jour sidéral_ le temps que met
une étoite à décrire une circonférence autour de l'axe du monde.

Afin de pouvoir comparer le jour sidéral à d'autres jours qui seront
indiqués plus tard, on le définit souvent ainsi:

_On appelle_ JOUR SIDÉRAL _le temps qui s'écoule entre deux passages
consécutifs de la même étoile au même point du méridien d'un lieu._

Le jour sidéral ainsi défini a toujours été trouvé le même, depuis les
plus anciennes observations astronomiques jusqu'à nos jours. Il se
subdivise en 24 heures sidérales, l'heure en 60 minutes, la minute en 60
secondes. Le jour et ses subdivisions s'indiquent par leurs initiales
j., h., m., s. Exemple: 10 heures 42 minutes 31 secondes s'écrivent
ainsi: 10h 42m 31s.

Il ne faut pas confondre le jour sidéral avec le jour vulgaire, qui est
le jour solaire; nous verrons que le jour solaire surpasse le jour
sidéral d'environ 4 minutes. Il importe donc, en astronomie, de préciser
l'espèce des jours, heures, minutes qui expriment un temps indiqué.

=24.= PÔLES. On appelle _pôle du monde_ chacun des deux points où la
direction de l'axe du monde va percer la sphère céleste.

Le pôle visible pour nous (à Paris et en France) s'appelle pôle _boréal_
ou _arctique_; le pôle qui nous est caché par la Terre s'appelle pôle
_austral_ ou _antarctique_.

PARALLÈLES CÉLESTES. Les cercles décrits par les étoiles étant tous
perpendiculaires à une même droite, sont parallèles; on leur donne le
nom de _parallèles célestes_. V. fig. 16.

ÉQUATEUR CÉLESTE. On nomme _équateur céleste_ le parallèle qui passe par
le centre de la sphère céleste; il divise celle-ci en deux hémisphères,
l'hémisphère _boréal_ et l'hémisphère _austral_. V. fig. 16.

On nomme _étoile polaire_ une étoile de deuxième grandeur qui nous
paraît actuellement la plus voisine du pôle boréal; elle en est distante
de 1° 1/2 environ. Nous apprendrons à la distinguer (n° 45); quand nous
saurons la reconnaître à première vue, elle nous servira à nous orienter
en nous faisant connaître à peu près la position du pôle boréal. Au lieu
de pôle boréal, on dit souvent le pôle, sans autre désignation.

=25.= HAUTEUR DU PÔLE. La _hauteur du pôle_ au-dessus de l'horizon d'un
lieu est l'angle que fait l'axe du monde avec le plan horizontal, ou
bien c'est l'angle aigu de cet axe avec la méridienne du lieu. C'est
l'angle POH, fig. 16, ci-après.

Dans les observatoires où il y a un _mural_, cette hauteur se trouve
indiquée sur le _limbe_; c'est l'arc qui sépare l'extrémité de la
méridienne (horizontale du mural) de l'extrémité de la ligne des pôles
(axe du monde).

La hauteur du pôle, à l'Observatoire de Paris, est de 48° 50' 11" 5
(d'après MM. Mauvais et Laugier).

Pour déterminer cette hauteur en un lieu quelconque, par une observation
directe, on détermine la hauteur, au-dessus de l'horizon, d'une étoile
circumpolaire quelconque à son passage supérieur au méridien, puis au
passage inférieur; la demi-somme de ces deux hauteurs est la hauteur
cherchée du pôle au-dessus de l'horizon du lieu.

Cette méthode se fonde sur ce que le pôle P est le milieu de l'arc du
méridien qui sépare le passage supérieur, I' (_fig._ 16), d'une étoile
circompolaire quelconque de son passage inférieur I (nº 23). PI' = PI;
alors IH = PH — PI; I'H = PH + PI; d'où IH + I'H = 2 PH, et enfin PH =
(IH + I'H)/2[9]

[Note 9: On peut indiquer sur une figure la disposition apparente de la
sphère céleste par rapporta l'horizon d'un lieu, cette figure fera
comprendre ce qui a été dit relativement au mouvement diurne apparent
des astres (_fig._ 46).

[Illustration: 026, Fig. 16.]

Le cercle PEP'E', vu de face, est le méridien céleste d'un lieu _m_,
dont nous supposerons le zénith à gauche en M. L'horizon de _m_ est le
cercle HCH'L perpendiculaire au méridien PEP'E', qui contient la
verticale OM. Nous avons figuré quelques parallèles célestes, parmi
lesquels l'équateur céleste EC'E'L', tous perpendiculaires au méridien
PEP'E' qui contient l'axe du monde PP'.

On voit tout de suite, sur cette figure, que la sphère céleste se
partage en trois zones: 1º la zone HPF' au-dessus du parallèle HF', dite
de _perpétuelle apparition_, parce que toutes les étoiles de cette zone
sont toujours visibles pour le lieu _m_; 2º la zone intermédiaire
HFH'F', où sont les étoiles qui ont un _lever_ L et un _coucher_ C. On
peut se figurer l'une de ces étoiles circulant sur cette zone dans le
sens LD'CD, se levant sous nos yeux en L, parcourant l'arc LD'C
au-dessus de l'horizon, se couchant en C; puis, invisible pour nous,
parcourant l'arc CDL au-dessous de l'horizon; 3º enfin on remarque la
zone FP'H' où se trouvent les étoiles constamment invisibles pour le
lieu _m_, parce qu'elles décrivent leurs cercles diurnes tout entiers
au-dessous de l'horizon H'H de ce lieu _m_.

La même figure montre que le méridien divise par moitié, en D', l'arc
que décrit une étoile au-dessus de l'horizon; que ce milieu D' est le
point de l'arc visible LD'C le plus élevé au-dessus de l'horizon HCH'L.

Enfin, il est facile de voir que le pôle P est le milieu de l'arc I'PI
de méridien qui sépare le passage supérieur, I', et le passage
inférieur, I, d'une étoile circompolaire quelconque.]

MOUVEMENT DE ROTATION DE LA TERRE.

=26.= Les étoiles ne tournent pas réellement autour de la terre,
avons-nous dit précédemment, leur mouvement diurne n'est qu'une
apparence produite par le mouvement de rotation de la terre. C'est ce
que nous allons essayer d'expliquer.

Nous dirons d'abord comment on est conduit à mettre en doute la réalité
du mouvement diurne des étoiles, puis les raisons qui nous portent à
croire au mouvement de la terre. Enfin nous montrerons que toutes les
apparences du mouvement diurne s'expliquent parfaitement dans
l'hypothèse que voici:

_La terre tourne sur elle-même autour d'un axe central; elle effectue,
d'un mouvement uniforme, une révolution entière en 24 heures sidérales._

1º _Le mouvement diurne des étoiles est invraisemblable._

En effet, le nombre des étoiles, que nous voyons, ou que les télescopes
nous laissent apercevoir, est incalculable; les distances qui nous en
séparent sont d'une grandeur incommensurable. Eu égard à ces distances,
il faut attribuer à la sphère céleste un rayon immense; il en résulte
que les cercles que les étoiles nous paraissent décrire ont des étendues
excessivement diverses; petits relativement, aux environs des pôles,
leurs périmètres deviennent, pour ainsi dire, infinis quand on arrive à
l'équateur céleste. Pour que ces périmètres si différents soient
parcourus dans le même temps, dans un jour sidéral, il faut que les
vitesses réelles des étoiles, modérées relativement aux environs des
pôles, aillent en augmentant jusqu'à devenir d'une grandeur excessive
sur l'équateur céleste. Néanmoins ces mouvements, si divers dans leurs
rapidité, doivent être tellement réglés, tellement mesurés, que ces
corps répandus en nombre infini dans l'espace, immensément éloignés les
uns des autres, ne paraissant liés par aucune dépendance mutuelle,
conservent invariablement leurs positions relatives, puisque la sphère
céleste, gardant toujours le même aspect, semble se mouvoir tout d'une
pièce. Quelle force, quelle influence produirait un _pareil_ mouvement
général? Cette influence devrait être en grande partie attribuée à la
terre, puisque ce mouvement aurait lieu autour d'un axe dont la position
paraît dépendre uniquement de celle de la terre. Mais comment concevoir
qu'une pareille influence puisse être exercée par notre globe, dont la
petitesse est inappréciable relativement aux espaces célestes à travers
lesquels il lui faudrait agir sur des corps qui, à en juger par les
dimensions connues de quelques-uns, sont beaucoup plus considérables que
lui. Toutes ces considérations rendent aussi incompréhensible
qu'invraisemblable le mouvement diurne des étoiles[10].

2º Au contraire, _bien des analogies et des faits observés nous portent
à croire au mouvement de rotation de la terre_.

Il y a d'abord des _analogies_ frappantes. Tous les corps célestes qui
sont assez près de nous pour que nous puissions distinguer quelque chose
de leur aspect extérieur, par exemple, le soleil, la lune, les planètes,
tournent tous sans exception sur eux-mêmes autour d'un axe central. Il
est naturel de penser que la terre, qui nous paraît dans les mêmes
conditions que les planètes, tourne de la même manière. Ce mouvement
d'un corps solide, isolé de toutes parts[11], est plus simple et plus
naturel que celui qu'il nous faudrait attribuer à une multitude de corps
isolés, indépendants les uns des autres comme les étoiles.

[Note 10: Les mêmes objections peuvent être exposées avec plus de
précision comme il suit:

1º L'observation nous montre les étoiles répandues par millions dans
l'espace, isolées, indépendantes et immensément éloignées les unes des
autres; il est peu vraisemblable que cette multitude innombrable de
corps isolés, indépendants, tournent autour de la même droite avec
autant d'ensemble, autant d'accord que s'ils étaient liés invariablement
les uns aux autres.

2º Eu égard à l'indépendance des étoiles, on ne pourrait expliquer le
mouvement circulaire de chacun de ces astres que par l'action d'un corps
placé au centre de son cercle diurne. Il devrait donc y avoir sur l'_axe
du monde_ autant de corps capables d'exercer une pareille influence
qu'il y a d'étoiles; or, l'observation ne nous en montre aucun; nous n'y
voyons que la terre.

L'observation nous apprend aussi que les distances qui séparent les
étoiles de la terre sont immenses, tellement grandes qu'on ne peut les
évaluer. La plus petite de ces distances surpasse 8 trillions de lieues;
c'est donc là le plus petit rayon que nous puissions attribuer à la
sphère céleste. Les étoiles qui nous paraissent décrire l'équateur
céleste parcourraient donc en 24 heures une circonférence de plus de 50
trillions de lieues de longueur; plus de 500000 lieues par seconde.
Comment la terre, dont la petitesse est inappréciable par rapport à ces
espaces célestes, pourrait-elle imprimer à plus de 8 millions de
millions de lieues de distance un pareil mouvement à des corps plus
considérables qu'elle-même?]

[Note 11: V. le commencement du chapitre II.]

Comme _faits observés_, nous citerons la diminution de la pesanteur à la
surface de la terre quand on descend du pôle vers l'équateur, qui ne
peut être, attribuée qu'à l'augmentation de la force centrifuge due à la
rotation de la terre; nous citerons encore la belle expérience de M.
Foucault sur le mouvement du pendule, la forme même de la terre renflée
à l'équateur, aplatie vers les pôles, puis les vents alisés, etc.

3º _Toutes les apparences du mouvement diurne des corps célestes
s'expliquent parfaitement dans l'hypothèse que la terre, animée d'un
mouvement uniforme de rotation autour d'un axe central, effectuerait une
révolution entière en 24 heures sidérales[12]._

[Note 12: _Les étoiles nous paraissent s'élever au-dessus de l'horizon;
elles nous semblent décrire des cercles autour d'un axe dont la
direction nous est connue._ Ces apparences peuvent fort bien se produire
sans que ce mouvement soit réel? Est-ce que les arbres d'une route ne
paraissent pas fuir, et se mouvoir tous ensemble avec rapidité, devant
un voyageur qui passe sur un chemin de fer? Est-ce que le rivage et les
personnes qui s'y trouvent ne paraissent pas se mouvoir devant un
voyageur qui s'éloigne en bateau?

Si le mouvement réel du voyageur produit l'apparence d'un mouvement en
sens contraire des corps extérieurs qui ne participent pas à ce
mouvement, ne peut-il pas se faire que le mouvement circulaire des corps
célestes soit simplement une apparence due à un mouvement circulaire de
l'observateur, dirigé en sens contraire de celui dont nous paraissent
animées les étoiles? L'apparence étant la même pour les habitants de
tous les lieux de la terre, doit pouvoir s'expliquer par un mouvement de
rotation du globe terrestre tout entier autour de la ligne que nous
avons appelée axe du monde. Or, rien de plus facile que cette
explication.]

C'est ce que nous allons démontrer.

[Illustration: 029, Fig. 17.]

_Nous voyons des étoiles se lever à l'orient, monter, puis s'abaisser et
se coucher à l'occident._

C'est que notre horizon, que l'on peut se figurer comme un plan matériel
attaché à la terre au point où nous sommes, tourne avec elle autour d'un
axe, oblique à ce plan. Le côté _est_ de cet horizon s'abaisse dans le
sens du mouvement (M_(1)H_(1)), (_fig._ 17), tandis que le côté _ouest_
se relève (M_(1)H'_(1)). Durant ce mouvement, l'étoile E, dont la
hauteur se comptait à l'est, nous a paru monter en se dirigeant de l'est
vers l'ouest; l'étoile E' qui se trouvait au-dessous de l'horizon,
invisible pour nous est devenue visible; elle s'est _levée_. L'étoile
E", dont la hauteur se comptait déjà à l'ouest, nous a paru descendre.
L'étoile E‴, qui était visible, a disparu et s'est _couchée_ à
l'occident. Toutes nous ont paru s'avancer de l'est à l'ouest, tandis
que c'est l'horizon qui a marché en sens contraire.

Ces premières apparences s'expliquent donc par le mouvement de rotation
de la terre.

Le mouvement diurne étudié avec précision se résume ainsi:

_Toutes les étoiles nous_ PARAISSENT _décrire des circonférences de
cercle autour d'une même droite fixe PP'[13]._

[Note 13: On peut à la rigueur se borner à expliquer ce mouvement
circulaire autour de l'axe du monde; mais nous avons cru bien faire
d'expliquer aussi le lever et le coucher des étoiles, et leur mouvement
au-dessus de l'horizon qui frappe immédiatement tout le monde et avec
lequel on est le plus familiarisé.]

Expliquons ce qui se passe quand on étudie ces phénomènes.

[Illustration: 030, Fig. 18.]

L'observateur, muni d'une lunette astronomique, vise une étoile E dans
la direction O_e_ (_fig._ 18). La terre tourne de l'ouest à l'est autour
d'un axe dont la direction est PP', par exemple, entraînant avec elle
dans ce mouvement tous les objets qui lui sont invariablement liés;
l'observateur et sa lunette sont dans ce cas. La lunette tourne donc;
bientôt la ligne de visée (axe optique) au lieu de la direction O_e_, a
pris la direction O_e'_; l'étoile E qui est restée en _e_, n'est plus
derrière la croisée des fils; _elle nous_ PARAÎT _s'être avancée de
l'est à l'ouest, décrivant l'arc e'e_. La lunette (que nous supposons
réduite à son axe optique) a quitté l'étoile, et nous croyons que
l'étoile a quitté la lunette. Si nous voulons retrouver l'astre derrière
la croisée des fils, nous sommes obligé d'imprimer à l'instrument avec
la main, ou autrement (machine parallactique), un mouvement de rotation
qui le ramène à l'étoile, vers l'ouest. À peine la lunette a-t-elle
rejoint l'étoile, que le mouvement de la terre l'en éloigne de nouveau;
la main de l'observateur ou un mécanisme la ramène vers l'étoile, et
ainsi de suite.

En résumé, la lunette a un double mouvement de _va-et-vient_ continuel,
de _e_ vers _e'_ et de _e'_ vers _e_. L'observateur qui n'a conscience
que du mouvement qu'il imprime lui-même, ne tient compte que du chemin
_e'e_, et croit que l'instrument fait ce chemin pour suivre l'étoile;
_celle-ci lui paraît en conséquence tourner de l'est à l'ouest autour
de_ PP'.

En définitive la somme des chemins _ee'_, dus à la rotation de la terre
étant précisément égale à la somme des chemins _e'e_, dus à la main de
l'observateur, si la terre, comme nous le supposons, imprime à chaque
point de la direction de la lunette un mouvement uniforme tel qu'il
décrive de l'ouest à l'est (sens _ee'_) une circonférence en 24 heures
sidérales, l'étoile doit nous paraître décrire dans le même temps, et
aussi d'un mouvement uniforme, une circonférence de l'est à l'ouest
(sens _e'e_).

Les apparences du mouvement diurne des étoiles s'expliquent donc
parfaitement dans l'hypothèse du mouvement indiqué de rotation de la
terre. Il faut donc laisser ces apparences de côté quand on veut peser
les raisons qui militent pour et contre l'existence du mouvement diurne
de tous les corps célestes autour d'un axe traversant la terre, pour et
contre le mouvement de rotation de la terre autour du même axe en face
des étoiles immobiles; ces apparences pouvant être attribuées à l'un ou
à l'autre de ces mouvements.

Or, ces apparences mises de côté, il n'y a plus que des invraisemblances
dans le mouvement général des corps célestes, tandis qu'il y a un grand
nombre d'analogies et de faits observés qui nous portent à croire au
mouvement de la terre.

Nous devons donc admettre comme certain que c'est la terre qui tourne
uniformément autour d'un axe central; parce que ce mouvement de la terre
explique des faits observés et certains qui sans lui seraient
inexplicables, parce qu'il explique parfaitement toutes les apparences,
et qu'il est conforme au mouvement que nous voyons aux corps célestes
assez voisins pour que nous distinguions quelque chose de leur aspect
extérieur.

Nous n'envisagerons donc-plus désormais le mouvement général de la
sphère céleste autour de l'axe de la terre que comme une simple
apparence.

=27.= Néanmoins, cela bien établi, et toutes réserves faites en
conséquence, nous continuerons à parler le même langage qu'avant cette
discussion, à indiquer le phénomène apparent au lieu du phénomène réel
correspondant; à cela nous ne voyons aucun inconvénient pour un lecteur
averti par la discussion précédente et la conclusion que nous en avons
tirée.

Si nous voulons indiquer l'heure du jour par un phénomène astronomique,
il n'y a évidemment aucun inconvénient à dire: il est 7 heures quand
telle étoile passe au méridien, au lieu de dire, il est 7 heures, quand
le méridien du lieu passe par l'étoile. Il en est toujours de même quand
la question pratique que l'on traite a pour objet l'heure d'un
phénomène, puisque le phénomène apparent arrive identiquement à la même
heure que le phénomène réel; or, chaque phénomène réel ou apparent;
dépendant du mouvement diurne, se distingue généralement par l'heure à
laquelle il arrive. De même, quand nous observons une étoile dans le
plan méridien, par exemple, pour connaître sa position précise dans ce
plan, il nous importe peu de savoir comment elle se trouve là: si c'est
l'étoile qui est venue trouver le plan, ou le plan qui est allé trouver
l'étoile.

Or, dès qu'il n'y a pas inconvénient, il y avantage à parler suivant les
apparences, parce que ce sont les apparences que l'on observe, c'est
avec elles qu'on est familiarisé. C'est sur elles qu'on se guide quand
on veut tirer parti de l'aspect du ciel pour se diriger sur la terre; ce
qui est un des principaux usages que nous voulons faire de la
cosmographie. Pourquoi dès lors astreindre l'esprit à un travail le plus
souvent inutile?

NOTIONS DIVERSES SUR LES ÉTOILES CONSIDÉRÉES EN ELLES-MÊMES ET
INDÉPENDAMMENT DU MOUVEMENT DIURNE.

=28.= _Coordonnées célestes des étoiles._ ASCENSION DROITE ET
DÉCLINAISON. Pour distinguer les étoiles les unes des autres, et fixer
d'une manière précise leurs positions relatives sur la sphère céleste,
on emploie les coordonnées célestes.

Les coordonnées célestes les plus usitées sont, d'une part, _l'ascension
droite_ et LA DÉCLINAISON; d'une autre part, _la longitude_ et _la
latitude célestes_. Pour le moment, nous ne nous occuperons que de
l'ascension droite et de la déclinaison, lesquelles suffisent, ainsi
qu'on va le voir, pour déterminer la position apparente de chaque étoile
sur la sphère céleste.

=29.= Considérons la sphère céleste en elle-même, indépendamment de tout
mouvement réel ou apparent; les étoiles sont pour nous comme autant de
points brillants semés sur sa surface. Figurons-nous marqués sur cette
sphère les deux pôles du monde, P et P', aux deux extrémités d'un même
diamètre PP', axe du monde (_fig._ 20); puis également tracée sur la
même sphère la circonférence E'_n_E de l'équateur céleste, grand cercle
perpendiculaire à l'axe PP'.

[Illustration: 033, Fig. 20.]

On a fait choix d'un point de cette circonférence, celui où passe
constamment le soleil quittant chaque année l'hémisphère austral pour
l'hémisphère boréal[14]; ce point est celui qu'on nomme _équinoxe_ ou
_point équinoxial du printemps_; il se désigne habituellement par ce
signe ♈. Ce point équinoxial du printemps, disons-nous, a été choisi
pour _origine_ des ascensions droites que nous allons définir.

[Note 14: V. chapitre III le mouvement propre du soleil.]

=30.= Par chaque étoile N et par les deux pôles P, P' on imagine un
_demi_ grand cercle de la sphère céleste.

On nomme _cercle horaire_ d'une étoile N le demi grand cercle PNP' qui
passe par cette étoile et les deux pôles du monde P, P'[15].

[Note 15: Ce nom vient de ce que chacun de ces demi-cercles passe au
méridien d'un lieu donné tous les jours, à la même heure sidérale; de
sorte que son passage peut servir à faire connaître cette heure même.]

=31.= On nomme _ascension droite_ d'une étoile, N, l'arc d'équateur
céleste compris entre son cercle horaire et le point équinoxial du
printemps, l'arc ♈_n_; cet arc étant compté à partir du point
équinoxial, de _l'ouest à l'est_, en sens contraire du mouvement diurne.

On peut, si on veut, imaginer un cercle horaire passant par l'origine ♈
des ascensions droites; alors on définit ainsi l'ascension droite:
l'angle dièdre compris entre le cercle horaire, PNP', de l'étoile, et le
cercle horaire, F♈P', de l'origine, mesuré de l'ouest à l'est, dans le
sens ♈_n'n_.

L'ascension droite se compte de 0° à 360°.

=32.= On appelle DÉCLINAISON d'une étoile le nombre de degrés du plus
petit des arcs de son cercle horaire qui vont de l'étoile à l'équateur.
Exemple: la déclinaison de l'étoile N (_fig._ 20) est N_n_.

Plus précisément: la déclinaison d'une étoile N, est l'angle NO_n_ que
fait avec le rayon visuel, ON, la trace du cercle horaire de l'étoile
sur l'équateur céleste; ces deux définitions rentrent évidemment l'une
dans l'autre.

La déclinaison est _boréale_ ou _australe_, suivant que l'étoile est
située sur l'hémisphère boréal ou sur l'hémisphère austral. Elle se
compte de 0° à 90° dans l'un ou l'autre cas.

Ces mots, _ascension droite_ et _déclinaison_, étant très-souvent
employés en astronomie, on les écrit en abrégé de cette manière: AR,
ascension droite (_ascensio recta_); D, déclinaison.

=33.= L'AR et la D d'une étoile suffisent évidemment pour déterminer sa
position apparente sur la sphère céleste; l'AR, ♈_n_, d'une étoile N,
portée sur l'équateur céleste, de l'ouest à l'est, à partir de l'origine
♈, fait connaître le cercle horaire P_n_P' de cette étoile (fig. 20),
ensuite la D, _n_N, boréale ou australe, fait connaître la position
précise, N, de cette étoile sur ce cercle horaire. On a coutume de dire
que l'étoile est à l'intersection de son cercle horaire et du parallèle
céleste qui correspond à sa déclinaison.

REMARQUE. L'AR et la D ne déterminent pas la position précise qu'un
astre occupe par rapport à la terre, mais seulement la direction de la
droite qui joint ces deux corps. Ce que nous venons d'appeler l'étoile
N, ou sa position sur la sphère céleste, n'est autre chose que la
projection perspective de l'astre sur cette sphère, dont le rayon ON est
tout à fait indéterminé. C'est le point _e_ de la figure 1, page 2; l'AR
et la D ne nous font pas connaître la distance réelle OE qui achèverait
de déterminer la position réelle, E, de l'étoile par rapport à la terre.
Mais connaissant les directions OE, OE', on peut trouver la distance
angulaire EOE'; etc. (V. le nº 4).

=34.= PROBLÈME. _Déterminer l'_AR_ d'une étoile _N_._

On a une horloge sidérale réglée de telle manière qu'elle marque 0h 0m
0s à l'instant précis où, dans le mouvement diurne de la sphère céleste,
l'origine ♈ des AR vient passer au méridien du lieu. Alors pour
déterminer l'AR d'une étoile quelconque, il suffit de déterminer l'heure
précise de son passage au méridien (nº 20). Cette heure convertie en
degrés, minutes, secondes, _à raison de 15° pour une heure_, est l'AR
cherchée[16].

[Note 16: (V. dans l'Appendice la manière d'effectuer simplement ce
calcul.) Pour comprendre l'application de cette règle à la détermination
de l'AR d'une étoile; il suffit de jeter les yeux sur une sphère céleste
(_fig._ 20). L'AR de l'étoile N est ♈_n_. Dans le mouvement diurne, tous
les points du cercle horaire PNP' décrivent des parallèles célestes avec
la même vitesse de 15° par heure, et tous arrivent ensemble au méridien
d'un lieu quelconque, le point N avec le point _n_. Or, quand le point ♈
passe au méridien du lieu, à 0h 0m 0s de l'horloge sidérale, le point
_n_ est évidemment en arrière d'un arc ♈_n_; mais il y arrive, par
hypothèse, à 7h 29m 43s; donc ce point _n_ parcourt un arc égal à ♈_n_
en 7h 29m 43s. Il parcourt 15° par heure; on calcule d'après cela le
nombre de degrés de cet arc ♈_n_ (qui n'est autre que l'AR de l'étoile
N).]

=35.= REMARQUE. Le point équinoxial ♈, origine des AR, n'est pas un
point visible de la sphère céleste, c'est-a-dire que sa position sur
cette sphère n'est indiquée par aucune étoile remarquable; on peut
auxiliairement le remplacer par une étoile.

On fait choix d'une étoile remarquable N', voisine du cercle horaire
P♈P', de l'origine (_fig._ 20), et dont l'AR a été déterminée
directement; par exemple: α d'Andromède. Cela posé, pour connaître l'AR
d'une autre étoile quelconque N, on détermine la différence _n'n_, d'AR
de cette étoile et de N'; en ajoutant le résultat à l'AR connue de N',
on a l'AR de N. (♈_n_ = ♈_n'_ + _nn'_.)


=36.= DIFFÉRENCES D'AR. Pour déterminer la différence d'AR, _nn'_ de
deux étoiles N, N' (_fig._ 20), il suffit évidemment de les regarder
passer toutes deux successivement au méridien, de noter les heures des
passages, et enfin de convertir en degrés la différence de ces heures.

=37.= _Déterminer la_ D _d'une étoile._ En jetant les yeux sur la figure
20, on voit que la déclinaison N_n_ d'une étoile est le complément de
l'angle NOP que fait le rayon visuel allant à l'étoile avec la ligne des
pôles PP'. De sorte que _si la direction de l'axe du monde est gravée
sur le mural, il suffit pour obtenir la_ D _d'une étoile, en l'observant
à son passage au méridien, de lire sur le limbe du mural le nombre de
degrés de l'angle_ NOP, _et d'en prendre le complément à 90°_.

=38.= _Autre méthode._ La D d'une étoile est égale à la hauteur du pôle
au-dessus de l'horizon du lieu, plus ou moins la distance zénithale
méridienne de l'étoile, suivant que cette étoile, à son passage
supérieur au méridien, se trouve entre le zénith et le pôle, ou entre le
zénith et l'équateur. Or on connaît la hauteur du pôle et l'on sait
trouver la distance zénithale méridienne d'une étoile à l'aide du
théodolithe ou du cercle mural.

Pour vérifier la proposition précédente

D = _hauteur du pôle_ ± _dist. zénith. mérid._

il suffit de jeter les yeux sur la figure 21.

[Illustration: 036, Fig. 21.]

Le cercle PEP'E' est le méridien du lieu; HH' la trace de l'horizon du
lieu sur ce cercle; E'E la trace de l'équateur _id._; OZ la verticale du
lieu et Z son zénith.

E'P = 1quadr. ou 90°; ZH = 90°;

d'où

E'P = ZH.

Otant de part et d'autre la partie commune ZP, on trouve ZE' = PH,
hauteur du pôle. Si le passage supérieur de l'étoile a lieu en N, on
voit que:

Décl. NE' = NZ + ZE' = NZ + PH = distance zénith. + haut. du pôle.

Si le passage supérieur a lieu en N', on a

Décl. N'E' = ZE' - ZN' = PH - ZN' = haut. du pôle - dist. zénith.

La déclinaison peut être australe; le rayon visuel passe au-dessous de
l'équateur par rapport à la ligne OP; on voit aisément ce qui arrive
dans ce cas.

=39.= REMARQUE. La D et l'AR d'une étoile ne varient pas durant son
mouvement diurne apparent; cela est évident _à priori_, puisque ces
coordonnées sont choisies sur la sphère céleste indépendamment de tout
mouvement réel ou apparent relatif à la terre.

=40.= _Catalogues d'étoiles._ Les astronomes ont consigné dans des
catalogues spéciaux les AR et les D observées d'un très-grand nombre
d'étoiles plus ou moins remarquables.

À l'aide de ces catalogues on construit des globes et des cartes
célestes plus commodes que les catalogues quand on veut se faire des
idées d'ensemble sur les positions relatives des étoiles et apprendre à
les retrouver les unes par les autres. Nous allons dire comment se
construit un globe céleste; quant aux cartes célestes, elles se
construisent comme les cartes terrestres géographiques. V. chapitre II
le mode de construction du planisphère céleste dont nous allons nous
servir.

=41.= _Globe céleste. Sa construction._

On appelle _globe céleste_ une sphère de carton représentant la sphère
céleste, sur laquelle on a figuré exactement les positions relatives
d'un certain nombre d'étoiles ou d'autres points remarquables du ciel.
Les points qui représentent les étoiles, vus du centre du globe, ont
exactement entre eux les mêmes distances angulaires que les étoiles
elles-mêmes. Cette représentation de la sphère céleste est donc on ne
peut plus exacte.

Pour construire un globe céleste, on commence par marquer les deux pôles
P et P' aux deux extrémités d'un même diamètre; puis on dessine
l'équateur en traçant un cercle de l'un de ses points, P, comme pôle,
avec une ouverture de compas sphérique égale à la corde d'un quadrant de
cette sphère. On marque un point de cet équateur comme devant
représenter le point équinoxial du printemps, origine des AR. À partir
de ce point marqué 0° ou ♈, l'équateur est divisé en degrés, minutes,
secondes, de 0° à 360°, de gauche à droite. Pour plus de commodité, on
adapte provisoirement au globe un demi-cercle de cuivre qui peut tourner
autour d'un axe passant par les pôles P, P'. Chaque quadrant de ce
demi-cercle est divisé en 90°, de 0° à 90° en allant de l'équateur à
chaque pôle; dans la demi-circonférence est pratiquée une rainure dans
laquelle se meut un style.

Pour marquer la position d'une étoile sur le globe, on fait tourner le
cercle de cuivre jusqu'à ce que son AR, lue sur l'équateur, soit celle
de l'étoile considérée. Arrêtant le cercle dans cette position, on fait
mouvoir le style dans la rainure, vers le pôle boréal ou vers le pôle
austral, jusqu'au point indiqué par la déclinaison donnée; on presse
alors le style sur la sphère; le point marqué est la position cherchée
de l'étoile sur le globe. On met à côté, si l'on veut, un nom ou une
notation indicative. On répète cette opération pour les diverses étoiles
que l'on veut représenter sur le globe céleste. Cela fait, on enlève, si
l'on veut, le limbe de cuivre.

=42.= CONSTELLATIONS. Pour plus de commodité dans l'observation de la
sphère étoilée, on a d'abord distribué les étoiles en un certain nombre
de groupes principaux, de grandeurs diverses et de formes plus ou moins
remarquables, qu'on a nommés _constellations_.

Les anciens avaient couvert le ciel de figures allégoriques de héros et
d'animaux, ils distinguaient les étoiles d'une même constellation par la
place qu'elles occupaient sur la figure; ainsi ils disaient l'œil du
Taureau, le cœur du Lion, l'épaule droite d'Orion, son pied gauche, etc.

Les modernes ont conservé les noms des constellations, mais en
abandonnant ces figures arbitraires.

On distingue les étoiles de chaque constellation, à commencer par les
plus brillantes, d'abord par des lettres grecques, α, β, γ, δ,... puis
par des lettres romaines, et aussi par des chiffres ou numéros d'ordre.
Cependant les étoiles les plus remarquables ont encore des noms
particuliers presque tous d'origine arabe; nous en citons quelques-uns
plus bas.

=43.= _Étoiles de diverses grandeurs._ Les étoiles ont d'ailleurs été
distribuées par classes suivant leur _éclat apparent_ qu'on a appelé
_grandeur_.

Les étoiles _les plus brillantes_ sont dites de 1re grandeur ou
primaires. On s'accorde généralement à ne comprendre dans cet ordre
qu'une vingtaine d'étoiles, dont 14 seulement sont visibles en Europe.
Voici les noms de ces dernières, en commençant par les plus
brillantes[17].

[Note 17: Les noms soulignés sur le planisphère désignent les étoiles de
première grandeur; les autres des constellations.]

_Étoiles de_ 1re _grandeur visibles en Europe._

_Sirius_ ou α du Grand Chien.
Arcturus ou α du Bouvier.
Rigel ou β d'Orion.
La Chèvre ou α du Cocher.
Wéga ou α de la Lyre.
Procyon ou α du Petit Chien.
Betelgeuze ou α d'Orion.
Aldébaran ou α du Taureau.
Antarès ou α du Scorpion.
Altaïr ou α de l'Aigle.
L'Épi ou α de la Vierge.
Fomalhaut ou α du Poisson austral.
Pollux ou β des Gémeaux.
Régulus ou α du Lion.

Viennent ensuite 65 étoiles d'un éclat assez notablement inférieur pour
qu'on les comprenne dans une 2e classe: ce sont les étoiles de 2e
grandeur ou _secondaires_.

On compte ensuite environ 200 étoiles de 3e grandeur ou _tertiaires_, et
ainsi de suite; les nombres augmentent très-rapidement à mesure qu'on
descend dans l'échelle des grandeurs.

4e grandeur, 425 étoiles; 5e, 1100; 6e, 3200; 7e, 13000; 8e, 40000; 9e,
142000.

Le ciel entier contient environ 5000 étoiles visibles à l'œil nu (de la
1re à la 6e grandeur inclusivement).

On n'en voit à Paris que 4000; 1000 restent au-dessous de notre horizon.

Au delà du 9e ordre viennent des étoiles, en nombre toujours croissant,
du 10e ordre, du 11e ordre, etc., jusqu'au 16e[18].

[Note 18: On conçoit que cette classification est assez arbitraire, et
qu'il doit être difficile d'établir une ligne de démarcation tranchée
d'une classe ou grandeur à une autre; aussi les astronomes ne sont-ils
pas d'accord sur les grandeurs de toutes les étoiles; de là ces nombres
indiqués par approximation.]

Il n'y a pas de raison pour assigner une limite à cette progression,
chaque accroissement dans les dimensions et le pouvoir des instruments
ayant fait apercevoir une multitude innombrable de corps célestes
invisibles auparavant.

On compte aujourd'hui 109 constellations dénommées. Nous allons indiquer
quelques-unes de celles qui sont visibles à Paris, et apprendre à les
retrouver dans le ciel.

_Description du ciel_.

=44.= Pour retrouver dans le ciel les étoiles les plus remarquables, on
emploie la méthode des _alignements_. Cette méthode consiste à faire
passer une ligne droite par deux étoiles que l'on connaît, puis à la
prolonger dans un sens ou dans l'autre, afin de trouver une ou plusieurs
étoiles remarquables situées dans cette direction. On peut, si l'on
veut, s'aider d'un fil tendu dans la direction considérée; tous les
points de la sphère céleste, recouverts par le fil, sont dans un même
plan passant par l'œil, par conséquent sur un même grand cercle de la
sphère céleste. Pour avoir une base dans l'évaluation approximative; à
vue d'œil, des distances angulaires, on pourra se rappeler que la
distance, βα, des gardes de la grande Ourse (dont il va être question)
est d'environ 5°, et que le diamètre apparent du soleil ou de la lune
est d'environ un demi-degré.

=45.= Nous allons, dans une description succincte, indiquer les
principales constellations visibles au-dessus de l'horizon de Paris;
nous donnons le moyen de les retrouver dans le ciel en partant d'une
belle constellation que chacun peut facilement reconnaître _à priori_.
(Suivez sur le planisphère.)

GRANDE OURSE. Il y a vers le nord une constellation très-belle, et si
remarquable qu'elle est connue même des personnes qui ne s'occupent ni
d'astronomie, ni de cosmographie.

[Illustration: 041, Fig. 22.]

C'est la grande Ourse ou le Chariot de David (_fig._ 22). Elle se
compose de 7 étoiles (6 de 2e grandeur et 1 de 3e), dont 4 forment un
quadrilatère; les 3 autres, disposées sur une ligne un peu courbe dans
le prolongement d'une diagonale du quadrilatère, forment la queue de la
grande Ourse; les deux étoiles β, α, sur le côté du quadrilatère opposé
à la queue, sont les gardes de la grande Ourse.

[Illustration: 041, Fig. 23.]

ÉTOILE POLAIRE, PETITE OURSE. La ligne βα des gardes de la grande Ourse
prolongée au nord, d'une quantité égale à 5 fois la distance βα,
rencontre une étoile de 2e grandeur, l'_étoile polaire_, dont il a été
question comme l'étoile visible la plus voisine du pôle boréal (1° 1/2);
l'étoile polaire fait partie de la petite Ourse, constellation composée
de 7 étoiles principales, et ayant, à très-peu près, la même forme que
la grande Ourse, mais avec des dimensions plus petites, et dans une
situation renversée (_fig._ 23). L'étoile polaire, située à l'extrémité
de la queue de la petite Ourse, se retrouve facilement une fois qu'on
connaît à peu près sa position, à cause de son éclat plus vif que celui
des étoiles suivantes de la même constellation. Le pôle boréal est à
côté (1° 1/2), entre la polaire et la grande Ourse.

[Illustration: 042, Fig. 24.]

CASSIOPÉE. La ligne qui joint la roue de devant du chariot de la grande
Ourse (δ) à la polaire, prolongée au delà de celle-ci (_fig._ 24),
rencontre _Cassiopée_, formée de 5 étoiles de 3e grandeur, figurant à
peu près une M ouverte; si l'on joint l'étoile α, adjacente, les 6
étoiles figurent une chaise.

PÉGASE, ANDROMÈDE, PERSÉE. Les lignes droites qui joignent
respectivement α et δ de la grande Ourse à la polaire, prolongées au
delà de celle-ci, comprennent entre elles, au delà de Cassiopée, le
_carré de Pégase_, formé de 4 étoiles de 2e grandeur. Trois de ces
étoiles appartiennent à la constellation de Pégase; la 4e fait partie de
la constellation d'_Andromède_.

À peu près dans le prolongement de la diagonale du carré qui va de α de
Pégase à α d'Andromède, on trouve β et γ d'Andromède, puis α de Persée,
toutes trois de 3e grandeur. L'ensemble de ces trois étoiles et du carré
de Pégase forme une grande figure qui a beaucoup d'analogie avec celle
de la grande Ourse.

γ, α, δ de Persée forme un arc concave vers la grande Ourse, facile à
distinguer; du côté convexe de cet arc, on remarque Algol ou β de
Persée, dont l'éclat varie périodiquement (nº 10).

LE LION (_fig._ 26). La ligne αβ des gardes de la grande Ourse,
prolongée au sud, du côté opposé à l'étoile polaire, va rencontrer un
trapèze, étroit entre les deux bases, _le Lion_, renfermant une étoile
primaire, _Régulus_, et 3 secondaires.

[Illustration: 043, Fig. 26.]

LE BOUVIER, _Arcturus_. À peu près sur l'alignement des deux dernières
étoiles de la queue de la grande Ourse, vers le sud-est, se trouve
_Arcturus_, étoile primaire, faisant partie de la constellation du
_Bouvier_, dont les autres étoiles principales forment un pentagone, au
nord d'Arcturus. À côté du Bouvier, on voit la _couronne boréale_ formée
de plusieurs étoiles rangées en demi-cercle, et dont la plus grande est
de 2e grandeur.

LE COCHER, _la Chèvre_. Le côté nord du quadrilatère de la grande Ourse
(δα), prolongé vers le sud-ouest, passe tout près et à l'est du Cocher,
pentagone irrégulier à l'angle nord-ouest duquel se trouve la Chèvre,
belle étoile primaire.

LE TAUREAU. Au sud, et un peu à l'ouest du Cocher, tout près, on voit le
_Taureau_, triangle d'étoiles, dont une primaire rougeâtre, Aldébaran.

[Illustration: 043, Fig. 25.]

ORION. Le côté sud, γβ, de la grande Ourse, prolongé vers le sud-ouest,
au delà du Cocher, conduit sur l'équateur, à _Orion_, la constellation
la plus belle du ciel, à cause du nombre de belles étoiles qu'elle
renferme (_fig._ 25). Le contour est un quadrilatère ayant, à deux
angles opposés, deux primaires: α ou l'épaule droite d'Orion; _Rigel_,
ou son pied gauche; puis, dans l'intérieur du quadrilatère, on remarque
sur une ligne droite, et rapprochées, trois belles étoiles, formant ce
qu'on appelle le _baudrier_ d'Orion; à côté du baudrier sont deux
étoiles moins brillantes.

SIRIUS. Sur la direction du baudrier d'Orion, vers le sud-est, on trouve
_Sirius_, qui est aujourd'hui la plus belle étoile du ciel. _Sirius_
fait partie de la constellation du grand Chien.

LE CYGNE. La diagonale, γβ, de Pégase, qui se dirige du sud vers
l'ouest, prolongée, va rencontrer _le Cygne_ ou _la Croix_, grande
constellation figurant une croix.

LA LYRE. À côté du Cygne, vers l'ouest, et à peu près dans la même
direction, on trouve _la Lyre_, qui renfermé _Wéga_, belle étoile
primaire, à côté d'un petit triangle isocèle. Wéga passe tous les jours
au _zénith_ de Paris.

LES GÉMEAUX. Le côté sud, γβ, du quadrilatère de la grande Ourse,
prolongé vers le sud-ouest, vers Orion, passe auparavant à côté _des
Gémeaux_, constellation figurant un grand quadrilatère oblique, dont le
côté oriental est formé par deux belles étoiles, _Castor_ et _Pollux_.

Le dernier côté de la queue de la grande Ourse, prolongé au sud-est,
vers Arcturus, passe tout près de l'équateur à côté de la _Vierge_,
renfermant une étoile primaire, _l'Épi_.

PROCYON. La ligne, menée de la polaire à Castor des Gémeaux, va
rencontrer _Procyon_, étoile primaire faisant partie de la constellation
du petit Chien, située à peu près entre Castor et Sirius.

Voici maintenant quelques particularités très-remarquables concernant
les étoiles.

_Étoiles variables ou périodiques._

=46.= On nomme ainsi des étoiles qui, sans changer de places apparentes,
éprouvent des changements périodiques dans l'intensité de leur lumière;
il y en a même parmi elles-qui deviennent quelque temps tout à fait
invisibles. En voici trois ou quatre exemples:

Algol ou β de Persée est de 2e grandeur pendant 2j 14h; elle décroît
ensuite pendant 3h 1/2 jusqu'à la 4e grandeur, puis elle croît de
nouveau pendant 3h 1/2 pour revenir à la 2e grandeur; sa période est de
2j 20h 48m. L'étoile, χ, du Cygne a une période de 404 jours, pendant
laquelle elle passe de la 5e à la 11e grandeur.

ο (omicron), de la Baleine, a une période d'environ 334 jours. Pendant
15 jours elle a un éclat maximum qui est celui d'une étoile de 2e ou de
3e grandeur; cet éclat décroît ensuite pendant 3 mois; elle descend à la
7e ou 8e grandeur; puis elle devient invisible pendant 5 mois. Elle
reparaît ensuite; son éclat augmentant pendant 3 mois, revient à son
maximum; puis cela recommence. Il y a eu des irrégularités dans cette
périodicité; ainsi cette étoile est restée une fois invisible pendant 4
ans (de 1672 à 1676).

En 1596, on remarqua l'apparition et la disparition d'une étoile du
Cygne; on reconnut qu'elle avait une période de 18 ans, pendant lesquels
elle était 12 ans visible et 6 ans invisible.

Dans l'hémisphère austral, on remarque η du Navire (Argo); cette étoile
d'éclat variable fut classée de 4e grandeur par Halley, de 2e grandeur
par Lacaille; de 1822 à 1826, elle fut de 2e grandeur; elle fut ensuite
égale à α du Centaure, étoile très-brillante du ciel austral. En 1850,
elle était égale en éclat à Sirius.

Nous parlerons d'étoiles colorées; en fait de variations de couleur,
nous citerons Sirius; cette étoile, qui paraissait rouge aux anciens,
nous paraît blanche.

Voici en tableau quelques exemples de périodes très-diverses.

NOMS DES ÉTOILES.          PÉRIODES.              VARIATIONS
                                                de grandeurs.

β de Persée              2 j. 20 h. 48 m.           2e à 4e
ο de la Baleine          334 j.                     2e à 0
χ du Cygne               404 j.                     5e à 11e
34e du Cygne             18 ans.                    6e à 0
β de la Lyre             6 j. 9 h.                  3e, 4e, 5e.
β d'Hercule              60 j. 6h.                  3e à 4e

_Étoiles temporaires._

=47.= On nomme ainsi des étoiles qui, après avoir brillé d'un éclat
très-vif, ont complètement disparu du ciel; quelques-unes ont apparu
tout d'un coup avec un éclat extraordinaire, et, après une courte
existence, se sont éteintes sans laisser de traces.

On peut citer d'abord celle dont l'apparition soudaine, puis la
disparition, fixèrent l'attention d'Hipparque, 128 ans avant
Jésus-Christ, et lui firent entreprendre le catalogue d'étoiles le plus
anciennement connu.

L'une des étoiles temporaires les plus remarquables et les mieux
étudiées est celle de 1572. Son apparition fut si soudaine que le
célèbre astronome Tycho Brahé, quand il la vit pour la première fois,
n'en pouvait croire ses yeux, et sortit de son observatoire pour
demander aux passants s'ils la voyaient comme lui. L'éclat de cette
nouvelle étoile surpassait celui de Sirius et de Jupiter; il était
comparable à celui de Vénus quand elle est le plus près possible de la
terre; on la voyait dans le jour, et même en plein midi, quand le ciel
était pur. En décembre de la même année, elle commença à décroître.
Jusque-là elle était blanche; en janvier 1572, elle était jaunâtre, puis
elle passa au rougeâtre d'Aldébaran, puis au rouge de Mars; enfin elle
devint blanche, d'un éclat mat comme Saturne. En janvier 1574, elle
était de 5e grandeur, et finit par disparaître en mars de la même année.
Cette étoile était dans Cassiopée.

C'était bien une étoile, car elle conserva constamment la même place par
rapport aux étoiles; sa distance à la terre ne parut pas moindre que la
leur.

En 1604, une étoile temporaire, plus brillante que Sirius, fut observée
par Kepler dans le serpentaire.

Antelme, en 1670, découvrit dans la tête du Cygne une étoile de 3e
grandeur, qui devint ensuite complètement invisible, se montra de
nouveau, et, après avoir éprouvé en 2 ans de singulières variations de
lumière, finit par disparaître de nouveau et n'a jamais été revue
depuis.

Quand on fait une revue attentive du ciel en le comparant aux anciens
catalogues, on trouve que nombre d'étoiles manquent. Lalande a marqué
dans le catalogue de Flamsteed plus de cent étoiles perdues. Ce mécompte
doit probablement quelquefois être attribué à des erreurs de catalogues;
mais il est certain que plusieurs étoiles observées antérieurement ont
disparu du ciel.

_Des étoiles doubles._

=48.= On nomme _étoiles multiples_ des étoiles qui, simples à l'œil nu
ou quand on les observe avec des instruments d'une médiocre puissance,
se résolvent en 2, 3 et même plus de 3 étoiles, quand on les examine
avec des lunettes d'un fort grossissement. Nous ne parlerons que des
étoiles doubles qui se résolvent seulement en deux étoiles; ce sont les
plus nombreuses parmi les étoiles multiples.

La distance angulaire qui sépare deux étoiles peut, par deux causes
différentes, être assez petite pour qu'elles se confondent à l'œil nu.
Elles peuvent se trouver à très-peu près sur la direction du même rayon
visuel, _issu de la terre_, bien que réellement très-distantes l'une de
l'autre, et alors on ne les regarde pas comme de véritables étoiles
doubles; ce sont des couples _optiques_. Ou bien elles sont réellement
voisines l'une de l'autre et à même distance de la terre; ce sont les
véritables étoiles doubles.

EXEMPLES. La belle étoile Castor, des Gémeaux, fortement grossie, est
formée de deux étoiles de 3e ou de 4e grandeur.

σ et η de la Couronne sont 2 étoiles doubles.

Il en est de même de l'étoile ξ, de la queue de la grande Ourse.

La 61e du Cygne est formée de deux étoiles à peu près égales, distantes
l'une de l'autre d'environ 15".

Nous citerons encore l'étoile γ de la Vierge.

On connaît maintenant un grand nombre d'étoiles doubles, plusieurs
milliers, lesquelles ont été distribuées en 4 classes, suivant la
grandeur de la distance angulaire des deux étoiles de chaque système.

Les deux étoiles d'un même système binaire changent quelquefois de
position l'une par rapport à l'autre. La plus petite tourne autour de la
plus grande; ce mouvement paraît _elliptique_ et soumis aux mêmes lois
que celui des planètes autour du soleil (Lois de Képler). On constate
ainsi que les lois de la gravitation universelle s'étendent jusqu'aux
étoiles.

Lorsque les deux étoiles d'un groupe sont très-dissemblables, on désigne
quelquefois la plus petite par le nom d'étoile satellite.

M. Struve, astronome russe, a constaté ce mouvement révolutif pour 58
étoiles doubles; il l'a trouvé probable pour 39 autres. Des observations
continuées depuis qu'on a soupçonné ces révolutions ont permis de
déterminer la durée de quelques-unes.

Voici les éléments des systèmes binaires les mieux étudiés (d'après M.
Faye):

NOM DE L'ÉTOILE DOUBLE.    GRANDEUR          DEMI-GRAND   _DURÉE_
                             des                axe         de la
                         deux étoiles.      de l'ellipse  révolution
                                              décrite

ξ de l'Ourse              4e  et 5e           2",44       61 ans, 6
ρ d'Ophiucus              5e  et 6e           4",97       92 ans, 3
ζ d'Hercule               3e  et 6e           1",25       36 ans, 4
η de la Couronne          5e  et 6e           1",11       66 ans, 3
γ de la Vierge            3e  et 3e           3",45      153 ans, 8
α du Centaure             1re et 2e          12",13       78 ans, 5

_Étoiles colorées._

=49.= Les étoiles sont blanches pour la plupart, mais il y en a de
colorées. Parmi les étoiles colorées, les étoiles rougeâtres sont en
majorité; telles sont α d'Orion, Arcturus et Aldébaran. Puis viennent
les étoiles jaunes, _la Chèvre_ et α de _l'Aigle_. Antarès du Scorpion
est rouge et a la forme d'un λ. Parmi les étoiles d'un moindre éclat, on
en trouve de vertes et de bleues; il y a dans l'hémisphère austral un
espace de 3' 3" où toutes les étoiles sont bleuâtres.

Sirius, qui parut rouge aux anciens, nous paraît blanche depuis des
siècles[19].

[Note 19: En général ces colorations si diverses ne sont pas
très-tranchées, et la planète Mars est d'un rouge bien plus sensible que
celui des étoiles rougeatres indiquées.]

Le catalogue des étoiles doubles présente la plupart de ces groupes
comme composés chacun de deux étoiles diversement colorées. En général
les deux nuances sont complémentaires (on appelle ainsi deux nuances
qui, fondues ensemble, donnent à l'œil la sensation de la lumière
blanche). Ainsi, quand l'une est rouge, ou orange, ou cramoisie, l'autre
est verte, ou bleue, ou vert foncé. Il peut arriver que la coloration de
la petite étoile en vert ou en bleu soit un effet de contraste. Lorsque
l'œil est affecté d'une manière très-vive, par la lumière rouge, par
exemple, une autre lumière qui, vue séparément, nous paraîtrait blanche,
nous semble verte. Dans α du Cancer, l'une des étoiles est jaune et
l'autre bleue; dans γ d'Andromède, l'une est orange, l'autre verte.
Quelquefois des deux étoiles la plus grande est blanche et la plus
petite néanmoins est colorée. Dans δ d'Orion, la plus grande est blanche
et l'autre d'un rouge prononcé. Dans α du Bélier, la plus grande est
blanche et l'autre bleue. Il en est de même dans β de la Lyre.

=50.= LUMIÈRE DES ÉTOILES. Les étoiles sont certainement lumineuses par
elles-mêmes; quels seraient les corps lumineux assez rapprochés d'elles
pour qu'elles en tirassent leur éclat? On doit donc les considérer comme
autant de soleils, qui peut-être échauffent et vivifient des systèmes
planétaires analogues au nôtre et invisibles pour nous. Le soleil
lui-même ne parait être qu'une étoile plus rapprochée de nous que les
autres.

DIMENSIONS DES ÉTOILES. Les dimensions des étoiles sont complètement
inappréciables. Plus les lunettes, à l'aide desquelles on les observe,
sont puissantes, plus leur diamètre apparent est petit. Eu égard aux
distances qui nous séparent des étoiles (nº 54), si l'une d'elles avait
seulement un diamètre apparent bien constaté de 1", elle serait au moins
un million de fois plus grosse que le soleil.

SCINTILLATION SES ÉTOILES. Quand on regarde à l'œil nu une étoile
brillante comme _Sirius_, _Wega_, etc., on remarque dans sa lumière un
tremblement auquel on a donné le nom de _scintillation_.

«_La scintillation_, dit M. Arago, consiste en changements d'éclats
trèssouvent renouvelés. Les changements sont ordinairement accompagnés
de variations de couleur et de quelques effets secondaires, conséquences
immédiates de toute augmentation ou diminution d'intensité, tels que des
altérations considérables dans le diamètre apparent des astres, etc.»

Les observateurs sont, en général, d'accord pour dire que les planètes
elles-mêmes scintillent comme les étoiles; cependant la scintillation de
Saturne est fort difficile à saisir.

_Distances immenses des étoiles à la terre._

=51.= La plus petite des distances des étoiles à la terre surpasse
206265 fois 38000000 lieues (7838070 millions de lieues). Ou bien, en
prenant pour terme de comparaison la vitesse de la lumière, qui parcourt
77000 lieues par seconde, on peut dire que la lumière de l'étoile la
plus voisine de la terre met plus de 3 ans à nous parvenir. C'est là un
fait mathématiquement démontré, comme nous l'expliquerons plus loin.

Voici les seules distances que l'on ait pu jusqu'ici mesurer avec
quelque précision; elles surpassent notablement le minimum précédent.

NOMS DES ÉTOILES.             DISTANCES           TEMPS
                             en millions     que met la lumière
                              de lieues.    à venir de l'étoile.

α du Centaure                 8 603 200          3 ans,2
61e du Cygne                 22 735 400          9 ans,43
α de la Lyre                 29 852 800         12 ans,57
Sirius                       52 174 000         21 ans,67
τ de la Grande Ourse.        58 934 200         24 ans,80
Arcturus                     61 712 000         25 ans,98
La Polaire                   73 948 000         31 ans,13
La Chèvre                   170 392 000         71 ans,74

Comme on le voit, les étoiles sont immensément éloignées de la terre; il
y a de bien plus grandes distances que celles que nous citons. Il
résulte, en effet, de l'ensemble des observations astronomiques, que,
dans la quantité innombrable des étoiles visibles au télescope, il y en
a très-probablement dont la lumière met plusieurs milliers d'années à
nous parvenir.

Nous allons essayer d'expliquer succinctement comment on a pu fixer avec
certitude le minimum que nous avons cité en commençant, et déterminer
les distances inscrites dans le tableau.

[Illustration: 051, Fig. 27.]

La distance d'un astre à la terre se mesure à l'aide de sa _parallaxe_
quand celle-ci peut être déterminée. Supposons que l'observateur occupe
successivement dans l'espace les positions A et B (_fig._ 27); la
parallaxe d'une étoile _e_ est l'angle A_e_B sous lequel serait vue de
l'étoile la droite AB qui joint les deux stations. Cet angle A_e_B est
la différence des angles _e_BX, _e_AX que forment les rayons visuels
avec la direction ABX de la base. Si les stations A et B sont deux
points de la surface terrestre, quelle que soit leur distance, il est
impossible de trouver la moindre différence entre les angles _e_AX,
_e_BX; leur différence A_e_B n'est pas appréciable avec nos instruments.
Ne pouvant trouver aucune parallaxe en se déplaçant sur la terre, on a
profité de ce que la terre change elle-même de position dans l'espace en
tournant autour du soleil. Elle parcourt, dans ce mouvement, une orbite
elliptique dont le grand axe a 76000000 lieues de longueur; un astronome
peut donc, à six mois d'intervalle, observer les étoiles de deux
stations. A et B, distantes l'une de l'autre de 76000000 lieues de 4
kilomètres.

On donne le nom de parallaxe _annuelle_ d'une étoile à l'angle sous
lequel serait vu de cette étoile le demi-grand axe de l'orbite
elliptique que décrit la terre autour du soleil. Il est facile de voir
que si la parallaxe annuelle atteignait pour une étoile la valeur de 1",
la distance de cette étoile à la terre ne serait pas moindre que 206265
fois 38000000 lieues, près de 8 millions de millions de lieues
(783807000000)[20]. Or il n'existe pas d'étoiles ayant une parallaxe de
cette grandeur; la plus petite des distances des étoiles à la terre est
donc supérieure à 206265 fois 38000000 lieues. La lumière parcourant
77000 lieues par seconde, il suffit de diviser 783807000000 par 77000,
pour avoir, en secondes, le minimum du temps que met à nous parvenir la
lumière d'une étoile quelconque. C'est ce minimum que nous avons cité en
commençant.

[Illustration: 052, Fig. 27bis.]

[Note 20: L'angle _e_ (_fig._ 27 _bis_), étant 1" ou une fraction de
seconde, on peut, sans erreur relativement sensible, regarder la ligne
AB comme confondue avec le petit arc, au plus égal à 1", dont elle est
la corde, et qui, décrit de _e_ comme centre avec le rayon _e_A = _e_B,
mesure l'angle A_e_B. Or il y a dans la circonférence entière, circ _e_A
= 2π·_e_A, 1296000 arcs de 1", tels que AB; 1296000 AB = 2π·_e_A; d'où
on déduit _e_A = 1296000/2π AB; or, 1296000/2π = 206265, à moins d'une
unité: donc si la ligne AB = 38000000 lieues, et l'angle A_e_B = 1", la
distance _e_A = 206205 × 38000000 lieues.

Si la parallaxe A_e_B est seulement une fraction de seconde, 0",35, par
exemple, la distance _e_A sera plus grande. La circonférence qui
contient 1296000", contient 129600000 fois 0",01, et 129600000/35 fois
0",35; d'où l'égalité 129600000/35 AB = 2π·_e_A, de laquelle on
déduirait _e_A.]

M. Bessel est parvenu le premier à trouver une parallaxe annuelle pour
la 61e du Cygne; cette parallaxe est de 0",35. Connaissant cette
parallaxe 0",35, on en déduit, par des considérations géométriques
très-simples (indiquées dans la note ci-dessous), la distance de cette
étoile à la terre, qui est 589300 fois 38 millions de lieues.

On a calculé depuis les parallaxes annuelles des 7 autres étoiles
indiquées dans notre tableau.

Voici par ordre les parallaxes des 8 étoiles désignées:

0",91; 0",33; 0",26; 0",15; 0",133; 0",127; 0",106; 0",046.

Ces parallaxes ont servi, comme celle de la 61e du Cygne, à calculer les
distances consignées dans le tableau de la page 45.

NÉBULEUSES. VOIE LACTÉE.

=52.= NÉBULEUSES. Dans la partie du ciel la moins riche en étoiles, on
remarque des taches blanchâtres et des amas d'étoiles qui paraissent
isolés. Ex.: Les Pléiades, amas confus d'étoiles indistinctes pour une
courte vue, offrent néanmoins à une bonne vue 6, 7, et même un plus
grand nombre d'étoiles distinctes, mais très-rapprochées; les
télescopes y font voir de 50 à 60 belles étoiles, accumulées dans un
très-médiocre espace, et comparativement isolées du reste du ciel. La
constellation que l'on nomme la chevelure de Bérénice, est un autre
groupe du même genre, plus diffus et formé d'étoiles plus brillantes.
Dans la constellation du Cancer se trouve une tache lumineuse, amas
confus d'étoiles analogue aux précédents, mais moins distinct à la vue
simple, et qui demande une lunette médiocre pour être résolu en étoiles.
Une autre tache du même genre, mais qui demande une meilleure lunette
pour la séparation des étoiles, se voit sur la poignée de l'épée de
Persée. _Ce sont là des nébuleuses résolues._

On donne le nom de _nébuleuses_ à des taches blanchâtres de formes
très-variées que l'on remarque çà et là dans les parties du ciel les
moins riches en étoiles. Les nébuleuses se distinguent en _nébuleuses
résolues_ et en _nébuleuses non résolues_.

=53.= Les nébuleuses résolues sont celles qui, examinées au télescope,
se sont résolues en un nombre plus ou moins grand d'étoiles distinctes,
mais très-rapprochées; nous venons d'en citer des exemples. Il y a
beaucoup de nébuleuses résolues, autres que les précédentes, et qui
l'ont été avec des télescopes d'un pouvoir de plus en plus grand.

Un grand nombre de nébuleuses résolues ont la forme circulaire, mais
cette forme n'est qu'apparente; une étude attentive porte à croire que
la forme réelle est celle d'un globe rempli du petites étoiles
généralement très-nettement terminées. L'éclat de ce globe diminue
rapidement à partir du centre; mais à une certaine distance du centre,
il ne diminue plus sensiblement. Il paraît y avoir là une sorte de
condensation, due probablement à une attraction de ces étoiles vers le
centre de la nébuleuse. Ces nébuleuses sont très-riches en étoiles;
ainsi, dans une seule nébuleuse de 10' de diamètre, c'est-à-dire dans
une étendue égale à environ la 10e partie du disque du soleil, on a
aperçu jusqu'à 20000 étoiles. Une des plus belles nébuleuses résolues se
voit entre η et ξ d'Hercule; elle est visible à l'œil nu.

Quelques nébuleuses sont perforées en forme d'anneaux; d'autres ont la
forme de spirales. On en voit une perforée entre β et γ de la Lyre; une
autre à la place même où est η d'Argo, qui en occupe le milieu. On
remarque une nébuleuse en spirale très-près de η de la grande Ourse; une
autre se trouve près de la chevelure de Bérénice.

Il y a des nébuleuses qui paraissent liées entre elles comme des étoiles
doubles.

Les nébuleuses ne sont pas uniformément répandues dans, le ciel; elles y
forment des couches plus ou moins étendues. On remarque une de ces
couches très-large dans la région du ciel où se trouvent la grande
Ourse, Cassiopée, la Vierge. Dans l'hémisphère austral, il y a deux
espaces très-riches en nébuleuses: le petit nuage et le grand nuage de
Magellan.

Les espaces célestes les plus riches en nébuleuses sont les plus pauvres
en étoiles. Ainsi, dans le corps du Scorpion, il y a un trou de 4° de
large sur lequel il n'y a pas d'étoiles; mais au bord on aperçoit une
nébuleuse. Il semble que les étoiles se soient rapprochées, et que cette
nébuleuse se soit formée des étoiles qui se trouvaient dans cet espace.

=54.= _Les nébuleuses non résolues_ ne présentent au télescope que des
taches blanchâtres, souvent mal terminées et de forme irrégulière,
quelquefois très-grandes; on en cite une de 4°,9. Il y en a qui offrent
l'aspect de nuages tourmentés par le vent. D'autres, en petit nombre,
ont l'apparence d'un disque ovale, assez bien terminé, d'un éclat
uniforme; on appelle celles-là des nébuleuses _planétaires_[21].
D'autres offrent l'aspect d'un étoile pâle et voilée; on les nomme
nébuleuses _stellaires_, ou _étoiles nébuleuses_. Il y en a qui, à l'œil
nu, offrent l'aspect d'une étoile ordinaire, mais qui, au télescope,
paraissent entourées d'une enveloppe sphérique lumineuse. Enfin, entre α
et β de la Lyre, il y a une nébuleuse qui a la forme d'un anneau.

[Note 21: Il y en a une dans le voisinage de l'étoile ν du Verseau qui a
un diamètre de 20". Ces nébuleuses planétaires, eu égard à leurs
distances, doivent avoir des dimensions énormes et des diamètres plus
grands que plusieurs fois la distance du soleil à la terre. Parmi ces
nébuleuses, il y en a trois au moins d'une couleur bleuâtre.
Quelques-unes présentent au centre une étoile très-brillante; d'autres,
légèrement aplaties, présentent au centre une étoile double.]

Ce qui est arrivé à l'égard des nébuleuses successivement résolues, à
l'aide d'instruments de plus en plus puissants, porte à croire que la
différence entre les nébuleuses résolues et les nébuleuses non résolues,
ne dépend que de la plus ou moins grande puissance des télescopes. S'il
en est ainsi, les nébuleuses non résolues seraient, eu égard à la faible
intensité de leur lumière, des amas d'étoiles tellement éloignées de
nous que leur lumière mettrait un certain nombre de milliers d'années à
nous parvenir.

=55.= VOIE LACTÉE. La voie lactée est une immense ceinture lumineuse,
blanchâtre, qui fait le tour du ciel, à peu près suivant un grand
cercle, en passant par le Cygne, Cassiopée, Persée, le Cocher, les
Gémeaux, la Licorne, etc. (V. le planisphère). Cette zone blanchâtre se
bifurque à peu près vers l'étoile α du Cygne, sous un angle aigu; les
deux branches restent séparées pendant 120° environ, et vont se réunir
dans l'hémisphère austral. Vue au télescope, la voie lactée se résout en
étoiles amoncelées par millions; elle fait l'effet d'une poussière
d'étoiles répandue sur le noir du firmament.

=56.= Herschell ayant eu l'idée, suivant son expression, de jauger le
ciel, c'est-à-dire de comparer la richesse en étoiles des différentes
parties de la sphère céleste, reconnut qu'à mesure qu'on approche de la
voie lactée, le nombre des étoiles télescopiques augmente. Avec un
télescope embrassant sur la sphère céleste un cercle de 15' de diamètre,
environ le quart du disque du soleil, les régions les plus pauvres en
étoiles lui en montraient _à la fois_ 5, 4,.....1 ou pas du tout, et les
régions les plus riches 200, 300,..... jusqu'à 588 étoiles; dans ces
dernières, il voyait ainsi passer sous ses yeux, en un quart d'heure,
jusqu'à 116000 étoiles.

=57.= Cette étude comparative de la voie lactée et des autres parties du
ciel, jointe à l'observation des nébuleuses, a conduit les astronomes à
cette conclusion très-probable: Les étoiles ne sont pas uniformément
répandues dans le ciel; elles y forment des groupes analogues à ceux que
nous avons désignés sous le nom de _nébuleuses résolues_. Toutes les
étoiles de la voie lactée, avec celles que nous voyons isolément autour
de nous, composent ensemble un de ces groupes, au milieu duquel se
trouve notre soleil avec la terre et les planètes; ce groupe est notre
nébuleuse.

Les apparences que nous présente la voie lactée s'expliquent, en effet,
assez bien, si on admet que nous nous trouvons au milieu d'une nébuleuse
ayant à peu près la forme suivante:

FORME DE NOTRE NÉBULEUSE. C'est une couche ou strate d'étoiles très-peu
épaisse, terminée par deux surfaces planes et parallèles, excessivement
étendues dans tous les sens. Cette couche se bifurque d'un côté,
c'est-à-dire se sépare en deux couches semblables, formant à l'intérieur
un angle très-aigu, et légèrement inclinées à l'extérieur sur la couche
principale qu'elles continuent respectivement. Le soleil, avec la terre
et les planètes, se trouve au milieu de la couche principale,
c'est-à-dire à égale distance de ses faces parallèles, tout près de
l'endroit où cette couche se sépare en deux[22].

[Note 22: Pour plus de précision, nous pourrions dire que chacune des
faces extérieures de notre nébuleuse nous fait l'effet d'un cercle de la
sphère céleste divisé en deux parties inégales par le côté d'un triangle
équilatéral inscrit, et dont la plus petite partie continuerait la
grande, mais avec une légère inflexion.]

[Illustration: 056, Fig.28]

Voici une coupe de notre nébuleuse, faite par un plan perpendiculaire au
milieu de la ligne à partir de laquelle a lieu la bifurcation. Le
soleil, avec la terre, est en S, tout près de cette ligne.

Quand nos regards se dirigent vers l'une des faces parallèles, notre
ligne de visée sortant presque aussitôt de la couche, nous voyons fort
peu d'étoiles dans cette direction. Si, au contraire, nos regards se
portent autour de nous, _dans des directions parallèles à ces surfaces_,
nos lignes de visée se prolongeant dans la couche elle-même, nous voyons
à la fois une multitude d'étoiles. Ces étoiles, en se projetant en masse
sur la sphère céleste, nous offrent l'aspect de cette ceinture lumineuse
à laquelle on a donné le nom de _voie lactée_.

Comme nous voyons des étoiles en grand nombre, dans le sens des surfaces
terminatrices, aussi loin que notre vue peut porter, même à l'aide de
télescopes, nous regardons ces surfaces comme traversant la sphère
céleste en entier, dans tous les sens; elles nous font ainsi l'effet de
grands cercles d'une immense étendue. Mais sortons, par la pensée, de
notre nébuleuse; éloignons-nous-en progressivement, dans une direction à
peu près perpendiculaire aux surfaces terminatrices, pour gagner, par
exemple, une autre nébuleuse. La surface que nous quittons, qui, en
réalité, est limitée, et dont le contour n'est probablement pas
circulaire, nous paraîtra de plus en plus petite. Quand nous serons
arrivés dans l'autre nébuleuse, la nôtre nous apparaîtra sous le même
aspect que les autres nébuleuses vues de la terre; elle nous fera
l'effet d'une tache blanchâtre et peu étendue qui, vue au télescope, se
résout en étoiles.

Si les étoiles qui, autour de nous, nous paraissaient d'abord isolées,
composent avec celles de la voie lactée une nébuleuse analogue aux
autres, nous avons eu raison de dire tout à l'heure que les étoiles
forment dans l'espace des groupes ou amas plus ou moins considérables,
séparés les uns des autres par des distances extrêmement grandes
relativement aux distances qui séparent les étoiles d'un même
groupe[23].

[Note 23: Nous jugeons de l'immensité des distances qui séparent les
nébuleuses les unes des autres par la faible lumière que nous envoient
les nébuleuses, comparée à celle des étoiles distinctes. A en juger par
cet indice, ces distances seraient telles, que la lumière mettrait des
milliers d'années pour aller d'une nébuleuse à une autre.]

=58.= _Mouvement propre des étoiles_. Ainsi que nous l'avons dit ailleurs,
on a remarqué dans certaines nébuleuses des indices de condensation des
étoiles autour de centres d'attraction intérieurs. Les étoiles de notre
groupe ne seraient-elles pas animées d'un mouvement analogue; ceci nous
conduit à parler des mouvements propres des étoiles.

Depuis que les moyens d'observation sont perfectionnés, on a reconnu en
effet que les étoiles ne méritent pas rigoureusement le nom de fixes;
certaines étoiles ont un mouvement propre angulaire que l'on est parvenu
à mesurer. Voici quelques exemples:

L'étoile α de Cassiopée parcourt annuellement un arc de 3",74. Arcturus,
la plus belle étoile du Bouvier, s'avance continuellement vers le midi
avec une vitesse de 2",25 par an. Sirius, la Lyre, Aldébaran, subissent
des déplacements analogues. Les deux étoiles de la 61e du Cygne, étoiles
doubles qui, observées depuis 50 ans, sont toujours restées à la même
distance, 15", l'une de l'autre, ont parcouru ensemble, pendant ce
temps, un arc de 4' 23", ou environ 5",3 par an. Vers 1718, les deux
étoiles qui composent l'étoile double γ de la Vierge étaient séparées
par une distance de 6 à 7", et il suffisait d'un télescope passable pour
les voir distinctes. Depuis elles se sont constamment rapprochées de
manière à ne plus être qu'à 1" l'une de l'autre; et on ne les voit
distinctes qu'à l'aide d'un puissant télescope. Enfin, tout porte à
croire que notre soleil, qui n'est qu'une étoile semblable aux autres,
se meut avec son cortège de planètes, se dirigeant vers une étoile de la
constellation d'Hercule.



                               CHAPITRE II.

                               DE LA TERRE.


_Des phénomènes qui donnent une première idée de la forme de la terre_.

=59.= La surface de la terre nous apparaît comme une surface plane d'une
grande étendue sur laquelle le ciel s'appuie comme une voûte. Mais ce
n'est là qu'une illusion; les faits suivants, observés depuis longtemps,
démontrent au contraire que _la terre est un corps rond, isolé de toutes
parts_.

1° Quand un vaisseau s'éloigne du port, un spectateur placé sur le
rivage le voit au bout de quelque temps s'enfoncer sous l'horizon;
bientôt le corps du navire ne se voit plus même avec une lunette, tandis
que les mâts et les voiles s'aperçoivent distinctement; puis le bas des
mâts disparaît également, et enfin le haut. Pour revoir le navire, il
suffit à l'observateur de s'élever davantage au-dessus du sol; ce sont
alors les sommets des mâts qui reparaissent les premiers. Les mêmes
faits ont lieu, mais en ordre inverse, quand un navire revient au port;
on voit d'abord le haut des mâts, puis le bas, etc.

Les mêmes apparences se produisent partout en mer pour un observateur
placé sur un navire qui s'éloigne ou se rapproche d'un autre navire.

Ces faits seraient inexplicables, impossibles, si la terre était plane;
dans ce cas, en effet, le navire serait vu tout entier tant qu'il serait
à portée de la vue distincte, et, dans le lointain, ce serait évidemment
le corps du navire qui disparaîtrait le dernier apparaîtrait le premier.

[Illustration: 060, Fig. 29.]

Tout s'explique parfaitement, au contraire, quand on admet la convexité
de la terre. L'observateur ayant l'œil en O (_fig_. 29), concevons en ce
de ce point O une tangente à la courbe que décrit le navire sur la
surface de la mer supposée convexe; soit B le point de contact. Tant que
le navire n'a pas dépassé le point B, il est vu tout entier du point O;
au delà du point B, la partie inférieure commence à devenir invisible;
bientôt le corps du navire disparaît; on ne voit plus que la mâture en
C; plus loin, en D, une partie des mâts seulement; enfin l'observateur
ne voit plus rien du navire quand celui-ci est en E. S'il monte alors en
O', il revoit le haut des mâts.

Les mêmes apparences se reproduisent sur le continent, quand on
s'éloigne ou qu'on se rapproche d'une tour ou d'une éminence dont on est
séparé par un terrain étendu et découvert. D'ailleurs, si on remarque le
peu de pente des fleuves qui se rendent à la mer, et ce qui se passe à
leurs embouchures où la mer montante pénètre à une assez grande
distance, on en conclura que la surface de chaque continent diffère peu
de ce que serait la surface continuée des mers qui le baignent, si les
eaux pouvaient s'étendre librement, et prendre leur position d'équilibre
en pénétrant ce continent.

2° Un autre _indice_ analogue de la convexité de la terre, c'est qu'en
approchant du _pôle nord_, on voit l'étoile polaire de plus en plus
élevée au-dessus de l'horizon, et _vice versa_, quand on descend vers le
_sud_.

3° _Les voyages autour du monde_ ont prouvé jusqu'à l'évidence que la
terre est un corps rond, isolé dans l'espace. Magellan, le premier,
quittant le Portugal, vogua vers l'ouest, rencontra l'Amérique, la
côtoya vers le sud jusqu'à ce qu'il pût continuer sa route à l'ouest,
traversa le détroit qui porte son nom, entra dans l'océan Pacifique, et
fut tué à l'île de Zébu par les naturels. Son lieutenant voguant
toujours à l'ouest, doubla le cap de Bonne-Espérance et aborda en
Europe. La terre est donc arrondie dans le sens que nous venons
d'indiquer; de nombreux voyages accomplis depuis dans toutes les
directions ont prouvé qu'elle l'est dans tous les sens. De plus;

=60.= _La terre est à très-peu près sphérique_. En effet:

1° L'ombre portée par la terre sur la lune dans les éclipses partielles
est _toujours_ terminée _circulairement_; or la géométrie nous apprend
que cela ne peut avoir lieu que si la terre est sphérique.

2° Un observateur placé à une certaine hauteur au-dessus de la surface
de la mer n'en découvre qu'une partie, laquelle est terminée
circulairement. S'il est placé au haut d'une tour très-élevée ou d'une
montagne, la partie visible de la surface terrestre lui paraît également
bornée par une courbe circulaire; il en est de même _en tout lieu_ de la
terre. Or la géométrie nous apprend encore qu'il n'en peut être ainsi
que _si la terre est sphérique_.[24]

[Note 24: On appelle _horizon sensible_ d'un observateur placé à une
certaine hauteur au-dessus du niveau de la mer la surface conique
limitée circulairement que forment tous les rayons visuels allant à la
courbe à laquée s'arrête la vue.

On conclut que cette courbe limite est circulaire des observations
suivantes:

1° Les rayons visuels dirigés du même point de vue vers les différents
points de cette courbe limite font avec la verticale du lieu
d'observation des angles égaux.

2° Si l'observateur s'élève sur la même verticale, la courbe limite
change: il voit de tous côtés plus loin qu'il ne voyait à la station
inférieure. Les rayons visuels dirigés dans tous les sens vers les
points de la nouvelle courbe limite font avec la verticale des angles
égaux entre eux; mais ces angles sont moindres que ceux des rayons
visuels allant aux points de la courbe précédente.

Ces faits ont été observés des diverses hauteurs auxquelles on a pu
s'élever et à tous les endroits de la terre où on a voulu les vérifier.

En admettant que ce résultat continue à être obtenu par un observateur
placé à des hauteurs de plus en plus grandes sur une verticale
quelconque, ou en conclut la sphéricité de la terre. (V. la note à la
fin du chapitre.)]

=61.= Cependant nous avons dit seulement: _La terre est à peu près
sphérique_. C'est qu'en effet, eu égard à ce que l'homme ne peut
s'élever qu'à des hauteurs limitées, et aux erreurs dont peuvent être
affectés les résultats des observations faites avec nos instruments pour
déterminer la forme des courbes limites dont nous venons de parler, on
ne peut pas conclure de ces observations, d'une manière absolue, que la
terre est sphérique; on peut affirmer seulement que sa forme approche de
celle d'une sphère.

Plus tard, nous dirons comment on a déterminé d'une manière plus précise
la forme de la terre en mesurant différents arcs tracés sur sa surface.

CERCLES PRINCIPAUX; LONGITUDE ET LATITUDE GÉOGRAPHIQUES.

[Illustration: 062, Fig. 32.]

=62.= Sachant que la terre est un corps rond, isolé dans l'espace, on
comprend plus aisément qu'elle puisse tourner sur elle-même, autour d'un
de ses diamètres comme axe. Ainsi que nous l'avons expliqué
précédemment, les étoiles doivent nous paraître tourner autour du même
axe; la ligne idéale PP' que nous avons appelée _axe du monde_, et l'axe
de rotation _pp'_ de la terre, sont une seule et même droite (_fig_.
32)[25]. De plus, la terre n'étant pour ainsi dire qu'un point dans
l'espace, nous pouvons sans inconvénient regarder son centre comme étant
celui de la sphère céleste.

[Note 25: La droite imaginaire que nous avons appelée _axe du monde_,
dans le chapitre des étoiles, passait par le lieu d'observation; cette
ligne n'est, en réalité, qu'une parallèle à l'axe de rotation de la
terre qui est l'axe vrai. Le mouvement diurne des étoiles, étudié par
rapport à cet axe apparent, est tel que le verrait un observateur placé
sur l'axe réel: la distance dés deux lignes, qui est au plus égale au
rayon de la terre, étant d'une petitesse inappréciable par rapport aux
distances célestes, il ne saurait y avoir de différence appréciable
entre les observations faites par rapport à l'une et à l'autre lignes,
considérées comme axes, quand il s'agit de distances angulaires entre
des points de la sphère céleste.]

=63.= Pôles. On nomme _pôles terrestres_ les deux points _p_, _p'_ où la
surface de la terre est rencontrée par l'axe du monde, autrement dit,
l'axe de rotation de la terre. L'un de ces pôles _p_, celui qui est du
côté du pôle céleste boréal, s'appelle _pôle boréal_; l'autre _p'_ est
le _pôle austral_.

=64.= ÉQUATEUR. On nomme _équateur terrestre_ le grand cercle
d'intersection de la terre par un plan perpendiculaire à l'axe _pp'_,
mené par le centre. On considère l'_équateur céleste_ comme déterminé
par le même plan E'E.

HÉMISPHÈRES. L'équateur divise la terre en deux hémisphères, dont l'un,
celui qui contient le pôle boréal, s'appelle _hémisphère boréal_;
l'autre est l'_hémisphère austral_.

=65.= PARALLÈLES. On nomme _parallèles terrestres_ les petits cercles de
la terre parallèles à l'équateur.

Chaque parallèle terrestre, _gi_, correspond à un parallèle céleste GI,
qui est l'intersection de la sphère céleste par un cône circulaire
droit, ayant pour sommet le centre commun, _o_, des deux sphères, et
pour génératrices les rayons menés de ce centre au parallèle terrestre.
L'un de ces cercles est la perspective de l'autre.

=66.= MÉRIDIEN. On appelle _méridien_ d'un lieu _g_ la courbe _pgp'_
(fig. précéd.), suivant laquelle la surface de là terre est coupée par
le plan qui passe par la ligne des pôles et le point _g_, limité à cet
axe _pp'_.

Dans l'hypothèse que la terre est exactement sphérique, le méridien d'un
lieu _g_ est la _demi_-circonférence de grand cercle, _pgp'_, qui passe
par la ligne des pôles _pp'_ et le lieu _g_. Le plan de ce méridien
coupe la sphère céleste suivant un grand cercle PGP' qui est le méridien
céleste du lieu.

=67.= La position d'un lieu sur la terre se détermine au moyen de sa
_longitude et de sa latitude géographiques_.

[Illustration: 063, Fig. 33.]

LONGITUDE GÉOGRAPHIQUE. On fait choix d'un méridien PAP' (_fig._ 33)
qu'on appelle _méridien principal_ ou _premier méridien_; cela posé, on
appelle _longitude_ d'un lieu, S, de la terre, l'angle dièdre moindre
que deux droits que fait le méridien PSP' de ce lieu avec le méridien
principal PAP'; ou ce qui revient au même, la longitude d'un lieu S est
le plus petit des arcs d'équateur compris entre le méridien du lieu et
le méridien principal; c'est l'arc AB (l'arc mesure l'angle).

La longitude d'un lieu est _occidentale_ ou _orientale_ suivant que
l'arc d'équateur qui la mesure, compté à partir du méridien principal,
se dirige dans le sens du mouvement diurne, c'est-à-dire de _l'est à
l'ouest_, ou en sens contraire. Exemple:la longitude AB du lieu S est
_orientale_; la longitude AE' du lieu N est _occidentale_. L'une ou
l'autre longitude varie de 0 à 180°.

Autrefois tous les pays avaient adopté, avec _Ptolémée_, un premier
méridien unique, qui passe par l'_île de Fer_, la plus occidentale des
îles Canaries; et comme le monde connu ne s'étendait pas au delà vers
l'ouest, toutes les longitudes étaient orientales. Aujourd'hui chaque
nation a le sien: c'est celui qui passe par le principal observatoire du
pays. Pour les Français, c'est le méridien de l'Observatoire de Paris;
pour les Anglais, c'est le méridien de Greenwich, qui est à 2° 20' 24"
ouest de celui de Paris. Il est facile de transformer une longitude
anglaise en longitude française, et _vice versa_ (nº 74); mais il
vaudrait mieux que tous les peuples s'entendissent pour adopter un
premier méridien unique.

LATITUDE GÉOGRAPHIQUE. On appelle _latitude_ d'un lieu S (_fig._ 33)
l'angle que fait la verticale OS de ce lieu avec sa projection OB sur
l'équateur; ou, ce qui revient au même, c'est le nombre de degrés du
plus petit arc de méridien, SB, qui va de ce lieu à l'équateur (l'arc
mesure l'angle).

La latitude est _boréale_ ou _australe_ suivant que le lieu est situé
sur l'hémisphère boréal ou sur l'hémisphère austral; elle varie de 0 à
90°, et se compte à partir de l'équateur dans l'un ou l'autre sens. La
latitude SB est boréale. La longitude et la latitude d'un lieu S
déterminent évidemment sa position sur le globe terrestre. En effet, ce
lieu est le point de rencontre du demi-méridien PBP' qu'indique la
première, et du parallèle _a_S_b'_ qu'indique la seconde. Il y a donc
lieu de résoudre ce problème: _Trouver la longitude et la latitude d'un
lieu de la terre_.

=68.= DÉTERMINATION DE LA LATITUDE. _La latitude d'un lieu est
précisément égale à la hauteur du pôle au-dessus de l'horizon de ce
lieu._ Il suffit donc de déterminer cette hauteur comme il a été indiqué
nº 25.

En effet, soit ON (_fig._ 33 _bis_) la verticale du lieu, PEP'E' son
méridien, E'E la trace de l'équateur céleste sur ce méridien, HH' la
trace de l'horizon rationnel sur le même plan. La latitude est NE', et
la hauteur du pôle PH; or les arcs NE' et PH sont égaux comme
compléments du même arc PN.

[Illustration: 065, Fig. 33 _bis_.]

Ex.: _La hauteur_ du pôle, à l'_Observatoire_ de Paris, est 48° 50' 11";
telle est donc la latitude de Paris à cet endroit[26].

[Note 26: La latitude varie de 1" par distance de 30m, 9 comptée du nord
au sud ou _vice versa_, dans le sens du méridien. Il faut donc indiquer
le point de Paris dont on considère la latitude (V. longueur du mètre).]

_En mer_, on ne peut déterminer la hauteur du pôle comme il a été
indiqué, faute de pouvoir installer sur le navire un mural ou une
lunette méridienne. On fait alors usage d'un instrument qu'on appelle
_sextant_.

=69.= CALCUL DE LA LONGITUDE. _Pour déterminer la longitude d'un lieu,
il suffit de connaître l'heure sidérale du lieu et celle qu'il est au
même instant sous le premier méridien; on convertit la différence de ces
heures en degrés à raison de 15° par heure; le résultat est la longitude
cherchée_ (V. les Remarques, n° 70).

[Illustration: 065, Fig. 34.]

Les heures se comptent respectivement aux divers lieux de la terre à
partir du passage au méridien de chaque lieu d'un point déterminé de la
sphère céleste, d'une étoile remarquable, par exemple. Cela posé, soient
_p_E'_p'_ (_fig._ 34) le méridien principal, _p_B_p'_ le méridien d'un
lieu quelconque _m_, EBE' l'équateur céleste, _ebe'_ le cercle diurne de
l'étoile régulatrice qui tourne dans le sens _ebe'_. Supposons qu'au
même instant il soit 5 heures au lieu _m_, et 2 heures sous le premier
méridien _p_E'_p'_. Quand l'étoile régulatrice se trouvait en _e'_, il
était 0h 0m 0s sous le premier méridien, et 3 heures au lieu _m_;
c'est-à-dire qu'en ce moment il y avait 3 heures que l'étoile avait
passé en _b_ au méridien du lieu _m_; elle a employé ces trois heures à
parcourir l'arc _be'_, dont le nombre de degrés est précisément le même
que celui de la longitude E'B. Mais l'étoile parcourt 360° en 24 heures,
soit 15° par heure; donc l'arc _be'_ = BE' parcouru en 3 heures est égal
à 15° × 3 (15° multipliés par la différence des heures). C. Q. F. D.

=70.= REMARQUES. _Si c'est l'heure de Paris qu'on retranche de celle du
lieu proposé, la longitude trouvée est orientale_, puisque l'étoile, qui
vient de l'_est_, a passé en ce lieu avant d'arriver au premier
méridien.

_Si c'est l'heure du lieu qu'on retranche de celle de Paris, la
longitude trouvée est occidentale_, puisque l'étoile venant de l'_est_
passe en ce lieu après avoir passé à Paris.

_Si la différence des heures observées surpassait 12 heures, il faudrait
augmenter l'heure la plus faible de 24 heures, et retrancher l'autre
heure de la somme. La différence convertie en degrés est encore la
longitude cherchée_; celle-ci est encore _orientale_ ou _occidentale_,
suivant que l'heure _soustraite_ est ou n'est pas celle de Paris.

Ex.: L'horloge sidérale d'un lieu, _m_, marque 3h 24' quand celle de
Paris marque 19h 37'; quelle est la longitude du lieu _m_?

3h 24m + 24h = 27h 24m; 27h 24m - 19h 37m = 7h 47m; en convertissant 7h
47m en degrés, on a la longitude demandée; cette longitude est
_orientale_.

Pour justifier cette dernière opération, il suffit d'observer que la
différence 19h 37m — 3h 24m, plus grande que 12 heures, correspond à un
arc de cercle diurne de l'étoile régulatrice plus grand que 180°; or la
longitude doit être au plus égale à 180°; la longitude cherchée est donc
le complément de cet arc à _une circonférence_; ou, ce qui revient au
même, c'est le complément à 24h de la différence ci-dessus qu'il faut
convertir en degrés; 24h - 19h 37' - 3h 24 = 24h + 3h 24 - 19h 37m.
C'est la soustraction que nous avons prescrite et opérée.

=71.= Le calcul d'une longitude se réduit donc, en définitive à la
résolution de ce problème: _Trouver les heures que marquent au même
instant les horloges sidérales de deux lieux différents, réglées sur la
même étoile?_[27] Il y a pour cela diverses méthodes.

[Note 27: Au lieu d'horloges sidérales, on peut se servir d'horloges
bien réglées sur le temps moyen (V. le temps moyen).]

=72.= 1º MÉTHODE DU CHRONOMÈTRE. Un observateur transporte, de Paris au
lieu dont on veut avoir la longitude, un chronomètre ou horloge sidérale
portative, réglé à l'Observatoire de Paris de manière à marquer 0h 0m 0s
à l'instant où une certaine étoile remarquable passe au premier
méridien. Il lui suffit de comparer sur place l'heure du chronomètre à
celle d'une horloge sidérale marquant 0h 0m 0s à l'instant où cette même
étoile passe au méridien du lieu.

S'il n'y avait pas en ce lieu d'horloge sidérale, _en mer_ par exemple,
on y déterminerait l'heure du lieu par des observations astronomiques;
l'heure marquée en ce moment par le chronomètre ferait connaître la
différence des heures sidérales de Paris et du lieu.

=73.= 2º MÉTHODE DU TÉLÉGRAPHE ÉLECTRIQUE. L'admirable et récente
invention du télégraphe électrique donne le moyen de résoudre la
question qui nous occupe pour deux lieux mis en communication par un fil
électrique. À l'instant d'un signal transmis, deux observateurs
regardent les horloges sidérales de ces lieux, réglées sur la même
étoile, puis se communiquent respectivement les heures observées. La
transmission du signal pouvant être regardée comme instantanée, ces
heures correspondent au même moment.

=74.= 3º SIGNAUX DE FEU. Avant la découverte du télégraphe électrique,
Cassini avait employé la méthode des signaux de feu, qui peut encore
être employée à défaut de fil électrique. Deux observateurs, séparés par
une distance de 20 à 30 lieues, munis de chronomètres et de lunettes,
aperçoivent au même instant une fusée lancée durant la nuit à une
station intermédiaire; leurs chronomètres leur indiquent alors les
heures sidérales de leurs stations respectives.

Cette méthode peut être appliquée à deux lieux, A et B, séparés par une
distance trop grande pour que le même feu soit vu à la fois de l'un et
de l'autre.

   C     C'           C"
–––––––––––...........––––––.....
A     A'     A"               B

On partage la distance AB par les stations intermédiaires A', A", en
intervalles tels que chacun rentre dans le cas précédent; des
observateurs se placent en A, A', A", B. Un premier signal C se
produisant entre A et A', les observateurs y notent leurs heures
respectives; supposons qu'il soit alors _h_ heures au lieu A. Après un
temps ts que l'observateur en A' peut mesurer, un second, signal C se
produit entre A' et A"; on y note les heures. Après un nouveau temps t's
que l'observateur en A" peut mesurer, un troisième signal C" se produit
entre A" et B; on y note les heures. Supposons qu'il soit alors _h'_
heures au lieu B; l'heure de A au même instant est évidemment h heures +
ts + t's.

=75.= 4º EMPLOI DU SEXTANT. On se sert _en mer_, pour la détermination
des longitudes, d'un instrument qu'on appelle _sextant_.

=76.= 5º SIGNAUX ASTRONOMIQUES. Certains phénomènes célestes, tels que
les éclipses des satellites de Jupiter, les occultations d'étoiles par
la lune, les distances angulaires de la lune au soleil ou à certaines
étoiles principales, visibles au même instant en des points de la terre
très-éloignés les uns des autres, sont d'excellents signaux pouvant
servir à la détermination des longitudes. L'heure de chacun de ces
phénomènes, en temps de Paris, se trouve dans un livre appelé _la
Connaissance des temps_, publié à l'avance par le bureau des Longitudes
de France; la différence de cette heure et de celle du lieu au même
instant donne la longitude.

=77.= Au lieu de comparer l'heure d'un lieu à celle du premier méridien,
il est quelquefois plus commode de la comparer à celle d'un lieu dont la
longitude est déjà connue. On a aussi besoin de convertir la longitude
relative à un méridien en longitude relative à un autre méridien.

PROBLÈME. _Connaissant la longitude_ l _d'un lieu_ G _par rapport au
premier méridien, et la longitude_ l' _d'un lieu_ B _par rapport au
lieu_ G, _trouver la longitude_, x, _du lieu_ B _par rapport au premier
méridien._

Ex.: _Connaissant la longitude de Greenwich par rapport à Paris,
convertir une longitude anglaise donnée en longitude française._

Le second lieu peut avoir par rapport au premier, G, l'une des quatre
positions B, B', B", B‴ (_fig._ 35). 1º Il a la position B quand les
longitudes _l_ et _l"_ sont de même nom et que leur somme ne dépasse pas
180°; alors PB = PG + GB ou _x_ = _l_ + _l'_. 2º Il a la position B'
quand les longitudes données étant toujours de même nom, leur somme PG +
GB' dépasse 180°; la longitude cherchée _x_ = PG'B' = 360° — (_l_ +
_l'_); elle est de nom contraire à _l_ et à _l'_. 3º Le second lieu a la
position B"; _l_ = PG et _l'_ = GB" sont des longitudes de noms
différents; alors la longitude _x_ = GB"-GP = _l'_ — _l_ est de même nom
que _l'_. 4º Enfin le second lieu étant B‴, on a _x_ = GP-GB‴ = _l_ —
_l'_, de même nom que _l_.

[Illustration: 069, Fig. 35.]

=78.= COMMENCEMENT DU MÊME JOUR SIDÉRAL EN DIFFÉRENTS LIEUX. Le jour
d'une date précise quelconque, le 19 mai 1856 par exemple, commence
d'abord pour les lieux situés sous le méridien PA'P' opposé à celui de
Paris (_fig._ 33), à l'instant où l'étoile régulatrice passe à ce
méridien; puis le jour de même date commence successivement à chacun des
autres lieux du globe, considérés dans le sens A'EAE', au fur et à
mesure que l'étoile, venant de PA'P', passe au méridien de ce lieu.

Imaginons un navire parti d'un port français de l'Océan, de Brest, par
exemple, se dirigeant vers l'ouest; ayant tourné le continent américain,
il a continué à s'avancer vers l'ouest, et vient à dépasser le méridien
PA'P'. Il devra augmenter d'un jour la date du journal du bord, s'il
veut être d'accord avec les habitants du port où il arrivera
postérieurement. Le contraire aurait lieu si un navire passait ce
méridien PA'P' en venant de l'ouest.

=79.= PROBLÈME. _Trouver la plus courte distance de deux lieux_, S, N
_de la terre supposée sphérique, connaissant leurs longitudes et leurs
latitudes (fig. 33)._ Les arcs PS, PN, menés du pôle à chaque lieu,
forment avec l'arc SN un triangle sphérique dont on connaît deux côtés,
PS = 90 ∓ latitude de S, PN = 90° ∓ latitude de N (suivant que la
latitude considérée est boréale ou australe), et l'angle SPN qui est la
somme ou la différence des longitudes, suivant que les longitudes sont
de noms différents ou de même nom. Tout cela se voit à l'inspection de
la figure; on calculera facilement SN.

ÉTUDE PRÉCISE DE LA FORME DE LA TERRE. _Valeurs numériques des degrés en
France, en Laponie, au Pérou; leur allongement quand on va de l'équateur
vers le pôle._

=80.= Pendant longtemps on s'en est tenu à la première idée que donnent
de la forme de la terre les phénomènes que nous avons indiqués au
commencement de ce chapitre; jusqu'à la fin du XVIIe siècle, on a
considéré la terre comme sphérique, et on s'est seulement occupé d'en
déterminer la grandeur. Dans cette hypothèse, il suffit évidemment de
déterminer, par des mesures exécutées sur la surface même de la terre,
la longueur d'un arc de méridien d'un nombre de degrés connu; de la
longueur d'un degré on déduit celle de la circonférence, et de celle-ci
la longueur du rayon.

Diverses mesures ont été ainsi exécutées, même dans l'antiquité[28].
Parmi les modernes, le premier qui essaya de mesurer la longueur d'un
degré fut Fernel, médecin de Henri II; il se dirigea de Paris vers
Amiens, en comptant exactement le nombre des tours de roue de sa
voiture; il trouva ainsi pour la longueur du degré, 57070 toises.

[Note 28: La plus remarquable des mesures exécutées dans l'antiquité est
attribuée à Ératosthène, à la fois géomètre, astronome, et géographe,
qui vivait 256 ans avant J.-C. Il trouva pour la longueur du degré 694
stades. On ne connaît pas précisément la longueur du stade; cependant on
croit ce résultat peu éloigné de la vérité.]

Mais la première mesure qui ait été obtenue par des méthodes de
précision dignes, de toute confiance, est due à l'astronome français
Picard. Établissant un réseau géodésique entre Paris et Amiens, il
trouva pour la longueur du degré, 57060 toises.

=81.= À la fin du XVIIe siècle, Newton et Huyghens, guidés par des
considérations théoriques, émirent cette opinion: _La terre n'est pas
sphérique; c'est un ellipsoïde de révolution, aplati vers les pôles et
renflé à l'équateur, c'est-à-dire que sa surface est semblable à celle
que décrit une ellipse tournant autour de son petit axe_ PP' (_fig._ 37,
ci-après). L'Académie des sciences s'occupa aussitôt de vérifier ces
indications de la théorie; la seule différence entre l'ancienne
hypothèse et la nouvelle consiste en ce que, dans la première, chaque
plan méridien, c'est-à-dire mené par l'axe, coupe la surface de la terre
suivant une circonférence de cercle (_fig._ 36), tandis que dans la
seconde, il la coupe suivant une ellipse aplatie vers les pôles (_fig._
37); c'était donc la forme de la courbe méridienne qu'il fallait
étudier. Pour cela, on a mesuré la longueur du. degré à diverses
latitudes (_V._ la note)[29].

[Note 29: MESURE D'UN ARC DE MÉRIDIEN. _Définitions._ On nomme
_méridien_ ou _courbe méridienne_, sur la surface de la terre, la courbe
suivant laquelle cette surface est coupée par un plan mené par la ligne
des pôles. Deux lieux A et B sont sur le même méridien quand la même
étoile passe au méridien dans les deux lieux à la même heure de
l'horloge sidérale.

Un arc de 1°, 2°, 3°,.... du méridien est un arc A'B' (_fig._ 37), tel
que les deux normales à la courbe, autrement dit les verticales, A'I,
B'I, menées à ses extrémités, font entre elles un angle A'IB' de 1°, 2°,
3°...... Cet angle A'IB' est précisément égal à la différence des
latitudes des lieux A' et B', si ces lieux sont sur le même hémisphère;
puisque la latitude d'un lieu, (nº 64), est égale à l'angle que fait la
verticale du lieu avec sa projection sur l'équateur; A'IB' =
A'I_e_-B'I_e_.

[Illustration: 071, Fig. 38.]

Le nombre des degrés d'un arc AB étant connu, il faut mesurer cet arc
avec l'unité linéaire, la toise, par exemple. Si l'arc AB est sur une
surface unie, découverte, on procède à cette mesure à la manière des
arpenteurs, en employant seulement des instruments de mesure plus précis
et plus de précautions. Mais dans le cas d'obstacles intermédiaires
s'opposant à cette mesure, ce qui arrive presque toujours, on établit ce
qu'on nomme un _réseau géodésique_.

On choisit, dans le voisinage des lieux où l'on suppose que l'arc AB
doit passer, des points C, D, E, F,...... placés de manière à pouvoir
être aperçus de loin (_fig._ 38). Concevons que les points A, C, D, E,
F, etc.. soient liés entre eux comme la figure l'indique, par des
triangles que traverse la direction de l'arc AB. Parmi les côtés de ces
triangles on choisit celui qui peut être mesuré le plus aisément;
supposons que ce soit EG; c'est ce qu'on appelle une _base_. Connaissant
EG et les angles E et G du triangle EGF, on peut résoudre ce triangle.
Connaissant EF et les angles E et F du triangle EDF, on peut résoudre ce
triangle. Connaissant ED et les angles D et E du triangle EDC, on peut
résoudre ce triangle. Enfin, pour la résolution du triangle ACD, on
connaît AC et AD. Connaissant, à partir de A, la direction de la
méridienne, dont tous les segments AL, LM, MO,..... à cause de leur peu
d'étendue, sont considérés comme des lignes droites, on peut mesurer les
angles CAL, DAL; on peut donc résoudre le triangle ALD; ce qui donne le
segment AL et la longueur DL. Connaissant DL, l'angle D et l'angle DLM
du triangle DLM, on résout le triangle, et on calcule le segment LM et
la longueur DM. Dans le triangle EMO, on connaît EM, l'angle E et
l'angle M; ainsi de suite jusqu'à ce qu'on arrive à la fin du réseau.
Ayant la longueur de AB en toises, on la divise par le nombre de degrés
de cet arc pour avoir la longueur d'un degré.

[Illustration: 072, Fig. 39.]

De ce que la longueur du degré va en augmentant avec la latitude, on
conclut (fig. 37) _que chaque méridien s'aplatit, c'est-à-dire que sa
courbure diminue quand on va de l'équateur au pôle._ Voici une manière,
entre plusieurs, d'expliquer ce fait: Soit AB (_fig._ 37) un arc de 1°,
voisin de l'équateur; A'B' un autre arc de 1°, voisin du pôle; on sait
que A'B' > AB. On peut, à cause du faible aplatissement de l'ellipse
méridienne, regarder chacun des arcs AB, A'B' comme confondu avec l'arc
de cercle qui passerait par son milieu et ses extrémités. À ce point de
vue, AB et A'B' sont des arcs de 1° appartenant à des circonférences de
rayons différents _r_, _r'_. Puisque l'on a A'B' > AB, on doit avoir
_r'_ > _r_; (360 A'B' = circ. _r'_ > 360 AB = circ. _r_). Cela posé,
pour comparer les courbures de ces deux arcs, rapprochons-les comme il
suit: sur une ligne indéfinie X'X (_fig._ 39) élevons une
perpendiculaire GH, et prenons à partir de G, GO = _r_. GO' = _r'_; puis
des points O et O' comme centres avec les rayons OG, O'G', décrivons
deux arcs de cercle passant en G; ces deux arcs sont tangents à X'X en
G. Si on prend QGP = 1°, Q'GP' = 1°, le milieu étant en G, ces arcs ne
seront évidemment que la reproduction des arcs AB, A'B' rapprochés l'un
de l'autre. L'arc Q'GP' ou A'B' se rapprochant plus de la ligne droite
X'GX que QGP ou AB, est moins convexe ou plus aplati que AB.

Nous avons pris AB = 1°; on peut, pour éviter toute objection, supposer
AB aussi petit que l'on veut.]

[Illustration: 071, Fig. 36.]

[Illustration: 071, Fig. 37.]

Si la courbe méridienne est une circonférence de cercle, la longueur du
degré doit être la même à toutes les latitudes (_fig._ 36); si c'est une
ellipse aplatie vers les pôles, la longueur du degré doit être plus
grande aux environs du pôle qu'à l'équateur, et en général augmenter
avec la latitude (_fig._ 37). En outre, comme on savait _à priori_ que
la forme de la terre approche de celle d'une sphère, il fallait exécuter
des mesures à des latitudes assez diverses pour que les différences
entre les valeurs numériques du degré, si elles existaient, fussent
assez notables pour ne pouvoir pas être attribuées aux erreurs des
observations. On ne s'est donc pas contenté des mesures exécutées en
France; la Condainine etBouguer se transportèrent au Pérou, Maupertuis
et Clairaut se rendirent en Laponie, afin d'y mesurer des arcs de
méridien. Les résultats obtenus confirmèrent les prévisions de Newton et
Huyghens.

=82.= Voici ces résultats, auxquels nous en joignons de plus récemment
obtenus pour qu'on voie mieux la variation du degré:

LIEUX.               LATITUDE                LONGUEUR
                     moyenne.              de l'arc de 1°.

Pérou                1° 31                   56737 toises
_Inde_              12° 32' 21"              58762
France              46°  8'  6"              57025
_Angleterre_        52°  2' 20"              57066
Laponie             66° 20' 10"              57196

=83.= Toutes les mesures analogues exécutées jusqu'à nos jours en
France, en Angleterre, en Espagne, en Russie, dans l'Inde, sur des arcs
d'une assez grande étendue, ont constaté que la longueur du degré
augmente constamment de l'équateur aux pôles. En résumé, sauf quelques
irrégularités locales de peu d'importance, tous ces travaux concourent à
établir la vérité de la proposition énoncée par Newton et Huyghens.
Ainsi donc:

FORME DE LA TERRE. _La terre n'est pas absolument sphérique; c'est un
ellipsoïde de révolution un peu aplati vers les pôles et renflé à
l'équateur; c'est-à-dire que sa surface est semblable à celle que décrit
une ellipse tournant autour de son petit axe (V. fig. 37)._

=84.= DIMENSIONS DE LA TERRE; LONGUEUR DU MÈTRE. Quand la convention
nationale décida en 1790 que l'unité de longueur, base du système
uniforme de mesures qu'elle voulait établir en France, serait prise dans
la nature, c'est-à-dire aurait un rapport simple avec les dimensions de
la terre, elle ordonna qu'il serait procédé à la détermination aussi
exacte que possible de ces dimensions. En exécution de cet ordre,
Delambre et Méchain mesurèrent l'arc de méridien compris entre Dunkerque
et Barcelone. La commission des poids et mesures, combinant leurs
résultats avec ceux qu'on avait déjà obtenus en Laponie et au Pérou, en
conclut que le méridien terrestre est une ellipse dont l'aplatissement a
pour mesure 1/334, et dont le quart a pour longueur 5130740 toises. La
dix-millionième partie de cette longueur fut choisie sous le nom de
_mètre_ pour unité de longueur; ainsi 10000000 mètres = 5130740 toises;
d'où on déduit la LONGUEUR DU MÈTRE.

_Le mètre légal vaut_ 0 toises, 5130740 = 3 pieds 0 pouce 11 lignes,
296.

(On sait que la toise vaut 6 pieds, le pied 12 pouces, le pouce 12
lignes.)

De nouveaux arcs terrestres ont été mesurés depuis 1795; les travaux de
Delambre et Méchain ont été continués et vérifiés par divers
savants[30]. En discutant toutes les mesures, tant anciennes que
nouvelles, M. Bessel a trouvé que les nombres 1/334 et 5130740 toises
étaient trop petits et devaient être remplacés par ceux-ci: 1/299 et
5131180 toises. Voici ce qui résulte de ce travail de révision de M.
Bessel en ce qui concerne _les dimensions de la terre_:

Demi-diamètre à l'équateur _a_ = 3272077 toises = 6377398 mètres.
Demi-diamètre polaire      _b_ = 3261139 toises = 6356080 mètres.

[Note 30: Leur méridienne a été prolongée au nord jusqu'au parallèle de
Greenwich; elle l'a été aussi au sud jusqu'à l'île de Formentera, par
MM. Biot et Arago.]

L'aplatissement d'un ellipsoïde a pour mesure le rapport (_a_-_b_)/_a_
de la différence de ses deux axes au plus grand des deux.

APLATISSEMENT DE LA TERRE 1/299 [31].

[Note 31: Un globe terrestre de même forme que la terre ayant 2m,99 de
rayon à l'équateur, aurait, d'après cela, à peu près 2m,98 de rayon vers
le pôle.]

La différence _a_ — _b_ des axes = 21318 mètres, en nombre rond, 21
_kilomètres_. On définit quelquefois l'aplatissement en indiquant cette
différence.

Le quart du méridien vaut 10000856 mètres.

Le quart de l'équateur vaut 10017594 mètres.

REMARQUE. On commet maintenant une erreur, très-faible, il est vrai, en
disant que le mètre est la dix-millionième partie du quart du méridien;
il s'en faut de 0ligne,038. On n'a pas cru devoir faire cette
correction; le mètre légal est toujours égal à 0toise,5130740 = 3pieds,
11lignes,296. Dans les calculs qui n'exigent pas une très-grande
précision, on considère toujours la circonférence du méridien comme
valant 10000000 mètres, et le rayon de la terre comme égal à 6366
kilomètres. L'unité pour les dimensions ci-dessus est le mètre légal.

NOTIONS SUR LES CARTES GÉOGRAPHIQUES.

=85.= Les positions relatives des différents lieux de la terre étant
connues par leurs longitudes et leurs latitudes;, afin d'embrasser d'un
coup d'œil ces positions relatives, ou de les graver plus aisément dans
la mémoire, on fait de la terre entière, ou de ses parties considérées
séparément, diverses représentations dont nous allons nous occuper. Ce
sont les globes et les cartes géographiques.

=86.= GLOBES TERRESTRES. Un globe géographique terrestre se construit de
la même manière qu'un globe céleste (nº 41). On marque de même sur le
globe de carton les deux pôles _p_, _p'_, et l'équateur; sur celui-ci le
point de départ des longitudes. Puis, en employant, pour plus de
facilité, le demi-cercle mobile dont nous avons parlé, on marque sur le
globe la position de chaque lieu remarquable de la terre d'après sa
latitude et sa longitude, connue par l'observation ou autrement. _Nous
renvoyons à ce qui a été dit (nº 41) pour la construction d'un globe
céleste; il n'y a qu'à dire longitude au lieu d'_AR, _et latitude au
lieu de_ D.

Quand on représente ainsi la terre par un globe, on la représente par
une sphère parfaitement unie; on n'entreprend pas de rendre sensible
l'aplatissement de la terre vers les pôles; cet aplatissement étant à
peu près de 1/300, sur un globe de 3 mètres de rayon équatorial, déjà
bien grand, le rayon polaire aurait 2m,99. On n'entreprend pas non plus
de rendre sensible sur la surface d'un globe géographique la, hauteur
des montagnes, ni la profondeur des mers; car la hauteur de la plus
grande montagne de la terre, le pic de l'Himalaya, au Thibet, est de
1/740 du rayon de la terre; les autres grandes montagnes ne vont pas à
la moitié de cette hauteur. Si donc le globe avait 0m,740 de rayon, la
plus grande protubérance de la surface terrestre serait d'un millimètre.
La plus grande dépression (le creux), destinée à représenter la
profondeur maxima des mers, ne serait pas plus grande; et encore pour la
généralité des montagnes et des mers ce serait beaucoup moins. Ces
inégalités seraient moins nombreuses et moins sensibles que les
rugosités sur la peau d'une orange.

Un globe terrestre géographique est sans contredit la représentation la
plus exacte possible de la surface terrestre. Mais l'usage d'un pareil
globe n'est pas commode, surtout pour ceux qui ont le plus besoin de
renseignements géographiques, c'est-à-dire, pour les voyageurs. Car,
pour y rendre distinctes les positions des lieux d'une même contrée, il
faut donner au globe de grandes dimensions. Aussi remplace-t-on
généralement les globes par quelque chose de plus portatif, par des
cartes géographiques.

=87.= CARTES GÉOGRAPHIQUES. On appelle ainsi la représentation sur une
surface plane de portions plus ou moins étendues de la surface de la
terre.

Si la surface d'un globe terrestre géographique, préalablement
construit, pouvait être développée et étendue sur un plan sans déchirure
ni duplicature, on aurait ainsi la meilleure carte géographique. Mais la
surface d'une sphère ne peut pas être ainsi développée; il en résulte
que la représentation de la terre sur une surface plane ne peut se faire
sans qu'il y ait des déformations dans certaines parties; on cherche
naturellement à construire les cartes de manière à atténuer le plus
possible ces déformations. Nous allons faire connaître les dispositions
les plus usitées en indiquant les avantages et les inconvénients de
chacune.

=88.= CANEVAS. Les points de la terre se distinguant par les méridiens
et les parallèles sur lesquels ils se trouvent, on est conduit à
représenter ces cercles sur la carte; on ne peut en représenter qu'un
nombre limité. On appelle _canevas_ un ensemble de lignes droites ou
courbes qui, se croisant dans toute l'étendue de la carte, représentent,
les unes des méridiens équidistants (en degrés), les autres des
parallèles équidistants aussi. La première chose que l'on dessine sur
une carte c'est le canevas; on a alors devant soi un grand nombre de
quadrilatères dans lesquels on place les lieux ou objets qui doivent
figurer sur la carte, soit d'après un globe terrestre que l'on a sous
les yeux, soit d'après leurs longitudes et leurs latitudes connues.

=89.= MAPPEMONDES. Quand on veut représenter la terre tout entière, pour
en embrasser l'ensemble d'un coup d'œil, on la divise en deux
hémisphères par un de ses cercles principaux; on exécute, à côté l'une
de l'autre, les représentations des deux hémisphères; l'ensemble est ce
qu'on appelle une _mappemonde_.

On emploie pour la construction dés cartes la méthode des projections ou
les développements de surface.

=90.= PROJECTION ORTHOGRAPHIQUE. La projection orthographique d'un point
est le pied de la perpendiculaire abaissée de ce point sur un plan qu'on
appelle plan de projection. Pour la construction des cartes
géographiques, le plan de projection est ordinairement l'équateur ou un
méridien choisi.

_Projection de l'équateur._ On trace un cercle d'un rayon plus ou moins
grand, suivant les dimensions qu'on veut donner à la carte. On considère
ce cercle comme l'équateur d'un demi-globe terrestre géographique que
l'on imagine superposé à ce cercle même et sur lequel sont supposés
marqués à l'avance les lieux qui doivent figurer sur la carte. Le pôle
de ce globe se projette au centre; chaque parallèle se projette en
véritable grandeur; chaque demi-méridien a pour projection le rayon qui
est la trace même de son plan sur la carte. Les distances des lieux en
longitude, qui sont des arcs de parallèles, sont donc très-exactement
conservés, tandis que les arcs de chaque méridien sont représentés en
raccourci, et sous une forme qui ne rappelle nullement leur forme réelle
(un arc de 90° est représenté par une ligne droite, un rayon). Aux
environs du pôle, les petits arcs de méridiens, approchant d'être
parallèles au plan de projection, sont représentés par des lignes
presque égales en longueur à ces arcs; la représentation des parties de
la terre voisines du pôle est donc la moins défectueuse; mais c'est
précisément là qu'il n'y a pour ainsi dire rien à représenter. A mesure
qu'on se rapproche du bord de la carte, l'altération des longueurs
devient de plus en plus grande; tout près du bord la projection d'un arc
de 1°, par exemple, se réduit presque à un point. Ces déformations,
très-grandes dans les latitudes les plus importantes à considérer, ont
fait abandonner ce mode de construction pour les cartes terrestres.

La projection sur un méridien offre les mêmes inconvénients; chaque
demi-parallèle a pour projection un de ses diamètres; d'où il résulte
précisément la même déformation que tout à l'heure pour les méridiens,
mais cette fois du milieu de la projection de chaque parallèle vers les
bords de la carte.

Si nous avons parlé des projections orthographiques, c'est qu'elles sont
employées pour les cartes ou planisphères célestes, notamment pour
représenter les constellations circumpolaires; ici les environs du pôle
sont plus importants à représenter.

=91.= PLANISPHÈRE. _Projection sur l'équateur._

Pour construire le canevas, on commence par tracer un cercle de rayon
aussi grand que l'on veut, et sur ce cercle un diamètre horizontal. On
divise chaque demi-circonférence en un certain nombre de parties égales,
en degrés par exemple, puis on joint le centre à tous les points de
division. On ne marque généralement que les divisions qui correspondent
aux 24 cercles horaires, c'est-à-dire de 15° en 15°, ou d'heure en
heure, à partir de 0° sur le diamètre horizontal. Ces divisions de la
circonférence indiquent les ascensions droites; les rayons tracés sont
les projections des cercles horaires. Pour obtenir les projections des
parallèles, on abaisse, des points de division du 1er quadrant du
contour, des perpendiculaires sur le diamètre horizontal; puis, enfin,
on trace des circonférences, concentriques au contour, et passant
respectivement par les pieds de toutes ces perpendiculaires: on marque
au pied de chaque perpendiculaire le nombre de degrés marqué à son
origine; chacun de ces numéros indique la déclinaison dé tous les points
du cercle adjacent[32]. Le canevas est alors terminé; il ne reste plus
qu'à y placer les étoiles d'après leurs coordonnées.

[Note 32: La construction des parallèles est fondée sur cette remarque
que le rayon de chaque parallèle céleste est égal au cosinus de la
déclinaison correspondante.]

Si on veut déterminer avec précision la position d'une étoile
particulière, on compte son ascension droite à partir de 0°, et on trace
le rayon qui va à l'extrémité de l'arc mesuré. On compte la déclinaison
sur la circonférence, à partir du même point 0° et on abaisse une
perpendiculaire de l'extrémité de l'arc obtenu sur le diamètre
horizontal; on décrit la circonférence qui passe par le pied de cette
perpendiculaire. L'intersection de cette circonférence et du rayon que
l'on vient de tracer est la position cherchée de l'étoile.

=92.= PROJECTION STÉRÉOGRAPHIQUE. Si de l'œil placé en O on mène un
rayon visuel OA à un point quelconque de l'espace, la trace _a_ de ce
rayon sur un plan fixe, MM', s'appelle la perspective du point A sur le
plan MM'. Le point fixe O est dit le _point de vue_, et le plan MM' le
_tableau_.

[Illustration: 079, Fig. 40.]

Ce mode de projection, connu sous le nom de _projection
stéréographique_, est employé pour construire des cartes géographiques.
On choisit alors pour tableau un méridien G'MGM' (_fig._ 40), et pour
point de vue le pôle O de ce méridien opposé à l'hémisphère MABCM' que
l'on veut projeter en tout ou en partie. Exécutée dans ces conditions,
la projection stéréographique jouit des propriétés fondamentales
suivantes:

1º _Tout cercle de la sphère, quel qu'il soit, a pour perspective un
cercle._

2º _L'angle de deux lignes quelconques, tracées sur la surface de la
sphère est égal à celui que forment les lignes qui les représentent sur
la carte._ (On appelle angle de deux courbes l'angle compris entre les
tangentes menées à ces courbes à leur point d'intersection.)[33]

[Note 33: V. à la fin du chapitre, la démonstration de ces deux
principes.]

Il résulte de ces deux principes que les méridiens et les parallèles
sont représentés sur le canevas _par des arcs de cercle perpendiculaires
entre eux_, comme sur le globe terrestre. Ce canevas est donc facile à
construire.

=93.= On choisit ordinairement pour tableau le méridien de l'île de Fer,
la plus occidentale des îles Canaries, ou pour parler d'une manière plus
précise, le méridien situé à 20° de longitude occidentale de Paris. On a
choisi ce méridien parce qu'il partage la terre en deux hémisphères, sur
l'un desquels se trouvent ensemble l'Europe, l'Asie, l'Afrique (tout
l'ancien monde) et une partie de l'Océanie. Le cercle PE'P'E (_fig._
42), qui représente ce méridien, forme le contour de la carte.

Voici les deux problèmes qu'il faut savoir résoudre pour construire une
carte dans ce système de projections.

[Illustration: 080, Fig. 42.]

=94.= PROJECTION D'UN MÉRIDIEN. Soit proposé de construire la
perspective du méridien M, qui fait avec celui de l'île de Fer un angle
de 10°. On prend sur le contour PE'P'E, à partir de P', sur la droite,
un arc P'G de 20° (_fig._ 42), (le double de 10°); on tire la droite PG
qui rencontre E'E en I; du point I comme centre avec le rayon IP, on
décrit un arc de cercle PKP' limité aux deux points P et P'; cet arc est
la perspective du demi-méridien indiqué.

DÉMONSTRATION. Le méridien M, comme tous les autres, passe par les
points P et P' qui sont à eux-mêmes leurs perspectives; l'arc de cercle,
perspective de méridien, passe donc en P et en P', et a son centre sur
E'E. Soit I ce centre supposé trouvé, et PKP' l'arc cherché; menons PIG
et la tangente PS à l'arc PKP'. La tangente RP au méridien PE'P'E est sa
projection à elle-même; il résulte du 2e principe, nº 92, que l'angle
RPS est égal à 10°; mais les rayons OP, IP des cercles PE'P', PKP' étant
perpendiculaires à PR et PS, l'angle P'PG = RPS = 10°; cet angle P'PG
est donc connu _à priori_: comme il est inscrit, l'arc P'G qui le mesure
est égal à 20°. On connaît donc le point G, et par suite la direction du
rayon PIG; de là la construction indiquée.

=95.= PROJECTION D'UN PARALLÈLE. Soit proposé de construire la perspective
du demi-parallèle dont la latitude est 60°. On prend E'C' = 60° (_fig._
42); on mène en C' la tangente C'D au cercle PE'P'E; puis du point D
comme centre avec le rayon DC', on décrit un arc de cercle C'HC limité
au point C, où il rencontre une seconde fois le contour PE'P'E; cet arc
C'HC est la perspective du demi-parallèle en question.

DÉMONSTRATION. Le parallèle en question rencontre le méridien PE'P'E en
deux points C' et C du tableau, situés à 60° des points E', E; l'arc de
cercle, perspective du demi-parallèle en question, passe donc aux points
C', C et a son centre sur P'P: il faut trouver ce centre. Or, le
parallèle proposé étant perpendiculaire au méridien PEP'E', la tangente
CD, qui est sa propre perspective, est perpendiculaire à la tangente qui
serait menée au même point à la perspective du parallèle. La
perpendiculaire menée à la tangente d'un arc de cercle, au point de
contact, passant par le centre de cet arc, la ligne C'D passe au centre
de l'arc à construire. Ce centre est d'ailleurs sur P'P; il est donc en
D. C. Q. F. D.

[Illustration: 081, Fig. 43.]

=96.= CONSTRUCTION DU CANEVAS (_fig._ 43). Nous supposerons qu'on
veuille représenter les méridiens et les parallèles de 10° en 10°. On
divise la circonférence en 36 parties égales (arcs de 10°) à partir de
l'un des pôles. On joint par des lignes au crayon le pôle P à tous les
points de division de rangs pairs à partir de P'; ex. le point G (_fig._
42). De chaque point de rencontre, I, de ces lignes avec E'E comme
centre, avec IP pour rayon, on décrit un arc de cercle limité aux points
P et P'. On obtient ainsi une série d'arcs de cercle tels que PKP'
(_fig._ 42), qui représentent les méridiens considérés de 10° en 10° à
partir du méridien de l'île de Fer (_fig._ 43).

Pour tracer les parallèles, à chacun des points de division, ex.: C'
(_fig._ 42), de la _demi-circonférence_ PE'P', on mène au crayon une
tangente C'D à cette demi-circonférence, à la rencontre de PP'. Du point
de rencontre D, comme centre, avec DC' pour rayon, on trace un arc de
cercle limité en C' et en C sur le contour PE'P'E. On obtient ainsi
(_fig._ 43) une série d'arcs de cercle qui représentent les parallèles,
de 10° en 10° à partir de l'équateur. On marque les latitudes de 0 à
90°, de E' vers P, puis de E' vers P', sur la demi-circonférence PE'P',
et même, si on veut, sur PEP'. On marque les longitudes de 10° en 10°
sur l'équateur, aux points où il est rencontré par les perspectives des
méridiens; seulement, il faut marquer 10° à la 1re division après le
point E', 0° à la seconde (méridien de Paris), puis 10°, 20°, etc., de
gauche à droite. Le canevas ainsi construit (_fig._ 43), on y marque les
divers lieux, soit d'après un globe terrestre, soit d'après leurs
longitudes et leurs latitudes connues.

_Remarque._ Le méridien du point de vue et l'équateur sont représentés
par des lignes droites PP', EE'. Les perspectives s'aplatissent de plus
en plus quand on s'approche de l'une ou l'autre de de ces lignes.

=97.= AVANTAGE ET INCONVÉNIENT DE LA PROJECTION STÉRÉOGRAPHIQUE
ordinairement employée pour construire les atlas de géographie.

_L'avantage qu'elle présente, c'est qu'une figure de petites dimensions,
située n'importe où sur l'hémisphère, est représentée sur la carte par
une figure semblable._ En effet, cette figure peut être considérée comme
plane à cause de sa petitesse; cela posé, il résulte de la seconde
propriété des projections stéréographiques, nº 92, que les triangles,
dans lesquels la figure et sa représentation peuvent être décomposés,
sont semblables comme équiangles, et semblablement disposés. Cette
figure n'est donc pas déformée; seulement ses dimensions sont réduites
dans le même rapport (V. BC et _bc_, _fig._ 40).

L'inconvénient de ce mode de projection consiste précisément en ce que
le rapport dans lequel se fait la réduction d'une petite figure varie
avec la position de celle-ci sur l'hémisphère. Au bord de la carte il
n'y a pas de réduction, puisque les parties du méridien qui forme le
contour sont représentées en véritable grandeur; mais les dimensions se
réduisent de plus en plus à mesure qu'on s'éloigne du bord; vers le
centre les dimensions sont réduites de moitié. Ex.: _de_ = 1/2 DE
(_fig._ 40).

=98.= SYSTÈME DE DÉVELOPPEMENT EMPLOYÉ POUR LA CARTE DE FRANCE. Dans la
construction de la grande carte de France du dépôt de la guerre, on
s'est surtout attaché à ne pas altérer les rapports d'étendue
superficielle qui existent entre les diverses parties de la contrée,
tout en conservant autant que possible les formes telles qu'elles
existent sur la terre. Pour cela, on a employé un système de
développement, dit _développement conique modifié_, que nous allons
faire connaître.

[Illustration: 083, Fig. 44.]

_Construction du canevas._ Supposons qu'il s'agisse de représenter une
contrée dont les longitudes extrêmes sont 5° Ouest et 7° Est, et les
latitudes extrêmes 42° et 52° Nord (ce sont à peu près celles de
France). On détermine la longitude moyenne, qui est ((7° + 5°)/2) = 1°
Est, et la latitude moyenne, qui est ((42° + 52°)/2) = 47° Nord. Cela
fait, on imagine devant soi un globe terrestre géographique sur lequel
est figurée la contrée à représenter, décomposée par un canevas de
méridiens et de parallèles comme le doit être la carte elle-même. On
représente le méridien moyen SCE (_fig._ 44) par une ligne droite _sce_.
Pour représenter le parallèle moyen, on imagine menée en C une tangente
CS au méridien du globe, jusqu'à la rencontre de l'axe PP' en S; on
déterminera l'aide de la latitude moyenne (47°), la longueur de cette
tangente du points au point C[34]; puis du point _s_ sur la carte, comme
centre, avec un rayon _sc_ = SC, on trace un arc de cercle _fch_ qui
représente le parallèle moyen. Pour avoir la représentation des autres
parallèles, on imagine le méridien moyen ACE divisé en parties AB, BC,
CD, DE,..... dont les extrémités correspondent à des latitudes connues,
de degré en degré par exemple. On porte sur _sce_, de part et d'autre de
_c_, et dans le même ordre que sur le globe, des longueurs _cb_,
_ba_,..... _cd_, _de_...... respectivement égales aux longueurs CB,
BA,... CD, DE...[35]. Puis de _s_ comme centre, on décrit des arcs de
cercle passant aux points _b_, _d_, _c_...; chacun de ces arcs
_bb'b"_,... représente un des parallèles de la contrée correspondant à
une latitude connue. Pour achever le canevas, il n'y a plus qu'à
représenter un certain nombre de méridiens de part et d'autre du
méridien moyen. Pour cela, on imagine sur le globe un certain nombre de
ces méridiens correspondant à des longitudes connues, de degré en degré
par exemple, lesquels divisent les parallèles en arcs tels que AA',
A'A",... BB', B'B",... etc. Sur chacun des parallèles de la carte,
_aa'a"_, _bb'b"_, on prend des arcs respectivement égaux en longueur à
leurs correspondants sur le globe, _aa'_ = AA', _a'a"_ = A'A",... _bb'_
= BB',..., etc.[36]. Cela tait, on fait passer par chaque série de
points ainsi obtenus, occupant le même rang sur leurs courbes
respectives à partir de _sce_, ex.: (_a'_, _b'_, _c'_,...), une ligne
continue (_a'b'c'_...); chacune des lignes ainsi obtenues représente un
des méridiens de la contrée correspondant à une longitude connue que
l'on indique sur la carte. On marque les latitudes sur les bords de la
carte, à gauche et à droite, aux extrémités des arcs _aa'a"_, _bb"_...,
et les longitudes en haut et en bas aux extrémités des arcs _abc_,
_a'b'c'_... Le canevas achevé, il ne reste plus qu'à y marquer les lieux
et les objets que l'on veut indiquer, d'après un globe terrestre ou
d'après leurs longitudes et leurs latitudes connues.

[Note 34: À l'inspection seule de la première des figures 44, on voit
que la tangente SC peut se construire comme il suit:

Le rayon R du globe terrestre est représenté par une longueur qui dépend
des dimensions que l'on veut donner à la carte, 0m,2, par exemple. On
décrit un cercle avec ce rayon et on y trace deux diamètres, l'un
horizontal, l'autre vertical. À partir du premier, on prend sur la
circonférence un arc égal à la latitude moyenne donnée; à l'extrémité de
cet arc, on mène une tangente que l'on prolonge seulement jusqu'à sa
rencontre avec le diamètre vertical prolongé lui-même. Cette tangente
est la longueur cherchée SC.]

[Note 35: Supposons que les arcs AB, BC, CD,..... du méridien moyen
soient 1°. Chacun d'eux est la 360e partie de la circonférence; AB =
2πR/300. Connaissant π et R, on peut calculer la longueur de AB = BC =
CD. Cette longueur est celle que l'on porte sur la droite sce de la
carte, de _c_ en _b_, de _b_ en _a_, etc. Dans la construction de la
carte de France, on a eu égard à l'aplatissement de la terre; la
longueur d'un degré du méridien dépend, dans ce cas, de sa latitude.]

[Note 36: Pour construire les arcs _aa'_, _a'a"_,..... qui appartiennent
à un parallèle dont la latitude est donnée, on construit à part ce
parallèle, avec un rayon _r_ = R × cos. latitude de ce parallèle, ou
bien de la manière indiquée à propos de la projection orthographique. Si
les arcs _aa'_, _a'a"_,.... sont de 1°, on prend un arc de 1° sur ce
parallèle; puis on porte cet arc par parties très-petites, de _a_ en
_a'_, sur l'arc de cercle _aa'a"_; puis une 2e fois de _a'_ en _a"_; une
3e fois de _a"_ en _a‴_, etc.....]

REMARQUES. Dans cette construction, on attribue au globe terrestre, dont
on est censé développer une partie de la surface, un rayon arbitraire R
dont la grandeur dépend du rapport que l'on veut établir entre les
distances sur la carte et les distances réelles. Si les arcs AB, BC,...
sont des arcs de 1°, on déduit leur longueur de celle du rayon assigné
au globe terrestre (1° = 2πR/360). Pour la carte de France, on a eu
égard à l'aplatissement de la terre; la longueur d'un degré du méridien
est estimée suivant la latitude.

Enfin, pour construire les arcs _aa'_, _a'a"_,... _bb'_,... on peut
déterminer la longueur des arcs AA', A'A",... BB',... que nous supposons
de 1°, d'après les rayons des parallèles auxquels ils appartiennent. On
porte chaque longueur ainsi déterminée, AA', par parties très-petites,
sur la ligne _aa'a"_ de la carte. (V. la 2e note ci-contre).


=99.= AVANTAGES LE CE MODE DE DÉVELOPPEMENT.> Ce sont ceux que nous
avons indiqués à l'avance. Les rapports d'étendue superficielle sont
partout conservés; ainsi, des contrées de même surface sur la terre
occupent des surfaces égales sur la carte. De plus, les surfaces
représentées sont fort peu déformées.

En effet, le canevas de la contrée sur le globe terrestre géographique
et sa représentation sur la carte, sont composées de petites figures
telles que A'A"B"B'", _a'a"b"b'_, équivalentes chacune à chacune, à peu
près de la même forme et semblablement disposées. Nous supposons les
parallèles et les méridiens très-rapprochés, ce qu'il est toujours
possible d'effectuer dans la construction.

Cela posé, 1º les petites figures A'A"B"B', _a'a"b"b'_ sont
équivalentes; car elles peuvent être considérées comme des
parallélogrammes ayant des bases égales; B'B" = _b'b"_ par construction,
et même hauteur B'A' = BA = _ba_.

2º Ces figures A'A"B"B', _a'a"b"b'_ ont sensiblement la même forme;
l'une et l'autre peuvent être considérées comme de petits rectangles. En
effet, les méridiens et les parallèles perpendiculaires sur le globe le
sont à fort peu près sur la carte; le long du méridien moyen, _sce_, les
angles sont même exactement droits.

Ce dernier mode de représentation consiste, comme on le voit, à
décomposer la contrée sur le globe terrestre, en très-petites parties
(les petites figures A'A"B"B') que l'on transporte une à une aussi
fidèlement que possible sur le papier. Cette représentation approche
d'autant plus de l'exactitude que ces figures sont plus petites.


                     APPENDICE AU CHAPITRE II

                           (NON EXIGÉ).


=100.= CARTES MARINES, dites de MERCATOR. Les cartes dont on se sert
pour la navigation diffèrent des précédentes: voici leur mode de
construction.

[Illustration: 086, Fig. 45.]

On imagine un globe terrestre géographique sur lequel sont tracés une
série de méridiens et de parallèles équidistants, aussi rapprochés que
l'on veut. On trace sur le papier une droite E'E dont on suppose la
longueur égale à celle de l'équateur du globe. On divise E'E en autant
de parties égales que ce même équateur, en 18 parties par exemple; par
tous les points de division, on mène des perpendiculaires à E'E (_fig._
45); il y a alors autant de bandes parallèles sur le papier que de
fuseaux sphériques sur le globe. Chacun de ces derniers est divisé en un
certain nombre de quadrilatères ABCD, MNPQ... Si les méridiens et les
parallèles, qui se coupent à angle droit, sont suffisamment rapprochés,
on peut regarder approximativement chacun de ces quadrilatères, par ex.
MNPQ, comme un rectangle ayant pour base MN et pour hauteur MP. Le mode
de construction de la carte consiste à représenter, en procédant _par
ordre_, de l'équateur au pôle, les divers rectangles de chaque fuseau
sphérique par des rectangles respectivement semblables, disposés à la
suite les uns des autres dans la bande parallèle correspondante à ce
fuseau. Tous les rectangles de la carte auront des bases égales; _mn_ =
AB (_fig._ 45), tandis que ceux du, fuseau ont des bases constamment
décroissantes de l'équateur au pôle (V. la _fig._ 44). Pour obtenir la
similitude de chaque rectangle MNPQ et du rectangle _mnpq_ qui le
représente sur la carte, on prend la hauteur _mp_ du rectangle de la
carte quatrième proportionnelle aux lignes connues MN, MP, _mn_ (MN = MP
cos. latit.); il faut donc faire un calcul ou une construction pour la
hauteur de chaque rectangle d'un fuseau. Ces hauteurs trouvées, on les
porte dans leur ordre sur une des lignes du cadre, à droite ou à gauche;
puis, par l'extrémité de chacune d'elles, on mène une parallèle à E'E.
Le canevas est tracé; les méridiens y sont représentés par les droites
parallèles à _y'_E_y'_, et les parallèles par les droites parallèles à
E'E; les longitudes se marquent sur une parallèle à E'E, et les
latitudes sur les deux perpendiculaires extrêmes _y'_E_y'_, _y_E'_y_.

=101.= REMARQUE. Les rectangles _de la carte_ considérés dans un sens ou
dans l'autre, à partir de l'équateur, vont, en s'allongeant
indéfiniment; vers les pôles leurs hauteurs deviennent excessivement
grandes. Ce fait s'explique aisément; en effet, toutes les hauteurs des
rectangles du globe terrestre sont égales; exemple: AC = MP; chacune
d'elles est, par exemple, un degré du méridien: les bases AB...MN, de
ces rectangles vont en décroissant indéfiniment de l'équateur au pôle
(car MN = AB × cos. latit., et par suite MP = AB = MN ÷ cos. latit.). La
hauteur constante, un degré du méridien, devient donc dans les
rectangles successifs de plus en plus grande par rapport à la base (V.
le globe). Le rapport de la hauteur de chaque rectangle à sa base étant
le même sur la carte que sur le globe, et la base restant constante sur
la carte, _ab_ = _mn_, il en résulte que sur celle-ci, les hauteurs
_ac_, _mp_... (_mp_ = _mn_ ÷ cos. _latitude_) doivent aller en
augmentant indéfiniment; ce qui fait que les rectangles s'allongent de
plus en plus, à mesure qu'on s'éloigne de l'équateur. Dans les régions
polaires les rectangles tendent à devenir infiniment longs. On ne doit
donc pas chercher à se faire une idée de l'étendue superficielle d'une
contrée par sa représentation sur une pareille carte; on se tromperait
gravement. Les marins, qui ne cherchent sur la carte que la direction à
donner à leur navire, trouvent à ces cartes un avantage précieux que
nous allons indiquer.

=102.= Pour aller d'un lieu à un autre les navigateurs ne suivent pas un
arc de grand cercle de la sphère terrestre; cette ligne, la plus courte
de toutes, a le désavantage de couper les divers méridiens qu'elle
rencontre sous des angles différents; ce qui compliquerait la direction
du navire. Les marins préfèrent suivre une ligne nommée _loxodromie_ qui
a la propriété de couper tous les méridiens sous le même angle. Cette
ligne se transforme _sur la carte marine_ en une ligne droite qui joint
le point de départ au point d'arrivée[37]; il suffit donc aux marins de
tracer cette ligne sur leur carte, pour savoir sous quel angle constant
la marche du navire doit couper tous les méridiens sur la surface de la
mer. Habituellement, et pour diverses causes, le navire ne suit pas la
ligne mathématique qu'on veut lui faire suivre; c'est pourquoi, après
avoir navigué quelque temps, on cherche à déterminer, au moyen
d'observations astronomiques, le lieu qu'on occupe sur la mer. Quand on
a trouvé la longitude et la latitude de ce lieu, on le marque sur la
carte marine; en le joignant par une ligne droite au lieu de
destination, on a une nouvelle valeur de l'angle sous, lequel la marche
du navire doit rencontrer chaque méridien.

[Note 37: Toutes les petites figures du canevas de la carte sont
semblables à celles du globe terrestre; les éléments _successifs_ de la
loxodromie, qui font sur le globe des angles égaux avec les éléments des
méridiens qu'ils rencontrent, doivent faire les mêmes angles avec ces
éléments de méridien rapportés sur la carte; ceux-ci étant des droites
parallèles, tous les éléments de la loxodromie doivent se continuer
suivant une même ligne droite.]

Le système de _Mercator_ est employé pour construire des _cartes
célestes_; mais seulement pour les parties du ciel voisines de
l'équateur.

_De l'atmosphère terrestre._

=103.= ATMOSPHÈRE. La terre est entourée d'une atmosphère gazeuse
composée de l'air que nous respirons. L'air est compressible, élastique
et pesant; les couches supérieures de l'atmosphère comprimant les
couches inférieures, la densité de l'air est la plus grande aux environs
de la terre. À mesure qu'on s'élève, cette densité diminue; l'air
devient de plus en plus rare, et à une distance de la terre relativement
peu considérable, il n'en reste pas de traces sensibles.

=104.= HAUTEUR DE L'ATMOSPHÈRE. On ne connaît pas cette hauteur d'une
manière tout à fait précise; d'après M. Biot qui a discuté toutes les
observations faites à ce sujet, elle ne doit pas dépasser 48000 mètres
ou 12 lieues de 4 kilomètres. Cette hauteur ne serait pas la
cent-trentième partie du rayon moyen de la terre[38]; le duvet qui
recouvre une pêche serait plus épais relativement que la couche d'air
qui enveloppe la terre.

[Note 38: Si on représentait la terre par un globe de 1 mètre de
diamètre, l'atmosphère figurée n'aurait pas une épaisseur de 4
millimètres.]

=105.= UTILITÉ DE L'ATMOSPHÈRE. L'air est indispensable à la vie des
hommes et des animaux terrestres tels qu'ils sont organisés.
L'atmosphère par sa pression retient les eaux à l'état liquide; elle
empêche la dispersion de la chaleur; sans elle le froid serait excessif
à la surface de la terre[39]. Les molécules d'air réfléchissent la
lumière en tous sens; cette lumière réfléchie éclaire les objets et les
lieux auxquels n'arrivent pas directement les rayons lumineux; sans
cette réflexion ces lieux resteraient dans l'obscurité.

[Note 39: Au sommet des montagnes, l'atmosphère devenant plus rare,
s'oppose moins à la dispersion de la chaleur; à l'hospice du
Grand-Saint-Bernard, à 2075 mètres au-dessus du niveau de la mer, la
température moyenne est d'un degré au-dessous de zéro.]

La réflexion des rayons lumineux qui frappent une partie de l'atmosphère
au-dessus d'un lieu _m_ de la terre, quand le soleil est un peu
au-dessous de l'horizon de ce lieu, produit cette lumière indirecte
connue sous le nom d'_aurore_ ou de _crépuscule_, qui prolonge d'une
manière si sensible et si utile la durée du jour solaire. Si
l'atmosphère n'existait pas, la nuit la plus absolue succéderait
subitement au jour le plus brillant, et réciproquement.

=106.= EXTINCTION DES RAYONS LUMINEUX. L'atmosphère incomplètement
transparente éteint une partie des rayons qui la traversent. Cette
extinction, faible pour les rayons verticaux, augmente avec la distance
zénithale de l'astre, parce que l'épaisseur de la couche atmosphérique
traversée par la lumière augmente avec cette distance; AG (_fig._ 46)
vaut environ 16 AB. L'extinction de la lumière et de la chaleur solaire
sont donc beaucoup plus grandes quand le soleil est près de l'horizon;
cette extinction est encore augmentée par les vapeurs opaques qui
existent dans les basses régions de l'atmosphère. C'est pourquoi le
soleil nous paraît moins éblouissant à l'horizon qu'au zénith.

[Illustration: 090, Fig. 46.]

Les astres nous paraissent plus éloignés à l'horizon qu'au zénith; cela
tient encore à ce que les molécules d'air, qui réfléchissent à l'œil la
lumière émanée de ces astres, s'étendent beaucoup plus loin à l'horizon
qu'au zénith; l'œil auquel arrivent ces rayons réfléchis doit juger les
distances plus grandes dans le premier cas que dans le second.
D'ailleurs l'extinction plus grande des rayons lumineux donne aux objets
une teinte bleuâtre plus prononcée qui contribue à nous les faire
paraître plus éloignés.

=107.= RÉFRACTION. L'atmosphère possède, comme tous les milieux
transparents, la propriété de réfracter les rayons lumineux,
c'est-à-dire de les détourner de leur direction rectiligne. Cette
déviation a lieu suivant cette loi démontrée en physique:

[Illustration: 090, Fig. 47.]

_Quand un rayon lumineux_ SA (_fig._ 47) _passe d'un milieu dans un
autre plus dense, par exemple du vide dans l'air, il se brise suivant_
AB, _en se rapprochant de la perpendiculaire_, NN', _à la surface de
séparation des milieux, sans quitter le plan normal_ SAN. _Si le nouveau
milieu est moins dense, le rayon s'écarte de la normale._

De cette propriété il résulte que les objets célestes, qui sont vus dans
une direction oblique à l'atmosphère, nous paraissent situés autrement
que nous les verrions si l'atmosphère n'existait pas. Il nous faut donc
connaître le sens et la valeur de ce déplacement, si nous voulons
savoir, à un instant donné, quelles sont les véritables positions des
astres que nous observons.

Un spectateur est placé en A sur la surface CA_c_ de la terre (_fig._
48). Soient L_l_, M_m_, N_n_ les couches successives de densités
décroissantes dans lesquelles nous supposons l'atmosphère décomposée, et
qui sont concentriques à la terre.

[Illustration: 091, Fig. 48.]

Soit une étoile S, que nous considérons comme un point lumineux. Si
l'atmosphère n'existait pas, le rayon lumineux SA nous montrerait
l'astre S dans sa véritable position; mais le rayon lumineux qui aurait
la direction AS, arrivant en _d_ sur la première couche atmosphérique,
N_n_, d'une ténuité extrême, est légèrement dévié, et se rapprochant de
la normale à la couche en _d_, prend la direction _de_; mais arrivé en
_e_, ce rayon entrant dans une nouvelle couche plus dense, éprouve une
nouvelle déviation, prend la direction _ef_ et ainsi de suite; les
directions successives que prend le rayon continuellement dévié, forment
une ligne polygonale, ou plutôt une courbe, _defa_, qui vient apporter
au lieu _a_, et non pas au lieu A, la vue de l'étoile. Celle-ci est vue
en A à l'aide d'un autre rayon lumineux SD qui, arrivé en D sur
l'atmosphère, a été dévié successivement de telle sorte que son
extrémité mobile arrive au lieu A, après avoir parcouru la courbe DEFA.
L'observateur qui place l'étoile à l'extrémité du rayon lumineux qu'il
perçoit, prolongé en ligne droite jusqu'à la sphère céleste, voit cet
astre dans la direction du dernier élément de la courbe DEFA,
c'est-à-dire à l'extrémité _s_ de la tangente AF_s_ menée à cette courbe
par le point A.

=108.= Il résulte de ce principe de physique: _le rayon incident et le
rayon réfracté sont dans un même plan normal à la surface de séparation
des milieux_, et de ce fait que toutes les couches atmosphériques ont
pour centre commun le centre de la terre, que toutes les directions
successives des rayons réfractés, sont dans un même plan vertical
comprenant la verticale AZ, la position vraie, S, et la position
apparente _s_ de l'étoile. Toutes ces réfractions s'ajoutent donc et
donnent une somme, SA_s_, qui est la réfraction totale relative à la
position actuelle S de l'étoile.

Les effets de la réfraction astronomique se résument donc, pour
l'observateur, dans un accroissement, SA_s_, de la hauteur de l'astre
observé. On peut la définir par cet accroissement. _La réfraction
astronomique est un accroissement apparent de la hauteur vraie d'un
astre au-dessus de l'horizon._

Quand un astre est au zénith Z, la réfraction est nulle; elle augmente
d'abord lentement à partir de 0°, quand la position vraie de l'astre
descend du zénith à l'horizon, puis augmente plus rapidement quand cet
astre est très-près de l'horizon; ainsi la réfraction, qui n'est encore
que 1'9" quand l'astre se trouve à 40° de l'horizon, est de 33'47",9 au
bord de l'horizon. Voici d'ailleurs le tableau des réfractions pour des
hauteurs décroissantes, de 10° en 10° d'abord, puis pour des hauteurs
plus rapprochées dans l'intervalle de 10° à 0°.

HAUTEUR       RÉFRACTION.
apparente.

90°              0",0
80              10 ,3
70              21 ,2
60              33 ,7
50              48 ,9
40            1' 9 ,4
30            1 40 ,7
20            2 38 ,9
15            3 34 ,5
10            5 20 ,0
9             5 53 ,7
8             6 34 ,7
7             7 25 ,6
6             8 30 ,3
5             9 54 ,8
4            11 48 ,8
3            14 28 ,7
2  0'        18 23 ,1
1  0         24 22 ,3
0 40         27  3 ,1
0 30         28 33 ,2
0 20         30 10 ,5
0 10         31 55 ,2
0            33 47 ,9[40]

[Note 40: Près de l'horizon les réfractions sont très-irrégulières parce
que les rayons lumineux y traversent les couches d'air les plus chargées
d'humidité, les plus inégalement échauffées ou refroidies par leur
contact avec le sol. C'est pourquoi les astronomes évitent d'observer
les astres trop près de l'horizon. Ce n'est qu'à partir de 5° ou 6° de
hauteur que les réfractions deviennent régulières et conformes à la
table précédente.]

_Usage du tableau._ Si la hauteur apparente d'un, astre est de 15° par
exemple, on prend dans la table la réfraction correspondante 3'34",5 et
on la retranche de la hauteur observée pour avoir la hauteur vraie.

REMARQUE. Quand la hauteur apparente d'un astre est de 0°0'0", cet
astre, vu au bord de l'horizon, se lève ou se couche en apparence,
tandis qu'il est déjà, en réalité à 33'47" au-dessous de l'horizon.

=109.= REMARQUE. Le diamètre apparent du soleil étant en moyenne de
32'3", il résulte de la remarque précédente que le bord supérieur de son
disque étant déjà à 1' au-dessous de l'horizon, à l'Orient ou au
Couchant, l'astre tout entier, soulevé par la réfraction, est visible
pour nous. Le soleil nous paraît donc levé plus tôt et couché plus tard
qu'il ne l'est réellement.

Une autre conséquence de la réfraction, c'est que le disque solaire, à
son lever et à son coucher, nous apparaît sous la forme d'un ovale
écrasé dans le sens vertical; la réfraction, relevant l'extrémité
inférieure du diamètre vertical plus que l'extrémité supérieure,
rapproche en apparence ces deux extrémités; le disque nous paraît donc
écrasé dans ce sens. La réfraction élevant également les deux extrémités
du diamètre horizontal n'altère pas ses dimensions.

Le même effet de réfraction a lieu pour la lune.

NOTE I.

SPHÉRICITÉ DE LA TERRE. Voici comment on montre la sphéricité de la
terre en se fondant sur les observations 1°, 2°, 3°, mentionnées dans la
note de la page 56.

On démontre d'abord que la courbe qui limite l'horizon sensible d'un
observateur placé à une hauteur quelconque est une circonférence dont
l'axe est la verticale du lieu.

[Illustration: 093, Fig. 30.]

Soit A (_fig_. 30) le point d'où on observe; AB, AG deux rayons visuels
quelconques allant à la courbe limite BC; AI la verticale du lieu A. On
sait que les angles BAI, CA1 sont égaux (1°). Nous allons prouver que
les lignes AB, AC sont égales. En effet, supposons qu'elles soient
inégales, que l'on ait AC > AB; nous pouvons prendre sur AB une longueur
AD = AC. Maintenant concevons que l'observateur s'élève en A' sur la
verticale AI, à une hauteur telle que le rayon visuel dirigé de ce point
A' dans le plan IAB, vers la nouvelle courbe limite, aille rencontrer la
ligne AD entre B et D, en E, par exemple; ce qui est toujours possible.
Le rayon visuel, dirigé de même de A' dans le plan IAC, ira rencontrer
la ligne AC en un point F situé au delà de C (2°). Les deux triangles
AA'E; A'AF sont égaux: car AA' = AA'; angle EA'I = angle FA' (1°); les
angles en A sont égaux comme suppléments des angles égaux EAI, FAI; les
triangles AA'E, AA'F étant égaux, on en conclut AE = AF. Mais AF est >
AC et AE < AD; avec AD = AC, on aurait donc une ligne AE plus petite que
AD égale à une ligne AF > AC; ce qui est absurde Cette absurdite résulte
de ce qu'on a supposé AC > AB; donc AC n'est pas plus grand que AB; ces
deux lignes ne pouvant être plus grandes l'une que l'autre, sont égales.
Les lignes allant du point A à la courbe limite étant égales, et faisant
avec la verticale AI des angles égaux; la courbe limite, lieu de ces
points B, C,..... est une circonférence qui a tous ses points également
distants de chaque point de la verticale AI.

[Illustration:094 Fig. 31]

Soient maintenant deux points d'observation A et A', situés sur deux
verticales différentes AI, A'Z (fig. 31); soit HD la corde commune aux
deux circonférences qui limitent les horizons sensibles de A et A';
menons les diamètres BCK, MCN, par le milieu C de HD. Cette corde HD est
perpendiculaire à ces deux diamètres BCK, MCN, et par suite à leur plan
BCN. Réciproquement le plan BCN est perpendiculaire à HD, et par suite
aux plans des circonférences qui ont HD pour corde commune. Le plan BCN
étant perpendiculaire au plan BHK, la perpendiculaire IA à ce plan BHK
est tout entière dans le plan BCN; de même A'Z est dans le plan BCN. Les
deux verticales IA, ZA' perpendiculaires à deux droites BC, CN, dans un
même plan avec ces droites, se rencontrent en un certain point O. Tirons
OH; le point O est à la même distance OH de tous les points de la
circonférence BHK; il est à la même distance OH de tous les points de
circ. NHM; il est donc à égale distance de tous les points de l'une et
l'autre circonférence.

Soit L un point quelconque de la surface de la terre; on peut concevoir
par L une circonférence LP, dont le plan soit perpendiculaire à la
verticale AIO ou à son prolongement OA", et qui rencontre la
circonférence NHM; dès lors OL égale la distance de O à circ. NHM,
c'est-à-dire OL = OH. Si circ. LP ne rencontrait pas circ. NHM, elle
rencontrerait une circonférence perpendiculaire à OZA' rencontrant déjà
circ. BKH; de sorte qu'on aurait toujours OL = OH. Le point O est donc à
égale distance de tous les points de la surface terrestre; celle-ci
ayant tous ses points à égale distance d'un point intérieur, est une
surface sphérique.

NOTE II.

Démonstration des deux principes relatifs à la projection
stéréographique des cercles d'une sphère, énoncés n° 92, page 74.

Théorème I. Tout cercle ED de la sphère a pour perspective, ou
projection stéréographique, un cercle.

[Illustration: 095, Fig. 40 _bis_.]

[Illustration: 095, Fig. 41.]

Observons d'abord que les droites qui projettent les points d'une
circonférence, circ.ED (V. la _fig_. 41 ci-après) sont les génératrices
d'un cône circulaire qui a le point de vue O pour sommet et cette
circonférence pour base. L'intersection d'une pareille surface par un
plan KBL parallèle à la base est une autre circonférence. En effet,
menons les génératrices quelconques OA, OE, OD qui rencontrent la
section en K, B, L (_fig_. 40 _bis_); les triangles semblables OIB, OIA
donnent O_i_/OI = _i_B/IA; les triangles OIK, OIE donnent O_i_/OI =
_i_K/IE; donc _i_B/IA = _i_K/IE; mais IA=IE, donc _i_B = _i_K; on
prouverait de même que _i_B = _i_L; donc la courbe KBL est une
circonférence dont le centre est _i_. Cela posé, soit O (_fig_. 41) le
point de vue sur la sphère; on sait que le tableau ou plan de projection
est un grand cercle ASB perpendiculaire au rayon OC. Soit HMF la
perspective d'une circonférence quelconque de la sphère, circ.ED; il
faut prouver que HMF est une circonférence. Pour cela, observons que la
ligne CI, qui joint le centre C de la sphère et le centre I de circ. ED,
est perpendiculaire au plan de cette circonférence; de sorte que le plan
OCI est à la fois perpendiculaire à cercle ASB et à cercle ED. Ce plan
OCI coupe la surface conique suivant le triangle OED, et le tableau ASB
suivant un diamètre ACB. Soit M un point quelconque de la projection HMF
de cercle ED; abaissons de M la perpendiculaire MP sur l'intersection CB
ou HF du plan OED et du plan ASB. Comme ces plans sont perpendiculaires,
MP, qui est dans le plan ASB, est perpendiculaire au plan OED; MP est
donc parallèle à cercle ED. Conduisons par MP un plan parallèle à cercle
ED; ce plan coupe le cône suivant une circonférence KML, dont KL,
parallèle à ED, est un diamètre. D'après un théorème connu (3° livre de
géométrie), (MP)² = KP × PL (1). Cela posé, observons que l'angle HFO =
OED; en effet HFO a pour mesure 1/2 AO + 1/2 BD; OED a pour mesure 1/2
DB + 1/2 OB; or AO = OB (ce sont deux quadrants). De ce que HFO = 0ED,
et OED=OKL, on conclut OKL = HFO; de OKL = HFO, on conclut que l'arc du
segment circulaire capable de l'angle HFO, qui aurait HL pour corde,
passerait par le point K. Les quatre points H, K, F, L sont donc sur une
même circonférence; les lignes HF, KL étant deux cordes d'une même
circonférence, HP × PF = KP × PL; donc en vertu de l'égalité (1), (MP)²
= HP × PF. Si donc on tirait les lignes HM, MF, le triangle HMF serait
rectangle; le point M appartient donc à la circonférence qui, dans le
plan ASB, a pour diamètre HF. Le point M étant un point quelconque de la
projection de circ. ED, on conclut que tous les points de la projection
sont sur la circonférence HMF dont nous venons de parler, autrement dit,
que cette circonférence est précisément la projection de circ. ED sur le
plan ASB.

Théorème II. _L'angle que forment deux lignes_ MP, MN _qui se coupent
sur la sphère est égal à celui que forment les lignes_ mn, mp _qui les
représentent sur la carte_ (_fig_. 41 _bis_). (On sait qu'on appelle
angle de deux lignes courbes MP, MN, l'angle que forment les tangentes
MG, MF, menées à ces courbes à leurs points de rencontre.)

[Illustration: 096, Fig. 41 bis]

Soient _g_ et _f_ les points où MG, MF percent le tableau; les
projections _mg_, _mf_ de ces tangentes sont elles-mêmes tangentes aux
courbes _mn_, _mp_; il faut démontrer que l'angle _gmf_=GMF. Pour cela,
menons, par le point de vue 0, un plan GOF parallèle au plan du tableau;
ce plan GOF perpendiculaire à l'extrémité du rayon OC est tangent à la
sphère. Soient G et F les points d'intersection de ce plan par les
tangentes MG, MF; menons OG, OF, FG. Les lignes OG, _mg_, intersection
des deux plans parallèles par le plan OMG, sont parallèles; OF, _mf_
sont aussi parallèles; donc l'angle _gmf_=GOF; nous allons prouver que
GOF=GMF. En effet, les lignes GM, GO, tangentes à la sphère, issues du
même point G, sont égales (on peut concevoir deux grands cercles
déterminés par les plans CMG, COG, lesquels auraient pour tangentes MG,
OG); pour une raison semblable, FM=FO. Les deux triangles MGF, OGF sont
donc égaux; par suite, l'angle GOF=GMF; donc _gmf_=GOF=GMF. C. Q. F. D.

REMARQUE. Nous avons dit que _mf_, projection de la tangente MF, était
elle-même une tangente à la projection _mn_ de MN. On se rend compte de
ce fait en imaginant une sécante MM' à la courbe MN, et la projection
_mm_' de cette sécante; puis faisant tourner le plan projetant OMM'
autour de OM, jusqu'à ce que M' soit venu se confondre avec M, MM'
devenant la tangente MF; pendant ce temps, _m_' se rapproche de _m_, et
se confond avec _m_ quand M' arrive en M; de sorte que la sécante et sa
projection deviennent tangentes en même temps.



                           CHAPITRE III.

                            LE SOLEIL.


=110.= MOUVEMENT PROPRE APPARENT DU SOLEIL. En outre du mouvement diurne
commun à tous les corps célestes, le soleil paraît animé d'un mouvement
propre dirigé en sens contraire du mouvement diurne.

On dit qu'un astre a un mouvement propre quand sa position apparente,
c'est-à-dire sa projection sur la sphère céleste, change
continuellement; autrement dit, quand sa position relativement aux
étoiles fixes change continuellement; or c'est ce qui arrive pour le
soleil.

=111.= _Premiers indices_. Si un soir, à la nuit tombante, on remarque un
groupe d'étoiles voisines de l'endroit où le soleil s'est couché, puis,
qu'on observe ces étoiles durant un certain nombre de jours, on les voit
de plus en plus rapprochées de l'horizon; au bout d'un certain temps,
elles cessent d'être visibles le soir; elles se couchent avant le
soleil. Si alors on observe le matin, un peu avant le lever du soleil,
on retrouve ces mêmes étoiles dans le voisinage de l'endroit où le
soleil doit bientôt apparaître. Celui-ci, qui d'abord précédait les
étoiles dans le mouvement diurne, les suit donc en dernier lieu; d'abord
à l'_ouest_ de ces astres, sur la sphère céleste, il se trouve
finalement à l'_est_. Mais les étoiles sont fixes; le soleil s'est donc
déplacé de l'ouest à l'est, en sens contraire du mouvement diurne. Il se
déplace de plus en plus dans le même sens; car si on continue
l'observation, le lever de chacune des étoiles en question précède de
plus en plus le lever du soleil. C'est là un mouvement en ascension
droite.

On voit aussi aisément sans instruments que la déclinaison du soleil
varie continuellement. En effet, d'une saison à l'autre, sa hauteur à
midi, au-dessus de l'horizon, change notablement: elle augmente
progressivement de l'hiver à l'été, et _vice versa_ diminue de l'été à
l'hiver. Le soleil se déplaçant sur le méridien, sa déclinaison varie
(_V_. la définition).

=112.= ÉTUDE PRÉCISE DU MOUVEMENT PROPRE. Le mouvement propre du soleil
une fois découvert, il faut l'étudier avec précision. Le moyen qui se
présente naturellement consiste à déterminer, à divers intervalles, tous
les jours par exemple, la position apparente précise du soleil sur la
sphère céleste. Si on trouve que cette position change continuellement,
on aura constaté de nouveau le mouvement; de plus, en marquant sur un
globe céleste les positions successivement observées, on se rendra
compte de la nature de ce mouvement.

La position apparente du soleil se détermine comme celle d'une étoile
quelconque par son ascension droite et sa déclinaison (n° 33); mais le
soleil a des dimensions sensibles que n'ont pas les étoiles.

Quand un astre se présente à nous sous la forme d'un disque circulaire,
ayant des dimensions apparentes sensibles, comme le soleil, la lune, les
planètes, on le suppose réduit à son centre. C'est la position de ce
centre qu'on détermine; c'est de cette position qu'il s'agit toujours
quand on parle de la position de l'astre[41].

[Note 41: Disons de plus que le soleil a un éclat que n'ont pas les
autres astres. Pour empêcher que l'œil ne soit ébloui et blessé par
l'éclatante lumière du soleil, dont l'image au foyer de la lunette est
excessivement intense, on a soin, quand on observe cet astre, de placer
en avant de l'objectif, ou entre l'œil et l'oculaire, des verres de
couleur très-foncée qui absorbent la plus grande partie des rayons
lumineux.]

=113.= ASCENSION DROITE DU SOLEIL. Pour déterminer chaque jour l'ascension
droite du centre du soleil, on regarde passer au méridien le premier
point du disque qui s'y présente (le bord occidental); on note l'heure
précise à laquelle ce premier bord vient toucher le fil vertical du
réticule de la lunette méridienne (n° 17); on marque également l'heure à
laquelle le soleil achevant de passer, ce même fil est tangent au bord
oriental du disque; la demi-somme des heures ainsi notées est l'heure à
laquelle a passé le centre; de cette heure on déduit l'AR de ce centre,
exactement comme il a été dit n° 34 pour les étoiles.

=114.= DÉCLINAISON DU SOLEIL. D'après le principe indiqué n° 38, on déduit
la déclinaison du soleil de sa distance zénithale méridienne, qui est la
demi-somme des distances zénithales du bord supérieur et du bord
inférieur du disque observées au mural. Cette distance zénithale doit
être corrigée des erreurs de réfraction et de parallaxe, le lieu
d'observation devant être ramené au centre de la terre (_V_. la
réfraction et la parallaxe).

=115.= On peut ainsi, toutes les fois que le soleil n'est pas caché au
moment de son passage au méridien, déterminer l'heure sidérale du
passage, l'ascension droite et la déclinaison de l'astre, puis consigner
les résultats de ces observations dans un tableau qui peut comprendre
plusieurs années. On trouve ainsi des valeurs constamment différentes,
au contraire de ce qui arrive pour les étoiles; ce fait général constate
d'abord le mouvement propre du soleil. Voici d'ailleurs, en résumé, ce
que nous apprend le tableau en question[42].

[Note 42: Dans cette étude du mouvement propre du soleil, on peut
prendre l'origine des AR sur le cercle horaire d'une étoile remarquable
quelconque, c'est-à-dire faire marquer 0h 0m 0s à l'horloge sidérale à
l'instant où cette étoile passe au méridien du lieu. On verra plus loin
(n° 131) comment on règle définitivement cette horloge.]

=116.= _Circonstances principales du mouvement propre apparent du soleil_.

Chaque passage du soleil au méridien retarde à l'horloge sidérale sur le
passage précédent, d'environ 4 minutes (en moyenne 3m 56s,5). Si, par
exemple, le passage a lieu un jour à 7 heures de l'horloge sidérale, le
lendemain il a lieu à 7h 4m environ, le surlendemain à 7h 8m; et ainsi
de suite. LE JOUR SOLAIRE, _qui est l'intervalle de deux passages
consécutifs du soleil au méridien_, surpasse donc le jour sidéral
d'environ 4 minutes. 365j 1/4 solaires valent approximativement 366j 1/4
sidéraux; autrement dit, si le soleil accompagne un jour une étoile au
méridien, il y revient ensuite 365 fois seulement, pendant que l'étoile
y revient 366 fois.

Supposons que le soleil et une étoile passent ensemble au méridien à
d'une horloge sidérale. L'étoile y revient tous les jours suivants à 0h
0m 0s, tandis que, à chaque nouveau passage du soleil, l'horloge marque
3m 56s,5 de plus que la veille; 365 de ces retards du soleil font 23h
59m (sidérales). Le 365e _retour_ du soleil a donc lieu à 23h 59m; une
minute après, à 0h 0m 0s, l'étoile revient pour la 366e fois; mais deux
retours consécutifs du soleil étant séparés par 24h.sid. 4m environ, il
doit s'écouler encore 24h 3m avant que le soleil ne soit revenu pour la
366e fois; donc l'étoile, 24 heures après, reviendra pour la 367e fois
avant que le soleil ne soit revenu pour la 366e. Ces deux derniers
passages recommencent une nouvelle période.

L'ASCENSION DROITE du soleil augmente chaque jour d'environ 1° (en
moyenne 59'8"), et passe par tous les états de grandeur de 0° à 360°.
C'est ce mouvement du soleil en AR qui cause le retard de son passage au
méridien (_V_. n° 140).

[Illustration: 100, Fig. 49.]

LA DÉCLINAISON est tantôt australe, tantôt boréale. Le 20 mars,
d'australe qu'elle était, elle devient boréale, et croît progressivement
de 0° à 23°28' environ, maximum qu'elle atteint vers le 22 juin. À
partir de là, elle décroît jusqu'à devenir nulle; redevient australe
vers le 23 septembre, augmente dans ce sens de 0° à la même limite
23°28', jusqu'au 22 décembre; puis décroît de 23°38' à 0°; redevient
boréale le 20 mars. Ainsi de suite indéfiniment.

Si on marque chaque jour sur un globe céleste, pendant un an au moins,
la position apparente du soleil, d'après son AR et sa D observées,
exactement comme il a été dit pour une étoile n° 45, on voit les
positions successivement marquées _s_', _s_'', _s_''',... faire le tour
du globe (_fig_. 49). Si on fait passer une circonférence de grand
cercle par deux quelconques des points ainsi marqués, il arrive qui tous
les autres points sont sur ce grand cercle. Le globe céleste figurant
exactement la sphère céleste, et les points marqués figurant les
positions apparentes successives du soleil sur cette sphère, on est
conduit, par ce qui précède, à cette conclusion remarquable:

_Le soleil nous semble parcourir indéfiniment, d'occident en orient,
c'est-à-dire en sens contraire du mouvement diurne, le même grand cercle
de la sphère céleste, incliné à l'équateur. Il parcourt ce cercle en_
366j 1/4 _sidéraux environ_ (_V_. la note)[43].

[Note 43: Ce mouvement se combine avec le mouvement diurne; le soleil
nous parait tourner autour de la terre, d'orient en occident, et en même
temps se mouvoir sur l'écliptique, mais beaucoup plus lentement, et
d'occident en orient.

Voici l'ingénieuse comparaison employée par M. Arago pour faire
comprendre comment le soleil peut être animé à la fois de ces deux
mouvements en apparence contraires. Un globe céleste (_fig_. 49) tourne
uniformément, d'orient en occident, autour d'un axe PP', achevant une
révolution en 24 heures sidérales; de sorte que chacun de ses cercles
horaires vient coïncider toutes les 24 heures avec un demi-cercle fixe
de même diamètre, représentant le méridien du lieu. Une mouche _s_
chemine en sens contraire (d'occident en orient), sur une circonférence
de grand cercle du globe, S'γS, avec une vitesse d'environ 1° par jour
sidéral. La mouche, tout en cheminant ainsi, est emportée par le
mouvement de rotation du globe; elle est donc animée de deux mouvements
à la fois, dont l'un lui est commun avec tous les points du globe, et
dont l'autre lui est propre. Si elle se trouve un jour sur le cercle
horaire P_s_'P', en _s_', quand ce cercle passe au méridien, elle le
quitte aussitôt pour se diriger vers le cercle P_s_''P' qu'elle atteint
au bout de 24 heures sidérales, au moment où le cercle P_s_'P' passe de
nouveau au méridien. Comme le globe tourne de l'est à l'ouest, la mouche
viendra bientôt passer au méridien, mais n'y passera qu'avec le cercle
P_s''_P' à peu près, c'est-à-dire environ 4 minutes plus tard que
P_s_'P', si l'intervalle des deux cercles P_s_''P', P_s_'P' est 1°. Elle
a déjà quitté le cercle P_s_''P', en continuant son chemin vers l'est,
quand celui-ci passe au méridien, et le lendemain elle y passe avec un
autre cercle horaire; etc.]

=117.= REMARQUE. Il est bon d'observer dès à présent qu'il s'agit ici, non
des _positions réelles_ successives du soleil par rapport à la terre,
mais de leurs _projections_ sur la sphère céleste, que déterminent
seules l'AR et la D du centre (n° 33). Ces coordonnées ne nous font pas
connaître la distance réelle du soleil à la terre; nous verrons plus
tard (n° 123) que cette distance variant d'un jour à l'autre, le lieu
des positions réelles du soleil par rapport à la terre, supposée fixe,
n'est pas une circonférence. Pour le moment, nous pouvons dire que la
projection sur la sphère céleste du centre du soleil (vu de la terre)
parcourt indéfiniment le même grand cercle incliné à l'équateur. Tel est
le sens précis de l'énoncé ci-dessus.

=118.= ÉCLIPTIQUE. On donne le nom d'_Écliptique_ au grand cercle que le
soleil nous semble ainsi parcourir indéfiniment sur la sphère céleste.
Ce nom vient de ce que les éclipses de soleil et de lune ont lieu quand
la lune est dans le plan de ce grand cercle, ou tout près de ce plan.

OBLIQUITÉ DE L'ÉCLIPTIQUE. L'écliptique est incliné sur l'équateur
d'environ 23°27'1/2(cette inclinaison varie dans certaines limites; au
1er janvier 1854 elle était 23°27'34"; au 1er juillet, 23°27'35",2).

On peut déterminer cette inclinaison par une construction faite sur le
globe céleste; c'est l'angle SγE (_fig_. 49) que l'on sait mesurer. Elle
peut d'ailleurs se trouver par l'observation; sa mesure, SE, est la plus
grande des inclinaisons trouvées pour le soleil durant sa révolution sur
l'écliptique.

=119.= POINTS ÉQUINOXIAUX. On appelle _équinoxes_ ou _points équinoxiaux_
les deux points, γ et ♎, de rencontre de l'équateur et de l'écliptique.
Le soleil est à l'un de ces points quand sa déclinaison est nulle; la
durée du jour est alors égale à celle de la nuit par toute la terre; de
là le nom d'équinoxes.

On distingue le _point équinoxial_ du printemps γ, qui est le point de
l'équateur où passe constamment le soleil quand il quitte l'hémisphère
austral pour l'hémisphère boréal. L'équinoxe du printemps a lieu du 20
au 21 mars.

L'autre point équinoxial, ♎, par où passe le soleil, quittant
l'hémisphère boréal pour l'hémisphère austral, s'appelle équinoxe
d'automne. Le soleil y passe le 21 septembre.

(V. plus loin, page 107, comment on détermine le moment précis de l'un
ou l'autre équinoxe.)

=120.= SOLSTICES. On nomme _solstices_ ou _points solstitiaux_ deux points
S, S', de l'écliptique, situés à 90° de chacun des équinoxes.

L'un d'eux, S, celui qui est situé sur l'hémisphère boréal, s'appelle
_solstice d'été_; l'autre, situé sur l'hémisphère austral, s'appelle
_solstice d'hiver_.

Ce nom de _solstice_ vient de ce que le soleil, arrivé à l'un ou à
l'autre de ces points, semble stationner pendant quelque temps à la même
hauteur, au-dessus ou au-dessous de l'équateur, sur le parallèle céleste
qui passe par ce solstice. Pendant quelques jours sa D, alors parvenue à
son maximum, est à peu près constante[44].

[Note 44: V. les tables de l'Annuaire du bureau des longitudes, ou bien
simplement les Tables des heures du lever et du coucher du soleil aux
environs du 21 juin ou du 21 décembre.]

Les parallèles célestes ST, S'T' (_fig._ 49) qui passent par les
solstices S et S' prennent le nom de _tropiques_.

Celui qui passe par le solstice d'été s'appelle _tropique du Cancer_.
Celui qui passe par le solstice d'hiver se nomme _tropique du
Capricorne_.

=121.= On appelle _colures_ deux cercles horaires perpendiculaires entre
eux, dont l'un passe par les équinoxes, et l'autre par les solstices (le
colure des équinoxes et le colure des solstices).

=122.= On appelle _axe_ de l'écliptique le diamètre, P(1)P'(1), de la
sphère céleste qui lui est perpendiculaire; ses extrémités P(1),
P'(1), sont les _pôles_ de l'écliptique. L'axe du monde et l'axe de
l'écliptique forment un angle égal à l'inclinaison de l'écliptique sur
l'équateur (nº 118); cet angle est mesuré par l'arc P(1)P qui sépare
les pôles voisins de l'écliptique et de l'équateur.

=123.= La position apparente du soleil, dans sa révolution sur
l'écliptique, passe au travers ou auprès d'un certain nombre de
constellations plus ou moins remarquables que l'on a appelées
zodiacales. Ces constellations se trouvent sur une zone de la sphère
céleste nommée _zodiaque_.

_Le zodiaque est une zone de la sphère céleste comprise entre deux plans
parallèles à l'écliptique, situés de part et d'autre de celui-ci, à une
même distance de _9°_ environ de ce plan; ce qui fait _18°_ environ pour
la largeur totale de la zone_.

On a divisé le zodiaque en douze parties égales qu'on a nommées
_signes_.

Pour cela on a partagé l'écliptique en douze arcs égaux à partir de
l'équinoxe du printemps ♈. Par chaque point de division, on conçoit un
arc de grand cercle perpendiculaire à l'écliptique, et limité aux deux
petits cercles qui terminent le zodiaque; de là douze quadrilatères dont
chacun est un signe.

Le soleil parcourt à peu près un signe par mois. A l'équinoxe du
printemps il entre dans le premier signe.

Chaque signe porte le nom d'une constellation qui s'y trouvait lors de
l'invention du zodiaque, il y a 2160 ans environ.

Voici les douze noms dans l'ordre des signes dont le premier, comme nous
l'avons dit, commence au point équinoxial du printemps ♈, les autres
venant après dans le sens du mouvement du soleil:

Bélier, Taureau, Gémeaux, Cancer, Lion, Vierge,
  ♈       ♉        ♊       ♋     ♌     ♍

Balance, Scorpion, Sagittaire, Capricorne, Verseau, Poissons.
  ♎        ♏          ♐          ♑         ♒        ♓

Les noms latins de ces constellations, mentionnées dans le même ordre
que ci-dessus, sont tous compris dans les deux vers latins suivants
attribués au poëte Ausone:

      _Sunt Aries, Taurus, Gemini, Cancer, Leo, Virgo,
      Libraque, Scorpius, Arcitenens, Caper, Amphora, Pisces._

Ces deux vers sont très-propres à graver dans la mémoire, et dans leur
ordre naturel, les noms des signes ou constellations du zodiaque.

Par suite d'un mouvement apparent de la sphère céleste considérée dans
son ensemble, et dont nous parlerons à propos de la précession des
équinoxes, chacune des constellations portant les noms ci-dessus ne se
trouve plus dans le signe de même nom qu'elle. Chacune d'elles a avancé
à peu près d'un signe dans le sens direct. Ainsi la constellation nommée
le Bélier, qui occupait primitivement le premier signe, se trouve
aujourd'hui dans le signe du Taureau; la constellation nommée le Taureau
se trouve dans le signe des Gémeaux; et ainsi de suite, en faisant le
tour, jusqu'à la constellation des Poissons, qui, au lieu du dernier
signe, occupe aujourd'hui le premier, celui qu'on nomme toujours le
Bélier.[45]

[Note 45: Pour éviter la confusion produite par ce défaut de
correspondance, qui s'aggrave de plus en plus, entre la position de
chaque constellation zodiacale et le signe qui porte son nom, les
astronomes ont pris tout simplement le parti d'abandonner cette division
de l'écliptique en douze parties égales, et de le diviser comme tout
autre cercle en 360 degrés, à partir de l'équinoxe du printemps.]

=124=. DIAMÈTRE APPARENT DU SOLEIL. On nomme _diamètre apparent_

[Illustration: 105, Fig. 51]

d'un astre quelconque l'angle _atb_ sous lequel le diamètre, _ab_, de
cet astre, est vu du centre de la terre (_fig._ 51).

La figure montre que si la distance _to_ d'un astre au centre de la
terre varie, son diamètre apparent varie en sens contraire de cette
distance; il diminue ou augmente suivant que cette distance augmente ou
diminue.

On reconnaît facilement que le diamètre apparent d'un astre, qui n'est
jamais qu'un petit angle, varie en raison inverse de la distance de cet
astre à la terre[46].

[Note 46: _ao_ = _ot_ · tg½_atb_ = ot' · tg½ _at'b_; (_fig._ 51); d'où
tg ½.atb: tg½.at'b = _ot'_ / _ot_; ou enfin parce que _atb, at'b_ sont
de petits angles, _atb_ / _at'b_ = _ot'_ / _ot_. Car on peut prendre le
rapport des angles au lieu du rapport des tangentes quand les angles
sont petits et très-peu différents l'un de l'autre.]

=125=. Nous allons indiquer, pour trouver le diamètre apparent du
soleil, deux méthodes qui conviennent pour la lune et pour un astre
quelconque.

1re MÉTHODE. On obtient le diamètre apparent du soleil en mesurant avec
le mural la distance zénithale de son bord supérieur et celle de son
bord inférieur; la différence de ces deux distances est évidemment le
diamètre apparent.

2e MÉTHODE. On remarque l'heure exacte à laquelle le premier, bord de
l'astre, le bord occidental vient passer au méridien; puis l'heure à
laquelle passe plus tard le dernier point du disque, le bord oriental;
on calcule la différence de ces deux nombres d'heures, puis on la
convertit en degrés, minutes, secondes, suivant la règle connue. Dans le
cas particulier où le soleil décrit l'équateur au moment de
l'observation, l'angle ainsi obtenu est le diamètre apparent. Pour toute
autre position du soleil, on multiplie le nombre de degrés ainsi trouvé
par le cosinus de la D du soleil[47].

[Note 47: Si, au moment de l'observation, le soleil est sur l'équateur,
comme cela arrive au moment de l'équinoxe, il est évident que la
différence des heures susdites est le temps que met à passer au méridien
l'arc d'équateur qui sépare les deux extrémités du diamètre du soleil
situé dans ce plan, et perpendiculaire à la ligne qui joint le centre de
l'astre au centre de la terre; cet arc mesure évidemment l'angle sous
lequel ce diamètre est vu du centre de la terre.

[Illustration: 106, Fig. 52]

Si le soleil n'est pas sur l'équateur, le nombre de degrés trouvé mesure
le diamètre apparent _acb_ du soleil, vu du centre _c_ du parallèle
céleste sur lequel se trouve cet astre au moment de l'observation (fig.
52). Pour déduire l'angle _atb_ de l'angle _acb_, on observe que le
diamètre apparent relatif au point _t_, ou l'angle _atb_, est au
diamètre apparent relatif au point _c_, angle _acb_, comme la distance
_oc_ est à _ot_. D'où _atb_ = _acb_ · _oc_/_ot_, > mais _oc_/_ot_ = sin
_cto_ = cos _ote_; or _ote_ est la D du centre _o_ du soleil; donc _atb_
= _acb_ · cos D.]

Il résulte de là que chaque observation faite pour trouver l'AR et la D
du soleil sert à déterminer le diamètre apparent de cet astre au moment
de cette observation.

Jusqu'à présent on n'a pu trouver de diamètre apparent aux étoiles;
l'angle sous lequel on les aperçoit est constamment nul aux yeux de
l'observateur muni des meilleurs instruments d'optique.

=126=. La détermination journalière du diamètre apparent du soleil donne
les résultats suivants:

Ce diamètre apparent atteint maintenant son maximum vers le 1er janvier;
ce maximum est de 32' 36'',2 = 1956'',2. A partir de ce jour, le
diamètre diminue constamment jusqu'à ce que, le 3 juillet à peu près, il
devienne égal à 31' 30'',3 = 1890'',3, qui est son minimum. Il
recommence ensuite à augmenter jusqu'à ce qu'il ait de nouveau atteint
son maximum; puis il diminue de nouveau, et ainsi de suite d'année en
année. Le diamètre apparent a donc une valeur moyenne d'environ 32'.

=127.= VARIATIONS DE LA DISTANCE DU SOLEIL À LA TERRE. Il résulte de ce
qui précède que là distance du soleil à la terre varie continuellement.
Vers le 1er janvier cet astre occupe sa position la plus rapprochée P
(_fig._ 53 ci-après), qu'on appelle le _périgée_. À partir du 1er
janvier, la distance augmente continuellement jusqu'à ce que, le 3
juillet, elle atteigne son maximum; la position A, occupée alors par le
soleil s'appelle l'_apogée_. De l'apogée au périgée, les distances
passent par les mêmes états de grandeur que du périgée à l'apogée; mais
ces distances se reproduisent en ordre inverse (_V._ plus loin la
symétrie de l'orbite solaire).

La distance réelle du soleil à la terre variant continuellement, c'est
donc avec raison que nous avons dit (nº 113) que la courbe des positions
réelles du soleil par rapport à la terre ne pouvait être une
circonférence dont celle-ci serait le centre.

=128.= Soient _l_ et _l'_ deux distances du centre du soleil au centre
de la terre, _d_ et _d'_ les diamètres apparents correspondants,
évalués, comme les trois précédemment cités, au moyen de la même unité,
en secondes par exemple, on a _l_ / _l'_ = _d'_ / _d_; d'où _l_ / _l'_ =
(1/d) / (1/d') (1)

En désignant par L et L' la plus grande et la plus petite des distances
du soleil à la terre, on aura d'après ce qui précède:

L/L' = (1/1890,3) / (1/1956,2) = 1956,2/1890,3 = 1,0348/1

Si donc L' est pris pour unité, on aura L = 1,0348.

La série des diamètres apparents, obtenus jour par jour donne ainsi une
série de nombres proportionnels aux distances réelles du soleil à la
terre.

Si donc, on veut représenter proportionnellement, à l'aide d'une
construction graphique, les distances réelles par des lignes _l_, _l'_,
_l"_, etc., on pourra prendre le premier jour une ligne arbitraire _l_
pour désigner la distance réelle de ce jour-là, correspondant au
diamètre apparent connu _d_; puis, en procédant par ordre, on construira
toutes les autres lignes _l'_, _l"_,..., d'après celle-là, comme
l'indique l'égalité (1) ci-dessus.

Nous pouvons maintenant nous occuper du lieu des positions réelles du
soleil par rapport à la terre supposée fixe.

=129=. ORBITE SOLAIRE. On appelle _orbite_ et quelquefois _trajectoire_
du soleil, la courbe que paraît décrire le centre du soleil autour de la
terre supposée fixe. Cette orbite ou trajectoire est une _courbe plane_,
tous ses points étant sur des rayons de l'écliptique (nº 113).

Voici comment on parvient, sans connaître aucune des distances réelles
de la terré au soleil, à déterminer néanmoins la nature de l'orbite
solaire.

On a devant soi un globe céleste (_fig._ 49) sur lequel on a marqué les
positions apparentes successives _s'_, _s"_, _s'''_... du soleil (nº
116, _fig._ 49), à la suite d'observations journalières d'AR et de D.
Admettons qu'en faisant ces observations d'AR et de D, on ait chaque
fois déterminé le diamètre apparent du soleil au moment de
l'observation. À l'aide des diamètres apparents, on peut construire des
lignes _l'_, _l"_,_l'''_..., proportionnelles aux distances réelles qui
séparent le soleil de la terre, quand le premier nous paraît sur
l'écliptique en _s'_, _s"_, _s'''_... (nº 124).

[Illustration: 108, Fig. 53.]

Cela posé, on reproduit l'écliptique sur un plan en y traçant un cercle
de rayon égal à celui du globe céleste; prenant sur ce cercle (_fig_.
53) un point quelconque _s'_ pour représenter une première position
apparente _s'_ du soleil, on rapporte sur la circonférence en question
les arcs _s' s"_, _s" s'''_... que l'on peut mesurer avec le compas sur
le globe céleste. On tire alors les rayons T_s'_, T_s"_, T_s'''_..., et
sur ces rayons, on prend les longueurs TS', TS", TS''', respectivement
égales aux lignes _l'_, _l"_, _l'''_... ci-dessus indiquées; ayant fait
cela pour toutes les positions du soleil marquées sur l'écliptique, on
joint par une ligne continue SS'S"..., les points ainsi marqués sur les
rayons de l'écliptique. La courbe ainsi obtenue est évidemment semblable
à celle que la _position réelle_ du soleil semble décrire dans l'espace
autour de la terre.

En faisant cette construction, on trouve que cette courbe est une
ellipse dont la terre occupe un des foyers. Cette ellipse est très-peu
excentrique, c'est-à-dire que la distance du centre au foyer est
très-petite relativement au grand axe de la courbe; elle en est à peine
la soixantième partie. Par conséquent, cette ellipse diffère très-peu
d'un cercle[48]. Aussi nous dirons:

_L'orbite du soleil, c'est-à-dire la courbe parcourue par la position
réelle du soleil dans son mouvement apparent de translation autour de la
terre supposée fixe est une ellipse très-peu allongée dont la terre
occupe un des foyers_[49].

[Note 48: Si _a_ désigne le grand axe, _c_ l'excentricité de l'ellipse,
la distance périgée _a_-_c_ = 1; puis _a_ + _c_ = 1,0348; d'où 2_a_ =
2,0348 et 2_c_ = 0,0348; on déduit de là la valeur de 2_b_ = racine
carrée de(a² - c²); on a ainsi des éléments suffisants pour construire
l'ellipse. Le rapport _c/a_ = 0,0348/2,0348 ou à peu près 1/60.]

[Note 49: Nous verrons plas tard que ce n'est pas le soleil qui tourne
autour de la terre, mais la terre qui tourne autour du soleil. Nous nous
conformons aux apparences _pour plus de commodité_; d'ailleurs les
conséquences _pratiques_ que l'on déduit du mouvement apparent du
soleil, ex.: les durées des jours et des nuits, les variations de la
température générale, etc., sont les mêmes que celles qu'on déduirait de
l'étude du mouvement réel de la terre. Car ces faits résultent des
positions relatives successives du soleil et de la terre, indépendamment
de la manière dont ces corps arrivent à ces positions relatives. Or
l'étude du mouvement propre apparent du soleil, considéré par rapport à
la terre supposée fixe, nous fait connaître exactement ces positions
relatives, une à une, et par ordre.

Plus précisément, les AR, les D, et les diamètres apparents observés
jour par jour, composent un tableau qui indique par des nombres les
positions relatives successives du soleil par rapport à la terre; la
construction de l'écliptique et de l'orbite solaire a pour objet la
représentation _graphique_ de chacune de ces positions relatives,
considérées les unes après les autres, indépendamment du mouvement des
deux corps; c'est la traduction du tableau en figure.]

Le grand axe AP de cette ellipse s'appelle _ligne des apsides_; P est le
_périgée_; A, l'_apogée_; les points correspondants _p_ et _a_ de
l'écliptique prennent quelquefois les mêmes noms. Chaque ligne TS' qui
va du centre de la terre à un point de l'orbite du soleil s'appelle un
rayon vecteur du soleil.

=130=. PRINCIPE DES AIRES. _Définition. L'aire décrite par le rayon
vecteur du soleil dans un temps déterminé quelconque est le secteur
elliptique, S'TS", compris entre l'arc d'ellipse_ S'S", _décrit dans cet
intervalle par le centre du soleil, et les deux rayons vecteurs_ T_s'_,
T_s", menés aux extrémités de cet arc_.

Si on évalue jour par jour, ou à des intervalles de temps égaux
quelconques, les aires correspondantes décrites par le rayon vecteur du
soleil, on trouve que ces aires sont égales.

Admettant que cet intervalle constant soit l'unité de temps, on conclut
de là très-facilement le principe suivant:

_Les aires décrites par le rayon vecteur du soleil dans son mouvement de
translation autour de la terre supposée fixe sont proportionnelles aux
temps employés à les parcourir_[50].

C'est là ce qu'on entend par la proportionnalité des aires au temps;
_c'est le principe des aires_.

=131=. VITESSE ANGULAIRE DU SOLEIL. On nomme _vitesse angulaire_ du
soleil, l'angle S'TS", des rayons vecteurs TS', TS", qui correspondent
au commencement et à la fin d'une unité de temps. Ou, ce qui revient au
même, la vitesse angulaire du soleil est l'arc d'écliptique, _s's"_,
décrit par la position apparente du soleil dans l'unité de temps. L'arc
_s's"_ mesure l'angle S'TS".

Par conséquent la comparaison des vitesses angulaires, aux différentes
époques du mouvement du soleil, revient à la comparaison des vitesses de
sa position apparente, _s_, sur l'écliptique. En comparant d'une part
les vitesses angulaires, et de l'autre les distances réelles, KÉPLER est
arrivé, par l'observation, à ce résultat général:

_La vitesse angulaire du soleil varie en raison inverse du carré de sa
distance réelle à la terre_.

Ce principe est une conséquence de celui des aires ou _vice versa_[51].

[Note 50: En effet soient _a_ l'aire décrite dans l'unité de temps, A
l'aire décrite dans _t_ unités de temps, A' l'aire décrite dans _t'_
unités; on a A = _a_ · _t_; A' = _a_ · _t'_; donc A / A' = _t_ / _t'_.]

[Note 51: Pour déduire ce second principe du premier, il suffit de
regarder chaque aire STS', décrite dans l'unité de temps, qui est aussi
petite que l'on veut, comme un secteur circulaire ayant pour rayon la
distance réelle TS au commencement de ce temps. Égalant deux aires ainsi
décrites à deux époques différentes, et traduisant l'égalité en celle de
deux rapports, on a le principe relatif aux vitesses angulaires, qui
sont représentées par les petits arcs, α, des secteurs circulaires en
question.

1/2a x (TS)² = 1/2 a(k) x (TS(k)); d'où a:α(k) = (TS(k))²/(TS)².]

=132=. La vitesse angulaire du soleil est donc à son maximum quand cet
astre est au périgée P (_fig._ 53) vers le 1er janvier; à partir de là,
elle décroît continuellement jusqu'à un minimum qu'elle atteint quand
l'astre arrive à l'apogée A, vers le 3 juillet. Puis cette vitesse
repassant exactement par les mêmes états de grandeur, mais dans l'ordre
inverse, augmente progressivement pour revenir à son maximum vers le 1er
janvier. Et ainsi de suite indéfiniment.

=133=. Résumé. On peut résumer ainsi ce que nous avons dit jusqu'à
présent sur le mouvement annuel apparent du soleil.

Ce mouvement s'accomplit dans une orbite plane dont le plan, qui passe
par le centre de la terre, se nomme le plan de l'écliptique; cette
orbite se projette sur la sphère céleste suivant le grand cercle de ce
nom; néanmoins cette orbite elle-même n'est pas circulaire, mais
elliptique; la terre en occupe le foyer et non le centre. L'excentricité
de cette ellipse est à peu près 1/60, en prenant pour unité la moitié du
grand axe de l'ellipse. Le mouvement du soleil sur cette ellipse est
réglé de telle sorte que son rayon vecteur décrit des aires égales en
temps égaux.

=134=. ORIGINE DES ASCENSIONS DROITES. Ainsi que nous l'avons dit nº 33;
le point choisi pour origine des ascensions droites de tous les astres
est le point équinoxial du printemps, le point ♈ (_fig._49)[52].

[Note 52: Voici le motif de ce choix. Il y a deux systèmes de
coordonnées célestes principalement usités en astronomie: 1º
l'_ascension droite_ et la _déclinaison_ qui se rapportent à l'équateur
céleste et à son axe (n° 36); 2º la _longitude_ et la _latitude
célestes_ qui se rapportent exactement de même à l'écliptique et à son
axe. Les premières obtenues par l'observation servent à calculer les
secondes; or ce calcul _fréquent_ est beaucoup simplifié par le choix
d'une origine commune aux ascensions droites et aux longitudes célestes;
c'est pourquoi on a pris pour origine l'un des points communs à
l'équateur et à l'écliptique.]

ORIGINE DU JOUR SIDÉRAL. C'est le moment où le point équinoxial passe au
méridien du lieu (V. le nº 78). Si l'horloge sidérale d'un lieu est
réglée de manière à marquer 0h 0m 0s à l'instant où le point équinoxial
passe au méridien d'un lieu, on peut y déterminer les AR des astres de
la manière indiquée nº 34. Mais le point équinoxial n'est pas visible
sur la sphère céleste; aucune étoile remarquable ne se trouve sur le
cercle horaire de ce point; cependant il est facile de régler une
horloge exacte de manière qu'elle remplisse la condition précédente.

[Illustration: 112, Fig. 50.]

=135=. DÉTERMINER LE MOMENT PRÉCIS D'UN ÉQUINOXE. RÉGLER UNE HORLOGE
SIDÉRALE SUR LE PASSAGE AU MÉRIDIEN DU POINT ÉQUINOXIAL. On observe les
passages successifs du soleil au méridien du lieu quand la déclinaison
décroissante est très-faible et voisine de 0°. On s'aperçoit que le
soleil a traversé l'équateur quand, d'un jour à l'autre, la déclinaison,
d'australe qu'elle était, est devenue boréale, et _vice versa_. Par
exemple, le 20 mars d'une certaine année, à 0h 53m 24s de l'horloge
sidérale, cette déclinaison _sd_ (_fig_. 50), observée au _mural_, est
9' 28" _australe_. Le lendemain, à 0h 57m 22s, cette déclinaison _s'd'_
est 14' 18" _boréale_. Le soleil a donc, dans l'intervalle, traversé
l'équateur au point équinoxial A.

Il s'agit de savoir 1º _à quelle heure de l'horloge le soleil a passé
en_ A; 2º _à quelle heure le point équinoxial_ A _passe journellement au
méridien du lieu_.

1re _Question_. L'heure cherchée est celle à laquelle la déclinaison
décroissante s'est trouvée réduite de 9' 28" à 0°. En un jour solaire
égal, d'après les heures ci-dessus indiquées, à 24h 3m 58s, temps
sidéral, la déclinaison du soleil a varié de 9' 28" + 14' 28",
c'est-à-dire de 23' 46"; dans quel temps a-t-elle varié de 9' 28"? On
peut supposer, sans erreur sensible, que pendant un jour la déclinaison
varie proportionnellement au temps.

Cela posé, on a évidemment:

_x_/24h 3m 58s = 9' 28"/23' 46" = 568"/1426" = 568/1426

Tout calcul fait, on trouve _x_ = 9h 35m 9s. Le soleil a passé au point
A, 9h 35m 9s après l'observation faite le 20 mars, c'est-à-dire à 10h
28m 33s de l'horloge sidérale.

2e _Question_. Le soleil, avec le point _d_ de l'équateur, a traversé le
méridien le 20 mars à 0h 53m 24s de l'horloge; le lendemain, avec _d'_,
il a passé à 0h 57m 22s. La différence, 3m 58s, de ces deux heures est
due à la différence _dd'_ des ascensions droites des points _d_ et _d'_:
pour le point A, il faut avoir égard à la différence _d_A. Soit _y_ la
différence entre les heures de passage de _d_ et de A, on a évidemment:

       _y_         _d_A       _d_>A              _sd_
     -------    =  -----  = ------------   = ---------------,
      3m 58s       _dd'_    _d_A + A_d'_      _sd_ + _s'd'_

        _y_        9' 28"    568"    568
ou    -------   = ------- = ----- = ----.
      3m 58s      23' 46"   1426" = 1426

Tout calcul fait, _y_ = 1m 34s. On conclut de là que le point A passe au
méridien à 0h 53m 24s + 1m 34s, c'est-à-dire à 0h 54m 58s de l'horloge
sidérale. Celle-ci réglée sur ce passage devrait marquer 0h 0m 0s à cet
instant; elle est donc en avance de 0h 54m 58s. Pour la régler, on doit
la retarder de ces 54m 58s.

Dans l'hypothèse où nous nous sommes placé, les ascensions droites
déterminées à l'aide de l'horloge sont donc trop fortes de ce qu'on
obtient en convertissant 54m 28s en degrés, à raison de 15° par heure.
En effet, ces ascensions droites sont comptées à partir d'un point de
l'équateur distant, vers l'ouest, du point équinoxial A, de ce nombre de
degrés.

=136.= L'horloge étant réglée sur le passage du point équinoxial ♈, on
peut déterminer l'heure du passage d'une étoile remarquable, voisine du
cercle horaire de ce point ♈, α d'Andromède par exemple, et en déduire
l'AR de cette étoile. Cette heure ou cette AR sert à vérifier plus tard
l'exactitude de l'horloge, ou bien à déterminer les AR en général, α
d'Andromède servant d'origine auxiliaire.

=137.= VARIATIONS DE L'ASCENSION DROITE DU SOLEIL. L'origine des AR est
la même pour le soleil que pour les étoiles. _Ainsi l'ascension droite
du soleil, à un moment donné quelconque, est l'arc d'équateur céleste
compris entre le point équinoxial ♈ et le cercle horaire qui passe par
le centre de l'astre, cet arc étant compté d'Occident en Orient, à
partir de ♈._ Nous avons dit (nº 113) comment on détermine cette
coordonnée.

=138.= Par suite du mouvement propre du soleil, son ascension droite
varie continuellement, mais elle ne varie pas proportionnellement au
temps, autrement dit, _elle n'augmente pas de quantités égales en temps
égaux_.

C'est un fait constaté par les observations indiquées nº 115.
Connaissant les heures sidérales d'une série de passages consécutifs du
soleil au méridien, et les AR correspondantes, il est facile de
comparer, d'une part, les accroissements d'AR survenus jour par jour, et
de l'autre, les temps durant lesquels ces accroissements se sont
produits; on trouve des rapports inégaux.

Ce fait peut s'expliquer comme il suit:

L'accroissement _a'a"_ d'AR du soleil (_fig._ 49), durant un temps
quelconque, correspond au chemin _s's"_ que la position apparente du
soleil fait sur l'écliptique pendant le même temps; _a'a"_ est la
projection de _s's"_ sur l'équateur. La grandeur de _a'a"_ dépend à la
fois de la grandeur de _s's"_ et de sa position sur l'écliptique.

[Illustration: page 114, fig. 49]

Or, 1º nous avons vu que les chemins parcourus sur l'écliptique par le
soleil en temps égaux ne sont pas égaux, mais varient en raison inverse
des carrés des distances du soleil à la terre (_V._ le nº 127).

2º _A cause de l'inclinaison de l'écliptique sur l'équateur_, quand même
les arcs _s's"_ seraient égaux, leurs projections _a'a"_ ne le seraient
pas nécessairement. Il suffit, en effet, de jeter les yeux sur la figure
49 pour voir que la projection d'un arc situé tout près de l'équateur
est moindre que l'arc projeté, tandis que le contraire a lieu près des
solstices; la grandeur de la projection dépend de l'inclinaison sur
l'équateur des arcs projetés, _s's"_, _s"s‴_, _s‴s""_, etc., et surtout
de ce que les arcs P_a'_, P_a"_,... qui les projettent, s'écartent de
plus en plus à mesure qu'on descend des pôles vers l'équateur.

Les deux causes d'inégalité que nous venons d'indiquer, tantôt
s'accordent pour augmenter ou pour diminuer l'accroissement d'AR durant
l'unité de temps, tantôt se contrarient; mais nous n'étudierons pas
leurs effets en détail[53].

[Note 53: La série d'observations indiquée nº 115 fait connaître, jour
par jour, l'arc _s's"_, sa projection et la durée du jour solaire; cela
suffit grandement pour qu'on puisse apprécier les effets des causes
susdites durant le mouvement annuel du soleil.]

MESURE DU TEMPS.

=139.= Le double mouvement relatif du soleil a la plus grande influence
sur les travaux de l'homme. En effet, le mouvement diurne produit les
alternatives des journées et des nuits; le mouvement annuel de
translation sur l'écliptique influe périodiquement, ainsi que nous
l'expliquerons plus tard, sur la durée des journées et des nuits, et sur
la température générale de chaque lieu de la terre; par suite, sur les
productions du sol et les travaux des champs. L'homme a donc été conduit
naturellement à régler ses occupations sur la durée et les circonstances
de ces deux mouvements. De là deux unités principales pour la mesure du
temps, _le jour et l'année_, dont nous allons nous occuper
successivement.

=140.= JOUR SOLAIRE. On appelle _jour solaire_ la durée d'une révolution
diurne du soleil, autrement dit, le temps qui s'écoule entre deux
passages consécutifs du soleil au même méridien.

_L'année tropique_ est le temps qui s'écoule entre deux retours
consécutifs du soleil au même point équinoxial.

Une année tropique = 365,2422 jours solaires = 366,2422 jours sidéraux
(V. nº 155).

=141.= _Le jour solaire est plus grand que le jour sidéral._ Cela
résulte du mouvement propre du soleil. Admettons en effet que cet astre
passe un jour au méridien en même temps qu'une certaine étoile de
P_s'_P' (fig. 49). Après un jour sidéral écoulé, quand l'étoile _e_
passe de nouveau au méridien avec son cercle horaire P_s'_P', le soleil,
par l'effet de son mouvement propre, se trouve sur un cercle horaire
plus _oriental_ P_s"_P'; il ne passe donc au méridien qu'un certain
temps après l'étoile (4 minutes environ); ce temps est précisément
l'excès du jour solaire sur le jour sidéral.

=142.= _Les jours solaires consécutifs sont inégaux._ C'est ce que nous
apprennent les observations de passages indiquées nº 115. On connaît les
heures sidérales d'un grand nombre de passages consécutifs du soleil au
méridien; en retranchant chaque heure de la suivante, on obtient l'excès
de chaque jour solaire sur le jour sidéral; or les restes ainsi obtenus
ne sont pas égaux.

=143.= _Les jours solaires sont inégaux parce que l'AR ne varie pas de
quantités égales en temps égaux._

L'accroissement d'AR est _a'a"_ (_fig._ 49). Si cet accroissement était
proportionnel au temps, l'arc _a'a"_ aurait toujours la même grandeur
après un jour sidéral écoulé quelconque; le retard du soleil sur
l'étoile _e_ étant toujours le même, le jour solaire égal à un jour
sidéral plus une quantité constante serait toujours le même.

Les 365,2422 jours solaires de l'année tropique forment une période
complète qui recommence indéfiniment à chaque nouvel équinoxe du
printemps[54]. En prenant la moyenne valeur d'un de ces 365,2422 jours
solaires, on a donc la moyenne valeur du jour solaire considéré en
général.

[Note 54: L'année tropique n'est pas rigoureusement constante; mais ses
variations sont si petites que nous nous abstenons d'en tenir compte;
n'ayant aucun intérêt, même éloigné, à nous en occuper.]

Puisque 365,2422 jours solaires valent 366,2422 jours sidéraux, _le jour
solaire moyen vaut_ 366,2422j. sid. /365,2422 = 1j. sid.,002729 = 1j.
sid. 3m 56s,5.

=144.= TEMPS MOYEN. L'inégalité des jours solaires a été longtemps un
grand inconvénient pour la mesure du temps civil par la durée de
certains mouvements mécaniques uniformes, comme ceux des horloges et des
montres, qui ne peuvent mesurer que des jours consécutifs égaux.

Il y a bien le jour sidéral; mais comme c'est sur la marche du soleil,
sur la durée du jour et des nuits, que l'homme règle ses occupations les
plus ordinaires, _il faut évidemment que la durée, l'origine, et par
suite les diverses périodes du jour, indiquées par les horloges et les
montres, s'écartent le moins possible, _en tout temps_, de la durée, de
l'origine et des périodes correspondantes du jour solaire vrai_.

Or le _jour sidéral_, trop différent du jour solaire, a l'inconvénient
grave de commencer successivement, quoi qu'on fasse, à tous les moments,
soit de la journée, soit de la nuit[55a].

Voici comment on est parvenu à remplir d'une manière satisfaisante les
conditions qui précèdent.

On a imaginé un premier soleil fictif (un point mobile), S', se trouvant
au périgée en même temps que le soleil vrai S, et décrivant l'écliptique
dans le même sens et dans le même temps que celui-ci, mais d'un
mouvement uniforme avec une vitesse constante précisément égale à la
vitesse angulaire moyenne de S, qui est très-approximativement
(360°/365,2422)=59'8",3 par jour solaire moyen[55b]. Le mouvement en AR
de ce soleil fictif S' est affranchi de la première des causes
d'irrégularité qui affectent celui du soleil vrai (nº 138, 1º);
cependant ce mouvement n'est pas encore uniforme à cause de l'obliquité
de l'écliptique (nº 138, 2º).

[Note 55ab: Voici quelques considérations élémentaires à propos du choix
de l'unité de temps et de la manière de régler les horloges.

En considérant les durées de tous les jours solaires de l'année
tropique, on trouve que la différence entre le jour le plus long et le
jour le plus court est d'environ 50 secondes; l'unité du temps civil
doit évidemment être prise entre ces deux limites. Cette condition
exclut immédiatement _le jour sidéral_.

Il est naturel de choisir la moyenne de ces durées extrêmes qui est la
durée dont s'écartent le moins les jours solaires _considérés en
général_. De plus, les jours solaires forment une période complète qui
se répète indéfiniment.

C'est en effet cette moyenne valeur qui, sous le nom de _jour solaire
moyen_, a été adoptée comme unité de temps. Les horloges et les montres
sont aujourd'hui construites et réglées d'après la durée du jour solaire
moyen; le temps qu'elles mesurent s'appelle _le temps moyen_.

Ces horloges construites, il faut les mettre à l'heure de manière à
remplir les autres conditions ci-dessus indiquées. Pour cela, il est
naturel d'établir une première coïncidence entre le temps moyen (l'heure
de l'horloge) et le temps solaire vrai; de plus, on doit choisir
l'époque de cette coïncidence de manière que l'écart qu'on ne peut
empêcher de se produire entre ces deux temps soit restreint dans ses
moindres limites. Pour peu qu'on réfléchisse aux propriétés de la
moyenne valeur, on voit que ce qui convient le mieux est d'établir cette
coïncidence à l'époque où le jour solaire vrai est à son maximum. Cette
condition est, en effet, réalisée dans la combinaison adoptée pour
rattacher le temps moyen au temps solaire vrai, que nous exposons dans
le texte.]

On a donc imaginé un second soleil fictif S", se trouvant au point
équinoxial γ en même temps que le premier S', et parcourant l'équateur,
aussi d'occident en orient, d'un mouvement propre uniforme, avec la même
vitesse constante ci-dessus indiquée de 360°/365,2422 par jour solaire
moyen; c'est là un mouvement régulier en AR[56]. L'accroissement de l'AR
de ce soleil fictif S" étant constant, et précisément égal à la moyenne
des accroissements journaliers de l'AR du soleil vrai, le jour solaire
de ce soleil fictif S", que l'on suppose participer au mouvement diurne
comme S et S', est constant (143), et précisément égal à la moyenne
valeur des jours solaires, c'est-à-dire, au _jour solaire moyen_.

[Note 56: Il s'en faut de 50",1 que la position apparente du soleil vrai
parcoure les 360° de l'écliptique en une année tropique (V. la
précession des équinoxes). Nous faisons ici et ailleurs abstraction de
ces 50" qui influent très-peu sur la valeur moyenne susdite. En la
considérant, nous compliquerions peu utilement ce que nous avons à dire
sur le jour et le temps moyens.]

C'est sur la marche de ce soleil fictif S", qu'on appelle _soleil
moyen_, que se règlent aujourd'hui les horloges et les montres.

=145=. L'unité de temps civil est le _jour solaire moyen_. Le jour se
compose de 24 heures, l'heure de 60 minutes, et la minute de 60
secondes.

Il est midi moyen, ou simplement midi en un lieu, quand le _soleil
moyen_ passe au méridien de ce lieu; il est minuit moyen quand il passe
au méridien opposé.

Le jour civil commence à minuit moyen; on compte de 0 à 12 h., de minuit
à midi; puis on recommence de midi à minuit.

Les astronomes font commencer le jour moyen à midi moyen, et comptent de
0 à 24 heures d'un midi à l'autre[57].

[Note 57: La convention relative à l'origine de chaque jour civil _d'une
date donnée_, aux lieux de diverses longitudes, est la même que celle
qui a été indiquée nº 78, à propos du jour sidéral (le soleil moyen
remplaçant l'étoile).]

Le temps ainsi mesuré (sur la marche du soleil moyen) s'appelle _temps
moyen_.

On appelle _temps solaire vrai_, le temps mesuré sur la marche du soleil
vrai (S).

Il est _midi vrai_ quand le soleil vrai passe au méridien du lieu; il
est minuit vrai quand il passe au méridien opposé. Les astronomes font
commencer chaque jour vrai à midi vrai; nous avons dit que les jours
vrais sont inégaux.

=146=. Les horloges et les montres marquent aujourd'hui le temps moyen;
l'aiguille des heures fait le tour du cadran en un demi-jour moyen;
celle des minutes en une heure moyenne; celle des secondes en une minute
moyenne[58].

[Note 58: Ce n'est qu'en 1816 qu'on a commencé à les régler ainsi;
auparavant on les réglait sur le midi vrai. Il y a maintenant une foule
de circonstances dans la vie ordinaire qui nécessitent absolument une
régularité parfaite dans la marche des horloges; nous ne citerons que le
service des chemins de fer.]

Chacun de ces instruments est mis à l'heure de manière à marquer 0h 0m
0s à _midi moyen_. Cette condition une fois remplie, l'horloge bien
construite et bien réglée marche indéfiniment d'accord avec le soleil
moyen, et doit marquer 0h 0m 0s à chacun des midis moyens suivants.

Les astronomes connaissent les lois du mouvement du soleil vrai; ils
peuvent calculer à l'avance en temps moyen, et à partir d'une époque
donnée quelconque, l'instant précis du midi vrai pour un nombre illimité
de jours solaires; ils connaissent l'AR du soleil S à chacun de ces
midis. D'un autre côté, en partant du moment connu d'un passage de S et
de S' au périgée, ils peuvent, par de simples multiplications (à cause
de l'uniformité du mouvement de S'), connaître les positions successives
de S' sur l'écliptique, à une époque donnée quelconque, par ex.: à
chaque midi vrai. Mais la distance de S' au point équinoxial ♈, comptée
sur l'écliptique d'occident en orient (sa longitude céleste), est
précisément l'AR du soleil moyen S". On peut donc comparer l'AR de S" à
celle de S aux mêmes époques, à chaque midi vrai par exemple[59]: La
différence de ces AR est la distance angulaire qui sépare, à midi vrai,
le cercle horaire de S" du méridien du lieu, que S rencontre en ce
moment; cette différence convertie en temps moyen, à raison d'une heure
moyenne pour 15°, est précisément le temps dont le midi moyen suit ou
précède le midi vrai (uniformité du mouvement en AR du soleil moyen). Si
le midi moyen précède un certain jour le midi vrai de 7m 15s, il est
déjà 7m 15s, temps moyen, quand le midi vrai arrive; les horloges
réglées sur le soleil moyen doivent marquer 7m 15s à midi vrai de ce
jour. Si le midi moyen suit le midi vrai de 5m 40s, il n'est encore que
11h 54m 20s, temps moyen, à midi vrai, et les horloges doivent marquer
cette heure-là à midi vrai de ce jour.

Le calcul du temps moyen au midi vrai est fait à l'avance pour tous les
jours de chaque année civile; les résultats en sont publiés à l'avance
pour l'usage que nous allons indiquer.

[Note 59: Quand les AR du soleil vrai et du soleil moyen S" coïncident,
le temps moyen (des horloges) et le temps solaire vrai coïncident. Une
de ces coïncidences a lieu vers le 25 décembre, _à l'époque des plus
longs jours solaires_. On peut suivre sur un globe les mouvements des
trois soleils, et les comparer comme il suit:

[Illustration: 120, Fig. 54]

_Mouvements comparés de S et S'_. Les deux astres sont ensemble au
périgée P (_fig._ 54); la vitesse de S, alors à son maximum, étant plus
grande que celle de S', S prend l'avance, et l'écart des deux astres
augmente de plus en plus jusqu'à ce que la vitesse décroissante de S
soit arrivée à la valeur moyenne, 59' 8",3; à partir de ce moment, S'
allant plus vite que S s'en rapproche de plus en plus, et le rejoint à
l'apogée A. La vitesse de S' surpassant toujours celle de S, qui est
alors à son minimum, S' prend l'avance; l'écart des deux soleils
augmente jusqu'à ce que S ait atteint de nouveau la vitesse moyenne 59'
8",3; alors, il se rapproche de S' qu'il rejoint au périgée P. Puis les
mêmes circonstances se reproduisent indéfiniment.

_Mouvements de S' et S"_. Ces deux astres sont ensemble au point
équinoxial ♈; les vitesses de leurs mouvements uniformes étant les
mêmes, ils parcourent un quadrant dans le même temps, l'un sur
l'écliptique, l'autre sur l'équateur; de sorte qu'ils se trouvent quatre
fois dans l'année sur le même cercle horaire; sur P♈P', PSP', P♎P', et
PS'P'; autrement dit, quand S' passe aux deux équinoxes et aux
solstices, S" rencontre S' ou sa projection sur l'équateur.

_Mouvements de_ S _et_ S". Ce que nous devons comparer ici, c'est le
mouvement de la projection _s_ de S sur l'équateur, et le mouvement de
S"; quand _s_ et S" se rencontrent, les deux soleils passent ensemble au
méridien; quand _s_ est en avance, S se trouvant sur un cercle horaire
plus oriental que S", passe au méridien plus tard que S"; quand _s_ est
en arrière, c'est le contraire. Cela posé, rappelons-nous que S' et S"
étant ensemble au solstice d'hiver, S, qui ne doit rejoindre S' qu'au
périgée, est en arrière de ce solstice. Mais la projection _s'_ de S',
allant du solstice au périgée P, prend l'avance sur S"; car près des
solstices la vitesse de cette projection _s'_ est à son maximum. Il
résulte de là que la projection _s_, qui rejoint _s'_ en même temps que
S rejoint S' au périgée, rencontre auparavant S"; S et S" se rencontrent
donc ainsi sur le même cercle horaire entre le solstice d'hiver (31
décembre) et l'arrivée du soleil vrai au périgée (1er janvier); c'est ce
que nous voulions montrer. On peut continuer de la même manière l'étude
de ces mouvements.]

=147=. METTRE UNE HORLOGE OU UNE MONTRE À L'HEURE OU VÉRIFIER SON
EXACTITUDE. Il y a chaque année dans le calendrier de la connaissance
des temps ou de l'Annuaire du bureau des longitudes de France une
colonne intitulée: _Temps moyen au midi vrai_, indiquant vis-à-vis de
chaque jour de l'année le temps que doit marquer ce jour-là, à midi
vrai, une horloge réglée sur le soleil moyen.

On se sert de ce tableau pour mettre à l'heure et vérifier les horloges
et les montres qui doivent marquer le temps moyen. Pour cela on
détermine, par l'observation d'un passage du soleil vrai au méridien,
l'instant précis du midi vrai; à ce moment l'horloge doit marquer
exactement le temps moyen au midi vrai indiqué sur le tableau pour le
jour où l'on est[60].

[Note 60: On peut encore régler une horloge ou une montre suivant le
temps moyen par l'observation des étoiles en se fondant sur ceci: 1j.
sidéral = 1j. moyen - 3m 55s,9. Lors du passage d'une étoile,
l'horloge doit marquer 3m 55s,9 de moins qu'au passage précédent.]

En parcourant ce tableau dans l'Annuaire on verra que chaque année le
soleil vrai et le soleil moyen se trouvent quatre fois sur le même
cercle horaire; à ces moments leurs AR sont les mêmes, le midi moyen et
le midi vrai des 4 jours où cela arrive coïncident ou à peu près. (V.
sur l'Annuaire, le 15 avril, le 15 juin, le 31 août et le 25 décembre;
vérifiez de même la note ci-dessous)[61].

=148=. ÉQUATION DU TEMPS. On appelle _équation du temps_ à un moment
quelconque ce qu'il faut ajouter au temps vrai, ou ce qu'il en faut
retrancher pour avoir le temps moyen. Cette différence s'écrit avec le
signe + ou avec le signe-, suivant celui des deux cas qui se présente.

L'équation du temps au midi vrai de chaque jour est donnée par le
tableau dont nous avons parlé tout à l'heure.

C'est l'heure indiquée dans ce tableau quand le midi moyen précède le
midi vrai (signe +); c'est 12 heures moins l'heure indiquée dans le cas
contraire (signe -)[62].

[Note 61: Le temps moyen au midi vrai a été 14m 33s le 23 février 1854;
c'est la plus grande avance possible dans le cours de cette année des
horloges sur le soleil vrai. Le 3 novembre 1854, le temps moyen au midi
vrai est 11h 43m 42s; les horloges retardent ce jour-là de 16m 18s sur
le soleil vrai; c'est le plus grand retard possible des horloges sur le
soleil vrai dans le cours de cette année. Le plus grand excès du jour
solaire sur le jour moyen est 30 à 31 secondes vers le 25 décembre; son
plus grand écart en moins est de 17 à 18 secondes en mars.]

[Note 62: On appelle aussi _équation du temps_, et c'est même la
définition astronomique, ce qu'il faut ajouter à l'AR du soleil moyen
pour avoir l'AR du soleil vrai. Soient _n_ la valeur moyenne de
l'accroissement d'AR dans l'unité de temps, _t_ le nombre de ces unités
écoulées depuis que le soleil moyen a passé au point équinoxial; l'AR du
soleil moyen est _nt_ et celle du soleil vrai:

A = _nt_ + _e_.

Cette quantité _e_, qui varie irrégulièrement, est l'équation du temps;
elle peut avoir le signe + ou le signe -.]


APPLICATION. _Un phénomène est arrivé le_ 9 _mars_ 1854 _à_ 8h 43m 17s
_du soir, temps vrai; on demande l'heure en temps moyen._

On trouve que le 9 mars 1854 le temps moyen au midi vrai est 0h 10m 48s,
et le lendemain 0h 10m 32s; la différence en moins est donc 16s.
L'équation du temps, variant de 16s en 24h, varie proportionnellement en
8h 54m 8s. On réduit 24h et 8h 54m 8s en secondes, ce qui donne 86400s
et 32048s; on écrit l'égalité 86400 / 32048 = 16 / _x_; d'où _x_ = 5s,9.
On retranche 5s,9 de 0h 10m 48s; le reste, 10m 42s,1, ajouté à l'heure
vraie, 8h 43m 17s, donne 8h 53m 59s,1 pour l'heure cherchée en temps
moyen.

On conçoit l'utilité de l'équation du temps; d'abord elle sert à régler
les horloges et les montres. Ensuite le temps vrai est celui qu'on
détermine en mer par exemple par les observations astronomiques, et le
temps moyen est celui que marquent les instruments dont on est muni.

=149=. REMARQUE. On considère donc en astronomie trois espèces de temps:
le temps sidéral, le temps solaire vrai et le temps solaire moyen.

Quelle que soit la manière d'évaluer le temps, l'heure exprimée est
particulière à chaque lieu de la terre; elle change évidemment avec le
méridien. On dit par exemple: il est telle heure en temps sidéral, en
temps vrai, ou en temps moyen de Paris.

DES CADRANS SOLAIRES.

[Illustration: 122, Fig.56]

=150=. Un _cadran solaire_ est un instrument qui, exposé au soleil, doit
indiquer le _temps vrai_. Il se compose essentiellement d'une _table
plane_ MN (_fig._ 56), qui peut avoir diverses positions, et d'une tige
ou arête rectiligne rigide, AB, nommée _style_, _toujours_ parallèle à
l'axe du monde, autrement dit, à l'axe de rotation de la terre.

Quand le soleil donne sur un cadran, la direction BC de l'ombre portée
par le style AB sur la table MN est évidemment la trace, sur cette
table, du plan SAB qui passe par le style et par la position, S, que le
soleil occupe en ce moment.

[Illustration: 123, Fig.57]

=151=. Cela posé, pour bien comprendre l'usage et la construction d'un
cadran quelconque, imaginons l'espace où nous sommes circonscrit par une
sphère immense, ayant son centre sur le style, qui, prolongé, la
rencontre aux deux pôles P et P' (nous n'avons figuré à dessein que la
partie de la sphère qui est au-dessus du cadran). Cette sphère est la
sphère céleste dont le soleil fait le tour dans les vingt-quatre heures
du jour solaire. Imaginons maintenant tracés sur cette sphère (_fig_.
57) vingt-quatre cercles horaires équidistants PCB, PC 1B, PC 2B,...
dont l'un PCB et son opposé P(XII)B coïncident avec le _plan méridien_
du lieu. Ces divers cercles horaires, qui passent tous par la direction
BP du style et coupent le plan de la table suivant les lignes CB(XII),
C1(I), C2B(II),... gravées sur cette table, correspondent aux 24 heures
du jour solaire. Un certain jour, le soleil arrive au méridien en S, sur
le cercle horaire PCB, du côté sud; l'ombre portée par le style AB a en
ce moment la direction B(XII) (le nº XII indique XII heures). A une
heure vraie après midi, le soleil arrive en S sur le cercle horaire PC
1B et l'ombre portée à la direction B(I) (I heure); à deux heures, le
soleil arrive en S sur le cercle PC2B, et l'ombre portée à la direction
B(II) (II heures); et ainsi de suite, le soleil faisant le tour de la
sphère céleste, rencontre d'heure en heure les autres cercles horaires
dont les traces B(III), B(IV), etc.,... reçoivent successivement l'ombre
du style pendant tout le temps que le soleil donne sur le cadran. Le
lendemain, à midi vrai, le soleil est revenu au cercle horaire méridien
PCB, plus haut ou plus bas que S, mais l'ombre portée a toujours la
direction B(XII); à une heure, il se trouve encore sur le cercle PC 1B,
et l'ombre portée a encore la direction B(I), et ainsi de suite
_indéfiniment_.

Si donc les traces B(XII), B(I), B(II), des cercles horaires indiqués
sont gravées sur la table du cadran, on saura qu'il est midi quand
l'ombre du style a la direction marquée (XII) à l'extrémité, qu'il est
une heure quand elle a la direction marquée (I), etc.

=152=. Construire un cadran revient donc à graver sur une table la trace
bien connue de chacun des vingt-quatre plans horaires, du côté où doit
porter l'ombre, c'est-à-dire du côté opposé à la position correspondante
du soleil, puis à fixer le style de manière qu'il soit parallèle à l'axe
du monde.

=153=. On distingue plusieurs espèces de cadrans solaires, suivant la
disposition de la table:

1° Le cadran _équinoxial_, dont la table est parallèle à l'équateur
céleste; c'est-à-dire perpendiculaire à l'axe de rotation de la terre;

2° Le cadran _horizontal_, dont la table est horizontale;

3° Le cadran _vertical méridional_, dont la table est verticale et
perpendiculaire à la _méridienne_ du lieu;

4° Le cadran _vertical déclinant_, dont la table est verticale, mais
dans une situation d'ailleurs quelconque, non perpendiculaire à la
méridienne.

=154=. CADRAN ÉQUINOXIAL. On peut regarder le plan de la table comme
celui de l'équateur céleste dont le pied du style serait le centre. Si
donc on trace une circonférence ayant ce pied O pour centre et un rayon
quelconque O(XII), cette circonférence sera concentrique avec celle de
l'équateur céleste, et les traces des 24 plans horaires qui, à partir de
l'extrémité nord de la méridienne, divisent l'équateur céleste en 24
arcs égaux, diviseront également la circonférence que l'on vient de
tracer en 24 arcs égaux. De là cette construction:

[Illustration: 124, Fig. 59]

_Construction du cadran équinoxial_ (_fig_. 59). On trace une
circonférence du centre O avec un rayon quelconque; on tire un premier
rayon O(XII), qui doit, le cadran une fois posé et orienté, coïncider
avec la trace du méridien du lieu sur la table. À partir du point (XII),
on divise la circonférence en 24 parties égales; on mène des rayons aux
points de la demi-circonférence dont le point (XII) est le milieu, comme
il est indiqué sur la figure, et de plus aux deux points qui suivent
ceux-là, à droite et à gauche, 16 rayons en tout. Puis à partir de ce
point (XII), de gauche à droite en montant, on écrit successivement aux
divers points de division de la circonférence, I, II, III, IV, V, VI,
VII, VIII; puis, à partir de (XII), dans l'autre sens, XI, X, IX, VIII,
VII, VI, V, IV.

[Illustration: 125, Fig. 58]

Pour poser et orienter un pareil cadran, on construit une équerre en
bois ou en fer, OMI (_fig_. 58), dont l'angle aigu OIM soit celui que
l'axe du monde fait avec l'horizon du lieu, c'est-à-dire égal à la
latitude (Ex.: à l'Observatoire de Paris, 48°50'11"). À l'aide d'un fil
à plomb, on fixe cette équerre dans une situation verticale telle que
son hypoténuse coïncide avec la méridienne du lieu, sa direction IM
allant du sud au nord; l'équerre est ainsi dans le plan méridien. On
cloue ensuite la table du cadran sur le côté OM de l'équerre, de manière
que O(XII) coïncide avec OM, et que le style soit le prolongement de IO.
Le style est ainsi parallèle à l'axe du monde; la table qui lui est
perpendiculaire est parallèle à l'équateur céleste, et O(XII) est la
trace du plan méridien sur la table du cadran.

À l'équinoxe, le soleil est dans le plan de la table, et quand il change
d'hémisphère, il en éclaire la seconde face; il est donc nécessaire que
les deux faces de la table soient semblablement graduées ou divisées, et
que le style soit prolongé des deux côtés. On entoure d'ailleurs la
table d'un rebord saillant, afin de recevoir les ombres portées au
moment de chaque équinoxe.

=155=. CADRAN HORIZONTAL. CADRAN VERTICAL MÉRIDIONAL.

Tous les deux se construisent de la même manière à l'aide d'un cadran
équinoxial dessiné _auxiliairement_[63].

[Note 63: On peut se borner à apprendre sur ce sujet les paragraphes
intitulés: _Construction d'un cadran horizontal_, _Construction d'un
cadran vertical déclinant_, le programme ne demandant pas de
démonstration; cependant, il est bon de se rendre compte de ces
constructions.]

Imaginons les trois cadrans, que nous venons de nommer, existant
simultanément, convenablement posés et orientés, ayant leurs styles dans
la même direction AOC (_fig._ 60), leurs tables se rencontrant suivant
une même horizontale LT, perpendiculaire au plan AO(XII), et que nous
appellerons ligne de terre.

[Illustration: 126, Fig. 60]

Nous ne considérerons, pour le moment, que le cadran équinoxial, O, et
le cadran horizontal, A. Ainsi qu'on le voit, les lignes horaires de la
même heure quelconque, par exemple O(XI), A(XI) (intersections des deux
tables par le même plan horaire), rencontrent naturellement LT au même
point. Imaginons que la table équinoxiale tourne autour de LT pour se
rabattre sur le plan horizontal, à gauche de l'autre table; les deux
lignes de XII heures viendront en prolongement l'une de l'autre (_fig._
61); les points de rencontre des lignes horaires avec LT n'auront pas
bougé, puisqu'ils sont sur la charnière[64].

[Note 64: Eu égard à la figure 60, la circonférence ne devrait pas être
tangente à LT sur la figure 61; mais cela ne fait rien pour l'exactitude
du cadran, car le rayon de cette circonférence du cadran équinoxial est
arbitraire; _la position du centre_ est seulement déterminée quand on se
donne à l'avance le pied du style du cadran horizontal.]

Si donc on trouve ces points de rencontre pour une position de la table
équinoxiale _rabattue_, on les connaîtra en véritable position, et il
n'y aura plus qu'à les joindre au pied A du style, sur le plan
horizontal, pour avoir les lignes horaires du cadran horizontal.

[Illustration: 127, Fig. 61]

Ce qui précède suffit pour l'intelligence de l'épure (_fig._ 61), dans
laquelle la partie à gauche de LT représente la table équinoxiale
rabattue, construite d'après la méthode que nous avons indiquée tout à
l'heure (nº 154). A droite de LT est la table du cadran horizontal, la
seule que l'on construise en traits définitivement _marqués_.

_Construction d'un cadran horizontal_. Du point A, choisi comme pied du
style sur le plan horizontal, on mène A(XII) perpendiculaire à LT. On
prolonge cette ligne au delà de LT. D'un point O quelconque pris sur ce
prolongement, on décrit une circonférence avec un rayon quelconque
O(XII). Puis on dessine à gauche de LT le cadran équinoxial, tel qu'il
est indiqué sur la figure 61, et d'après les principes que nous avons
exposés (154). On joint le point A à tous les points d'arrivée sur LT
des lignes de ce cadran; on marque la rencontre de chaque ligne de
jonction avec le cadre MNPQ, du même chiffre romain que celui qui
désigne la ligne correspondante du cadran équinoxial auxiliaire. Cela
fait, le cadran horizontal est dessiné tel qu'il doit être sur le cadre
MNPQ. Tout le reste, en dehors de ce cadre, doit être supprimé.

Pour mettre ce cadran en place, on fera coïncider A(XII) avec la
direction de la méridienne du lieu, le point (XII) étant au nord de A.
Quant au style, il doit partir de A, se trouver dans le _plan méridien_
(le plan vertical qui passe par la méridienne), faisant avec la
méridienne A(XII) un angle égal à la latitude.

Le cadran _vertical méridional_ se construit exactement de même;
seulement il faut, pour la pose du cadran, avoir égard à ce fait que la
direction AO du style fait avec la table verticale un angle égal à 90°
moins la latitude du lieu; la distance du pied du style à LT, ligne de
midi, est C(XII) (_fig._ 60).

=156=. CADRAN VERTICAL DÉCLINANT.--Il arrive souvent qu'on doit
construire un cadran sur un plan vertical (un mur), dont on n'a pas pu
choisir l'exposition, et qui fait un angle aigu avec la méridienne. Un
tel cadran s'appelle _cadran vertical déclinant_. Pour en construire un,
on emploie un cadran horizontal dessiné auxiliairement.

Pour comprendre la construction, il faut se figurer le cadran vertical
déclinant et le cadran horizontal existant simultanément (_fig._ 62,
cadran O' et cadran O), perpendiculaires l'un à l'autre, ayant leurs
styles dirigés suivant la même droite O'O, et leurs tables se
rencontrant suivant une même horizontale L'T'. Les lignes horaires de la
même heure quelconque doivent couper L'T' au même point. Ex.: O'(XII),
O(XII). (Ce sont les intersections des deux tables par le même plan
horaire.) Si donc on conçoit la table horizontale toute _construite_, se
rabattant telle qu'elle est, au-dessous du cadran vertical sur le plan
de celui-ci, en tournant autour de L'T' (_fig._ 62), les points
d'arrivée susdits des lignes horaires _correspondantes_, étant sur la
charnière L'T', n'auront pas bougé. (La table horizontale sera alors sur
le plan de l'épure.) Si donc on construit la table horizontale, ainsi
rabattue, sur le plan vertical, les points de rencontre de ses lignes
horaires avec L'T' ne seront autres que les points de rencontre des
lignes horaires du cadran vertical déclinant avec la même ligne, de
sorte qu'en joignant ces points à O, pied du style du cadran vertical,
on aura, en véritable position, les lignes horaires de ce cadran qui n'a
pas bougé (_fig._ 62).

Remarquons que la ligne, O'(XII), de midi du cadran horizontal,
c'est-à-dire la méridienne du lieu, n'est pas perpendiculaire à la trace
L'T' du cadran vertical sur l'horizon, mais fait avec cette trace
l'angle aigu du plan vertical donné avec le plan méridien du lieu; cet
angle O'(XII)T' est connu; les lignes O'(XII) et L'T' doivent faire sur
l'épure cet angle donné.

Cela posé, voici comment on peut construire un cadran vertical
déclinant.

[Illustration: 129, Fig. 62]

CONSTRUCTION DU CADRAN VERTICAL DÉCLINANT (_fig._ 62). On trace une
verticale O(XII) qui doit représenter la distance du pied du style au
bord horizontal de la table; ce bord est représenté par la ligne L'T'
qu'on mène perpendiculaire à O(XII); on fait avec L'T', au point (XII),
un angle T'(XII)O' égal à l'angle de la méridienne et du plan vertical
sur lequel doit être placé le cadran; on prend (XII)O' égal au second
côté (XII)_o_ de l'angle droit d'un triangle rectangle O(XII)_o_, dont
l'angle (XII)O_o_ = 90°-latitude du lieu, triangle que l'on construit
auxiliairement. On mène ensuite LT perpendiculaire à O'(XII); cela fait,
sans se préoccuper du cadran vertical déclinant, on construit, comme il
a été indiqué nº 155, la table d'un cadran horizontal dont le pied du
style serait en O' et le bord de la table LT[65]. On prolonge, au
besoin, les lignes horaires de ce cadran jusqu'à L'T', marquant les
points de rencontre des mêmes chiffres romains qui distinguent ces
lignes sur le cadran horizontal. On joint le point O à tous ces points
de rencontre avec L'T'; enfin l'on trace un cadre MNPQ sur lequel on
indique les rencontres des lignes O(XII), O(I), par les mêmes chiffres
romains (XII), I, etc... Le dessin enfermé dans ce cadre est la table du
cadran vertical déclinant. La table ainsi construite se pose ou se
dessine sur le mur vertical choisi, de manière que la ligne O(XII) soit
verticale. On fixe ensuite le style en O de manière à ce qu'il soit dans
un plan passant par la méridienne et O(XII), et fasse avec cette
dernière un angle égal à 90°-la latitude du lieu.

[Note 65: A Pour construire ce cadran horizontal O', il faut, d'après ce
qui a été expliqué nº 155, construire un cadran équinoxial O", puis
joindre le point O' à tous les points de rencontre des lignes horaires
de ce cadran O" avec LT. On fera bien de faire cette construction au
crayon.]

L'ANNÉE.

=157=. ANNÉE TROPIQUE. _L'année tropique_ est le temps qui s'écoule
entre deux retours consécutifs du soleil au même équinoxe (140).

Une année tropique = 366j. sid.,2422 = 365j. sol. moyens,2422 =

365j. sol. moyens 5h 48m 46s[66].

[Note 66: _Pour connaître la longueur d'une année tropique_, il
suffirait de déterminer l'instant précis de l'équinoxe du printemps pour
deux années consécutives; le temps sidéral écoulé entre ces deux
observations serait la longueur cherchée. Pour plus de précision, on
s'est servi des observations d'équinoxes faites par Lacaille et Bradley
il y a un siècle; en les combinant avec des observations récentes, on a
connu le temps compris entre deux équinoxes séparés par cent années
tropiques; en divisant cette durée par 100, on a eu la longueur
cherchée, à moins d'une seconde d'approximation. L'erreur, ne provenant
que des observations extrêmes, est ainsi pour cent ans la même qu'elle
serait pour un an, si on se servait de deux observations consécutives;
l'erreur rendue ainsi cent fois plus petite est devenue négligeable.]

=158=. L'année est une période de temps usuelle, fort importante à
considérer. Il est un fait sur lequel nous reviendrons plus tard: la
température, en un lieu donné, varie d'un bout de l'année à l'autre; les
températures annuelles s'y partagent en deux périodes, l'une croissante,
l'autre décroissante, qui se reproduisent les mêmes d'année en année; la
même chose arrive pour les durées des journées et des nuits. Ainsi, à
chaque jour occupant dans l'année un rang déterminé, correspond tous les
ans, abstraction faite des circonstances atmosphériques accidentelles,
la même température, la même durée du jour et de la nuit. Cela tient à
ce qu'en moyenne le soleil revient ce jour-là à la même position par
rapport à l'horizon du lieu en question; car, c'est cette position du
soleil qui règle les températures terrestres et les durées des journées
et des nuits. Chacun sait quelle influence la température et la durée du
jour et de la nuit ont sur la plupart de nos travaux et de nos actions.
De là, l'utilité des calendriers.

=159=. CALENDRIER. On appelle _Calendrier_ un tableau détaillé des jours
de l'année, relatant les circonstances astronomiques ou autres
remarquables, qui se rapportent à chacun d'eux.

=160=. La fraction de jour qui complète l'année tropique est fort
difficile à retenir; il serait fort incommode d'avoir à préciser
l'instant d'un jour intermédiaire où une année finirait et une autre
commencerait. C'est pourquoi on a senti, de tout temps, la nécessité
d'adopter pour l'usage ordinaire une année _civile_ composée d'un nombre
entier de jours.

Mais eu égard aux considérations précédentes (158), il était
indispensable que la durée et les subdivisions de l'année civile
concordassent le plus possible avec celles de l'année tropique, période
naturelle et régulatrice. Ce but n'a pas été atteint tout de suite; mais
il l'est à très-peu près et d'une manière suffisante par la combinaison
adoptée aujourd'hui.

161. ÈRES DIVERSES. Les années successives ses distinguent par un numéro
d'ordre, qui dépend du nombre d'années écoulées depuis un certain
événement remarquable. L'événement à partir du quel on commence à
compter les années n'est pas le même pour tous les peuples. Les anciens
Romains les comptaient à partir de la fondation de Rome, laquelle eut
lieu 753 ans avant Jésus-Christ; les Chrétiens les comptent à partir de
la naissance de Jésus-Christ; les Mahométans à partir du moment où
Mahomet s'enfuit de la Mecque. _Chaque manière de compter les années se
nomme une_ ÈRE. Il y avait l'ère romaine; il y a l'ère chrétienne et
l'ère mahométane; celle-ci commence à l'an 622 de l'ère chrétienne[67].

[Note 67: Il y avait aussi l'ère grecque, datant par olympiades,
périodes de quatre années, dont la première commence à l'an 776 avant
J.-C., et l'ère égyptienne de Nabonassar, qui commençait à l'an 747
avant J.-C.]

=162.= Cela posé, occupons-nous de la convention qui règle aujourd'hui la
durée de l'année civile.

ANNÉE CIVILE. On a adopté deux espèces d'années civiles, les unes de 365
jours solaires, les autres de 366 jours, tellement combinées que la
moyenne d'un nombre quelconque, même relativement considérable, d'années
civiles diffère extrêmement peu de la valeur exacte de l'année tropique.
Voici cette combinaison:

Sur quatre années civiles consécutives, il y en a généralement trois de
365 jours et une de 366 jours dite année bissextile. Une année est en
général bissextile, quand le nombre qui la désigne dans l'ère chrétienne
est divisible par 4; ex: 1848, 1852. Toute autre année n'a que 365 jours
et garde le nom d'année commune; ex.: 1850, 1853. Il n'y a que trois
exceptions à la règle générale précédente dans chaque période de 400
ans; quand une année est séculaire, c'est-à-dire exprimée par un nombre
terminé par deux zéros, elle devrait être bissextile si on suivait la
règle précédente; par exception, une année ainsi dénommée n'est pas
bissextile, si le nombre qu'on obtient en supprimant les deux zéros
n'est pas divisible par 4. Ex.: sur les quatre années séculaires
consécutives 2000, 2100, 2200, 2300, une seule sera bissextile, c'est la
première; les trois autres ne le seront pas; 1700, 1800 n'ont pas été
bissextiles, 1900 ne le sera pas non plus.

=163.= Une période de cent années civiles s'appelle un _siècle_.

On donne quelquefois le nom de _lustre_ à une période de cinq années.

=164.= Parlons maintenant des subdivisions de l'année. L'année se
subdivise en douze mois, généralement de 30 ou 31 jours, excepté un seul
de 28 ou de 29 jours. Les voici _par ordre_:

_Janvier_.   31j.
_Février_.   28 ou 29j.
_Mars_.      31j.
_Avril_.     30j.
_Mai_.       31j.
_Juin_.      30j.
_Juillet_.   31j.
_Août_.      31j.
_Septembre_. 30j.
_Octobre_.   31j.
_Novembre_.  30j.
_Décembre_.  31j.

Quand une année se compose de 365 jours, février n'en a que 28; quand
l'année est bissextile, février a 29 jours.

L'année civile commence le 1er janvier; c'est en hiver, car l'équinoxe
du printemps a lieu vers le 21 mars.

Chaque période de sept jours consécutifs s'appelle une _semaine_.

Les sept jours de chaque semaine prennent des noms particuliers dans
l'ordre suivant: _lundi_, _mardi_, _mercredi_, _jeudi_, _vendredi_,
_samedi_, _dimanche_[68].

[Note 68: Ces noms sont tirés de ceux des planètes connues des anciens,
parmi lesquels ils faisaient figurer le soleil et la lune. Ainsi _lundi_
vient de _Lune_ (_di leune, dies lunæ_); _mardi_, de _Mars_ (_di mars,
dies martis_); _mercredi_, de _Mercure_; _jeudi_, de _Jupiter_ (_dies
jovis_); _vendredi_, de _Vénus_; _samedi_, de _Saturne_ (_Saturday_ en
anglais); _dimanche_ est le jour du Seigneur ou du _Soleil_ (_dies
dominica_; en anglais _Sunday_).]

Les semaines se suivent sans qu'on les distingue en général par des
numéros d'ordre, sans qu'on les classe même dans les mois ou dans les
années. C'est une période qui n'a aucun rapport avec les circonstances
du mouvement du soleil[69].

[Note 69: L'année civile commune de 365 jours comprend 52 semaines et un
jour.

Le dernier jour d'une année commune, commençant une 53e semaine, porte
le même nom de semaine que le premier jour de cette même année.

Le premier jour de l'année qui suit une année commune doit donc porter
le nom de semaine, qui vient immédiatement après le nom du premier jour
de cette année commune précédente. Ex.: le 1er janvier 1854 a été un
dimanche; le 1er janvier 1855 sera un lundi. Après une année bissextile,
il faut avancer de deux jours dans la semaine. Par ex.: le 1er janvier
1860 ayant été un dimanche, le 1er janvier 1861 sera un mardi.]

Nous allons maintenant parler de l'invention et du perfectionnement des
combinaisons relatives au nombre des jours de l'année civile, de la
réforme julienne et de la réforme grégorienne.

=165=. De tout temps, comme nous l'avons dit, les hommes sentirent la
nécessité de composer l'année civile d'un nombre entier de jours; mais
ce n'est qu'après un temps très-long qu'on est arrivé à rendre la
longueur moyenne de l'année civile à très-peu près égale à celle de
l'année tropique.

On pense que les Égyptiens firent primitivement usage d'une année de 360
jours, partagée en 12 mois de 30 jours chacun. De là, suivant quelques
érudits, la division du cercle en 360 degrés.

Cette année différait trop de l'année astronomique, et ses
inconvénients, immédiatement évidents, donnèrent lieu à une première
correction ou réforme; l'année commune fut portée à 365 jours.

Cette nouvelle année avait, quoique à un degré moindre, l'inconvénient
capital de l'année de 360 jours, celui de différer trop du temps que le
soleil met à faire sa révolution complète, c'est-à-dire de l'année
tropique.

Cette année de 365 jours a pris le nom d'année _vague_ ou de Nabonassar.

=166.= INCONVÉNIENTS DE L'ANNÉE VAGUE. Ayant égard aux considérations
développées, nº 158 et 160, voyons ce qui arriverait si toutes les
années civiles n'étaient que de 365 jours comme l'année égyptienne,
tandis que l'année astronomique est d'environ 365 jours-1/4.

Choisissons un jour d'une dénomination déterminée, le 21 mars, par
exemple, jour actuel de l'équinoxe. Dans ce jour on éprouve une certaine
température liée à cette circonstance que ce jour-là le soleil décrit à
peu près l'équateur.

L'année suivante, quand commencera le 21 mars, comme il y aura seulement
365 jours écoulés depuis l'équinoxe précédent, le soleil ne sera pas
encore arrivé sur l'équateur; il lui faudra un quart de jour pour
l'atteindre. Quand arrivera le 21 mars d'une troisième année, il sera
encore plus éloigné de l'équateur; il lui faudra une demi-journée pour
l'atteindre.

Enfin, après quatre années, le 21 mars précédera d'un jour l'arrivée du
soleil à l'équateur; cette arrivée n'aura lieu que le 22 mars de la
cinquième année. Cette année ce sera le 22 mars qui jouira de la
température qui avait lieu d'abord le 21 mars; le 21 mars jouira de la
température primitive du 20, et ainsi de suite, chaque jour rétrogradant
quant à la température.

Après quatre nouvelles révolutions, le soleil n'atteindra l'équateur que
le 23 mars, qui aura alors la température qu'avait primitivement le 21;
et ainsi de suite, après chaque période de 4 années, la date de
l'arrivée du soleil à l'équinoxe étant reculée d'un jour, tous les jours
de l'année viendront successivement, quant à la température, prendre la
place du 21 mars, puis continuant à rétrograder, se plongeront de plus
en plus dans l'hiver.

Après 30 périodes de quatre ans, ou 120 ans, la date de l'équinoxe se
trouvera reculée d'un mois, et ainsi de suite; de sorte que la
température originelle du 21 mars aura lieu successivement en avril,
puis en mai, en juin, etc...

Au bout d'environ trois fois cent vingt ans, ou 360 ans, par exemple, le
jour de l'équinoxe, qui est le premier jour du printemps, se trouvant
transporté au 21 juin, il en résultera que le printemps prendra, dans la
nomenclature des mois et de leurs jours, la place de l'été, qui prendra
la place de l'automne; celui-ci prend la place de l'hiver qui vient
remplacer le printemps, et cette perturbation aurait lieu sans
cesse[70].

[Note 70: Nous parlons des saisons, bien qu'elles ne soient définies et
expliquées que plus tard (nº 171). Leurs noms et les caractères qui les
distinguent, quant à la température, sont si vulgairement connus qu'il
n'y a pas d'inconvénient dans la transposition faite par le programme.]

Dans l'état actuel des choses, on jouit dans nos climats d'une
température modérée en avril et mai; les mois de juillet et d'août sont
chauds, décembre et janvier sont froids.

Dans le système que nous examinons, le même mois serait successivement
tempéré, chaud et froid. Les travaux de l'agriculture se rapportent aux
divers mois, non à cause de leurs noms, mais à cause de leurs
températures.

Dans le système de l'année vague, on ne pourrait pas dire comme
aujourd'hui: la moisson se fait dans tel mois, la vendange dans tel
autre, puisque la température favorable à l'un ou à l'autre de ces
travaux n'arriverait plus d'une manière fixe à un mois plutôt qu'à un
autre. Chacun, pour diriger les travaux qui dépendent de la température,
serait à peu près livré à ses propres appréciations, à moins que le
calendrier ne fût continuellement remanié.

=167=. RÉFORME JULIENNE. Voilà les inconvénients qui, avec bien
d'autres, résultaient, avant Jules César, de ce que la durée fixe de
l'année civile différait trop de l'année tropique.

Jules César, conseillé par Sosygène, astronome égyptien, résolut de
porter remède à ce désordre par une intercalation régulière, exempte
d'arbitraire, et uniquement fondée sur la différence d'un quart de jour
qu'il croyait exister exactement entre l'année de 365 jours et l'année
astronomique de 365 jours-¼.

Il décida que, sur quatre années consécutives, trois seraient composées
de 365 jours, et la quatrième de 366 jours.

C'est dans cette unique prescription que consiste la réforme dite
réforme _julienne_, du nom de son auteur officiel.

Il arriva ainsi que la moyenne des années civiles fut de 365 jours-¼ ou
365j,25, peu différente de l'année tropique, composée de 365j,2422.

Le jour complémentaire ajouté à chaque quatrième année fut placé à la
fin du mois de février, qui, au lieu d'avoir 28 jours comme dans l'année
de 365 jours, en a 29 dans chaque année bissextile.

De cette manière, en admettant que l'équinoxe du printemps arrive le 21
mars de la première année d'une période composée de trois années
communes et d'une année bissextile, il arrivera pour la cinquième fois
le 21 mars de la cinquième année civile, à peu près à la même heure que
le 21 mars de la première.

En effet, entre ces deux 21 mars il se sera écoulé 365j × 3 + 366j =
1461 jours = (365j + 1/4) × 4, ou quatre années tropiques, à très-peu
près.

De sorte que, dans la seconde période de quatre ans, tout se passera à
très-peu près comme dans la première, et ainsi de suite, de période en
période.

Ainsi furent corrigés en très-grande partie les inconvénients de l'année
vague.

Nous disons _en très-grande partie_, car, dans ce qui précède, nous
faisons abstraction de la différence entre 365j 1/4 ou 365j,25, valeur
supposée par Jules César à l'année tropique, et la valeur exacte de
cette année qui est 365,2422 (à moins de 0,0001).

365j,25-365j,2422 = 0j,0078.

Les inconvénients de cette différence ne pouvaient devenir sensibles
qu'après un assez grand nombre de siècles.

En effet, à raison de 0j,0078 de différence pour une année, c'est 0j,78
pour 100 ans et 3j,12, ou environ 3 jours pour 400 ans; plus exactement
encore, 1 jour pour 130 ans. Cette différence se produit en sens
contraire de l'ancienne; c'est l'année civile moyenne qui est plus
grande que l'année tropique, au lieu d'être moindre; de sorte que la
date de l'équinoxe, si nous la considérons de nouveau, a dû reculer
après la réforme julienne au lieu d'avancer comme auparavant.

=168.= A l'époque du concile de Nicée, l'an 325 après J.-C., l'équinoxe
du printemps arrivait le 21 mars. Les Pères de l'Église, qui voulaient
que la célébration de la fête de Pâques eût lieu au commencement du
printemps, réglèrent l'époque de sa célébration au premier dimanche
après la pleine lune qui vient immédiatement après l'équinoxe du
printemps, celle qui suit le 21 mars, dans la persuasion qu'après la
réforme julienne l'équinoxe du printemps arriverait toujours le 21 mars.
Mais ils avaient compté sans la différence susdite de 0j,0078, entre
l'année civile moyenne et l'année tropique.

130 années civiles valant 130 années tropiques plus un jour, il en
résulta que, 130 ans après le concile de Nicée, le 21 mars dépassait
d'un jour l'arrivée du soleil à l'équinoxe, celle-ci ayant lieu alors le
20 mars. Au bout de 130 nouvelles années, nouvelle rétrogradation de la
date de l'équinoxe qui arrivait le 19 mars, et ainsi de suite; de sorte
que, en 1582, sous le pontificat de Grégoire XIII, la date de l'équinoxe
avait rétrogradé de 10 jours; il avait lieu réellement le 11 mars. Cette
rétrogradation, non remarquée, aurait, avec le temps, fait célébrer en
été une fête que les traditions rattachent au printemps, et aurait fini
par reproduire en sens contraire, beaucoup plus à la longue, il est
vrai, les inconvénients que nous avons reprochés à l'année vague.

=169.= _Réforme grégorienne._ Le pape Grégoire XIII eut la gloire de
compléter, en octobre 1582, la réforme julienne.

L'équinoxe du printemps avait eu lieu cette année le 11 mars. Afin qu'il
eût lieu à l'avenir le 21 mars, comme à l'époque du conseil de Nicée, il
commença par faire en sorte que le 11 mars devint le 21 mars: il n'y
avait pour cela qu'à augmenter toutes les dates subséquentes de 10
jours. _Il décida, en conséquence, que le 5 octobre 1582, époque de la
publication de la bulle pontificale, s'appellerait le 15 octobre, et que
l'on compterait ainsi jusqu'à la fin de 1582_, cette année devant avoir
ainsi dix jours de moins que les autres.

De plus, pour corriger l'erreur de l'intercalation julienne et
rapprocher, en la diminuant, la moyenne des années communes de la valeur
de l'année tropique, Grégoire XIII _remplaça 3 années bissextiles, sur
100, par 3 années communes_. C'est lui qui créa cette exception que nous
avons indiquée, à savoir: _qu'une année, dont le nom en chiffre est
terminé par deux zéros, n'est pas bissextile quand le nombre obtenu par
la suppression de ces deux zéros n'est pas divisible par 4_.

Ainsi, en résumé, la réforme grégorienne consista dans le changement de
date du 5 octobre 1582 en 15 octobre 1582, et dans la prescription que
nous venons de rappeler.

Moyennant cette réforme complémentaire, il faudra plus de 3000 ans, à
partir de 1582, pour que l'équinoxe s'écarte d'un jour du 21 mars. C'est
ce qu'on vérifie aisément.

=170.= A Rome, la réforme grégorienne eut son effet le 5 octobre 1582
qui devint le 15 octobre 1582. En France, elle fut adoptée le 10
décembre de la même année qui devint le 20 décembre. En Allemagne, dans
les pays catholiques, en 1584; dans les pays protestants, le 19 février
de l'an 1600.

Le 1er mars 1600, le Danemark, la Suède, la Suisse, suivirent l'exemple
de l'Allemagne.

En Pologne, la réforme eut lieu en 1586. Enfin l'Angleterre se décida à
l'adopter en 1752, le 3/14 septembre. Il lui fallut avancer la date de
11 jours, l'année 1700, bissextile suivant la méthode julienne, et non
bissextile après la réforme grégorienne, s'étant écoulée depuis cette
dernière.

Les Russes et les autres peuples de l'Église grecque en sont restés à la
méthode julienne; ils ont, sans interruption, une année bissextile sur
4. Or, depuis le concile de Nicée, en 325, point commun de départ, il y
a eu douze années séculaires qui, pour les motifs de la réforme
grégorienne, ne devaient pas être bissextiles; il en résulte que les
Russes, et autres peuples susdits, ont compris dans les années
antérieures à l'année présente douze jours de plus que nous; cette année
présente a donc commencé pour eux douze jours plus tard que pour nous;
pour chaque jour de l'année leur date est donc en arrière de douze jours
sur la nôtre; quand nous sommes au 22 mars, ils ne sont encore qu'au 10.
Une date russe s'indique ainsi, (4 mai / 16 mai), ce qui signifie que le
jour en question est le 4 mai pour les Russes, et pour nous le 16 mai.

DES SAISONS.

=171.= Les deux équinoxes et les solstices partagent l'année en _quatre_
parties inégales nommées _saisons_, remarquables au point de vue de la
durée des jours et des nuits, et des variations de la température.

Une _saison_ est le temps employé par le soleil pour aller d'un équinoxe
à un solstice, et _vice versa_.

Le _printemps_ est le temps qui s'écoule depuis l'équinoxe du printemps
jusqu'au solstice d'été. L'été dure du solstice d'été à l'équinoxe
d'automne; l'_automne_, de l'équinoxe d'automne au solstice d'hiver;
enfin l'_hiver_ dure depuis le solstice d'hiver jusqu'à l'équinoxe du
printemps.

Les saisons ne sont pas égales. Voici leurs durées actuelles[71]:

Le printemps dure    92j 20h 59m          ¦
                                          ¦ 186j 11h 12m
L'été                93  14  13           ¦

L'automne            89j 17h 35m          ¦
                                          ¦ 178j 18h 37m.
L'hiver              89   1   2           ¦

Comme on le voit, l'automne et l'hiver durent ensemble huit jours de
moins environ que le printemps et l'été.

[Note 71: Nous disons actuelles, parce que ces durées varient
_lentement_, comme nous le verrons plus tard (précession des
équinoxes).]

[Illustration: 139, Fig. 65]

=172.= CAUSES DE L'INÉGALITÉ DES SAISONS. Cette inégalité est due à la
forme elliptique de l'orbite décrit par le soleil autour de la terre
(129), et à la position que le grand axe de cette ellipse (_fig._ 65)
occupe par rapport à la ligne des équinoxes et des solstices. On connaît
la loi des aires (nº 130): _les aires décrites par le rayon vecteur du
soleil sont proportionnelles aux temps employés à les parcourir_.

Cette loi connue, il suffit de jeter les yeux sur la _fig._ 65, la
différence des aires parcourues dans les diverses saisons rend
parfaitement compte des différences qui existent entre leurs durées.

INÉGALITÉS DES JOURS ET DES NUITS.

_Du jour et de la nuit aux différentes époques de l'année, et en
différents lieux._

=173.= Le mot _jour_, quand on l'oppose au mot _nuit_, n'a pas la
signification que nous lui avons donnée jusqu'à présent. Le _jour_ est
le temps que le soleil passe au-dessus de l'horizon entre un lever et le
coucher suivant; la _nuit_ est le temps qu'il passe sous l'horizon,
entre un coucher et le lever suivant. Dans nos climats, chaque jour
solaire (nº 140) se compose d'un jour et d'une nuit.

=174.= On sait que le jour est tantôt plus long, tantôt plus court que
la nuit, et que la durée du jour et celle de la nuit varient
continuellement d'un bout de l'année à l'autre. Nous sommes maintenant
en mesure de nous rendre compte de ces variations; nous n'avons, pour
cela qu'à étudier, sur un globe céleste, à partir d'une certaine époque
et par rapport à un horizon déterminé, le mouvement du soleil tournant
chaque jour autour de l'axe du monde, tout en cheminant sur la sphère
céleste le long de l'écliptique[72].

[Note 72: C'est ici le cas de se rappeler l'ingénieuse comparaison de M.
Arago, page 99, en note.]

=175.= Puisque la déclinaison du soleil varie continuellement d'un jour
à l'autre, cet astre ne décrit pas précisément, chaque jour solaire, un
parallèle céleste. Si un jour il rencontre le méridien en un certain
point, D (_fig._ 63), le lendemain, ayant fait une révolution autour de
l'axe PP', il revient au méridien, non plus au point D, mais en un point
situé un peu plus haut ou un peu plus bas; il a décrit, dans
l'intervalle, une espèce de spirale (que l'on peut imaginer et même
construire sur un globe céleste), faisant le tour de ce globe, entre les
deux parallèles célestes qui correspondent aux deux points en question
du méridien. Ces deux parallèles célestes étant très-rapprochés, on
peut, sans qu'il en résulte évidemment aucun inconvénient dans l'étude
que nous entreprenons, supposer que le soleil décrit, chaque jour
solaire, un parallèle céleste, celui, par exemple, qui occupe la
position moyenne entre les parallèles que l'astre rencontre ce jour-là;
puis, que ce jour écoulé, il passe brusquement au parallèle moyen qui
correspond au jour solaire suivant, et ainsi de suite. Par exemple, nous
admettrons qu'à l'équinoxe du printemps, le soleil décrit l'équateur
céleste, le lendemain, un parallèle un peu plus élevé, le surlendemain,
un nouveau parallèle supérieur, et ainsi de suite, jusqu'à ce que,
arrivé au solstice d'été, il décrive le tropique du Cancer, TGSF; puis
redescendant vers l'équateur, il décrit à peu près les mêmes cercles
diurnes, mais en ordre inverse, du solstice d'été à l'équinoxe
d'automne. Ensuite, passant sur l'hémisphère austral, il y décrit, dans
la seconde partie de l'année, une pareille série de cercles diurnes (nº
176).

[Illustration: 141, Fig. 63]

Chacun de ces cercles diurnes est divisé, dans nos climats, par
l'horizon du lieu en deux arcs généralement inégaux; ex.: LDC, CKL. L'un
de ces arcs, LDC, situé du même côté de l'horizon que le lieu M
(au-dessus de l'horizon), est parcouru par le soleil durant le jour,
c'est _l'arc de jour_; l'autre, CKL (au-dessous de l'horizon), est
parcouru par cet astre durant la nuit, c'est _l'arc de nuit_. Le
mouvement diurne du soleil peut être considéré comme uniforme durant les
24 heures d'un jour solaire; comparer les durées relatives du jour et de
la nuit, à une époque quelconque, revient donc à comparer l'arc de jour
et l'arc de nuit; c'est ce que nous allons faire pour tous les jours de
l'année[73].

[Note 73: _Si le soleil décrivait indéfiniment l'équateur, la durée du
jour, égale à celle de la nuit, serait la même pour tous les lieux de la
terre et à toutes les époques._

Cette proposition est évidente à l'inspection de la figure 63. En effet,
l'horizon rationnel, HGH'F, d'un lieu quelconque, et l'équateur (grands
cercles de la sphère), se divisent mutuellement en deux parties égales.
Le soleil décrirait chaque jour une demi-circonférence L'E'C' (du côté
du lieu M), et chaque nuit la demi-circonférence C'EL'.

_Si le soleil, à défaut de l'équateur, décrivait indéfiniment le même
cercle parallèle à l'équateur (_KLDC_, par exemple), c'est-à-dire si_ SA
DÉCLINAISON NE VARIAIT PAS, _la durée d'un jour en un lieu donné, _M_,
serait la même à toutes les époques; la durée de la nuit, différente, en
général, de celle du jour_ (nº 176), _serait également constante au même
lieu._

Cette proposition est évidente à l'aspect de la figure 63. En effet, le
soleil décrirait chaque jour indéfiniment l'arc LDC (au-dessus de
l'horizon de lieu), et chaque nuit l'arc CKL. L'arc LDC et l'arc CKL
sont inégaux.

_La variation continuelle du jour et de la nuit, en chaque lieu de la
terre, tient donc à la variation de la déclinaison du soleil, ou, si
l'on veut, à l'inclinaison de l'écliptique sur l'équateur céleste_ (nº
118).]

VARIATIONS DE LA DURÉE DU JOUR ET DE LA NUIT EN UN MÊME LIEU DONNÉ AUX
DIFFÉRENTES ÉPOQUES DE L'ANNÉE.

=176.= Supposons, pour fixer les idées, que le lieu considéré M, _fig._
63, soit l'Observatoire de Paris, dont la latitude est 48° 50' 11";
l'horizon rationnel de ce lieu est HGH'F (nº 8). Afin de laisser voir
bien nettement la division de chaque cercle diurne par l'horizon, nous
n'avons pas dessiné l'écliptique sur la _fig._ 63 qui représente un
globe céleste; mais il faut l'y rétablir par la pensée, faisant le tour
du globe dans la position indiquée par la _fig._ 66 _bis_. Cette
dernière nous montre le mouvement annuel du soleil sur l'écliptique
divisé en quatre périodes principales, correspondant aux quatre saisons:
1º de l'équinoxe, ♈, au solstice d'été S; 2º de ce solstice à l'équinoxe
d'automne ♎; 3º de cet équinoxe au solstice d'hiver S'; 4º enfin, de ce
solstice à un nouvel équinoxe du printemps ♈.

[Illustration: 142, Fig. 66 bis]

Suivons maintenant sur la _fig._ 63.

A l'équinoxe du printemps, 21 mars, le soleil décrit l'équateur, le jour
est égal à la nuit (l'arc de jour est L'E'C'; l'arc de nuit C'EL'). De
l'équinoxe du printemps, ♈, au solstice d'été S, du 21 mars au 22 juin,
le soleil s'élevant progressivement au-dessus de l'équateur sur
l'hémisphère austral (le long de ♈S, _fig._ 66 _bis_), le jour augmente
continuellement et la nuit diminue, à partir de 12 heures. (Comparez
(_fig._ 63) les arcs de jour L'E'C'..., LDC,..., GTF entre eux, et aux
arcs de nuit C'EL'..., CKL...., FSG.) Le jour, constamment plus grand
que la nuit, atteint son maximum quand le soleil arrive en S au solstice
d'été (22 juin); la nuit est alors à son minimum. (A Paris ce plus long
jour est de 15h 58m; la nuit correspondante est de 8h 2m.)

Du solstice d'été, S, à l'équinoxe d'automne, ♎ (du 22 juin au 21
septembre), le soleil redescendant vers l'équateur (le long de l'arc S♎,
_fig._ 66 _bis_), décrit sensiblement les mêmes cercles diurnes que dans
la période précédente, mais en ordre inverse. (V. ces cercles en
descendant, _fig._ 63.) Le jour diminue et la nuit augmente; la nuit
regagne tout ce que perd le jour. Le jour et la nuit redeviennent ainsi
égaux à l'équinoxe d'automne (21 septembre), le soleil décrivant de
nouveau l'équateur.

De l'équinoxe d'automne, ♎, au solstice d'hiver, du 21 septembre au 21
décembre, le soleil descendant dans l'hémisphère austral (le long de
♎S', _fig._ 66 _bis_), le jour diminue et la nuit augmente, à partir de
12 heures. (Comparez les arcs de jours L'E'C',..., L"D"C",..., F'S'G',
et les arcs de nuit 'C'EL',..., C"K"L",..., G'T'F'). Le jour,
constamment moindre que la nuit, atteint son minimum quand le soleil
arrive en S', au solstice d'hiver, 21 décembre; la nuit est alors à son
maximum. (Ce jour le plus court est à Paris de 8h 2m; la nuit la plus
longue, de 15h 58m.)

Enfin du solstice d'hiver S à un nouvel équinoxe du printemps ♈, du 21
décembre au 21 mars, le soleil remonte vers l'équateur (le long de l'arc
S'♈, _fig._ 66 _bis_); il décrit sensiblement les mêmes cercles diurnes
que dans la période précédente, mais dans l'ordre inverse (suivez fig.
63, en remontant); le jour augmente, la nuit diminue; le premier regagne
tout ce qu'il avait perdu depuis le 21 septembre, la nuit perd ce
qu'elle avait gagné; le jour redevient ainsi égal à la nuit à un nouvel
équinoxe du printemps, c'est-à-dire le 21 mars. A partir de là, les
mêmes périodes d'accroissement ou de diminution du jour et de la nuit
recommencent indéfiniment d'année en année.

=177=. REMARQUE. La _déclinaison_ du soleil varie très-irrégulièrement.
A l'équinoxe du printemps, le soleil monte rapidement; les jours
croissent d'une manière très-sensible. Au solstice d'été, quand le
soleil cesse de monter, pour descendre ensuite, il reste stationnaire
pendant quelques jours. La durée du jour et celle de la nuit n'éprouvent
à cette époque que des variations très-petites. (V. dans l'Almanach de
l'Annuaire du bureau des longitudes de France, du 10 au 25 juin, les
colonnes intitulées lever du soleil, coucher _id._, déclinaison _id._) A
l'équinoxe d'automne, la durée des jours diminue rapidement. Au solstice
d'hiver, quand le soleil cesse de descendre, pour monter ensuite, le
soleil paraît encore quelque temps stationnaire; il en résulte les mêmes
conséquences qu'au solstice d'été (V. l'Annuaire aux environs du 31
décembre).

=178=. Voilà ce qu'on peut dire de plus général sur les variations
périodiques du jour et de la nuit en chaque lieu de l'hémisphère boréal,
sauf une particularité générale dont nous allons parler.

=179=. Les lieux de l'hémisphère austral peuvent se partager en deux
catégories: 1º ceux dont l'horizon rencontre, comme HGH'F, tous les
cercles diurnes que le soleil décrit pendant l'année (_fig._ 63 _bis_);
2º tous ceux dont l'horizon ayant la situation indiquée _fig._ 64
ci-après, ne rencontrent pas tous ces cercles diurnes.

[Illustration: 144, Fig. 63 bis]

[Illustration: 144, Fig. 64]

Dans chaque lieu de la première catégorie, tout se passe comme à Paris;
chaque jour solaire de l'année s'y compose d'un jour et d'une nuit dont
les durées subissent les variations périodiques que nous avons décrites.

Il n'en est pas tout à fait de même pour les lieux de la seconde
catégorie; considérons l'un de ces lieux, M, _fig._ 64. Depuis
l'équinoxe de printemps jusqu'à ce que le soleil arrive au parallèle
céleste dont la trace est HK, tout s'y passe comme à Paris; chaque jour
solaire se compose d'un jour et d'une nuit. Mais le jour augmente de 12
heures à 24 heures, et la nuit diminue de 12 heures à 0. Puis il y a un
jour persistant pendant tout le temps que le soleil met à aller du
parallèle HK au tropique du cancer ST, et à revenir de ce tropique au
cercle HK; en effet, le soleil reste tout ce temps au-dessus de
l'horizon HH' du lieu M. Ce jour peut durer un certain nombre de jours
solaires et même des mois (V. nº 184). Ensuite, pendant que le soleil
descend du parallèle HK au parallèle H'K', en passant par l'équinoxe
d'automne, ♎, il y a jour et nuit à chaque jour solaire; le jour diminue
de 24 à 12 heures, puis de 12 heures à 0; la nuit augmente de 0 à 12
heures, puis de 12 heures à 24. Puis il y a nuit persistante tout le
temps que le soleil met à descendre du parallèle H'K' au tropique du
capricorne T'S', et à revenir de ce tropique au cercle H'K'; car le
soleil reste tout ce temps au-dessous de l'horizon HH' de M. Cette
longue nuit a la même durée que le long jour ci-dessus indiqué. Enfin le
soleil remontant du parallèle H'K' à l'équinoxe ♈, il y a jour et nuit à
chaque révolution diurne du soleil; le jour croît de 0 à 12 heures et la
nuit diminue de 24 à 12 heures.

Il est facile de distinguer les lieux des deux catégories que nous
venons d'indiquer. Pour un lieu de la première, l'arc EH (_fig._ 63
_bis_), est plus grand que ES = 23° 28'[74]; mais EH = 90°-PH = 90°-E'M
= 90°-latitude du lieu; 90°-latitude > 23° 28' revient à latitude <
90°-23° 28' = 66° 32'.

[Note 74: Nous prenons pour plus de simplicité la plus grande
déclinaison du soleil (inclinaison de l'écliptique, nº 128), égale à 23°
28'; on sait qu'elle est variable et présentement égale à 23° 27' 34"
(juin 1854).]

Les lieux de la première catégorie sont ceux dont la latitude est
inférieure à 66° 32'.

Pour un lieu de la deuxième catégorie (_fig._ 64), on a EH > ES = 23°
28', ou 90°-latitude < 23° 28'; ce qui revient à latitude > 66° 32'.

De là cette distinction remarquable:

=180=. _Chaque jour solaire de l'année se compose d'un jour et d'une
nuit en tout lieu dont la latitude est inférieure à_ 66° 32'. (Toute la
France est dans ce cas.)

_Tout lieu dont la latitude atteint ou dépasse 66° 32' a, chaque année,
un jour de 24 heures ou de plus de 24 heures, et une nuit de même durée,
ce jour et cette nuit n'étant pas consécutifs_, mais séparés par tous
les jours solaires de l'année durant chacun desquels il y a en ce lieu
alternative de jour et de nuit.

Les deux parallèles terrestres qui sur les deux hémisphères ont la
latitude de 66° 32' s'appellent _cercles polaires_: l'un est le cercle
polaire _boréal_ ou _arctique_, l'autre est le cercle polaire _austral_
ou _antarctique_. Comme on le voit, ces deux cercles sont des lignes de
démarcation entre les lieux des deux catégories que nous venons
d'établir. Nous avons indiqué leurs traces _pq_, _p'q'_ sur le méridien
du lieu, _fig._ 63 _bis_ et 64.

=181.= LIEUX DE L'HÉMISPHÈRE AUSTRAL. Si de l'hémisphère boréal nous
passons à l'hémisphère austral, nous voyons les mêmes variations du jour
et de la nuit se produire en ordre inverse. En effet, chaque lieu M de
l'hémisphère boréal a son _antipode_ M' sur l'hémisphère austral. (On
appelle _antipodes_ deux lieux diamétralement opposés; ils ont des
longitudes et des latitudes égales, mais de noms différents). Pendant
qu'il fait jour en M, il fait nuit en M', et _vice versa_ (_fig._ 63).
Si donc on veut savoir ce qui se passe en un lieu de l'hémisphère
austral, aux antipodes de Paris par exemple, il n'y a qu'à relire tout
ce qui précède, en remplaçant partout le mot jour par le mot nuit, et
_vice versa_. Nous laissons le lecteur faire ce changement.

=182.= LIEUX SITUÉS SUR L'ÉQUATEUR. _Sur l'équateur la durée du jour est
constamment égale à celle de la nuit._ En effet, l'horizon de chaque
lieu de l'équateur (par ex.: celui de E', à cause de sa verticale IE'),
est perpendiculaire à l'équateur; cet horizon contient donc l'axe du
monde PP'. Cette ligne PP', qui remplace HH', contenant les centres de
tous les cercles diurnes décrits par le soleil, chacun de ceux-ci est
rencontré par l'horizon de E' suivant un diamètre, et divisé en deux
arcs égaux, l'un de jour, l'autre de nuit.

=183.= DURÉE DU JOUR ET DE LA NUIT À LA MÊME ÉPOQUE, _c'est-à-dire à
chaque jour solaire de même date_, EN DES LIEUX DIFFÉRENTS.

Voici d'abord à ce sujet deux propositions générales:

1º _La durée du jour comme celle de la nuit est la même à la même époque
quelconque pour tous les lieux de même latitude._

2º _Chaque jour du printemps ou de l'été est d'autant plus long, et la
nuit d'autant plus courte pour un lieu de l'hémisphère boréal que sa
latitude est plus élevée; le contraire a lieu pour les jours et les
nuits de l'automne et de l'hiver._

La première proposition est une conséquence de la symétrie de la sphère
(les lieux de même latitude étant sur le même parallèle terrestre)[75].

[Note 75: On peut rendre ce fait évident en imaginant qu'on construise
sur deux globes distincts la _fig._ 63 relativement à deux lieux M et N
de même latitude. Les deux figures ainsi construites seraient
identiquement les mêmes, puisque sur toutes les deux, les cercles
diurnes une fois dessinés, on prendrait sur le méridien le même arc
PH=E'M=latitude; pour fixer la position de l'horizon; de l'identité des
deux figures on conclut que le cercle diurne, correspondant à chaque
jour solaire, est divisé de la même manière par les horizons des deux
lieux.]

[Illustration: 147, Fig. 67]

La seconde est mise en évidence par la _fig._ 67 qui représente la
projection du globe de la figure 63 sur le méridien du lieu considéré.
On y voit les traces ou projections de quelques cercles diurnes et
celles des horizons de lieux M et M(1) de latitudes différentes E'M,
E'M(1). On n'a qu'à suivre le soleil comme nous l'avons fait nº 176; on
voit que dans la première période ci-dessus indiquée, de l'équinoxe du
printemps au solstice d'été, et de ce solstice à l'équinoxe d'automne,
chaque jour est plus long en effet pour M(1) que pour M, et chaque nuit
plus courte, tandis que c'est le contraire dans la seconde période quand
le soleil se trouve au-dessous de l'équateur.

=184=. Ce qui rend plus remarquable en un lieu donné le phénomène qui
nous occupe, c'est évidemment la différence entre le jour le plus long
de l'année et le jour le plus court. Plus cette différence est grande,
plus grandes aussi et plus sensibles doivent être les variations
quotidiennes que nous avons indiquées. Un caractère très-propre à
distinguer les uns des autres les divers lieux d'un même hémisphère, est
donc la durée du plus long jour ou de la plus longue nuit (qui est
absolument la même).

=185=. Cette durée dépend exclusivement de la latitude[76]; nous allons
l'indiquer pour diverses latitudes boréales, à partir de l'équateur, sur
lequel, ainsi que nous l'avons dit nº 182, il y a constamment un jour de
12 heures et une nuit d'égale durée.

[Note 76: _Calcul de la durée du jour en un lieu donné, à une époque
donnée._ Soient O le centre d'un cercle diurne LDCK, _fig._ 63, D la
déclinaison correspondante E'D du soleil, L la latitude E'M d'un certain
lieu de la terre, _x_ la moitié LK de l'arc de nuit pour ce lieu. Le
rayon de la sphère étant pris pour unité, nous avons OI = sin D, OK =
cos D; le triangle rectangle IO_i_ donne O_i_ = IO tan OI_i_ = IO tang
PH = IO tang E'M = sin D tang L. D'un autre côté le triangle rectangle
_i_OL donne O_i_ = OL cos _i_OL = OK cos _x_ = cos D cos _x_; en égalant
les deux valeurs de O_i_, on a cos D cos _x_ = sin D tang L, d'où:

cos _x_ = tang D⋅tang L. (1)

Ayant le tableau des déclinaisons moyennes du soleil pour les différents
jours de l'année, on pourra, à l'aide de cette formule, déterminer le
nombre de degrés de l'arc _x_; 2_x_ est l'arc de nuit à l'époque
considérée; 360°-2_x_ est l'arc de jour; en partageant 24 heures en
parties proportionnelles à 2_x_ et à 360°-2_x_, on a les durées
respectives de la nuit et du jour, à l'époque où le soleil a la
déclinaison D, au lieu M dont la latitude est L. Tant que tang D x tang
L ne surpasse pas 1, on trouve une valeur de _x_; quand tang D tang L =
1, cos _x_ = 1, _x_ = 0; la nuit est nulle, le jour a 24 heures au
moins. Alors D = 90°-L; si cette valeur de D est le maximum 23° 28', le
plus long jour dure précisément 24 heures au lieu considéré. Si la
valeur D = 90°-L est inférieure à 23° 28', le plus long jour du lieu
dure depuis le moment où D a cette valeur 90°-L, jusqu'à ce que le
soleil, ayant passé par le solstice d'été, soit revenu à cette
déclinaison D = 90°-L. Cette formule discutée répond donc aux questions
que l'on peut se proposer sur la durée du jour; on peut faire varier L
pour comparer entre eux les divers lieux de la terre.]


            DURÉE          DURÉE                  DURÉE         DURÉE
LATITUDE   du plus        du jour     LATITUDE   du plus       du jour
          long jour.    le plus court.           long jour.    le plus
                                                               court.

 0°        12h 0m         12h 0m         40°      14h 51m       9h 9m
 5         12 17          11 43          45       15  26        8 34
10         12 35          11 25          50       16   9        7 51
15         12 53          11  7          55       17   7        6 53
20         13 13          10 47          60       18  30        5 30
25         13 34          10 26          65       21   9        2 51
30         13 56          10  4          66° 32'  24   0        0  0
35         14 22           9 38

Dans chaque lieu dont la latitude est supérieure à 66° 32', la durée du
jour varie de 0 à 24 heures, comme nous l'avons dit nº 179, dans la
partie de l'année où le soleil rencontre l'horizon. Mais le nombre des
jours pendant lesquels cet astre reste au-dessus de l'horizon sans se
coucher (la durée du plus long jour), et le nombre de jours pendant
lesquels il reste au-dessous de ce plan sans se lever (la durée de la
plus longue nuit), varient avec la latitude; le tableau suivant fait
connaître ces durées pour diverses latitudes boréales depuis 66° 32'
jusqu'à 90°.

LATITUDES      LE SOLEIL         LE SOLEIL
boréales.   ne se couche pas    ne se lève pas
            pendant environ     pendant environ

 66°32'        1 j.              1 j.
 70              65                60
 75             103                97
 80             134               127
 85             161               153
 90             186               179

Pour les latitudes australes de même valeur les durées ne sont pas
absolument les mêmes. Ainsi, pour la latitude australe de 75°, le soleil
doit rester constamment au-dessus de l'horizon pendant qu'il ne se lève
pas à la latitude boréale de 75° et _vice versa_. Le soleil reste donc
environ 97 jours sans se coucher et 103 jours sans se lever à la
latitude australe de 75° (V. nº 181).

Les longs jours des contrées voisines des pôles sont notablement
augmentés par deux causes que nous allons indiquer. En définitive, la
nuit ne dure que 70 _jours environ au pôle boréal_.

Les mêmes causes, la réfraction et le crépuscule, affectent d'ailleurs,
mais à un degré moindre, la durée de chaque jour en un lieu quelconque.

=186=. INFLUENCE DE L'ATMOSPHÈRE SUR LA DURÉE DU JOUR; 1º RÉFRACTION.
Nous avons vu, nº 108 et 109, que l'atmosphère réfractant les rayons
lumineux qui nous viennent du soleil, nous fait voir cet astre plus haut
qu'il ne l'est en réalité, que, notamment tout près de l'horizon, elle
le relève d'un angle de plus de 33'. Il résulte de là que nous voyons le
soleil se lever avant qu'il ne soit réellement au-dessus de l'horizon,
et que nous le voyons encore quelque temps après qu'il s'est abaissé
au-dessous de ce plan. La durée du jour se trouve donc augmentée par là,
et celle de la nuit diminuée en conséquence. C'est ainsi qu'à Paris le
plus long jour de l'année est de 16h 7m, et le plus court de 8h 11m, au
lieu de 15h 18m et 8h 2m, comme nous l'avons indiqué en ne tenant pas
compte de la réfraction. Au pôle boréal le soleil paraît au-dessus de
l'horizon (l'équateur) tant qu'il n'est pas descendu à la latitude
australe de 33'.

=187=. CRÉPUSCULE. L'atmosphère agit encore d'une autre manière pour
augmenter la durée du jour. On sait que les molécules d'air
réfléchissent en tous sens, non-seulement la lumière qui tombe
directement sur leur surface, mais encore celle qui a déjà été réfléchie
vers elles par d'autres molécules. Le résultat de ces réflexions
multipliées est la lumière diffuse qui nous éclaire alors même que le
soleil est à une certaine distance au-dessus de l'horizon.

On appelle _crépuscule_ la lumière qui, de cette manière, nous arrive
indirectement du soleil, avant son lever et après son coucher. Le
crépuscule du matin est aussi connu sous le nom d'_aurore_.

[Illustration: 150, Fig. 68]

Quand le soleil venant de se coucher pour un lieu _m_ de la terre
(_fig._ 68) descend progressivement au-dessous de son horizon _m_D, il
continue pendant un certain temps à projeter directement de la lumière
sur une partie de la masse d'air atmosphérique DCD' située au-dessus de
cet horizon. Ainsi, de la position S, indiquée sur notre figure, le
soleil envoie directement de la lumière à toute la partie CED de la
masse atmosphérique D'CD; cette lumière est réfléchie partiellement vers
le lieu _m_ par les molécules de cette masse d'air; d'où la clarté
crépusculaire. L'étendue de la masse CED, ainsi frappée directement par
les rayons du soleil, diminue à mesure que cet astre s'abaisse davantage
sous l'horizon; la clarté crépusculaire diminue naturellement avec elle,
et doit s'éteindre alors que l'extrémité C du _rayon solaire tangent_
SKC, mobile avec le soleil, vient coïncider avec le point D. Cette
dégradation progressive de la clarté crépusculaire, à partir de la
clarté du jour, ménage la transition du jour à la nuit. Quand le soleil,
continuant son mouvement diurne, se rapproche de nouveau de l'horizon
mD', un rayon solaire commence par arriver en D'; puis l'extrémité du
rayon tangent à la terre remontant sur D'CD, la masse d'air D'C'E',
frappée directement par les rayons solaires avant le lever de l'astre,
augmente progressivement; de sorte que la clarté crépusculaire, d'abord
très-faible, augmente progressivement jusqu'à ce qu'arrive la clarté du
jour proprement dit; ainsi se trouve ménagée la transition de la nuit au
jour.

=188=. On estime par expérience, en calculant le temps qui s'écoule
depuis le coucher du soleil jusqu'à l'instant où l'on peut voir à la vue
simple les plus petites étoiles (celles de 5e et de 6e grandeur), que le
crépuscule cesse, pour un lieu donné, quand le soleil arrive à 18°
au-dessous de l'horizon de ce lieu, et qu'il recommence quand le soleil,
se rapprochant de cet horizon, n'en est plus qu'à cette distance de
18°[77].

[Note 77: L'état de l'atmosphère, la transparence plus ou moins grande
de l'air, doivent avoir une grande influence sur l'intensité de la lueur
crépusculaire. Aussi ne doit-il pas toujours arriver que la fin du
crépuscule, ou le commencement de l'aurore, corresponde au même
abaissement du soleil au-dessous de l'horizon. La limite que nous
indiquons n'est donc qu'approximative.]

[Illustration: 151, Fig. 69]

=188= _bis_. Tous les points de la sphère céleste situés à 18°
au-dessous de l'horizon d'un lieu se trouvent sur la circonférence d'un
certain cercle de cette sphère parallèle à l'horizon, derrière celui-ci
par rapport au zénith M du lieu, et à une distance sphérique de 18°.
C'est le cercle _h_L'_h_'C' de la _fig._ 69. PEP'E' est le méridien du
lieu _m_ dont le zénith est M; HLH'C son horizon, rencontrant le
méridien suivant HH'; FLF'C représente un des parallèles diurnes décrits
par le soleil dans le sens FLF'C.

Le soleil ayant décrit l'arc LF'C au-dessus de l'horizon, se couche en
C; le crépuscule du soir commence alors et dure pendant que le soleil,
continuant son mouvement diurne, parcourt l'arc CC'; il fait absolument
nuit pendant que cet astre décrit l'arc C'FL'. Quand il arrive en L',
l'aurore ou crépuscule du matin commence, et dure jusqu'à ce que le
soleil se lève en L.

L'un et l'autre crépuscule allongeant le jour à ses deux bouts, qu'on
nous permette cette expression, diminuent la nuit proprement dite de ce
qu'ils ajoutent au jour. Il arrive même, à l'époque des longs jours,
pour les lieux dont la latitude dépasse 48° 32', que l'adjonction des
deux crépuscules au jour supprime absolument la nuit. (V. la note
ci-dessous.)

A Paris notamment, dont la latitude est de 48° 50' 11", il n'y a pas de
nuit absolue aux environs du solstice d'été du 15 au 25 juin. Le
crépuscule du soir n'est pas fini que celui du matin commence[78].

[Note 78: Si l'on veut considérer ces jours allongés durant lesquels le
soleil parcourt des arcs tels que L'F'C', et ces nuits restreintes
durant lesquelles il parcourt des arcs tels que C'FL' pour les comparer
les uns aux autres, comme nous avons fait pour les jours et les nuits
proprement dits, on n'a qu'à reprendre la fig. 63 en y remplaçant
l'horizon HGH'F par le cercle parallèle _h_L'_h'_C', placé au-dessous de
celui-ci, par rapport au lieu M, à la distance sphérique _h_H = 18°
(_fig._ 69). L'observation du mouvement annuel, ainsi faite, conduit aux
mêmes conséquences et dans le même ordre, sauf ce qui concerne le plus
long jour et la plus longue nuit, qui se trouve ainsi modifié. La zone
terrestre comprenant les lieux qui ont le plus long jour de 24 heures au
moins est augmentée d'une zone inférieure large de 18°, ce qui fait
descendre sa base inférieure à la latitude de 48° 32'; de sorte que
Paris, dont la latitude est de 48° 50' 11", se trouve sur cette zone; de
là ce que nous avons dit dans le texte.

La zone comprenant les lieux qui ont leur plus longue nuit de 24 heures
au moins, se trouve au contraire diminuée d'une zone de 18° de largeur;
de sorte qu'elle ne comprend plus que les lieux dont la latitude est au
moins de 66° 32' + 18º = 84° 32'.

Tout cela se voit sur la _fig._ 69. En effet, pour que le plus long des
jours que nous considérons actuellement soit de 24 heures au moins pour
un certain lieu, il suffit que l'on ait pour ce lieu _h_E < 23° 28' ou
HE-18° < 23° 28'; d'où HE < 23° 28' + 18° = 41° 28'. Mais HE =
90°-latitude; donc 90°-latitude < 41° 28'; d'où latitude > 48° 32'.]

=189=. _Durée du crépuscule_. Le mouvement du soleil sur chaque cercle
diurne étant sensiblement uniforme, les durées des crépuscules du soir
et du matin ont pour mesure les nombres de degrés des arcs
crépusculaires CC', L'L; ces deux arcs étant égaux, nous pouvons dire
d'abord: _l'aurore et le crépuscule du soir d'un même jour solaire
durent autant l'un que l'autre_.

Si on ne quitte pas un même lieu de la terre, on voit que pour tous les
parallèles diurnes rencontrés à la fois par les cercles HH', _hh'_, les
projections des arcs crépusculaires sur le méridien sont égales toute
l'année. Ayant égard aux positions respectives de ces arcs
crépusculaires sur leurs cercles, par rapport au plan de projection,
puis à la grandeur de ces cercles diurnes suivant leur rapprochement de
l'équateur, on suit facilement les variations de la durée du crépuscule
en ce lieu pour les diverses époques de l'année (_fig._ 70). Nous
contentant d'indiquer la marche à suivre, nous laissons au lecteur à
préciser le sens de ces variations.

[Illustration: 153, Fig. 70]

Ce qui importe davantage, c'est de comparer les durées correspondantes
des crépuscules pour des lieux différents.

_La durée du crépuscule à une même époque quelconque de l'année est
d'autant plus grande pour un lieu que sa latitude est plus élevée._

On voit la raison de ce fait sur la _fig._ 70, où nous n'indiquons que
les projections des cercles diurnes et les traces des horizons de deux
lieux M et M_(1). Comparez les projections sur un même parallèle; comme
la différence est constante, voyez sur l'équateur I_i_', I_i_'_(1).

Plus l'horizon d'un lieu est incliné sur l'équateur, et par suite sur
les parallèles diurnes, plus est étendu l'arc du parallèle diurne
compris entre l'horizon HH' et le cercle _hh_', entre lesquels existe
toujours l'écartement fixe de 18°; cela se voit par les projections. Les
arcs crépusculaires finissent par devenir très-grands, et le crépuscule
finit par augmenter le plus long jour de plusieurs jours solaires, et
même d'un ou deux mois pour les lieux voisins du pôle. Quand on arrive
au pôle, HH' devenant l'équateur, _hh_' étant au-dessous à 18° de
distance, il ne reste plus au-dessous de hh' qu'une zone de 5° 28' de
large, sur laquelle le soleil ne reste que 70 jours environ, de sorte
que le crépuscule diminue la nuit de plus de 3 mois.

CAUSES PRINCIPALES DES VARIATIONS DE LA TEMPÉRATURE EN UN LIEU DÉTERMINÉ
DE LA TERRE.

=190=. La quantité de chaleur que reçoit chaque jour un lieu déterminé
est très-variable: _elle dépend de la durée du jour en ce lieu et de la
hauteur méridienne du soleil au-dessus de son horizon_. Plus le jour est
long et plus le soleil s'élève, plus l'échauffement est grand[79]. Du
solstice d'hiver au solstice d'été, la hauteur méridienne du soleil
augmente dans nos climats en même temps que la durée du jour; la
quantité de chaleur reçue quotidiennement dans ce lieu augmente donc
continuellement durant cette période de l'année. Du solstice d'été au
solstice d'hiver, au contraire, la hauteur méridienne du soleil diminue
avec la durée du jour; la quantité de chaleur reçue journellement
diminue donc dans cet intervalle.

[Note 79: La hauteur du soleil au-dessus de l'horizon n'est autre chose
que l'angle sous lequel les rayons solaires viennent frapper le sol au
moment considéré; or, si une surface se présente successivement aux
rayons solaires sous un angle variable, il est évident que le nombre des
rayons reçus sur une étendue donnée est le plus grand possible quand la
surface leur est perpendiculaire, et que ce nombre va en diminuant avec
l'angle que les rayons forment avec la surface, jusqu'à devenir nul avec
cet angle. Tout cela se constate en physique par l'expérience.

Prenons donc le soleil un certain jour à son lever; la quantité de
chaleur qu'il fournira dans l'unité de temps par exemple au lieu
considéré, ira évidemment en augmentant depuis zéro jusqu'à un maximum
qui aura lieu à midi vrai, puis diminuera depuis ce maximum jusqu'à
zéro.

Comparons maintenant ce qui arrive à Paris, à deux époques où la durée
du jour est différente. Plus le jour est long, plus la hauteur
méridienne du soleil est grande.

Donc plus le jour est long, plus grande est la quantité de chaleur reçue
par la terre, parce qu'elle est frappée _plus longtemps et avec une plus
grande intensité moyenne_ par les rayons solaires.]

[Illustration: 150, Fig. 1]

=191=. Dans nos climats, et en général pour tout lieu situé entre le
pôle et le tropique, _la hauteur méridienne du soleil au-dessus de
l'horizon varie_ avec _la déclinaison du soleil_ dans le même sens que
la durée du jour. C'est ce que l'on voit clairement sur la _fig._ 63.
Supposons que PEP'E' soit le méridien du lieu M; la hauteur méridienne
du soleil est l'angle que fait, avec la trace IH' de l'horizon, le rayon
qui va chaque jour du centre I de la terre au point de l'arc TS' où
passe le soleil à midi. Ex.: le jour où le soleil décrit le cercle
diurne LDCK, sa hauteur méridienne est l'angle DIH', mesuré par l'arc
DH'. Cette hauteur méridienne, qui est à son minimum, S'IH', au solstice
d'hiver, en même temps que la durée du jour, augmente continuellement
avec celle-ci à mesure que le soleil remonte sur l'écliptique, se
rendant du solstice d'hiver au solstice d'été, puis diminue avec la
durée du jour dans l'intervalle du solstice d'été au solstice d'hiver.
Aux environs de chaque solstice, la hauteur méridienne, avant de varier
dans un autre sens, reste quelque temps stationnaire avec la déclinaison
du soleil et la durée du jour.

A Paris, le minimum de la hauteur méridienne du soleil est 17° 42' au
solstice d'hiver; le maximum 64° 38', au solstice d'été; la moyenne est
41° 10', à l'un ou à l'autre équinoxe.

=192.= Mais la température d'un lieu, à chaque instant, ne dépend pas
seulement de la quantité de chaleur qu'il reçoit à cet instant; cette
chaleur, qu'il tend à perdre par le rayonnement, lui est plus ou moins
conservée par l'atmosphère. Il résulte de là que le maximum de la
température _du jour_ n'a pas lieu à midi, moment où la terre reçoit la
plus grande quantité de chaleur, mais à deux heures environ; un peu plus
tôt en hiver, un peu plus tard en été.

En voici la raison: A midi, par exemple, le sol reçoit plus de chaleur
qu'il n'en perd par le rayonnement, et la température s'élève. Il en est
de même jusqu'à deux heures environ; alors l'intensité du rayonnement
ayant augmenté progressivement avec la température, tandis que la
quantité de chaleur reçue à chaque instant a diminué avec la hauteur du
soleil, la perte surpasse le gain, et la température s'abaisse jusqu'à
l'heure du lendemain où le sol recommence à gagner plus qu'il ne perd.

L'heure du maximum n'est pas la même partout; sur les montagnes elle se
rapproche de midi, parce que l'atmosphère moins dense s'oppose moins au
rayonnement.

Un effet semblable se produit quant à la plus haute température _de
l'année_. S'il n'y avait pas accumulation de la chaleur conservée par
l'atmosphère, le jour le plus chaud de l'année serait le 21 juin, jour
du solstice d'été; le jour le plus froid serait le 21 décembre, vers le
solstice d'hiver. Mais, à cause de l'accumulation susdite, la plus haute
température de l'année a lieu un mois plus tard, à la fin de juillet; le
minimum trois semaines plus tard, vers le milieu de janvier.

Au solstice d'été, par exemple, la somme des quantités de chaleur reçues
par le sol dans un jour solaire surpasse la somme de celles qu'il perd
dans le même temps par le rayonnement de jour et de nuit; par suite, la
température moyenne s'élève d'un jour à l'autre; cela continue ainsi
pendant le mois qui suit. Après ce mois, le rayonnement ayant augmenté
avec la température, et la quantité de chaleur reçue ayant diminué avec
la hauteur méridienne et la durée du jour, la perte de chaleur pour
chaque jour solaire finit par surpasser le gain, et la température
moyenne s'abaisse. Cela dure ainsi jusqu'à l'époque de l'année où le
gain redevient de nouveau supérieur à la perte. Nous n'avons pas besoin
de faire remarquer l'influence des longues nuits.

=193=. Les variations de la température n'ont pas, en réalité, la
régularité qui vient d'être indiquée; d'autres causes accidentelles
influent considérablement sur ces variations. Les vents qui soufflent
irrégulièrement, tantôt d'un côté, tantôt d'un autre, apportant dans un
lieu des masses d'air considérables ayant pris la température différente
qui règne dans d'autres régions de la terre, modifient la température du
lieu tantôt dans un sens, tantôt dans un autre. La température générale
d'un lieu peut encore être influencée _par le voisinage des mers, d'une
chaîne de montagnes, la hauteur du lieu au-dessus du niveau de la mer_.
(V. la note ci-dessous)[80], et en général _par la distribution des
terres et des eaux dans la région du globe où il se trouve_. Mais ces
causes sont en général du domaine de la météorologie, et nous n'avons
pas à nous en occuper ici.

[Note 80: L'atmosphère s'oppose au rayonnement de la chaleur terrestre,
et par suite au refroidissement qui en résulte. Mais à mesure qu'on
s'élève au-dessus du niveau des mers, l'air moins dense s'oppose moins
au rayonnement; de là un froid plus grand. On a remarque que la
température, à latitude égale, s'abaisse d'environ 1° pour 185 mètres
d'élévation.]

=194=. PRINCIPALES ZONES TERRESTRES. Sous le rapport des températures,
et quelquefois de la durée du plus long jour et de la plus longue nuit,
on divise la terre en un certain nombre de zones dont nous indiquerons
seulement les principales.

On appelle _tropiques terrestres_ deux parallèles tracés sur le globe
terrestre à 23° 28' de part et d'autre de l'équateur; les tropiques
terrestres correspondent aux tropiques célestes (nº 120) (V. _fig._ 63,
les cercles ST, S'T').

On appelle _cercles polaires_ deux parallèles situés à 23° 28' des pôles
(66° 32' de l'équateur). Le cercle polaire boréal (cercle _pq_, fig. 63)
passe en Islande, au nord de la Suède, dans la Sibérie, le pays des
Esquimaux, et le Groënland. Le cercle polaire austral (cercle _p'q'_,
fig. 63) est défendu par des glaces perpétuelles.

La surface de la terre est partagée par ces quatre cercles en cinq zones
principales: 1º _La zone torride_, comprise entre les deux tropiques,
qui a 46° 50' de largeur; 2º deux zones tempérées dont chacune est
comprise entre l'un des tropiques et un cercle polaire; 3º deux zones
glaciales comprises entre les cercles polaires et les pôles.

La zone torride occupe à peu près 0,40 de la surface totale de notre
globe; les zones tempérées 0,52, et les zones glaciales 0,08.

=195=. _Température des différentes zones_. Dans la zone torride, entre
les tropiques, le soleil s'écartant peu du zénith à midi, les rayons
tombent chaque jour verticalement sur la terre et y pénètrent en
très-grande quantité. Aussi la température moyenne de cette zone
est-elle très-élevée; à l'équateur elle est de 28° centigrades.

Dans les zones tempérées, à mesure que la latitude augmente, les rayons
du soleil, tombent plus obliquement sur la terre, y pénètrent en moins
grande quantité; la température moyenne diminue rapidement. A la
latitude de Paris elle n'est plus que de 10 à 11°. Au cap nord, à la
latitude de 70°, elle est descendue à 0°.

Dans les zones glaciales, à l'obliquité du soleil se joint la longueur
des nuits. Le froid y est toujours très-intense, c'est la région des
glaces perpétuelles.

REMARQUES. A latitude égale, la température est plus élevée en Europe
qu'en Amérique et en Asie. Par exemple: la température moyenne est la
même à Londres, dont la latitude est 51° 31', qu'à New-York dont la
latitude est 41° 55'.

L'hémisphère austral est plus froid que l'hémisphère boréal. La ceinture
de glaces perpétuelles qui entoure le pôle boréal ne s'étend pas à plus
de 9°, tandis que celle qui entoure le pôle austral s'étend à plus de
18°.

DISTANCE DU SOLEIL À LA TERRE.--SES DIMENSIONS.

=196=. Après nous être occupé du mouvement du soleil et de ses
principaux effets, nous allons montrer comment on a pu trouver la
distance qui nous sépare de cet astre et ses vraies dimensions.

A propos de l'orbite solaire, nous avons dit que les diverses valeurs
que prend successivement le diamètre apparent du soleil, fournissent
autant de nombres proportionnels aux valeurs correspondantes de la
distance du soleil à la terre. On connaît ainsi la loi suivant laquelle
varie cette distance; mais cela n'apprend rien sur sa grandeur absolue.
Il faut donc recourir à d'autres moyens pour déterminer cette grandeur.

Ainsi que nous l'avons déjà dit à propos des étoiles, nº 51, la distance
d'un astre à la terre s'obtient de la même manière que sur la terre la
distance d'un lieu où on est à un point inaccessible mais visible. On
fait choix d'une base, et on cherche à déterminer les angles adjacents
et l'angle sous lequel cette base serait vue du lieu inaccessible. La
seule difficulté de l'opération, quand il s'agit d'un astre, consiste
dans la grandeur de la distance à mesurer relativement à la base dont on
peut disposer; cette grandeur, en rendant l'angle très-petit, donne une
grande influence sur le résultat aux erreurs d'observations. La base
dont on se sert pour le soleil, la lune, et les planètes, est le rayon
de la terre; l'angle opposé est la _parallaxe_ de l'astre.

=197=. PARALLAXE DU SOLEIL. La _parallaxe_ d'un astre S (_fig._ 71
ci-après), relativement à un lieu A de la terre, est l'angle ASO, sous
lequel serait vu, du centre même de l'astre, le rayon AO de la terre qui
aboutit au lieu A. Quand l'astre est à l'horizon, en S', sa parallaxe
est dite _horizontale_; quand il est déjà à une certaine hauteur
au-dessus de l'horizon, cet angle ASO est dit une parallaxe de
_hauteur_.

=198=. On sait déjà que, à cause de l'immense éloignement des étoiles,
leurs parallaxes ainsi définies sont trop faibles pour que nous
puissions les déterminer (nº 51). Nous n'avons donc à nous occuper sous
ce rapport que du soleil, de la lune et des planètes; les parallaxes de
ces astres sont encore des angles très-petits.

=199=. _La parallaxe horizontale du soleil, à sa distance moyenne de la
terre, est 8",57_, à moins de 0",04 d'approximation en plus ou en moins.

=200=. _La distance moyenne du soleil à la terre est d'environ 38000000
lieues de 4 kilomètres_ (24000 fois le rayon de la terre).

[Illustration: 159, Fig. 71]

Supposons qu'on observe le soleil à l'horizon; le centre O de la terre,
le centre S du soleil, et le lieu d'observation A sont reliés par un
triangle ASO (_fig._ 71), dans lequel l'angle A = 90°; l'angle ASO =
8",57 (parallaxe horizontale), l'angle O = 8°-8",57[81]; un pareil
triangle peut sans erreur sensible être considéré comme isocèle, comme
si l'angle O était égal à l'angle A. Cela admis, le rayon, AO = _r_, de
la terre est la corde d'un petit arc de cercle de 8",57, décrit du
sommet S, avec un rayon SO précisément égal à la distance cherchée du
soleil à la terre, que nous désignerons par D. On peut, sans erreur
relative sensible, considérer ce petit arc de 8",57 comme égal à sa
corde AO = _r_, avec laquelle il se confond. En comparant cette longueur
à celle de la circonférence tout entière, 2πD, on a

2πD/_r_ = 360°/8",57 = 1296000"/8",57 = 1296000/8,57

d'où on déduit aisément D = 1296000 · _r_ / 2π · 8,57.

[Note 81: La résolution de triangle ASO par la trigonométrie donne _r_ =
D sin P; d'où D = _r_ / sin P; à cause de la petitesse de P (8",57), on
peut remplacer sin P par P, qui est la longueur d'un arc de 8",57 dans
la circonférence dont le rayon est 1.]

En faisant le calcul on trouve D=24068_r_ (nous avons mis 24000 en
nombre rond). Le rayon considéré dans le calcul de la parallaxe est le
rayon de l'équateur égal à 6377398 mètres.

La parallaxe n'étant connue que par approximation, avec une erreur
possible de 0",04, en plus ou en moins, on ne peut répondre de la
distance du soleil à la terre qu'à quelques centaines de mille
kilomètres près. Avec cette approximation, on estime que la distance
moyenne est d'environ 38000000 lieues de 4 kilomètres[82].

[Note 82: Cette distance moyenne est le demi-grand axe de l'orbite
solaire (nº 129). La distance apogée est 24728, et la distance périgée
23648.]

=201=. DIAMÈTRE DU SOLEIL; SON VOLUME, SA MASSE, SA DENSITÉ, _comparés
aux mêmes quantités relatives à la terre_.

1º _Le diamètre réel du soleil égale 112 fois celui de la terre_ (ce qui
fait environ 357000 lieues de 4 kilomètres).

2º _Le volume du soleil égale 1405000 fois celui de la terre_.

3º _La masse du soleil égale 355000 fois celle de la terre_.

4º _La densité du soleil est à très-peu près le ¼ de la densité de la
terre_.

=202=. DIAMÈTRE RÉEL DU SOLEIL. Reprenons le triangle ASO (_fig._ 71),
et prolongeons la longueur AO, considérée comme un petit arc de cercle
très-aplati, d'une longueur égale OB, (_fig._ 71); AOB sera le diamètre
réel de la terre; l'angle ASB, double de la parallaxe horizontale ASO,
est le diamètre apparent de la terre vue du soleil (nº 124). Imaginons
ensuite qu'on joigne de même le centre O de la terre aux deux extrémités
A' et B' d'un diamètre A'SB' du soleil; on obtient ainsi un triangle
A'OB', tout à fait analogue au triangle ASB (faites la figure), dont
l'angle au sommet, A'OB', est précisément le diamètre apparent du soleil
au même instant (nº 124). Les diamètres réels AOB, A'SB', peuvent être
regardés, d'après les considérations qui précèdent, comme se confondant
avec les petits arcs de cercle AB, A'B'; de même rayon (OS=SO); qu'ils
sous-tendent; mais des arcs de cercle de même rayon sont entre eux comme
les angles au centre ASB, A'OB', qui leur correspondent (2º livre de
géom.).

On a donc

A'B' / AB ou 2R / 2_r_ = A'OB' / ASB

Mais, à la distance moyenne, le diamètre apparent du soleil A'OB' = 32'
3",3; et ASB double de la parallaxe horizontale = 8",57 · 2 = 17",14; on
a donc:

2R / 2_r_ = 32' 3",3 / 17",14 = 1923",3 / 17",14 = 1923,30 / 17",14

D'où on déduit R = 112_r_.

2R = 357000 lieues de 4 kilomètres.

2º Les surfaces des deux globes sont entre elles comme les carrés des
rayons, ou comme 112² / 1; leurs volumes sont comme les cubes des mêmes
rayons, comme 112³: 1.

On a S = 1254_s_; V = 1404928_v_.

Nous avons pris en nombre rond V = 1405000_v_.

On se fera une idée du volume énorme du soleil en imaginant que le
centre de cet astre vienne un instant coïncider avec celui de la terre;
le globe solaire ainsi placé irait non-seulement jusqu'à la lune, mais
encore une fois au delà.

3º La masse d'un corps se définit vulgairement la quantité des molécules
matérielles qui composent ce corps. Mais comment s'imaginer les
dernières molécules matérielles d'un corps et en évaluer le nombre?

On prend la masse d'un certain corps pour unité, et on évalue le rapport
des autres masses à celle-là d'après les principes suivants:

La masse d'un globe sphérique, comme la terre ou le soleil, se mesure
par le chemin que ce globe, en vertu de son attraction propre, fait
parcourir dans la première unité de temps à un corps placé à une
distance convenue.

Ou bien si l'on veut:

Les masses de deux globes sphériques sont entre elles comme les vitesses
avec lesquelles ces deux globes attirent respectivement un corps
quelconque placé à égale distance de l'un et de l'autre. (V. le principe
de gravitation.)

On a trouvé, d'après cela, pour le soleil et pour la terre:

M = 354936_m_

Nous avons mis en nombre rond M = 355000_m_.

4º La densité d'un corps homogène est le nombre qui mesure la masse de
l'unité de volume du corps. Si le corps n'est pas homogène, la densité
est la masse moyenne de l'unité de volume.

Il résulte de là que si M est la masse d'un corps, V son volume, D sa
densité, M = V · D. Écrivons ces égalités pour le soleil et la terre:

M = V · D; _m_ = _v_ · _d_;

on déduit de là

M/m = (V/_v_) · (D/_d_); d'où D/_d_ = (M/_m_)/(V/_v_)

Mais M/_m_ = 355000, et V/_v_ = 1405000; d'où D/_d_ = 355000/1405000. On
trouve D/_d_ = 0,252, ou 1/4 à peu près.

=203.= TACHES DU SOLEIL. SA ROTATION. A l'œil nu le soleil nous apparaît
comme un disque brillant d'un éclat uniforme; mais quand on l'examine
avec une lunette, munie de verres colorés pour affaiblir l'éclat du
disque, on aperçoit à sa surface des taches noires de formes
irrégulières dont la _fig._ 74 peut donner une idée.

[Illustration: 162, Fig 74]

Si on observe ces taches sur le bord oriental du soleil, on les voit se
déplacer chaque jour sur le disque, allant de l'Est à l'Ouest avec une
vitesse qui croît jusqu'au milieu du disque, puis décroît ensuite. Après
avoir décrit des droites parallèles ou des demi-ellipses très-aplaties,
ayant toutes leur convexité tournée vers la même région, ces taches
disparaissent lorsqu'elles ont atteint le bord occidental. Plusieurs
d'entre elles s'évanouissent pendant leur mouvement visible; d'autres,
ayant achevé leur course visible et disparu au bord occidental, ne
reparaissent plus; elles ont dû se dissiper sur la face du soleil en ce
moment invisible pour nous. D'autres taches enfin, après avoir disparu
au bord occidental, reparaissent au bord opposé, et font ainsi une ou
plusieurs révolutions complètes avant de se dissoudre. En déterminant (à
l'aide des AR et des D) les positions successives de chaque tache
relativement au centre du soleil, on peut construire la courbe que cette
tache paraît décrire sur le disque. Ou a constaté ainsi que toutes ces
taches décrivent des courbes semblables et parallèles; on reconnaît en
même temps que celles qui achèvent leur révolution reviennent toutes à
la même position au bout du même temps, qui est de 27j, 3.

=204=. ROTATION DU SOLEIL. La nature de ces mouvements, leur régularité,
leur ensemble, l'égalité des temps pendant lesquels une tache est
successivement visible et invisible, ne peuvent s'expliquer que par un
mouvement de rotation du soleil sur lui-même, analogue à celui que nous
avons reconnu à la terre. Cette rotation admise, ayant déduit d'un
nombre suffisant d'observations particulières la position de l'axe de
rotation et celle de l'équateur céleste, on a pu constater ensuite
l'accord du mouvement de rotation avec les apparences du mouvement
général des taches; cet accord met hors de doute le mouvement de
rotation.

_Il résulte donc de l'observation des taches du soleil que cet astre
tourne sur lui-même, d'Occident en Orient, autour d'un axe central. Il
fait une révolution en_ 25j, 34 [83].

[Note 83: Durée de la rotation. Les taches qui font une révolution
entière, mettant toutes 27j, 3 à l'accomplir, il semblerait au premier
abord que 27j,3 doit être la durée d'une révolution du soleil; mais pour
déterminer cette durée il faut avoir égard non-seulement au mouvement
des taches, mais encore au changement de place du soleil par rapport à
la terre, qui change la position du point de vue; il faut combiner ces
deux mouvements. C'est d'après des observations ainsi faites sur des
taches nombreuses que M. Laugier a trouvé la durée ci-dessus indiquée
(25j, 34).]

L'axe du soleil fait avec celui de l'écliptique un angle de 7° 9';
l'équateur solaire fait donc avec le même plan un angle de 82° 51'; il
le coupe d'ailleurs suivant une droite faisant avec la ligne des
équinoxes un angle de 80°; On remarque que jamais les taches ne se
rencontrent dans le voisinage des pôles du soleil; elles sont comprises
dans une région qui s'étend à 30° environ de son équateur.

[Illustration: 164, no title]

=205=. _Détails particuliers sur les taches du soleil_. Voici des
détails sur les taches du soleil qui motivent l'hypothèse que l'on fait
sur la constitution physique de cet astre. Ces taches ont été observées
pour la première fois par Fabricius en 1611, et par Galilée en 1612.
Elles ont une forme irrégulière et variable, mais sont nettement
définies sur leur contour; elles sont généralement entourées d'une sorte
de bordure moins sombre, appelée _pénombre_. La _figure_ 75 peut donner
une idée de ces taches. Voici ce qu'en dit sir John Herschell dans son
_Traité d'astronomie_[84].

[Note 84: Traduction de M. Cournot.]

«Les taches ne sont pas permanentes; d'un jour à l'autre, ou même
d'heure en heure, elles semblent s'élargir ou se resserrer, changer de
forme, puis disparaître tout à fait, ou reparaître dans d'autres parties
du disque où il n'y en avait pas auparavant. En cas de disparition,
l'obscurité centrale se resserre de plus en plus et s'évanouit avant les
bords. Il arrive encore qu'elles se séparent en deux ou plusieurs
taches. Toutes ces circonstances annoncent une mobilité extrême qui ne
peut convenir à un fluide, et accuse un état violent d'agitation qui ne
semble compatible qu'avec l'état atmosphérique et gazeux de la matière.
L'échelle sur laquelle s'accomplissent ces mouvements est immense. Une
seconde angulaire, pour l'observateur terrestre, correspond sur le
disque solaire à 170 lieues, et un cercle de ce diamètre (comprenant
plus de 22000 lieues carrées) est le moindre espace que nous puissions
voir distinctivement à la surface du disque solaire. Or on a observé des
taches dont le diamètre surpassait 16000 lieues, à peu près cinq fois le
diamètre de la terre. Pour qu'une pareille tache disparaisse en six
semaines (les taches durent rarement plus longtemps), il faut que les
bords, en se rapprochant, décrivent plus de 300 lieues par jour.

»Dans le voisinage des grandes taches, ou des groupes de taches, on
observe souvent de larges espaces couverts de raies bien marquées,
courbes ou à embranchements, qui sont plus lumineuses que le reste du
disque, et qu'on nomme _facules_. On voit fréquemment des taches se
former auprès des facules lorsqu'il n'y en avait pas auparavant. On peut
les regarder très-probablement comme les faîtes de vagues immenses
produites dans les régions supérieures de l'atmosphère solaire, à la
suite de violentes agitations.»

=206=. CONSTITUTION PHYSIQUE DU SOLEIL. La science ne nous apprend rien
de positif sur la constitution physique du soleil. Nous sommes réduits,
sous ce rapport, à des conjectures plus ou moins probables. Les
observations faites sur les taches ont conduit à l'hypothèse suivante,
imaginée par William Herschell, et généralement admise aujourd'hui. On
suppose que le soleil est un _globe obscur_ entouré de _deux
atmosphères_ concentriques: une première atmosphère dans laquelle flotte
une couche de nuages opaques et réfléchissants; une seconde, lumineuse à
sa surface extérieure. Cette dernière enveloppe, qui nous envoie la
lumière et la chaleur, et détermine le contour visible de l'astre, a
reçu le nom de _photosphère_, c'est-à-dire de sphère lumineuse. Quand
une ouverture se produit dans cette photosphère, nous voyons la couche
nuageuse; de là une tache grise ou pénombre. Quand une ouverture
correspondante se produit dans la couche nuageuse, nous voyons à travers
les deux ouvertures le globe obscur central; de là une tache noire
ordinairement entourée d'une pénombre[85] (V. la _fig._ 75). Il est
probable que ces déchirements temporaires des deux couches sont dus à
des masses de gaz qui, partant du globe intérieur, lancées peut-être par
des volcans puissants, traversent violemment les deux atmosphères en les
déchirant.

[Note 85: Quand une tache est vue de face, la pénombre entoure la tache
comme une auréole circulaire; quand la tache, se déplaçant, approche du
bord, la largeur de la pénombre diminue du côté le plus voisin du
centre, en persistant telle qu'elle est de l'autre côté. Cette pénombre
fait l'effet d'un talus descendant dans l'intérieur du globe, et dont on
verrait toute la surface dans la première position de la tache (près du
centre), puis seulement d'un seul côté quand la tache est vue plus
obliquement. De là l'idée de l'atmosphère opaque à travers laquelle
descendrait ce talus jusqu'au noyau obscur.]

=207=. LUMIÈRE ZODIACALE. On appelle ainsi une lueur très-faible qui, à
certaines époques de l'année, apparaît à l'ouest après le crépuscule du
soir, ou à l'est avant l'aurore. Elle dessine sur la voûte céleste une
sorte de triangle scalène incliné, sans contours bien nets, dont la base
de 20° à 30° repose sur l'horizon, et dont le sommet s'élève quelquefois
à 50° de hauteur (V. _fig._ 76 la partie de la figure située au-dessus
de HH'). Un arc de cercle mené du sommet au milieu de la base coïncide à
peu près avec l'écliptique; en sorte que cette lueur paraît, pour ainsi
dire, couchée sur le zodiaque, dans le sens de sa plus grande dimension;
de là vient son nom.

[Illustration: 166, Fig. 76]

Dans nos climats, la lumière zodiacale se voit en général le soir à la
fin du crépuscule, pendant les mois de mars et d'avril, et le matin
avant l'aurore, en septembre et octobre; dans les régions équatoriales
on la voit toute l'année.

Deux circonstances paraissent en effet décider de sa visibilité: 1º la
brièveté du crépuscule, 2º la position plus ou moins inclinée de l'arc
de l'écliptique sur laquelle cette lueur se projette. On peut d'après
cela se convaincre, à l'aide d'un globe terrestre, que les époques les
plus favorables pour la voir sont celles que nous avons citées.

La lumière zodiacale participe d'ailleurs au mouvement diurne; elle
accompagne le soleil; son extrémité supérieure s'abaisse de plus en
plus, et au bout de quelque temps elle disparaît entièrement. On se fait
une idée nette des circonstances de ce phénomène, en imaginant que le
soleil soit environné d'une immense atmosphère, de forme lenticulaire,
_fig._ 76 (très-peu dense, car on voit les étoiles à travers), dont
l'astre occuperait le centre, et dont la plus grande dimension serait
dirigée dans le sens de l'écliptique. Nous n'en voyons que la partie
située au-dessus de l'horizon H'H.

=208=. IRRÉGULARITEÉS DU MOUVEMENT APPARENT DU SOLEIL.

Pour terminer en ce qui concerne le mouvement apparent du soleil par
rapport à la terre, il nous reste à faire connaître succinctement
quelques irrégularités dont ce mouvement est affecté, et dont nous avons
fait abstraction à dessein. Nous nous occuperons principalement du
phénomène connu sous le nom de _précession des équinoxes_. Pour bien
comprendre ce que nous avons à dire à ce sujet, il nous faut définir ici
quelques termes très-usités d'ailleurs en astronomie.

[Illustration: 167, Fig. 77]

=209=. LONGITUDES ET LATITUDES CÉLESTES. En outre de l'ascension droite
(AR) et de la déclinaison (D), les astronomes font souvent usage, pour
définir d'une manière précisé la position d'un astre sur la sphère
céleste, de deux quantités analogues à l'AR et à la D, mais qui en
diffèrent en ce qu'elles se rapportent à l'écliptique, au lieu de se
rapporter à l'équateur: ce sont _la longitude_ et la _latitude
célestes_.

Soient la sphère céleste, O (_fig._ 77), E♈E' l'équateur, S'♈S
l'écliptique, OP l'axe du monde, ON l'axe de l'écliptique, _e_ un astre
quelconque, P_e_D un arc de grand cercle perpendiculaire à l'équateur,
N_e_L un autre arc perpendiculaire à l'écliptique. On sait que
l'ascension droite de l'astre _e_ est l'arc ♈D, que sa déclinaison est
_e_D. Sa longitude est ♈L, et sa latitude _e_L.

=210=. LA LATITUDE d'un astre _e_, est sa distance _e_L à l'écliptique,
comptée sur le demi-cercle qui passe par cet astre et les pôles de
l'écliptique. La latitude est _boréale_ ou _australe_ suivant que le
pôle de l'écliptique le plus voisin de l'astre est boréal ou austral;
elle est positive dans le premier cas, négative dans le second, et varie
de 0 à 90°. Le demi-cercle N_e_L se nomme _cercle de latitude_.

=211=. On appelle LONGITUDE d'un astre, _e_, l'arc ♈L compris entre un
point déterminé de l'écliptique et le cercle de latitude de cet astre.
L'origine des longitudes est le point équinoxial du printemps, ♈; elles
se comptent de l'ouest à l'est; à partir de ce point, et varient en
général de 0° à 360°.

=212=. Le mouvement diurne apparent de la sphère céleste, autour d'un
axe perpendiculaire à l'équateur, permet de déterminer facilement
l'ascension droite et la déclinaison d'un astre à l'aide des instruments
méridiens, comme nous l'avons expliqué, nº 34 à 39. Mais cet axe de
rotation étant oblique à l'écliptique, on ne peut arriver par le même
moyen à la connaissance des longitudes et des latitudes.

_La longitude et la latitude d'un astre se déduisent par un calcul de
trigonométrie sphérique, de son ascension droite et de sa déclinaison
observées_[86].

[Note 86: Ce calcul consiste dans la résolution du triangle sphérique
NPe (_fig_. 77), dont nous allons indiquer les éléments. On y connaît:
1º le côté Pe = 90°-Déclinaison; 2º le côté NP qui mesure l'angle PON,
inclinaison de l'écliptique sur l'équateur; 3º l'angle NP_e_ qui a pour
mesure l'arc ED = 90° + ♈D = 90° + AR. Connaissant deux côtés d'un
triangle et l'angle compris, on peut résoudre ce triangle et calculer:
1º le troisième côté N_e_ = 90°-Latitude; 2º l'angle PN_e_, qui a pour
mesure l'arc d'écliptique LS = 90°-Longitude; d'où la longitude et la
latitude célestes.]

C'est pour rendre plus facile cette conversion très-fréquente des
ascensions droites et des déclinaisons en longitudes et en latitudes,
qu'on a choisi pour origine commune des ascensions droites et des
longitudes _le point équinoxial_ ♈, commun aux deux cercles sur lesquels
se comptent ces coordonnées.

=213=. MOUVEMENTS DIRECTS, RÉTROGRADES. On sait que le soleil se meut
sur l'écliptique, _de l'ouest à l'est_; sa latitude est constamment
_nulle_; ses diverses positions se distinguent par leurs longitudes.

Comme on a souvent à considérer, en astronomie, des mouvements qui ont
lieu sur la sphère céleste, soit le long de l'écliptique, soit suivant
des lignes qui ne s'en écartent pas beaucoup, on a adopté des
dénominations spéciales pour désigner le sens de ces mouvements. Tout
mouvement qui s'effectue dans le même sens que celui du soleil, de
l'ouest à l'est (dans le sens des longitudes croissantes), est dit un
_mouvement direct_; dans le sens contraire, le mouvement est dit
_rétrograde_.

=214=. On dit que deux astres sont _en conjonction_ quand leurs
longitudes sont égales; _en opposition_, quand leurs longitudes
diffèrent de 180°; _en quadrature_, quand elles diffèrent de 90°.

PRÉCESSION DE ÉQUINOXES.

=215=. Supposons qu'à une certaine époque on ait formé un catalogue des
ascensions droites et des déclinaisons d'un certain nombre d'étoiles,
rapportées au point équinoxial ♈, puis qu'à d'autres époques, séparées
les unes des autres par des intervalles de plusieurs années, on ait
recommencé plusieurs fois la même opération, en ayant soin de déterminer
chaque fois la position précise du point équinoxial ♈, comme nous
l'avons indiqué au nº 135. On reconnaît ainsi que les ascensions droites
des étoiles augmentent avec le temps; les déclinaisons varient aussi. La
loi de ces variations est assez complexe et difficile à établir; mais si
on convertit les ascensions droites et les déclinaisons en longitudes et
en latitudes, une loi très-simple se manifeste aussitôt:

_Les longitudes célestes de toutes les étoiles augmentent
proportionnellement au temps, à raison de 50",2 environ par an, tandis
que leurs latitudes ne varient pas sensiblement._

EXEMPLE: _Épi de la Vierge_.

Longitude; d'après Hipparque, 128 ans avant J.-C. 174° 7' 30"--Bradley,
en 1760....... 200° 29' 40"--Maskelinè, en 1802... 201° 4' 41"

[Illustration: 169, Fig. 78]

=216=. Cette égale variation des longitudes de toutes les étoiles peut
s'expliquer de deux manières:

1º Ou bien, le point équinoxial ♈, origine des longitudes, restant fixe,
chaque étoile e (_fig._ 78) se déplace, en tournant autour, de l'axe ON,
de manière que son cercle de latitude s'éloigne de ♈ d'un mouvement
continu, occupant des positions successives telles que N_e_L,
N_e_(1)L_(1), N_e_(2)L_(2),...; après un an, la longitude de l'étoile
est devenue ♈L_(1) = ♈L + LL_(1) = ♈L + 50",2; après une nouvelle année,
♈L(2) = ♈L(1) + L(1)L(2) = ♈L(1) + 50",2 etc.

2° Ou bien chaque étoile e et son cercle de latitude N_e_L restant fixes
(_fig._ 79), le point équinoxial ♈ s'en éloigne vers l'ouest, d'un
mouvement continu, uniforme, tel que, après un an, la longitude de
l'étoile est devenue ♈(1)L = ♈L + ♈♈(1) = ♈L + 50",2; après deux ans,
♈(2)L = ♈(1)L + ♈(1)♈(2) = ♈(1)L + 50",2, etc.

Si on adoptait la première hypothèse, comme d'ailleurs il résulte de
l'observation que les latitudes des étoiles ne varient pas sensiblement
(L_e_ = L(1)_e_(1) = L(2)_e_(2),...), il faudrait admettre comme
fait général _que toutes les étoiles décrivent de l'est à l'ouest des
cercles parallèles à l'écliptique, exemple: _ee_(1) _e_(2)..., d'un
mouvement direct et uniforme, avec la même vitesse constante de 50",2
par an_. Mais un pareil mouvement général des étoiles n'est pas plus
vraisemblable que le mouvement diurne attribué aux mêmes astres; il
donne lieu aux mêmes objections, et on pourrait répéter ici tout ce qui
a été dit page 22; cette première explication doit donc être rejetée. En
effet, c'est la seconde qui est aujourd'hui exclusivement adoptée.
L'égale variation des longitudes de toutes les étoiles est attribuée au
phénomène suivant que l'on désigne sous le nom de _précession des
équinoxes_.

=217=. PRÉCESSION DES ÉQUINOXES. _Le point équinoxial ♈ et son opposé, ♎
tournent indéfiniment sur l'écliptique d'un mouvement uniforme et
rétrograde, de l'est à l'ouest, avec une vitesse constante d'environ
50",2 par an_ (fig. 79).

[Illustration: 170, Fig. 79.]

Comme nous l'avons déjà fait observer, il résulte de ce mouvement
rétrograde du point équinoxial que la longitude d'une étoile quelconque,
_e_ (_fig._ 79), si elle est ♈L, à une certaine époque, devient après un
an, ♈(1)L = ♈L + ♈(1) = ♈L + 50",2; après deux ans, ♈(2)L = ♈(1)LL
+ ♈(1)♈(2) = ♈(1)L + 50",2, etc. Ce mouvement rétrograde des points
équinoxiaux est désigné sous le nom de _précession des équinoxes_, parce
qu'il en résulte cette conséquence très-remarquable:

_L'époque à laquelle arrive un équinoxe du printemps précède
chaque-année d'environ 20m 25s celle à laquelle il arriverait, si le
mouvement rétrograde des points équinoxiaux n'avait pas lieu_.

Ceci s'explique aisément (_fig._ 79).

En effet, un équinoxe du printemps a lieu quand le soleil et le point
équinoxial se rencontrent en un certain point ♈ de l'écliptique. A
partir de ce moment, tandis que le soleil continue à tourner sur
l'écliptique dans le sens ♈S♎S' le point équinoxial tourne sur
l'écliptique dans le sens contraire ♈S'♎S. Ces deux points mobiles,
aussitôt séparés, marchent donc à la rencontre l'un de l'autre, mais
avec des vitesses très-différentes. Le point équinoxial arrivé en ♈_(1),
est de nouveau rencontré par le soleil; alors a lieu un nouvel équinoxe
du printemps. Si le mouvement rétrograde des points équinoxiaux
n'existait pas, ce nouvel équinoxe n'aurait lieu qu'au retour du soleil
en ♈; comme par le fait il s'en faut alors de l'arc ♈_(1)♈ = 50",2 que
le soleil soit de retour en ♈, l'époque du nouvel équinoxe est avancée
du temps qu'il faut au soleil pour parcourir cet arc de 50",2,
c'est-à-dire d'environ 20m 25s.

CONSÉQUENCES DE LA PRÉCESSION DES ÉQUINOXES.

=218=. Une des premières conséquences de la précession des équinoxes est
la différence entre l'année sidérale et l'année tropique.

Année sidérale. On appelle _année sidérale_ le temps qui s'écoule entre
deux retours consécutifs du soleil au même point ♈ de l'écliptique.

On peut concevoir que le cercle de latitude N♈ soit celui d'une étoile
fixe _e_; on peut donc dire que l'année _sidérale_ est le temps qui
s'écoule entre deux retours consécutifs du soleil au cercle de latitude
d'une étoile déterminée quelconque; de là le nom d'_année sidérale_.

=219=. _Différence entre l'année sidérale et l'année tropique_.
Supposons qu'une année tropique et une année sidérale commencent toutes
deux au même équinoxe du printemps, le soleil étant en ♈ sur
l'écliptique; l'année tropique finit quand le soleil arrivé en ♈_(1) a
encore un arc ♈_(1)♈ = 50",2 à parcourir pour être de retour en ♈. Le
soleil parcourt donc 360° de l'écliptique en une année sidérale, et
360°-50",2 en une année tropique. La vitesse moyenne étant supposée la
même durant ces deux années, celles-ci sont entre elles comme ces deux
nombres 360° et 360°-50",2. Donc une année sidérale = 365j.sol.moy.,2422
· 360° / (360°-50",2). On trouve ainsi 1an.sid. = 365j.sol.moy.,25638.

La différence est 0j,01418 = 20min, 25s[87].

[Note 87: Nous avons déjà indiqué cette différence entre l'année
tropique et l'année sidérale, nº 217.]

=220=. DÉSACCORD ENTRE LES SIGNES ET LES CONSTELLATIONS DU ZODIAQUE. La
rétrogradation des points équinoxiaux a encore sur le zodiaque un effet
remarquable que nous avons déjà signalé nº 123. Dès avant Hipparque, on
avait pris le point équinoxial du printemps pour origine des divisions
du zodiaque partagé en douze parties égales nommées signes, et on avait
donné à chacun de ces douze espaces égaux le nom de la constellation qui
l'occupait à cette époque (nº 123). Ainsi le soleil entrant dans le
premier signe à l'époque de l'équinoxe du printemps, y trouvait la
constellation du _Bélier_; de là le nom de _signe du Bélier_; un mois
après, entrant dans le second signe, il y rencontrait la constellation
du Taureau, etc., jusqu'au douzième signe où se trouvait la
constellation des Poissons. Aujourd'hui il n'en est plus de même; comme
il s'est écoulé 2000 ans environ depuis l'invention du zodiaque, le
point équinoxial ♈ a rétrogradé vers l'ouest de 50",2 · 2000 ou de 27°
53' à peu près; chaque signe ayant une étendue de 30° dans le sens de
l'écliptique, le point ♈ est venu se placer à peu près à l'endroit où
commençait le douzième signe des anciens, celui des Poissons.

Il résulte de là que le soleil, entrant à l'équinoxe dans le premier
signe, toujours nommé le _Bélier_, y rencontre la constellation des
_Poissons_; un mois après, entrant dans le signe du _Taureau_, il y
trouve la constellation du _Bélier_, etc., etc. Tous les signes ont
rétrogradé d'une place à peu près. Ce désaccord ne peut qu'augmenter
avec le temps, jusqu'à ce que le point équinoxial ayant fait le tour de
l'écliptique soit revenu à la position qu'il occupait il y a 2000
ans[88].

[Note 88: V. dans les notes, à la fin du chapitre, un Appendice sur ce
qui vient d'être dit sur la précession des équinoxes et ses
conséquences.]

MOUVEMENT RÉEL DE LA TERRE.

=221=. Quand nous étudions avec précision les diverses positions
successivement occupées par le soleil par rapport à un lieu déterminé de
la terre, cet astre nous paraît animé à la fois de deux mouvements: 1º
du mouvement diurne qui lui est commun avec les étoiles; 2º d'un
mouvement de translation qui lui est propre, le long d'un orbite
elliptique dont la terre occupe un foyer. Ainsi que nous l'avons
expliqué nº 26, le premier mouvement n'est qu'une apparence due à la
rotation de la terre. Sachant que le mouvement diurne du soleil n'a rien
de réel, on peut se demander également s'il n'en est pas de même de son
mouvement de translation autour de la terre. Ne pourrait-il pas se faire
que celui-ci ne fût aussi qu'une simple apparence due à un second
mouvement dont la terre serait animée en même temps qu'elle tourne
autour de son axe. Il y a bien des exemples de mouvements composés
analogues à celui que l'on est ainsi conduit à attribuer à la terre; une
pierre lancée dans une direction quelconque tourne sur elle-même plus ou
moins rapidement en même temps qu'elle parcourt sa trajectoire
parabolique. La terre étant un corps isolé de toutes parts (nº 59), et
pouvant par conséquent se comparer à la pierre, on conçoit qu'elle
puisse se mouvoir comme celle-ci autour de son centre de gravité, tandis
que ce point, mobile lui-même, décrit une certaine courbe dans l'espace.
Voyons donc si un pareil mouvement de la terre n'expliquerait pas le
second mouvement apparent du soleil.

[Illustration: 173, Fig. 82]

=222=. Pour simplifier, nous ferons abstraction du premier mouvement,
c'est-à-dire du mouvement de rotation de la terre que nous supposerons
réduite à son centre: cela ne change rien évidemment à la question à
résoudre, qui est celle-ci:

_Le centre_ T _de la terre se meut sur une ellipse_ TT'T"... _autour du
soleil immobile au foyer_ S; _un observateur_ (fig. 82) _placé sur la
ligne mobile_ TS, _à peu près au point_ T, _et se croyant immobile dans
l'espace, cherche à se rendre compte des positions différentes que le
soleil lui paraît successivement occuper; à quel résultat doit-il
arriver?_

Cet observateur voit d'abord le soleil se projeter successivement en des
points différents _s_, _s'_, _s"_,... de la sphère céleste; d'où il
conclut que cet astre en mouvement tourne autour de lui dans le sens
_ss's"_.

Les rayons visuels TS_s_, T'S_s'_,T"S_s"_,... étant par le fait dans le
même plan (celui de l'ellipse TT'T"), les positions apparentes _s_,
_s'_, _s"_,... que l'observateur détermine d'abord, sont à
l'intersection de ce plan et de la sphère céleste; _c'est pourquoi en
étudiant sur un globe céleste la forme de la courbe ss'ss"..., on a
trouvé une circonférence_ L'ÉCLIPTIQUE. (Nº 116).

[Illustration: 174, Fig. 53]

Par suite du mouvement elliptique de la terre, T, sa distance au soleil
S varie continuellement (_fig._ 82); le diamètre apparent du soleil vu
de la terre doit donc varier en conséquence. C'est en effet ce que
remarque l'observateur; mais croyant le soleil en mouvement sur
l'écliptique (à cause du déplacement de sa position apparente _s_), il
attribue à ce mouvement la variation continuelle de la distance des deux
globes. En conséquence, pour construire une courbe semblable à celle que
la position réelle du soleil doit suivant lui décrire autour de la
terre, il opère comme nous l'avons indiqué nº 129; il obtient ainsi la
_fig._ 53 que nous reproduisons ici. Mais voyons maintenant ce qui
arrivera si, dans l'hypothèse du mouvement de la terre, on veut
connaître la forme de sa trajectoire TT'T"T"'... (_fig._ 82). On devra,
comme au nº 129, reproduire l'écliptique sur le papier, et y remarquer
de même les positions apparentes _s_, _s'_, _s"_... relevées sur le
globe; puis joindre les points _s_, _s'_, _s"_,... au centre, considéré
comme point d'intersection des rayons visuels issus de la terre; mais
cette fois, comme on sait que ce point d'intersection est le centre du
soleil, on l'appellera S. Jusqu'à présent la nouvelle figure (_fig._ 82)
ne diffère pas de la précédente. Mais, pour continuer, on devra porter
les longueurs proportionnelles aux distances du soleil à la terre, non
plus sur les rayons Ss, Ss', Ss",.... mais sur leurs prolongements ST,
ST', etc. On obtient aussi une courbe TT'T"T‴... semblable à celle que
la terre décrit autour du soleil. Or cette courbe est évidemment
identique à la courbe intérieure SS'S"S‴... du nº 129 (_fig_. 53); en
effet, TS = ST; TS' = ST'; TS" = ST", etc.; l'angle STS' = TST'; S'TS" =
T'ST", etc. Cela posé, si on transporte l'une des courbes sur l'autre,
par exemple SS'S"..... sur TT'T"....., en retournant la première de
manière que T coïncide avec S, TS avec ST, et TS' avec ST', tous les
autres rayons vecteurs coïncidant, les deux courbes coïncident dans
toute leur étendue.

La courbe que le soleil nous paraît décrire autour de la terre supposée
immobile est donc précisément égale à celle que, dans l'hypothèse du
mouvement de la terre, celle-ci décrit autour du soleil.

Ainsi donc il suffit que la terre décrive une ellipse dont le soleil
occupe un des foyers, pour que cet astre nous _paraisse_ animé du
mouvement de translation que nous lui avons attribué jusqu'à présent.

=223=. PREUVES DU MOUVEMENT DE TRANSLATION DE LA TERRE. Les apparences
du mouvement de translation du soleil peuvent donc s'expliquer avec la
même facilité, soit qu'on regarde la terre comme immobile et le soleil
tournant effectivement autour d'elle, soit qu'on regarde la terre comme
se mouvant autour du soleil. Ces apparences ne doivent donc pas entrer
en ligne de compte dans l'examen des motifs que nous pouvons avoir
d'ailleurs de nous arrêter à l'une de ces deux idées plutôt qu'à
l'autre.

Or, la plus simple observation faite avec une lunette nous fait voir
certains corps célestes tournant continuellement autour d'un corps plus
gros qu'eux. Nous voyons de cela plusieurs exemples (ex.: les satellites
d'une planète tournent autour de cet astre). Nulle part nous ne voyons
de grands corps tournant autour d'un plus petit. Peut-on alors admettre
que le soleil, 1405000 fois plus gros que la terre, ayant une masse
355000 fois plus grande, tourne autour de notre globe?

Quand on étudie les apparences que présentent les mouvements des
planètes, on trouve que ces apparences s'expliquent beaucoup plus
simplement dans l'hypothèse du mouvement de la terre autour du soleil
que dans l'hypothèse de son immobilité.

La terre se mouvant autour du soleil peut être assimilée aux planètes;
on reconnaît alors que son mouvement satisfait complètement aux lois
qui, dans cette hypothèse, régissent les mouvements des planètes autour
du soleil.

Il y a plus: ce mouvement des planètes et de la terre est précisément
celui que ces corps doivent avoir autour du soleil, si on s'en rapporte
à la théorie de la gravitation universelle dont l'exactitude a été
vérifiée dans des circonstances si nombreuses et si variées. Ce sont là
évidemment des preuves frappantes du mouvement de la terre autour du
soleil.

On peut ajouter que divers phénomènes, inexplicables dans l'hypothèse
absolue de l'immobilité de la terre ou de son centre, s'expliquent
parfaitement, si on admet son mouvement de translation autour du soleil.
Ex.: le phénomène connu sous le nom d'_aberration_; la _parallaxe
annuelle_ actuellement connue de quelques étoiles.

Ces raisons sont plus que suffisantes pour nous faire admettre le
mouvement de la terre autour du soleil comme une vérité incontestable;
nous tiendrons donc pour certaine la proposition suivante:

_La terre tourne constamment, d'un mouvement uniforme, autour d'un axe
central, effectuant une révolution en 24 heures sidérales; elle se meut
en même temps autour du soleil, son centre décrivant une ellipse dont
cet astre occupe un foyer._

Note I. Calcul des parallaxes.

[Illustration:177, Fig. 72]

=224=. Il existe entre la parallaxe horizontale et une parallaxe de
_hauteur_ quelconque une relation très-simple, qui sert à déduire l'une
de l'autre. Soient _r_ le rayon de la terre, D la distance du soleil à
la terre, P la parallaxe horizontale, _p_ la parallaxe correspondant à
une hauteur quelconque _h_: le triangle AOS, _fig_. 72, donne:

sin ASO = sin ASO = AO = _r_ (1) sin OAS sin ZAS OS D

Si ASO est la parallaxe horizontale, ZAS est un angle droit, sin ZAS =
1, et dans ce cas:

sin P = _r_. (2) D

Si ASO est un parallaxe de hauteur, la distance zénithale ZAS de l'astre
est le complément de sa hauteur _h_ au-dessus de l'horizon(11); sin ZAS
= cos _h_;

l'égalité (1) devient donc sin _p_ = _r_; sin _p_ = _r_ cos _h_; cos _h_
D D

ou enfin sin _p_ = sin P cos _h_. (3) (3)

Les parallaxes étant en général des angles très-petits, notamment celle
du soleil, on peut remplacer sin _p_ par _p_, et sin P par P; les
égalités (2) et (3) deviennent alors

P = _r_ (4); et _p_ = P cos _h_, ou _p_ = P sin Z, (5) D Z étant la
distance zénithale de l'astre.

Cos h, ou sin Z, étant moindre que 1 dès que _h_ existe, il résulte de
la formule (5) qu'une parallaxe de hauteur quelconque est inférieure à
la parallaxe horizontale, et que la parallaxe est d'autant moindre que
la hauteur _h_ est plus grande. Quand l'astre est au zénith, _h_= 90°,
cos h = 0; sa parallaxe est nulle. La parallaxe correspondant à une
hauteur quelconque, _h_, se déduisant de la parallaxe horizontale
(formule 5), il suffit de trouver celle-ci. Voici comment on y peut
parvenir en général pour la lune et les planètes.

=225=. Deux observateurs se placent l'un en A, l'autre en A' (_fig_.
73), sur le même méridien; l'un au nord, l'autre au sud de l'équateur
terrestre. Ils observent à un même instant convenu, l'un la distance
zénithale méridienne ZAS, l'autre Z'A'S. Cela fait, on connaît dans le
quadrilatère AOA'S les rayons terrestres OA, OA', les angles OAS, OA'S
(180°--distance zénithale), et AOA'= L + L', somme des latitudes des
lieux A et A'.

ASO = _p_; A'SO = _p'_; ASA' = _p_ + _p'_.

La parallaxe horizontale P est la même pour A que pour A', si on suppose
la terre sphérique. Nous savons que _p_ = P cos _h_ = P sin Z (Z
_distance zénithale_); _p'_ = P sin Z'; d'où _p_ + _p'_ = P (sin Z + sin
Z') (1).

Mais le quadrilatère AOA'S donne

ASA' + SAO + SA'O + AOA' = 360°;

ou _p_ + _p'_ + 180-Z + 180-Z' + L + L' = 360°,

d'où _p_ + _p'_ = Z + Z'-(L + L'). (2)

En égalant les valeurs (1) et (2) de _p_ + _p'_, on a

P(sin Z + sin Z') = Z + Z'-(L + L'),

Z + Z'-L-L' d'où l'on tire P =-----------------; sin Z + sin Z'

ou bien, si on rend la formule calculable par logarithmes,

Z + Z'-L-L' d'où l'on tire P =--------------------------; Z + Z' Z-Z' 2
sin------ + sin------ 2 2

=226.= C'est par cette méthode que Lalande, à Berlin, et Lacaille, au
cap de Bonne-Espérance, ont calculé les parallaxes de la Lune, de Vénus
et de Mars. Celle du soleil est trop petite; elle serait relativement
trop affectée par les erreurs d'observations commises sur les angles qui
entrent dans ce calcul. La valeur de cette parallaxe que nous avons
indiquée n° 199 a été obtenue par l'observation d'un passage de Vénus
sur le soleil (V. ce qui concerne cette planète).

=227.= _Usage de la parallaxe pour ramener les observations à ce
qu'elles seraient si l'observateur était placé au centre de la terre._

Quand on regarde un astre S d'un lieu A de la surface de la terre, la
direction AS_s__(i) (_fig._ 73), dans laquelle on le voit, n'est pas
généralement la même que si on l'observait du centre, O, de la terre;
dans le premier cas on le voit en _s__(1) sur la sphère céleste; dans le
second on le voit en _s_. Le changement de direction du rayon visuel
A_s_', dû au déplacement de l'observateur, est donc précisément mesuré
par la parallaxe.

[Illustration: 178, Fig. 73]

Observée au point A, la distance zénithale est ZAS; observée au point O,
cette distance est ZOS = ZAS-ASO = ZAS-_p_. On comprend, à l'aide des
mêmes considérations, que le soleil ne doit pas paraître, au même
instant donné, placé de la même manière sur la sphère céleste pour des
observateurs placés en des lieux différents de la surface de la terre.
Le mouvement annuel du soleil sur la sphère céleste ne doit donc pas
présenter absolument le même caractère pour ces divers astronomes. D'un
autre côté, le mouvement diurne faisant occuper au soleil diverses
positions relativement à l'horizon d'un lieu déterminé, il doit en
résulter des irrégularités pour les observations du soleil faites de ce
lieu seul. Pour faire disparaître ces discordances entre les
observations faites en divers lieux ou à des moments divers de la
journée, on opère comme nous allons l'indiquer.

228. Afin que les observations faites à la surface de la terre soient
comparables les unes aux autres, on les ramène à ce qu'elles seraient si
l'observateur était placé au centre de la terre. Il faut donc corriger
les observations de la parallaxe; c'est là le principal usage qu'on fait
des parallaxes en astronomie.

Le plan ZOS, qui est vertical, comprend à la fois les deux directions
AS_s_(1) et OS_s_; quand ce plan vertical coïncide avec le plan méridien,
les deux directions AS, OS sont à la fois dans ce plan; le parallaxe
n'influe donc ni sur l'azimuth ni sur l'ascension droite d'un astre;
mais elle influe sur la distance zénithale qu'elle augmente (fig. 72 et
73), et sur sa hauteur au-dessus de l'horizon qu'elle diminue; elle
influe sur ces deux angles en sens contraire de la réfraction (108).
Ainsi, quand on veut ramener les observations au centre de la terre, la
hauteur observée h doit être diminuée de la réfraction, R, et augmentée
de la parallaxe; H = h — R + p est la hauteur telle qu'on la trouverait
s'il n'y avait pas d'atmosphère, et si on observait du centre de la
terre. On applique cette formule quand on fait des observations sur le
soleil, la lune ou les planètes; quant aux étoiles, on a simplement H =
h — R.

229. Cette correction de l'effet de la parallaxe sur la position
apparente du soleil dans le ciel suppose que l'on connaît la parallaxe
de hauteur de l'astre pour le moment et le lieu où l'observation se
fait; voici comment on arrive à la connaître. La parallaxe horizontale
est égale à 8",6 quand le soleil est à la distance moyenne de la terre;
le diamètre apparent du soleil est, pour la même distance, 32'3",3. La
parallaxe horizontale varie évidemment dans le même rapport que le
diamètre apparent (n° 124) (les deux quantités varient en raison inverse
de la distance D du soleil à la terre); il suffit donc de connaître le
diamètre apparent, à une époque quelconque, pour en déduire la valeur de
la parallaxe horizontale à la même époque; de celle-ci on déduit la
parallaxe de hauteur à l'instant considéré.

230. TABLES DES PARALLAXES DU SOLEIL. Pour faire les corrections aux
hauteurs observées du soleil, il faut donc connaître les valeurs de la
parallaxe de hauteur pour les différentes hauteurs de l'astre au-dessus
de l'horizon, ou, ce qui est la même chose, pour les différentes
distances zénithales; on emploie pour cela la formule (5) quand on
connaît d'avance les valeurs de P. On sait que, pour le soleil, la
valeur de P à la distance moyenne est 8",57, et qu'à toute autre
distance elle est réciproque à cette distance (formule 4), ou
proportionnelle au diamètre apparent de l'astre. On a donc les éléments
nécessaires pour calculer la table des parallaxes, que l'on trouve dans
les recueils spéciaux d'astronomie.

NOTE II.

_Appendice au chapitre de la précession des équinoxes_.

=231=. _Changement de direction de l'axe du monde_.--_Déplacement du
pôle_. La variation des longitudes célestes, en nous faisant connaître
le mouvement rétrograde des points équinoxiaux, met par cela même en
évidence un mouvement d'ensemble dont cette rétrogradation n'est qu'un
incident particulier. Le point, γ, en effet, n'est point un point isolé,
arbitraire; c'est l'une des extrémités de la ligne des équinoxes,
intersection de l'équateur céleste et de l'écliptique. Si on admet que
le point équinoxial occupe successivement diverses positions, γ, γ1,
γ2..., il faut admettre en même temps que la ligne des équinoxes occupe,
aux mêmes époques, les positions correspondantes γΩγ, γ1Ω1, etc. (_fig_.
80); cette ligne est donc animée d'un mouvement de révolution qui
correspond exactement à celui du point γ. Mais cette ligne γΩ est,
d'après sa définition même, perpendiculaire à l'axe ON de l'écliptique
et à l'axe OP de rotation de la terre (_fig_. 81); elle est donc
perpendiculaire au plan PON de ces deux lignes. Si la ligne γΩ tourne
constamment de l'est à l'ouest, d'un mouvement uniforme, il faut
admettre que le plan PON tourne dans le même sens, de manière que γΩ lui
soit toujours perpendiculaire. Comme il résulte d'ailleurs de
l'observation des étoiles que l'axe ON de l'écliptique est sensiblement
fixe, et que l'angle PON qui mesure l'inclinaison de l'écliptique sur
l'équateur ne change pas non plus sensiblement, de ce mouvement du plan
PON il faut conclure que l'axe OP de rotation de la terre tourne autour
de l'axe ON de l'écliptique, d'un mouvement conique de révolution tel
que chacun de ses points est précisément animé du même mouvement
uniforme et rétrograde que le point γ. Résumons-nous:

[Illustration: _Fig_. 80]

=232=. _La direction de l'axe du monde n'est pas constante; elle varie
lentement, mais d'une manière continue; cet axe, faisant toujours avec
une perpendiculaire ON au plan de l'écliptique un angle de 23° 27' 30"
environ, tourne autour de cette perpendiculaire d'un mouvement conique
de révolution, uniforme et rétrograde, tel que chacun de ses points
décrit une circonférence avec une vitesse angulaire constante d'environ
50", 2 par an_.

Mais le pôle boréal P est un de ces points.

Le pôle boréal P n'est donc pas fixe sur la sphère céleste; tournant
autour _d'une perpendiculaire à l'écliptique_ (_fig._ 81), _il décrit
sur cette sphère, dans le sens rétrograde, une circonférence de petit
cercle_ PP'P''P''' _avec une vitesse angulaire constante de 5O",2 par
an. Le pôle N de celle circonférence en est distant de 23° 27' 30"
environ_[89].

[Note 89: V. la nutation ci-après.]

[Illustration: _Fig. 81._]

L'équateur céleste est, à une époque quelconque, le grand cercle de la
sphère céleste perpendiculaire à l'axe de rotation de la terre. De cette
définition il résulte que la direction de cet axe OP changeant
continuellement, la position de l'équateur céleste doit changer d'une
manière correspondante. Ce qu'on exprime en disant que l'équateur
céleste tout entier tourne autour d'une perpendiculaire à l'écliptique,
de la même manière et dans le même sens que les points équinoxiaux. Le
nom de _précession des équinoxes_ se donne aussi au phénomène complet,
c'est-à-dire à l'ensemble des rotations que nous avons indiquées; c'est
pourquoi nous avons placé ce titre en tête du chapitre actuel.

=233.= _Toutes ces rotations découvertes par l'observation des étoiles_
(variations de leurs longitudes), _se trouvent être une conséquence du
principe de la gravitation universelle._ On démontre en effet, dans la
mécanique céleste, que l'attraction du soleil sur le renflement du
sphéroïde terrestre imprime à l'axe de rotation de la terre, et à tous
les points invariablement liés à cet axe, un mouvement de rotation
autour d'une perpendiculaire à l'écliptique, qui est précisément celui
que nous venons d'indiquer.

Or, comme l'existence de la gravitation universelle est aujourd'hui mise
hors de doute par une foule d'autres faits vérifiés, qui en sont des
conséquences nécessaires, nous devons conclure de cette coïncidence que
la variation observée des longitudes célestes est bien due au mouvement
rétrograde des points équinoxiaux.

=234.= NUTATION. Le mouvement de l'axe de la terre et celui du pôle
seraient tels que nous les avons définis tout à l'heure, si le soleil
agissait seul sur le renflement de notre sphéroïde; mais la lune a aussi
sur ce renflement une action beaucoup plus faible, mais suffisante
néanmoins pour imprimer aux mouvements en question une modification qui
les rend tels que nous allons l'indiquer. Concevons un petit cône
O_p'p''p'''_ (_fig._ 81 _bis_), ayant pour axe OP et pour base une
petite ellipse _p'p''p'''_, tangente à la sphère céleste en P, et dont
le grand axe soit dans le cercle de latitude du point P (n° 209); ce
grand axe de l'ellipse est vu de la terre sous un angle de 19",3, et son
petit axe sous un angle de 14",4. Imaginons maintenant que la ligne OP
tourne autour de la perpendiculaire ON au plan de l'écliptique,
emportant avec elle le petit cône ainsi construit, comme un corps solide
qui lui serait invariablement attaché. Concevons, enfin, qu'un point
_p'_ parcoure indéfiniment cette ellipse, mobile, d'un mouvement
rétrograde et uniforme, tel qu'il décrive l'éclipse entière en 18 ans
2/3 environ. Les positions successives _p', p'', p'''_,... du point _p'_
sont celles que le pôle boréal occupe en réalité, et les directions
O_p'_; O_p''_, O_p'''_,... sont les positions que prend successivement
l'axe de rotation de la terre.

[Illustration: 177, Fig.1]

Le pôle _p'_ décrivant cette ellipse est tantôt en arrière, tantôt en
avant du point P, dans le mouvement angulaire autour de l'axe ON de
l'écliptique; il en résulte que la vitesse du mouvement rétrograde des
points équinoxiaux qui correspond exactement au mouvement angulaire du
pôle _p'_ n'est pas précisément constante et égale à 50'',2 par an, mais
oscille de part et d'autre de cette valeur, dans des limites
très-restreintes. Le point équinoxial est tantôt en avant, tantôt en
arrière de la position qu'il occuperait s'il avait cette vitesse
constante de 50'',2 par an.

Par suite, _la différence entre l'année tropique et l'année sidérale
n'est pas constante_; autrement dit, _la valeur de l'année tropique
varie périodiquement mais très-peu, de part et d'autre, d'une valeur
moyenne_. En second lieu, l'angle NO_p'_, de O_p'_ avec la
perpendiculaire ON à l'écliptique, est évidemment tantôt plus grand,
tantôt plus petit que l'angle NOP, qui est constamment égal à 28° 27'
1/2 environ; or l'angle NO_p'_ est l'obliquité vraie de l'écliptique;
donc l'obliquité de l'écliptique doit éprouver, dans ces 18 ans 2/3, des
variations périodiques, oscillant de part et d'autre de sa valeur
moyenne, dans des limites qui ne dépassent pas 19'',3/2 = 9'',65
(demi-grand axe de la petite ellipse).

Le mouvement angulaire du point P ou de l'axe OP autour de l'axe ON de
l'écliptique conserve le nom de précession des équinoxes; c'est le
mouvement moyen des points équinoxiaux. Le mouvement de l'axe O_p'_ sur
le petit cône est ce qu'on appelle _nutation_ de cet axe.

=235.= CHANGEMENT D'ASPECT DU CIEL. Les mouvements que nous avons
décrits changent à la longue l'aspect du ciel pour l'observateur
terrestre. Si on veut se rendre compte de leur effet, on n'a qu'à
prendre un globe céleste, construit à une époque déterminée, sur lequel
soient marqués l'équateur et son pôle P, l'écliptique et son pôle N. De
N comme pôle avec le rayon sphérique NP, égal à 28°27'30'' environ, on
décrit un petit cercle PP'P''P'''... (_fig_. 81). Sachant que le pôle
boréal P décrit cette circonférence, de l'est à l'ouest (sens
PP'P''P'''...), avec une vitesse constante d'environ 50'',2 par an, on
se rendra compte de sa position sur la sphère céleste à une époque
anté rieure quelconque, ou à une époque future indiquée. Ainsi, il y a
4000 ans, il était à l'est de sa position actuelle, à une distance de
50",2X4000 = 50°46 environ; il était alors voisin de α du _Dragon_.
Maintenant il est voisin de α de la _Petite Ourse_ (étoile polaire);
dont il est distant de 1°28' environ; il continuera à s'en rapprocher
pendant 265 ans environ, après lesquels la distance ne sera plus que
d'un demi-degré; puis il s'en éloignera pour passer dans d'autres
constellations. Dans 8000 ans ce ne sera plus α de la _Petite Ourse_,
mais α du _Cygne_ qui méritera le nom d'étoile polaire; dans 12000 ans
ce sera la belle étoile _Wéga_, de la _Lyre_, qui ne sera plus alors
qu'à 5° du pôle.

Les mêmes mouvements doivent aussi modifier à la longue la situation des
étoiles par rapport à l'horizon d'un lieu déterminé de la terre. La
distribution des étoiles en _étoiles circompolaires, étoiles ayant un
lever et un coucher, étoiles constamment invisibles_, ne reste pas la
même.

[Illustration: 183]

=236.= Variation de la durée des saisons. La rétrogradation des points
équinoxiaux a aussi une certaine influence sur la durée des saisons (n°
171). En effet, reprenons la _fig_. 65; nous voyons que le mouvement
annuel de l'est à l'ouest du point γ (0° de cette figure) tend à le
rapprocher du périgée dont il est actuellement éloigné de 79"37'environ.
Lorsque, dans la suite des temps, ces deux points se trouveront
confondus, le printemps sera égal à l'hiver, l'été à l'automne, et ces
deux dernières saisons seront les plus longues, tandis que maintenant
les saisons les plus longues sont l'été et le printemps. D'ici là, le
printemps diminuera et l'automne augmentera (faites tourner
simultanément les deux lignes ponctuées de la figure jusqu'à ce que le
point γ (0°) soit arrivé au périgée). Si, retournant vers le passé, on
fait mouvoir ces deux mêmes lignes des équinoxes et des solstices, en
sens contraire (de l'ouest à l'est), on comprend qu'à une époque
antérieure moins éloignée de nous, la ligne des équinoxes s'est trouvée
perpendiculaire au grand axe de l'ellipse (Périg., Apog.). Alors le
printemps et l'été étaient égaux, et ces deux saisons étaient, comme au
temps présent, plus longues que les deux autres; pour calculer la date
précise de ce phénomène, il faut avoir égard non-seulement à la
précession des équinoxes, mais encore au déplacement annuel du périgée
solaire (n° 237), qui a lieu dans le sens direct (de l'ouest à l'est),
et accélère le rapprochement de ce périgée et du point γ. Par ces deux
causes, ces points se rapprochent en réalité de 62" et non de 50",2 par
an. Ils sont actuellement distants de 79°37' (V. Mr Faye); à quelle
époque étaient-ils éloignés de 90°? Cela revient à demander combien ils
ont mis de temps à se rapprocher de 10° 23'; la question est facile à
résoudre. Ils ont mis 604 ans, et c'est à peu près vers l'an 1250 de
notre ère que leur distance était de 90°; depuis cette époque, le
printemps a diminué et l'été a augmenté. On peut se demander à quelle
époque encore plus éloignée le point γ (0° de la figure) coïncidait avec
l'apogée. Il faut se reporter de 90° vers l'est, à partir de l'an 1250.
On trouve que l'époque en question coïncide à peu près avec celle que la
Genèse attribue à la création du monde; alors le printemps était égal à
l'hiver, l'été à l'automne, et ces deux dernières saisons étaient les
plus courtes.

=237=. _Déplacement lent du périgée_. Le périgée se déplace sur
l'écliptique d'environ 11",7 par an, dans le sens direct, c'est-à-dire
de l'ouest à l'est. Il résulte de ce mouvement, combiné avec celui du
point équinoxial, que ces deux points se rapprochent d'environ 61",9 par
an, ou, en nombre rond, de 62", comme nous l'avons dit n° 236. Ce
déplacement du périgée a été ainsi découvert.

Des observations de Flamsteed en 1690, et de Delambre en 1800, il
résulte que la longitude du périgée augmente de 61",9 par an
(rappelons-nous que la longitude se compte de l'ouest à l'est, à partir
de γ) (de 0° vers 90°, etc.). Si cet accroissement n'était que de 50",2,
le périgée se comporterait comme une étoile et devrait être considéré
comme étant fixe comme elle, cet accroissement de 50",2 étant dû au
mouvement rétrograde du point équinoxial γ. Mais l'excès de 61",9 sur
50", indique que le périgée lui-même se déplace lentement en sens
contraire du mouvement de γ, c'est-à-dire de l'ouest à l'est.

Tandis que l'écliptique change peu à peu de direction dans l'espace,
l'ellipse que le soleil nous paraît décrire tourne donc lentement dans
ce plan, dans le sens direct, avec une vitesse angulaire de 11",7 par
an.

=238=. _Diminution séculaire de l'obliquité de l'écliptique_. Dans ce
qui précède, nous avons regardé l'obliquité de l'écliptique comme
restant toujours la même, ou plutôt comme oscillant de part et d'autre
d'une valeur moyenne constante, égale à 23° 27' 30", dont elle ne
s'écarterait que de 9",65 environ, revenant tous les 18 ans 2/3 à la
même valeur; mais il n'en est pas tout à fait ainsi. Il résulte
d'observations faites à des époques très-éloignées que l'obliquité
moyenne en question a constamment diminué depuis les premières
observations.

D'après les observations les plus modernes, cette diminution de
l'obliquité moyenne de l'écliptique est d'environ 48" par siècle ou de
0",48 par an.

Elle a été découverte par l'observation des latitudes des étoiles qui ne
sont pas rigoureusement constantes. L'examen attentif des variations de
ces latitudes a fait voir que le mouvement de l'écliptique, quelle qu'en
soit la cause, ne diffère pas beaucoup de celui que ce grand cercle
prendrait s'il tournait autour de la ligne γΩ des équinoxes, comme
charnière, pour se rabattre sur le plan de l'équateur, avec une vitesse
constante d'environ 48" par siècle, ou de 0",48 par an.

Suivant Delambre, l'obliquité moyenne de l'écliptique était en 1800 de
23° 27' 57"; en 1850, elle était de 23° 27' 33"; en 1900, elle se
réduira à 23° 27' 9".



                             CHAPITRE IV.

                               LA LUNE.


=239=. Après le soleil, il est naturel que nous nous occupions de
l'astre qui éclaire fréquemment nos nuits, c'est-à-dire de la lune.

Ce qui nous frappe d'abord quand notre attention se porte sur cet astre,
c'est sa grandeur apparente, ce sont les aspects si variés sous lesquels
nous le voyons.

_Grandeur de la lune, son diamètre apparent._. La lune nous paraît à peu
près aussi grande que le soleil; en effet, tandis que le diamètre
apparent du soleil varie entre 31' 1/2 et 32' 1/2, celui de la lune
varie entre 29' 22" et 33' 31".

=240=. PHASES DE LA LUNE. La lune nous paraît animée du mouvement diurne
comme les étoiles et le soleil; de même que celui-ci, elle se lève,
traverse le méridien, puis se couche pour passer un certain temps
au-dessous de notre horizon. Mais elle ne se présente pas constamment à
nous sous la forme d'un cercle brillant; son aspect change, pour ainsi
dire, tous les jours. Les formes diverses sous lesquelles nous la voyons
s'appellent ses _phases_. Nous allons décrire ces phases qui, chacun le
sait, se reproduisent périodiquement.

À une certaine époque (qui revient plusieurs fois dans l'année), le
soir, peu après le coucher du soleil, on aperçoit la lune à l'occident,
sous la forme d'un croissant très-délié, dont les pointes sont en haut
(_fig._ 88, ci-après). C'est un simple filet demi-circulaire dont la
convexité est tournée vers l'occident, et dont la concavité a une forme
elliptique. Ce croissant animé du mouvement diurne, commun à tous les
astres, disparaît bientôt au-dessous de l'horizon.

Le lendemain la lune est un peu plus éloignée de l'horizon quand le
soleil se couche, le croissant a plus de largeur.

Les jours suivants, dans les mêmes circonstances, c'est-à-dire peu après
le coucher du soleil, on voit la lune de plus en plus éloignée du point
de l'horizon où le soleil s'est couché; son croissant s'élargit de jour
en jour (_fig_. 89); son coucher retarde de plus en plus sur celui du
soleil. Six ou sept jours après la première observation, la lune se
montre à nous sous la forme d'un demi-cercle (_fig_. 90). Elle est alors
déjà assez éloignée du soleil pour ne passer au méridien qu'environ 6
heures après lui, c'est-à-dire à 6 heures du soir. On est arrivé au
_premier quartier_.

À partir de là, la lune continue à s'élargir; le bord oriental que nous
avons vu concave, puis droit, devient convexe et elliptique; de sorte
que la figure de l'astre nous paraît formée d'un demi-cercle, et d'une
demi-ellipse qui s'élargit continuellement (_fig_. 91). Six ou sept
jours après que la lune a été vue sous la forme d'un demi-cercle, elle
est devenue tout à fait circulaire (_fig_. 92). À cette époque, elle
passe au méridien 12 heures après le soleil; elle se lève à peu près
quand celui-ci se couche, et se couche quand il se lève. Nous sommes à
la _pleine-lune_.

En continuant à observer la lune, on voit qu'elle se lève de plus en
plus tard, et repasse par les mêmes formes que précédemment, mais dans
un ordre inverse. Le cercle, que nous avons vu, se déprime vers
l'occident; la figure prend de ce côté une figure elliptique de plus en
plus aplatie (_fig_. 93). La partie la plus convexe du contour, toujours
circulaire, est désormais tournée vers l'orient. Le septième jour, après
la pleine lune, la figure de l'astre est celle d'un demi-cercle (_fig_.
94) dont le diamètre est du côté de l'occident; nous sommes arrivés au
_dernier quartier_. La lune passe alors au méridien 18 heures après le
soleil, c'est-à-dire vers 6 heures du matin. À partir de ce moment, la
figure de l'astre se creuse de plus en plus du côté de l'occident;
bientôt la lune nous présente de nouveau la forme d'un croissant qui se
rétrécit chaque jour (_fig_. 95); son lever retarde de plus en plus.
Environ 6 jours après que nous l'avons vue pour la seconde fois sous la
forme d'un demi-cercle, nous ne voyons plus qu'un croissant très-délié
dont la convexité est cette fois tournée vers l'orient (_fig_. 96), et
qui ne se montre à nous que le matin, un peu avant le lever du soleil,
non loin de l'endroit où cet astre va bientôt apparaître. À partir de
là, pendant deux ou trois jours, on ne voit plus la lune du tout. On est
arrivé à la _néoménie_ ou _nouvelle lune_. Au bout de ce temps, on
recommence à l'apercevoir le soir, du côté de l'occident, un peu après
le coucher du soleil, sous la forme du premier croissant dont il a été
question (_fig_. 88). Puis les mêmes formes que nous avons décrites se
reproduisent indéfiniment de la même manière et dans le même ordre.

[Illustration: 187, fig. 88]

[Illustration: 187, fig. 89]

[Illustration: 187, fig. 90]

[Illustration: 187, fig. 91]

[Illustration: 187, fig. 92]

[Illustration: 188, fig. 92 bis]

[Illustration: 188, fig. 93]

[Illustration: 188, fig. 94]

[Illustration: 188, fig. 95]

[Illustration: 188, fig. 96]

Ce n'est pas seulement la nuit que l'on peut observer la lune; toutes
les fois qu'elle n'est pas trop rapprochée du soleil, on la voit sans
peine en plein jour; il en résulte une plus grande facilité pour suivre
ses changements de forme, et s'assurer qu'ils se produisent bien comme
nous venons de le dire.

=241=. D'où vient que la lune se montre à nous sous des aspects si
divers? C'est toujours le même corps que nous voyons. En effet, quand la
lune encore nouvelle nous apparaît sous la forme d'un croissant
lumineux, nous apercevons à côté le reste de son disque circulaire
éclairé par une lumière plus faible, et qui va en s'affaiblissant chaque
jour (V. plus loin la _lumière cendrée_). Quand le croissant s'est
élargi jusqu'au demi-cercle, nous ne voyons plus le reste du disque.
Mais un phénomène, qui se répète souvent, prouve évidemment que cette
seconde partie du disque lunaire existe toujours, bien qu'elle ait cessé
temporairement d'être visible pour nous: ce phénomène est l'occultation
des étoiles par la lune.

[Illustration: 189, fig. 97]

Quand le croissant de cet astre, convexe du côté de l'orient (_fig_.
88), approche d'une étoile, celle-ci disparaît bien avant qu'elle ne
soit atteinte par ce bord concave _a_ (_fig_. 97). Elle devient
invisible précisément au moment où elle doit être atteinte par le bord
oriental _c_ du disque supposé circulaire et complet. Il est donc
évident que la face de la lune qui est devant nous a toujours la même
étendue et la même forme circulaire; mais que nous n'en voyons
généralement qu'une portion plus ou moins grande.

Les phases de la lune s'expliquent parfaitement si on admet que cet
astre est un corps sphérique et opaque comme la terre, dont une moitié
seulement, celle qui fait face au soleil, est éclairée par cet astre. La
lune changeant continuellement de position relativement à nous et au
soleil, nous apercevons suivant sa position une portion plus ou moins
grande de la moitié éclairée. De là les différents aspects qu'elle nous
présente. C'est ce que nous allons expliquer plus au long.

=242.= EXPLICATION DES PHASES DE LA LUNE. Concevons que la lune se meuve
en décrivant autour de la terre T un cercle, le cercle T_l_ (_fig_. 98),
et que le soleil S soit situé sur le plan de ce cercle à une distance
tellement grande par rapport au rayon T_l_, que les rayons lumineux
envoyés par le soleil à la lune dans ses diverses positions puissent
être regardés comme parallèles. _Les positions relatives de la terre, du
soleil et de la lune que cette figure nous indique, considérées par
ordre, sont à peu près celles qui ont lieu en réalité_ (V. nº 145).
L'hémisphère éclairé de la lune tourné vers le soleil S est limité par
un cercle dont la trace est _ss´_ (nous dirons cercle _ss´_),
perpendiculaire à la direction _l_S des rayons lumineux (considérez sur
la figure l'une quelconque des positions de la lune). D'un autre côté,
quand même la surface tout entière de la lune serait éclairée, nous ne
pourrions voir que la moitié de l'astre, qui, faisant face à la terre,
est limitée par un cercle dont la trace est _tt´_ (cercle _tt´_),
perpendiculaire au rayon T_l_ qui va de la terre à la lune[90]. La trace
_tt´_ est tangente à l'arc que la lune intercepte sur sa trajectoire.

[Illustration: 191, fig. 98]

Il est évident, d'après cela, que de la terre, on n'aperçoit en réalité
que la partie de l'hémisphère éclairée _s´ts_, qui lui est commune avec
l'hémisphère visible _t´st_. La partie commune à ces deux hémisphères
est, en général, ce qu'on nomme un fuseau sphérique (V. la surf. blanche
_psp´t_ sur chacune des petites sphères, à droite et à gauche, en dehors
du cercle T_l_); la plus grande largeur de ce fuseau est mesurée en son
milieu par l'arc _st_ qui se retrouve précisément sur notre figure
principale. D'après cela, pour nous rendre compte des phases, il nous
suffira, en suivant la lune dans son mouvement autour de la terre T, de
déterminer cette partie commune aux deux hémisphères.

[Note 90: _Circonf. ss´_ est la _ligne de séparation de l'ombre et de la
lumière_; on l'appelle quelquefois _cercle d'illumination. Circonf. tt´_
est celle qu'on appelle le _contour apparent de la lune_.]

Quand la lune est en (A), son hémisphère obscur est tout entier tourné
vers la terre; l'astre est invisible pour nous. À mesure qu'elle
s'avance de (A) vers (B), le cercle _tt'_ tournant avec le rayon T_l_,
s'écarte de plus en plus, du cercle _ss'_; une partie de l'hémisphère
éclairé, _s'ts_, de plus en plus grande, devient visible pour nous.
Quand la lune est en B, nous voyons un fuseau dont la largeur est
mesurée par l'arc _st_ (V. sphère _psp's'_, à côté); c'est ce fuseau
qui, projeté sur la sphère céleste, nous apparaît sous la forme d'un
croissant (_fig_. 88)[91]. La lune s'avançant de (B) vers (C), le fuseau
s'élargit (l'arc _st_ augmente); en (C) nous voyons la moitié de
l'hémisphère éclairé, c'est alors que la lune est vue sous la forme d'un
demi-cercle (_fig_. 90). Lorsqu'elle s'avance de (C) vers (D), puis de
(D) vers (E), la partie visible de l'hémisphère éclairé augmente de plus
en plus (l'arc _st_ grandit). En (D) la lune nous apparaît sous la forme
indiquée (_fig_. 91). En (E) nous voyons l'hémisphère éclairé tout
entier; la lune a la forme d'un cercle brillant (_fig_. 92). Après cela
une partie de plus en plus grande de cet hémisphère éclairé redevient
invisible. Le cercle brillant se défait du côté où il a commencé à se
former (V. désormais l'arc _s't'_ sur la figure). En (F) nous avons la
phase indiquée par la figure 93; en (G) nous avons un demi-cercle
(_fig_. 94); dans la position (H) nous avons un croissant (_fig_. 96),
et enfin quand la lune est revenue à sa première position (A) nous ne
voyons plus rien. Puis la lune continuant à tourner, les mêmes phases se
reproduisent indéfiniment.

[Note 91: REMARQUE. La circonférence _tt'_ perpendiculaire à la ligne
qui va de la terre à la lune, termine la partie du globe lunaire sur
lequel arrivent directement les rayons visuels issus de T; cette
circonférence est donc la ligne de contact du globe lunaire et du cône
des rayons visuels tangents, lequel a son sommet en T; cette ligne est
vue de face; tout ce qui en est éclairé doit donc avoir pour nous la
forme circulaire. Quant au cercle _ss'_, il n'est vu par l'observateur T
qu'en projection sur le plan même du cercle _tt'_, et si nous regardons
cette projection comme à peu près orthogonale à cause de l'éloignement
du point de vue, T, situé sur une perpendiculaire au plan de projection,
le cercle _ss'_ doit nous faire l'effet d'une demi-ellipse convexe du
côté du soleil avant le 1er quartier et après le dernier; concave de ce
côté, dans l'intervalle: à chaque quadrature, le cercle projeté _ss'_
coupant à angle droit le plan de projection, sa projection nous fait
l'effet d'une ligne droite. La partie la plus convexe du contour du
fuseau lunaire éclairé et visible appartient donc au cercle _tt'_; c'est
la plus rapprochée du soleil; la partie généralement aplatie de ce
contour appartient à la projection du cercle _ss'_; celle-ci est plus
éloignée que l'autre du soleil. Ainsi se trouve expliquée une
particularité de notre description des phases. En jetant les yeux sur la
_fig._ 98, on verra qu'abstraction faite des diamètres apparents des
deux disques, terrestre et lunaire, la portion _s_(1)_at_(1), du
disque terrestre éclairé visible de la lune, et la partie, _ts_, du
disque lunaire éclairé visible de la terre, se complètent constamment de
manière à former, par addition, un cercle éclairé entier[92]. Quand la
lune est _nouvelle_, position (A), tout l'hémisphère terrestre éclairé
_s´_(1)_a_(1)_s_(1) est visible de la lune; pour l'habitant de la
lune, il y a _pleine terre_; la masse de lumière réfléchie de la terre
vers la lune est alors la plus grande possible; elle n'est pas effacée
d'ailleurs par la lumière arrivée du soleil à la lune, entièrement
cachée pour l'observateur terrestre; il en résulte que, à cet instant,
la lumière cendrée a sa plus grande intensité; avec de bons yeux ou une
faible lunette, nous voyons le disque lunaire éclairé d'une lumière
beaucoup plus faible que celle de la pleine lune. Plus tard, quand le
filet lumineux de la lune se forme et s'agrandit, la terre réfléchit
vers la lune une masse de lumière de moins en moins grande; de plus,
cette lumière réfléchie est effacée en partie par la lumière plus
brillante arrivée directement du soleil à la lune; il résulte de là que
le disque lunaire se partage en deux fuseaux inégalement éclairés, l'un
étroit et brillant, qui grandit; l'autre, plus large et plus terne, qui
diminue. Bientôt la lumière directe efface tout à fait la lumière
réfléchie, et dès la première quadrature la lumière cendrée n'existe
plus pour l'observateur terrestre. Plus tard, après le _dernier
quartier_, quand la lune se rapproche de sa position première, de la
position (G) à la position (A), la lumière cendrée reparaît et grandit,
les mêmes effets, déjà décrits, se reproduisant dans l'ordre inverse.]

[Note 92: V. la _fig._ 71, position (2), de la lune, le fuseau lunaire
éclairé et visible est mesuré par l'arc _st_, le fuseau terrestre par
l'arc _s_(1)_t_(1), mais _s_(1)_t´_(1) = _st_; or _s_(1)_t´_(1) +
_s_(1)_t_(1) = 180°, donc _st_ + _s_(1)_t_(1) = 180°. En général,
menez _t_(1)_t´_(1) parallèle à _tt´_, et remarquez la partie commune
aux hémisphères terrestres _t_(1)_s´_(1)_t´_(1) et
_s_(1)_t_(1)_s´_(1); c'est le fuseau terrestre brillant pour
l'habitant de la lune; on a constamment _s_(1)_t´_(1) = _st_; et
_s_(1)_t´_(1) + _s_(1)_t_(1) = 180°; d'où _st_ + _s_(1)_t_(1) =
180°.]

=243=. REMARQUES. Dans cette explication des phases de la lune, nous
avons supposé que cet astre décrit un cercle, et que le soleil est fixe
dans le plan de ce cercle. Ces conditions ne sont pas exactement
remplies, en réalité; mais elles ne sont pas indispensables pour
l'explication des phases. En fait de distances, nous avons seulement
opposé que la distance du soleil à la terre ou à la lune était
extrêmement grande par rapport à la distance qui sépare ces deux
derniers corps; ce qui est toujours vrai en réalité. Nous avons supposé
que la lune tournait dans le plan de l'écliptique; elle s'en écarte un
peu, mais les phases telles que nous les avons expliquées ne peuvent
être que fort peu modifiées par cette circonstance; car le cercle _ss'_
restant toujours parallèle à lui-même, le cercle _tt'_ dans le mouvement
réel de la lune doit tourner à fort peu près comme nous l'avons supposé;
or tout dépend des positions relatives de ces cercles. Nous avons
supposé que le soleil ne tournait pas en même temps que la lune en
réalité, les positions relatives des trois astres sont les mêmes que si
le soleil tournait autour de la terre en même temps que la lune, mais
avec une vitesse angulaire 13 fois-1/3 plus petite. Il résulte de là que
si on représente par 1 l'angle que la ligne TS a décrit dans un temps
donné quelconque, 13-1/3 représente l'angle dont le rayon T_l_ qui va à
la lune a tourné dans le même temps; si donc ces lignes coïncidaient
d'abord (position (A) de la lune), après ce temps donné elles sont
séparées par un angle dont la grandeur est représentée par 12-1/3. On
représente donc _avec exactitude_ les positions relatives successives
des trois corps en supposant que, le soleil restant sur la ligne fixe
TS, la lune tourne autour de la terre avec une vitesse 12 fois-1/3 plus
grande que celle du mouvement apparent de translation du soleil; c'est
ce que nous avons fait sans mentionner la vitesse. La lune doit donc
revenir sur la ligne TS après-3651,256/12-1/3, c'est-à-dire 291-1/2 à
peu près.

=244=. SYZYGIES ET QUADRATURES. Quand la lune, située entre la terre et
le soleil, sur la ligne qui joint ces deux corps, est invisible pour
nous (position A), on dit qu'elle _est nouvelle_. Il y a _pleine lune_,
au contraire, quand cet astre, occupant la position opposée (E), nous
offre l'aspect d'un cercle entier. En (C), à 90° de la ligne TS, on dit
que la lune est à son _premier quartier_; en (G), de même, à 90° de TS,
on dit qu'elle est à son _dernier quartier_. Les deux phases
principales, _pleine lune et nouvelle lune_, se désignent souvent sous
le nom commun de _syzygies_; le _premier quartier_ et le _dernier
quartier_ s'appellent _quadratures_. Les quatre positions qui tiennent
chacune le milieu entre deux des précédentes s'appellent des _octants_.

=245=. Quelquefois ces expressions _nouvelle lune, pleine lune_, etc.,
ne désignent pas des phases, mais quatre périodes de la révolution
lunaire. On dit que la lune est _nouvelle_ pendant tout le temps qu'elle
met à aller de la position (A) à la position (C), qu'elle est dans son
premier quartier pendant qu'elle va de (G) à (D), etc.

=246=. REMARQUE. Quand la lune est en (A), sur la ligne TS, ou plutôt
quand sa longitude céleste est la même que celle du soleil, les deux
astres sont dits en _conjonction_. À cette époque, au moment où le
soleil passe au méridien, la ligne TS y passe avec lui; donc la lune
doit y passer à peu près en même temps. La lune s'éloignant du soleil en
tournant sur la sphère céleste, les longitudes des deux astres sont de
plus en plus différentes, l'intervalle de leurs passages au méridien
augmente de plus en plus. Quand la lune est en (C), la longitude des
deux astres diffère de 90°; la lune passe au méridien environ 6 heures
après le soleil. Quand elle arrive en (E), la différence des longitudes
est 180°; les deux astres sont en _opposition_. La lune se trouve à peu
près sur le cercle horaire opposé à celui du soleil; elle passe au
méridien 12 heures après lui. Enfin en (G), la différence des latitudes
est de 270º; la lune passé alors au méridien environ 18 heures après le
soleil. Ainsi se trouve expliqué ce que nous avons dit, nº 240, à propos
du lever et du coucher de la lune.

247. LUMIÈRE CENDRÉE. Quand on observe attentivement la lune, quelques
jours avant le premier quartier, ou quelques jours après le dernier,
quand le croissant est très-étroit, on voit distinctement le reste du
disque éclairé par une lumière pâle, très-faible, qu'on appelle _lumière
cendrée_. La lune nous offre alors l'aspect représenté par la _fig._ 88
et la _fig._ 96. La lumière cendrée disparaît toujours avant le premier
quartier, et ne reparaît que quelque temps après le dernier quartier.

=248.= _Explication de la lumière cendrée._ Examinons la terre T vis-à-vis
du soleil S, et vis-à-vis de la lune (positions diverses). La terre
éclairée par le soleil doit produire à l'égard de la lune des phénomènes
semblables à ceux que la lune produit à l'égard de la terre,
c'est-à-dire que l'hémisphère terrestre éclairé par le soleil
présenterait à un habitant de la lune des phases semblables à celles que
la lune présente à un habitant de la terre. Suivons sur la _fig._ 99, à
partir de la première position (A) de la lune; d'abord la terre doit
offrir à l'habitant de la lune un cercle lumineux; puis un fuseau
brillant décroissant du cercle au demi-cercle de (A) jusqu'à (C); puis
du demi-cercle au croissant, au filet, puis à zéro, de (C) à (D), puis
de (D) à (E). A partir de la position (E) de la lune, le fuseau
terrestre, se reformant, grandit, et les phases se reproduisent dans un
ordre inverse. Suivant la position occupée par la lune, la partie
éclairée de la surface terrestre, qui se trouve _vis-à-vis_ de cet
astre, lui envoie par réflexion une partie plus ou moins grande de la
lumière qu'elle reçoit directement du soleil; la lune nous renvoie une
partie de cette lumière réfléchie. C'est cette lumière affaiblie par une
double réflexion qu'on appelle _lumière cendrée._

=249.= Nous allons maintenant revenir, pour nous en occuper spécialement,
au mouvement propre de la lune que nous n'avons fait qu'indiquer
succinctement nº 243. Pour commencer, nous expliquerons comment on
détermine avec précision chacune des positions successives de l'astre;
puis nous indiquerons les principales circonstances de son mouvement.

=250.= FORME DU DISQUE DE LA LUNE. La lune ayant des dimensions apparentes
très-appréciables, il est nécessaire d'indiquer auquel de ses points se
rapportent les observations faites pour déterminer les positions
successives de l'astre. Tout nous porte à croire, ainsi que nous l'avons
expliqué nº 241, que la lune est un corps sphérique opaque comme la
terre, et, de même que celle-ci, éclairé en partie par le soleil. En
conséquence, adoptant cette opinion, on opère constamment, à propos de
la lune, comme si on avait devant soi un disque circulaire analogue à
celui du soleil. C'est au centre de ce disque que se rapportent les
observations qui servent à déterminer de temps en temps la position de
la lune. On mesure l'ascension droite et la déclinaison de ce centre, et
on se sert de ces angles pour étudier le mouvement de l'astre sur la
sphère céleste.

=251=. MESURE DU DIAMÈTRE APPARENT, DE L'ASCENSION DROITE, ET DE LA
DÉCLINAISON DU CENTRE DE LA LUNE. Pour trouver l'ascension droite et la
déclinaison de la lune, on ne peut pas opérer tout à fait de la même
manière que pour le soleil, puisqu'on n'aperçoit le plus souvent qu'une
moitié du contour circulaire du disque de la lune; on supplée à ce qui
manque sous ce rapport, en faisant usage du diamètre apparent de l'astre
que l'on peut toujours déterminer. En effet, dès qu'on aperçoit la lune
sous la forme d'un croissant, ou autrement, on voit toujours au moins la
moitié de son contour circulaire; il suffit donc de mesurer l'angle sous
lequel se voient les extrémités de cette demi-circonférence pour avoir
le demi-diamètre apparent de l'astre (nº 124, définition)[93]. Ce
diamètre apparent varie d'une époque à une autre avec la distance de
l'astre à la terre; il change même sensiblement d'une heure à une autre
de la même journée; il est donc important de connaître sa valeur pour
l'instant où on fait l'observation du centre comme nous allons le dire.

[Note 93: On peut employer, pour mesurer ce diamètre apparent, un
micromètre à fils parallèles, c'est-à-dire une lunette astronomique dans
laquelle les fils du réticule, au lieu d'être perpendiculaires, sont
parallèles entre eux; l'un de ces fils est fixe; l'autre fil, demeurant
toujours parallèle au premier, peut en être éloigné ou rapproché au
moyen d'une vis. Quand le disque de la lune est entièrement visible, on
amène les fils à être tangents au contour; puis on fait tourner la
lunette de manière à ce que l'un des fils ne cesse pas d'être tangent;
l'autre fil, sans être dérangé, continue à être également tangent au
disque; ce qui prouve que le diamètre de ce disque est le même dans
toutes les directions, c'est-à-dire que ce disque est exactement
circulaire; l'écart des deux fils donne la mesure du diamètre apparent.
Il est évident que les choses ne se passent pas ainsi quand le disque
n'est pas entièrement visible; la moitié du contour circulaire est
toujours visible, et les extrémités de cette demi-circonférence sont les
points du contour de la figure les plus éloignés l'un de l'autre, ceux
pour lesquels les fils parallèles de la lunette, amenés au contact, sont
les plus écartés. Le plus grand écart des fils amenés au contact donne
donc la mesure du diamètre apparent de l'astre au moment de
l'observation.]

DÉCLINAISON. Pour obtenir la déclinaison du centre de la lune, on
observe le bord inférieur du disque, ou bien son bord supérieur au moyen
du mural, afin de déterminer la déclinaison de ce bord; cela fait, on
n'a plus qu'à ajouter ou à retrancher le demi-diamètre apparent pour
connaître la déclinaison du centre.

ASCENSION DROITE. Pour déterminer l'ascension droite du centre de la
lune, on opère d'une manière analogue; on observe l'heure du passage au
méridien du bord oriental, ou du bord occidental (celui qui est
visible); on ajoute ou on retranche ensuite la moitié du temps que le
disque tout entier met à traverser le méridien; le résultat est l'heure
du passage du centre. (Le temps en question se calcule d'après le
diamètre apparent de la lune, au moment de l'observation, et d'après la
valeur de la déclinaison du centre.)

Ces préliminaires exposés, nous allons résumer ce qui concerne le
mouvement propre de la lune.

=252=. MOUVEMENT PROPRE DE LA LUNE. La lune se déplace parmi les
étoiles; pour le reconnaître, il suffit de remarquer attentivement la
position que cet astre occupe par rapport à quelques étoiles voisines;
on voit cette position changer d'une manière sensible dans l'espace de
quelques heures.

Pour étudier ce mouvement de la lune, on emploie le même procédé que
pour celui du soleil. On observe l'astre, aussi souvent que possible, à
son passage au méridien; on détermine chaque fois son ascension droite
et sa déclinaison; puis on se sert de ces angles pour construire
graphiquement sur un globe, ou calculer trigonométriquement les
positions apparentes successives de la lune sur la sphère céleste.
D'après ce travail:

_La lune nous paraît décrire, d'occident en orient, un grand cercle de
la sphère céleste, faisant avec l'écliptique un angle de 5° 9' environ_.

=253=. Mais ce grand cercle, analogue à l'écliptique, n'est que le lieu
des projections des positions réelles de l'astre sur la sphère céleste
(nº 117); le travail précédent ne nous apprend donc rien sur l'orbite de
la lune, c'est-à-dire sur le lieu de ses positions réelles, si ce n'est
que cette orbite est _plane_. Mais la connaissance des diamètres
apparents de l'astre permet de déterminer la nature de l'orbite lunaire.

=254=. Le diamètre apparent de la lune varie, comme nous l'avons dit,
entre 29' 22" et 33' 31"; la distance de la lune à la terre varie donc
dans des limites correspondantes. _La lune ne décrit pas un cercle dont
la terre occupe le centre._

Connaissant les positions apparentes successives de la lune sur la
sphère céleste et les diamètres apparents correspondants, on peut, comme
on a fait pour le soleil nº 129, construire une courbe, semblable à
celle que la lune décrit autour de la terre. On arrive ainsi au résultat
suivant:

=255=. ORBITE LUNAIRE. _La lune décrit autour de la terre une ellipse
dont la terre occupe un foyer_. Cette ellipse est ce qu'on nomme
_l'orbite de la lune_.

L'excentricité de l'orbite lunaire est environ 0,055 ou 1/18 de son
grand axe; elle surpasse 3 fois celle de l'orbite terrestre qui est
1/60; ainsi l'orbite de la lune est plus allongée, approche moins de la
forme d'un cercle que l'orbite de la terre. Le grand axe de l'orbite
lunaire s'appelle aussi la _ligne des apsides_; l'une de ses extrémités
(la plus voisine de la terre) est le _périgée_ de la lune; l'autre est
l'_apogée_ (nº 129).

=256=. LOI DES AIRES. Le principe des aires se vérifie dans le mouvement
de la lune: _les aires elliptiques décrites par le rayon vecteur qui va
de la terre à la lune sont proportionnelles aux temps employés à les
parcourir_.

On vérifie également que _la vitesse du mouvement angulaire de la lune
autour de la terre varie en raison inverse du carré de la distance des
deux globes._

=257=. _Longitudes et latitudes de la lune_. Avant d'aller plus loin,
observons que le mouvement de la lune est beaucoup plus simple à étudier
quand on le rapporte à l'écliptique et à son axe que si on le rapporte à
l'équateur. C'est pourquoi, dans l'étude de ce mouvement, on convertit
ordinairement l'ascension droite et la déclinaison, trouvées au moyen
des instruments méridiens, en longitudes et en latitudes, pour se servir
préférablement de ces derniers angles.

=258=. _Durée de la révolution de la lune_. La position apparente de la
lune fait le tour de la sphère céleste 13 fois-1/3 plus vite que celle
du soleil; en effet, la longitude de la lune varie moyennement de 13°
10' 35" par jour solaire moyen, tandis que celle du soleil ne varie que
de 59' 8".

RÉVOLUTION SIDÉRALE DE LA LUNE. On appelle ainsi le temps qui s'écoule
entre deux retours consécutifs de la lune à la même étoile. La
révolution sidérale de la lune est de 27j 7h 43m 11s, ou 27j. sol.
moy.,321661[94].

RÉVOLUTION SYNODIQUE. _On appelle révolution synodique de la lune, mois
lunaire_, ou _lunaison_, le temps qui s'écoule entre deux retours
consécutifs de la lune à la longitude du soleil. La durée de la
révolution synodique de la lune ou le mois lunaire est de 29j. sol.
moy. 12h 14m ou 29j. sol. moy.,53, à peu près 29j.-1/2 [95].

[Note 94: On appelle révolution _tropique_ de la lune le temps qui
s'écoule entre deux retours consécutifs de cet astre à la même
longitude. On calcule ce temps comme on a calculé l'année tropique (nº
157); on détermine à deux époques assez éloignées le moment précis où la
longitude de la lune a une valeur donnée, 0° par exemple; puis on divise
le temps écoulé par le nombre des révolutions qui ont eu lieu entre ces
deux époques. La révolution tropique est de 27 j. sol. moy.,321582.

La lune ayant quitté une étoile revient plus tôt à la même longitude
qu'à la même étoile; en effet, tandis que la lune a fait le tour de la
sphère, la longitude de l'étoile augmente par l'effet de la précession
des équinoxes (nº 216). La révolution tropique est donc plus courte que
la révolution sidérale. La révolution sidérale se déduit de la
révolution tropique par une proportion qui résulte de ce que le chemin
angulaire parcouru par l'astre dans la dernière période est 360°-(50",2
· 27,321582 / 365,2422) et dans la première 360°.]

[Note 95: Quand le soleil et la lune ont la même longitude, il y a
_nouvelle lune_: quand, après une révolution synodique, ils se
retrouvent avoir même longitude, il y a encore nouvelle lune. En
général, toutes les phases de la lune se produisent dans l'intervalle
d'une nouvelle lune à l'autre; la révolution synodique est _précisément_
la période des phases; de là son importance et son nom de _lunaison_.]

=259=. La révolution _synodique_ de la lune est plus longue que la
révolution _sidérale_; cela s'explique aisément. En effet, concevons que
la lune, le soleil et une étoile se trouvent ensemble à un moment donné
sur le même cercle de latitude; à partir de ce moment, la lune prenant
l'avance fait d'abord le tour de la sphère céleste et revient à l'étoile
après une révolution sidérale, c'est-à-dire après 27j 7h 43m
(27j,321661); pendant ce temps, le soleil a parcouru un certain arc sur
l'écliptique, vers l'est; il faudra donc que la lune, recommençant une
nouvelle révolution sidérale, fasse un certain chemin pour se retrouver
avec le soleil sur un même cercle de latitude; le temps qu'elle met à
faire ce chemin est l'excès de la révolution synodique sur la révolution
sidérale.

=260=. La durée d'une révolution synodique est facile à trouver quand on
connaît les durées des révolutions sidérales du soleil et de la lune qui
sont respectivement 365j,25638 et 27j,321661. En prenant le rapport de
ces deux nombres, on trouve que la lune parcourt 360º de longitude 13
fois-1/3 plus vite que le soleil; il résulte de là, en moyenne, que si,
après un certain temps écoulé, le soleil a fait autour de la terre un
chemin angulaire représenté par 1, la lune en a fait un représenté par
13-1/3; donc, l'avance de la lune sur le soleil est représentée après le
même temps par 12-1/3.

Si donc on compare les positions respectives des cercles de latitude de
la lune et du soleil, on voit que, sous ce rapport, les choses se
passent exactement comme si, le soleil restant fixe, la lune tournait
autour de l'axe de l'écliptique avec une vitesse 12 fois-1/3 plus grande
que celle du mouvement de translation du soleil autour de la terre. La
lune ayant quitté le soleil doit donc le retrouver après un temps 12
fois-1/3 moins grand que celui qu'il faut au soleil pour faire le tour
de la sphère, c'est-à-dire qu'elle le rejoindra de nouveau après
365j,25638 / 12-1/3[96]. C'est le même raisonnement que nous avait fait
nº 284 dans notre explication des phases de la lune.

[Note 96: Plus exactement 365,25038 / ((365,25638 / 27,321661)-1) =
365,25638 / 12,35...]

=261=. NŒUDS DE LA LUNE.--MOUVEMENT DE LA LIGNE DES NŒUDS. Le mouvement
de la lune n'est pas tout à fait tel que nous l'avons décrit; il est
affecté de certaines irrégularités que, pour plus de clarté et de
simplicité, nous avons à dessein passées sous silence. Nous indiquons,
dans une note à la fin du chapitre, la principale de ces irrégularités
dont il suffit de tenir compte pour avoir une idée à très-peu près
exacte du mouvement de la lune (V. cette note).

=262=. DISTANCE DE LA LUNE À LA TERRE. Nous avons déjà dit, d'après
Lalande, que la parallaxe horizontale moyenne de la lune est à
l'équateur de 57'40"; elle varie entre 53'53" et 61'27".

D'après cela, en faisant usage de la formule D = _r_ / sin. P (n° 224),
on arrive à ce résultat:

_La distance de la lune à la terre a pour valeur moyenne à peu près 60
fois le rayon de la terre_ (celui de l'équateur); _ce qui fait à peu
près 95000 lieues de 4 kilomètres_.

Cette distance varie entre 57 fois et 64 fois le même rayon[97]. On voit
par là que la lune est bien moins éloignée de nous que le soleil, dont
la distance moyenne est de 24000 rayons terrestres; le soleil est 400
fois plus éloigné que la lune.

[Note 97: Les distances citées sont plus exactement 59r,617; 56r,947 et
63r,802.]

=263=. En comparant cette distance moyenne de la lune à la terre (60
rayons terrestres) au rayon du soleil qui comprend 112 de ces rayons, on
arrive à une conséquence curieuse. Si le centre du soleil venait
coïncider avec le centre de la terre, la lune serait située dans
l'intérieur du soleil, même assez loin de la surface. Cette comparaison
donne une idée de l'immensité de l'astre qui nous éclaire.

=264=. DIMENSIONS DE LA LUNE. D'après le raisonnement déjà fait, n° 201,
à propos du soleil, le diamètre réel de la lune est au diamètre de la
terre comme le diamètre apparent de la lune est au diamètre apparent de
la terre vue de la lune, c'est-à-dire au double de la parallaxe de cette
dernière. En faisant usage des valeurs moyennes de ces angles, qui sont
31' 25",7 = 1885",7 et 57' 40" = 3460", on arrive à ce résultat:

_Le_ RAYON _de la lune est à très-peu près les_ 3/11 _du rayon de la
terre_. _r'_ = 3/11 _r_.

Le VOLUME de la lune, supposée sphérique, est environ 1/49 de celui de
la terre. _v'_ = 1/49 de _v_.

Sa SURFACE est à peu près les 3/40 de celle de la terre, _s'_ = 3/40 de
_s_.

=265=. MASSE. La masse de la lune est à peu près 1/81 de celle de la
terre.

DENSITÉ. On obtient son rapport à celle de la terre en divisant la masse
par le volume, ce qui donne 49/81. La densité de la lune est à peu près
les 6 dixièmes de celle de la terre.

=266=. LE MOUVEMENT PROPRE DE LA LUNE EST UN MOUVEMENT RÉEL. De ce que
la distance de la lune à la terre ne dépasse jamais 64 rayons
terrestres, tandis que la terre tournant autour du soleil occupe
successivement des positions différentes, dont la _distance_,
périodiquement variable, s'élève jusqu'à 48000 rayons terrestres, on
conclut naturellement que la lune et son orbite accompagnent la terre
dans son mouvement autour du soleil. La lune est le _satellite_ de la
terre. Nous avons vu tout à l'heure que la lune est plus petite que la
terre; il résulte de là et de la faible distance des deux globes que la
lune, soumise à l'attraction de la terre, doit décrire autour de notre
globe précisément l'orbite elliptique que l'observation nous a fait
connaître. Ainsi le mouvement de la lune autour de la terre n'est pas
une simple apparence comme le mouvement annuel de translation du soleil,
avec lequel il a d'ailleurs tant de rapports; c'est un mouvement réel
dont toutes les circonstances s'expliquent par les lois de la
gravitation universelle[98].

[Note 98: Ces lois expliquent et font connaître les irrégularités que
nous indiquons à la fin du chapitre. L'explication de la rétrogration
des nœuds est analogue à celle de la rétrogradation des points
équinoxiaux, le corps attirant principal étant la terre au lieu du
soleil.]

=267=. TACHES DE LA LUNE. Même à la vue simple, on aperçoit sur la
surface de la lune des taches grisâtres dont l'ensemble donne
grossièrement à la lune l'apparence d'une figure humaine. À chaque
lunaison, à mesure que le disque s'éclaire, on retrouve les mêmes taches
occupant les mêmes positions respectives par rapport au contour du
disque. On tire de ce fait une conclusion remarquable.

=268=. _La lune montre toujours à la terre à peu près la même partie de
sa surface_. Nous ne voyons jamais qu'un hémisphère de la lune;
l'hémisphère opposé nous reste constamment caché.

=269=. ROTATION DE LA LUNE. De ce que la lune nous montre toujours la
même face dans sa révolution autour de la terre, on doit conclure
qu'elle tourne sur elle-même.

_La lune, comme le soleil et la terre, tourne continuellement sur
elle-même, d'occident en orient, autour d'un axe central; elle fait un
tour entier dans le même temps qu'elle fait sa révolution sidérale sur
son orbite, c'est-à-dire en_ 27j 7h 43m 11s[99]. _Ce mouvement de
rotation de la lune est uniforme comme celui du soleil et de la terre_.

[Note 99: Il est facile de se rendre compte par une expérience de ce
double mouvement de translation et de rotation de la lune.

Figurons-nous un spectateur fixe en S, sur TS (_fig._ 98), à une grande
distance d'une table ronde, autour de laquelle une seconde personne _l_
circule sans bouger la tête, les yeux constamment fixés vers le centre T
de la table. Partie de la position (A), cette personne _l_ tourne dans
le sens des lettres (A), (B), (C)... Quand ce mouvement commence, le
spectateur, S, ne voit que le derrière de la tête de la personne _l_;
puis un peu de sa figure en (B); puis la voit de profil (pos. C); de (C)
à (D) et de (D) à (E), le profil s'élargit, et quand la personne _l_
arrive en (E), le spectateur S la voit en face. Cette personne _l_ a
fait évidemment un demi-tour sur elle-même, en même temps qu'elle a
tourné autour de la table, puisqu'elle voit en face une personne à
laquelle elle tournait d'abord le dos. La personne _l_ continuant à
circuler autour de la table, une partie de plus en plus grande de sa
figure se cache pour le spectateur S; à la position (G), elle n'est plus
vue que de profil, et le côté visible de sa figure n'est pas celui qui
l'était à la position (C). Enfin, revenue à la position (A), la personne
_l_ tourne de nouveau le dos à la personne S. La tête de _l_
représentant la lune a donc fait un tour sur elle-même, en même temps
qu'elle tournait autour du point central T représentant la terre.]

Les extrémités de l'axe de rotation sont les pôles de la lune; le grand
cercle perpendiculaire à cet axe est l'_équateur lunaire_; l'équateur
lunaire coupe l'écliptique suivant une ligne parallèle à la ligne des
nœuds, en rétrogradant avec elle.

L'axe de rotation de la lune fait avec l'écliptique un angle presque
droit, de 88° 29' 49", et avec le plan de l'orbite lunaire un angle de
83° 20' 49".

DÉMONSTRATION. _La rotation de la lune est prouvée par la fixité de ses
taches._

[Illustration: page 203, fig. 101]

En effet, considérons, pour plus de simplicité (_fig._ 101); une tache,
_m_, située au centre même du disque, sur la ligne T_l_ qui joint ce
centre à celui de la terre, et suivons le mouvement de la lune à partir
de la position (A). Si la lune se déplaçait le long de son orbite sans
tourner sur elle-même, chaque ligne _lm_ de son intérieur se
transportant parallèlement à elle-même, dans la position (B) de cet
astre, la tache _m_ serait vue en _m'_; on la voit toujours en _m_ sur
la direction du rayon T_l'_ qui va de la terre au centre du disque;
cette tache a donc tourné dans l'intervalle de l'arc _m'm_ = _m'l'_T =
_l'_T_l_. Quand la lune arrive à la position (C), la tache, au lieu
d'être vue en _m"_, est toujours vue en _m_; elle a donc tourné de l'arc
_m"m_ = _m"l"_T = _l"_T_l_; voyez encore ce qui arrive à la position
(D), etc. Il résulte donc de la fixité des taches que chaque point _m_
de la surface de la lune est animé, autour d'un axe passant en _l_, d'un
mouvement angulaire précisément égal au mouvement du centre de la lune
autour de la terre. Chaque tache doit faire un tour entier dans le même
temps que le centre _l_ de la lune fait une révolution autour de la
terre. Tel est précisément le mouvement de rotation indiqué.

=270.= LIBRATION DE LA LUNE. A la vue simple, les taches de la lune nous
paraissent toujours garder la même position; mais si on les observe
attentivement pendant quelques jours avec une lunette, on remarque que
les points observés ne conservent pas en réalité la même position sur le
disque; chacun d'eux nous paraît osciller de part et d'autre d'une
position moyenne. L'impression générale que nous laissent tous ces
petits mouvements, qui d'ailleurs à une même époque quelconque de
l'observation, ont tous lieu dans le même sens, c'est que la lune tout
entière éprouve un mouvement d'oscillation, ou de balancement, autour de
son centre, qui produit celui des taches que nous voyons à sa surface.
Ce mouvement particulier de la lune, découvert par Galilée, a reçu le
nom de _libration_.

La libration de la lune est un mouvement composé, dû à trois causes
distinctes produisant chacune une libration particulière. Ces trois
librations particulières, dont la coexistence produit le mouvement
d'oscillation des taches tel qu'on l'observe, sont connues sous les noms
de _libration en longitude_, _libration en latitude_, et _libration
diurne_. Nous les décrirons séparément afin de les mieux faire
comprendre.

=271.= LIBRATION EN LONGITUDE. Les taches de la lune les plus
rapprochées du centre nous paraissent osciller de part et d'autre de ce
point; celles qui avoisinent l'un ou l'autre bord se montrent et se
cachent alternativement; en somme, le globe lunaire nous paraît se
balancer légèrement, en tournant de droite à gauche, puis _vice versa_,
de gauche à droite autour d'une perpendiculaire au plan de son orbite.
C'est ce balancement de la lune que l'on désigne sous le nom de
_libration en longitude_.

Pour parler d'une manière plus précise, nous dirons:

La _libration en longitude_, considérée seule, consiste dans une espèce
de balancement continuel, ou mouvement de _va-et-vient_ circulaire, du
globe lunaire autour d'un axe perpendiculaire au plan de son orbite. Par
suite, une tache centrale nous parait osciller de part et d'autre du
centre. Quand la lune part du périgée, les taches situées alors près du
bord oriental disparaissent successivement, pour ne reparaître qu'au
moment où la lune apparaît à l'apogée; dans le même temps, de nouvelles
taches, invisibles auparavant, apparaissent au bord occidental, se
rapprochent du centre, puis, s'en retournant vers le bord, disparaissent
successivement. Quand la lune va de l'apogée au périgée, les _mêmes_
taches du bord oriental se rapprochent du centre; puis, arrivées à une
certaine distance du bord, s'en retournent pour y être revenues au
moment où la lune arrive au périgée; les taches vues au commencement de
cette seconde période sur le bord occidental disparaissent pour ne
reparaître qu'à l'arrivée de la lune au périgée.

L'amplitude de chaque oscillation est de 8°; par exemple: une tache qui,
à peine arrivée au bord occidental, disparaît, a parcouru, pour arriver
là de sa position la plus éloignée, un arc de 8°. Nous voyons donc, à
l'ouest et à l'est du globe lunaire, successivement, un fuseau de 8° de
largeur que nous ne verrions pas sans la libration en longitude.

=272.= LIBRATION EN LATITUDE. La lune nous paraît se balancer légèrement
de haut en bas, puis de bas en haut, autour d'un axe situé dans le plan
de son orbite. Des taches apparaissent successivement au bord supérieur
du disque (par rapport à l'orbite), s'avancent un peu en deçà; puis,
s'en retournant, disparaissent les unes après les autres; tandis que des
taches voisines du bord inférieur opposé, s'en rapprochent
progressivement, disparaissent pour reparaître plus tard. L'amplitude
d'une oscillation est d'environ 6°-1/2.

=273.= LIBRATION DIURNE. Enfin on remarque encore un troisième
balancement de l'astre beaucoup plus faible que les deux autres, et dont
la période ne dure qu'un jour: c'est un mouvement de _va-et-vient_
circulaire autour de l'axe de rotation de là terre, c'est-à-dire suivant
le parallèle céleste que la lune nous paraît décrire au-dessus de notre
horizon dans le mouvement diurne de la sphère céleste. L'amplitude de
cette oscillation est égale à la parallaxe de l'astre, environ 1°[100].

[Note 100: Voir note II, à la fin du chapitre, l'explication de chaque
libration.]

=274.= MONTAGNES DE LA LUNE. A l'aide du télescope on distingue à la
surface de la lune des inégalités qui ne peuvent être que des montagnes;
car elles projettent des ombres très-caractérisées dont la position et
la grandeur se rapportent exactement à la direction des rayons solaires
qui arrivent sur les lieux de la surface de la lune où ces inégalités
s'observent.

Le bord du fuseau brillant de la lune tourné du côté du soleil est
toujours circulaire et à peu près uni; mais le bord opposé de la partie
éclairée qui devait offrir l'apparence d'une ellipse bien tranchée, si
la surface lunaire avait une courbe unie, se montre toujours avec des
déchirures ou des dentelures qui indiquent des cavités et des _points
proéminents_. Les dentelures sont de grandes ombres que présentent des
montagnes situées sur ce bord, quand le bord éclairé dépasse ces points
proéminents; le soleil gagnant en hauteur, ses rayons sont moins
inclinés; les ombres se raccourcissent. Quand la lune est pleine, les
rayons solaires arrivant perpendiculairement en même temps que nos
rayons visuels, on n'aperçoit plus d'ombre sur aucun point de la surface
lunaire.

L'existence des montagnes lunaires est encore confirmée par ce fait,
qu'il existe même en dehors de la partie éclairée des points brillants,
qui sont les sommets de montagnes éclairées avant les vallées voisines.

On a pu, à l'aide de mesures micrométriques des ombres portées, calculer
les hauteurs de plusieurs montagnes de la lune. MM. Beer et Maddler, de
Berlin, après avoir effectué un grand nombre de ces mesures dans les
diverses parties de l'hémisphère lunaire visible, ont trouvé 22
montagnes dont la hauteur dépasse 4800 mètres (hauteur du mont Blanc).

Voici, les plus hautes que nous désignons par leurs noms généralement
adoptés:

Dorfel       7603 mètres.

Newton       7264

Casatus      6956

Curtius      6769

Calippus     6216

Tycho        6151

Huyghens     5530

=275.= REMARQUE. Les taches grisâtres que l'on remarque à l'œil nu sur
la surface de la lune ne sont pas des montagnes; ce sont des parties qui
réfléchissent moins bien les rayons solaires que les régions
environnantes. Ces parties moins brillantes ne renferment presque pas de
montagnes; on leur a donné jusqu'ici le nom de _mers_, à tort, puisque,
ainsi que nous l'expliquerons bientôt, il ne peut exister d'eau à la
surface de la lune.

[Illustration: page 207, fig. 106.]

=276.= CONSTITUTION VOLCANIQUE DE LA LUNE. Les montagnes très-nombreuses
de la lune présentent un caractère particulier extrêmement remarquable.
Elles offrent en général l'aspect d'un bourrelet circulaire entourant
une cavité dont le fond est quelquefois au-dessous du niveau des parties
environnantes de la surface de la lune. Souvent il existe au milieu de
cette cavité centrale une montagne isolée en forme de pic (_fig._ 106).
Ces montagnes circulaires ressemblent assez aux cratères des volcans
éteints qui existent à la surface de la terre; mais les diamètres des
montagnes lunaires sont incomparablement plus grands que les diamètres
de ces volcans. Le diamètre de l'Etna, dans son maximum, a atteint 1500
mètres; et celui du Vésuve, environ 700 mètres. Or, parmi les plus
grandes montagnes circulaires de la lune on en cite deux qui ont 91200
et 87500 mètres de diamètre. A partir de là on en trouve de toutes les
dimensions, jusqu'aux plus petites que nous puissions apprécier à la
distance de la lune. Eu égard à leurs dimensions, les grandes montagnes
lunaires sont plutôt comparables à certains cirques montagneux que l'on
rencontre sur la terre, et que l'on désigne sous le nom de cratères de
_soulèvement_. Tels sont, par exemple, le cirque de l'île de Ceylan, qui
a 70000 mètres de diamètre; celui de l'Oisans, dans le Dauphiné, qui en
a 20000, et le cirque du Cantal (Auvergne), qui en a 10000.

En somme la surface de la lune nous offre l'aspect général des contrées
volcaniques; on y voit presque partout des accidents de terrain
considérables; le sol paraît avoir été tourmenté par des actions
volcaniques intérieures; il n'offre pas les traces d'un nivellement
pareil à celui que les eaux et les agents atmosphériques ont produit
avec le temps sur la surface de la terre.

=277.= ABSENCE D'ATMOSPHÈRE À LA SURFACE DE LUNE. Il résulte de divers
indices que la lune n'est pas entourée d'une atmosphère gazeuse analogue
à celle dans laquelle nous vivons; voici l'observation qui démontre de
la manière la plus précise cette absence d'atmosphère autour de la lune.
(V. aussi la note ci-après.)

Quand cet astre, en vertu de son mouvement propre, vient à passer devant
une étoile, on peut observer avec une grande exactitude l'instant précis
de la disparition de l'étoile, puis l'instant de sa réapparition; de là
on déduit la durée de l'occultation. D'un autre côté, les lois connues
du mouvement de la lune nous apprennent quelle est la position de cet
astre par rapport à la terre et à l'étoile, au moment de l'observation,
et par suite quelle est la corde du disque qui passe précisément entre
l'observateur et l'étoile. Connaissant la vitesse du mouvement propre de
la lune au même moment, on peut calculer le temps qu'il faut au dernier
point de cette corde (considérée dans le sens du mouvement), pour venir
remplacer le premier sur la direction du rayon visuel qui va de
l'observateur à l'étoile; car ce temps est précisément celui qu'il faut
à cette deuxième extrémité comme à tout autre point de la lune pour
parcourir dans le sens de l'orbite un chemin ayant la longueur connue de
la corde en question. Or on trouve toujours que ce temps est égal à la
durée de l'occultation; ou du moins la différence qui existe entre ces
deux temps est assez faible pour qu'on puisse la regarder comme
résultant des erreurs d'observation.

Il n'en peut être ainsi évidemment que si la lune n'a pas d'atmosphère
gazeuse analogue à la nôtre; en effet, le temps _calculé_ est
précisément celui pendant lequel le rayon lumineux qui va _en droite
ligne_ de l'étoile à l'observateur est successivement intercepté par les
divers points de la corde que nous avons considérés; c'est donc
précisément le temps que doit durer l'occultation, si ce rayon direct
est le seul qui puisse nous montrer l'étoile. Cela posé, admettons que
la lune soit entourée d'une atmosphère gazeuse plus ou moins étendue, et
considérons l'étoile e un peu après le moment où le disque lunaire a
commencé à s'interposer entre elle et l'observateur placé en O
(_fig._107, nº 1).

[Illustration: 209, fig. 107]

Le rayon direct _e_O est intercepté et ne nous montre plus l'étoile;
mais le rayon lumineux _ec_ qui traverse l'atmosphère tout près de ce
disque se réfracte et nous apporte indirectement la vue de l'astre;
celui-ci ne cesse d'être vu que lorsqu'il est déjà assez avancé derrière
la lune pour que la réfraction ne puisse plus dévier jusqu'à nous aucun
des rayons qui vont de l'étoile à l'atmosphère: l'occultation
commencerait donc en réalité un certain temps _après_ le passage entre
la terre et l'étoile de la première extrémité de la corde que nous
considérons. Elle cesserait aussi un certain temps _avant_ le passage de
la seconde extrémité; car un peu avant ce dernier passage, la vue de
l'étoile nous serait apportée par un des rayons lumineux réfractés
allant de l'étoile à la partie de l'atmosphère qui avoisine cette
seconde extrémité (_fig._ 107, nº 2). La durée de l'occultation, ainsi
diminuée au commencement et à la fin, différerait donc du temps qui a
été calculé d'après la longueur de la corde, d'une quantité d'autant
plus grande que l'atmosphère lunaire serait plus étendue et plus dense.
Comme il n'existe pas de différence appréciable entre ces deux durées,
il en résulte que la lune n'a pas d'atmosphère d'une densité
appréciable.

On a pu reconnaître ainsi que l'atmosphère de la lune, s'il y en a une,
est nécessairement moins dense à la surface même de l'astre que l'air
qui reste dans nos meilleures machines pneumatiques lorsqu'on y a fait
le vide autant que possible. Cela revient à dire que la lune n'a pas
d'atmosphère[101].

[Note 101: On arrive à la même conséquence de la manière suivante: Si la
lune a une atmosphère, il n'y a pas de nuages flottants dans cette
atmosphère comme dans la nôtre; car des nuages cacheraient
nécessairement certaines portions de la surface de la lune, et l'aspect
général du globe lunaire varierait d'un instant à l'autre d'une manière
irrégulière; or nous savons qu'il ne se passe rien de pareil.

S'il n'y a pas de nuages dans l'atmosphère de la lune, cette atmosphère
est tout à fait transparente; mais une pareille atmosphère doit, en
réfléchissant les rayons lumineux qui la traversent en dépassant la
lune, produire sur cet astre quelque chose d'analogue à notre
crépuscule: une moitié de la lune étant éclairée comme la moitié de la
terre, des rayons solaires seraient réfléchis par l'atmosphère de cette
première moitié de la lune sur une partie de la seconde moitié en
quantité décroissante, à mesure qu'on s'éloignerait des bords de
l'hémisphère éclairé. À l'époque où la lune n'est pas pleine, la surface
de la lune qui est vis-à-vis de nous se composerait toujours d'une
partie éclairée et d'une partie obscure, mais sans transition brusque de
l'une a l'autre; il devrait y avoir une dégradation insensible de
lumière du côté de la partie de cette surface qui ne reçoit pas
directement les rayons du soleil; il n'y aurait pas une séparation nette
des deux parties. Or, comme cette dégradation de lumière n'existe pas,
que les deux parties de l'hémisphère lunaire qui fait face à la terre
sont séparées par une ligne elliptique très-tranchée, on conclut de là
que la lune n'a pas d'atmosphère.]

=278=. ABSENCE D'EAU SUR LA LUNE. De ce que la lune n'a pas
d'atmosphère, on conclut immédiatement qu'il n'existe pas d'eau à la
surface de cet astre; car s'il y en avait, cette eau, dont la surface
serait libre de toute pression, produirait des vapeurs qui
constitueraient immédiatement une atmosphère. C'est donc à tort qu'on a
donné le nom de mers aux taches grisâtres qu'on aperçoit à la surface de
la lune (nº 286).

=279=. Une conséquence immédiate de l'absence d'atmosphère et d'eau sur
la lune, c'est que cet astre ne peut être habité par des êtres animés,
au moins par des êtres analogues à ceux qui habitent la terre.

La surface de la lune ne doit offrir aucune végétation; la température y
doit être très-basse. En raison de l'absence d'eau et d'atmosphère, la
configuration du globe lunaire a dû se conserver telle qu'elle était au
moment où ce globe s'est solidifié. C'est ce qui explique le grand
nombre de cirques qu'on y voit, tandis que, les cirques sont rares sur
la terre, où les eaux et les agents atmosphériques, par leur action
continue, ont en général dégradé les aspérités et comblé les cavités.

DES ÉCLIPSES.

=280=. Il arrive de temps en temps, à l'époque de la pleine lune, que le
disque de cet astre s'entame peu à peu d'un côté; une échancrure s'y
forme, augmente progressivement d'étendue, puis diminue peu à peu, et
finit par s'anéantir, le disque redevenant ce qu'il était avant le
commencement du phénomène. Quelquefois l'échancrure augmente à tel point
qu'elle envahit le disque entier; l'astre disparaît complètement pendant
un certain temps; au bout de ce temps il reparaît; le disque se découvre
progressivement, en nous présentant en sens inverse les mêmes phases
successives qu'avant sa disparition. Le phénomène que nous venons de
décrire est ce qu'on appelle une _éclipse de lune partielle ou totale_.

Les phases d'une éclipse de lune ont quelque analogie avec celles que
cet astre nous présente régulièrement à chaque lunaison; mais elles en
diffèrent essentiellement par leur durée (les phases d'une éclipse se
produisent toutes dans un petit nombre d'heures), et par l'irrégularité
des intervalles de temps compris entre les éclipses successives.

=281=. Il y a aussi des _éclipses de soleil partielles ou totales_. De
temps à autre, à des intervalles irréguliers, le disque du soleil
disparaît graduellement, en partie ou en totalité, nous offrant des
phases analogues à celles que nous venons de décrire pour la lune.

=282=. Les éclipses de lune ont toujours lieu, au moment de
l'_opposition_, quand la lune est _pleine_; or à cette époque la terre
se trouve entre le soleil et la lune (nº 242, fig. 98); en se rendant
compte d'une manière précise de la position des trois corps, on
reconnaît facilement qu'une éclipse de lune a pour cause l'interposition
de la terre qui intercepte une partie ou la totalité des rayons solaires
dirigés sur le globe lunaire.

=283=. Les éclipses de soleil ont toujours lieu à l'époque de la
_conjonction_, quand la lune est _nouvelle_; or à cette époque la lune
se trouve entre le soleil et la terre (nº 242, fig. 98); on reconnaît
aisément qu'une éclipse de soleil, partielle ou totale, est due à
l'interposition de la lune qui intercepte une partie ou la totalité des
rayons solaires dirigés vers la terre.

=284=. EXPLICATION DES ÉCLIPSES. La figure 108 rend manifeste cette
explication des éclipses.

[Illustration: 212, fig. 108]

[102]

Considérons deux globes sphériques S et T; le premier S plus grand que
le second est lumineux; l'autre T est opaque, et ne peut être éclairé
que par le globe S.

[Note 102: La _concavité_ de la courbe que décrivent les différentes
positions _l, l', l"_... de la lune doit être tournée en sens inverse
(vers la terre): le graveur s'est trompé.]

Concevons par la ligne des centres, ST, un plan qui détermine sur les
globes les circonférences de grands cercles, circ. SB', circ. TB; soit
DBB' une tangente commune aux deux circonférences. Imaginons que cette
tangente fasse une révolution autour de TS avec les demi-circonférences
qu'elle touche. Tandis que celles-ci décrivent les surfaces des deux
globes, la tangente engendre un cône droit indéfini dont le sommet est
en D; ce cône DB'C' touche et enveloppe les deux globes T et S; c'est ce
qu'on appelle le cône tangent _extérieur_ aux deux sphères. Limitons ce
cône au petit cercle BKC; on a ainsi le cône circulaire droit DBC; ce
cône est ce qu'on appelle le _cône d'ombre_ du globe opaque T par
rapport au globe lumineux S. On le nomme ainsi parce que tous les
points, N, de l'intérieur de ce cône, sont dans l'obscurité; tous les
rayons lumineux, qui pourraient y arriver en ligne droite du globe S,
étant, comme le montre la figure, interceptés par le globe opaque T
(essayez de joindre, par une ligne droite, un point du globe S au point
N). D'aucun de ces points, N, intérieurs au cône d'ombre DBC, on ne peut
non plus apercevoir le globe S[103].

[Note 103: Pour plus de clarté et de simplicité, _nous faisons ici et
plus loin abstraction de tout effet de réfraction_; il en sera ainsi
jusqu'à l'endroit où nous expliquons l'effet de l'atmosphère terrestre
sur les éclipses de lune.]

Concevons maintenant une tangente commune, HIH', passant entre les mêmes
circonférences, circ. TB et circ. SB'; faisons encore tourner cette
tangente en même temps que les deux circonférences autour de ST comme
axe; cette tangente engendre une nouvelle surface conique indéfinie dont
le sommet est en I, et qui touche et enveloppe les globes T et S, de ses
deux nappes _p_I_q_, P'I_q'_; ce nouveau cône est le cône tangent
_intérieur_ aux deux sphères. Le tronc de cône indéfini _p_EH_q_
comprend dans son intérieur _le cône d'ombre_, DBC, du globe T. L'espace
qui existe _dans ce tronc de cône_, autour et au delà du cône d'ombre,
DBC, se nomme la _pénombre_ du globe opaque T par rapport au globe
lumineux S. Ce nom de _pénombre_ (presque ombre) vient de ce que chaque
point; M, situé dans l'espace ainsi désigné, est mis par le globe opaque
T à l'ombre d'une partie du corps lumineux S. Ainsi le point M, marqué
sur notre figure, ne reçoit pas de lumière de la partie G'E'C' du globe
S, tandis qu'il en reçoit librement de la partie supérieure G'H'B'
(essayez de joindre M, par une ligne droite, à un des points de G'E'C;
MG' est une tangente au globe T). Du point M on ne voit pas la partie
G'E'C de S, on ne voit que la partie supérieure G'H'B'. Chaque point M
de la pénombre reçoit du globe S une somme de rayons lumineux d'autant
moindre qu'il est plus rapproché du cône d'ombre; c'est ce que la figure
met en évidence.

A l'aide de ces explications géométriques, on comprendra facilement ce
que nous allons dire des éclipses. Nous commencerons par les éclipses de
lune.

=285=. ÉCLIPSES DE LUNE. Supposons que le globe lumineux S soit le
soleil, et que le globe T soit la terre. Celle-ci se meut autour du
soleil avec son _cône d'ombre_. Quand, à l'époque de l'opposition
(pleine lune), la terre se trouve entre le soleil et la lune, il peut
arriver que cette dernière, qui se trouve précisément du côté du cône
d'ombre, se rapproche assez de la terre pour pénétrer dans ce cône en
totalité ou en partie, comme il est indiqué sur notre figure; positions
_l_ et _l'_ de la lune. Quand la lune se trouve dans la position _l_,
elle ne reçoit aucune lumière du soleil; elle n'en reçoit pas non plus
de la terre par réflexion (car elle est précisément vis-à-vis de
l'hémisphère obscur de la terre). La lune est donc alors complètement
obscure et invisible; on ne la voit plus d'aucun point de la terre, _ni
de l'espace_ (V. nº 290). Il y a alors _éclipse totale de lune_.

=286=. _Les phases d'une pareille éclipse s'expliquent naturellement_.
La lune tournant autour de la terre, de l'ouest à l'est, arrive au cône
d'ombre de la terre dans lequel elle se plonge peu à peu (du côté DB par
exemple); le disque lunaire s'échancre vers le bord oriental (position
_l'_); l'échancrure, augmentant progressivement, envahit tout le disque;
l'astre est alors tout entier dans le cône (position _l_). Son mouvement
vers l'est continuant, il atteint l'autre côté (DC) du cône, et commence
à en sortir (4e position); le bord oriental du disque, éclipsé le
premier, reparaît aussi le premier; l'astre sortant peu à peu de
l'ombre, le disque se découvre progressivement, nous offrant les mêmes
phases qu'à l'entrée, mais en sens inverse; après quoi nous le revoyons
tel qu'il était avant le commencement de l'éclipse.

Il y a _éclipse partielle_ quand la lune, au lieu d'entrer en plein dans
le cône d'ombre, atteint ce cône sur le côté: une partie seulement du
globe lunaire, _l'_, traverse l'ombre; elle y entre progressivement,
puis en sort de même; on se figure aisément la marche du phénomène et
les apparences qui en résultent pour nous.

=287=. EFFET DE LA PÉNOMBRE. Avant d'entrer dans le cône d'ombre, la
lune traverse la pénombre (de EP à BD); la quantité de rayons solaires
qu'elle reçoit en général du soleil diminue de plus en plus; il en
résulte que l'éclat de chaque partie du disque s'affaiblit
progressivement à mesure que l'astre approche du cône d'ombre. Il n'y a
donc pas passage subit de l'éclat ordinaire du disque à l'obscurité,
mais dégradation progressive de lumière depuis l'un jusqu'à
l'autre[104]. De même à la sortie, l'astre, quittant le cône d'ombre (du
côté CD), entre dans la pénombre; à mesure qu'il s'avance vers la limite
extérieure (HQ) de cette pénombre, le disque d'abord terne reprend peu à
peu son éclat ordinaire[A].

[Note 104: Cette dégradation de teinte est tellement prononcée, qu'il
est impossible d'indiquer avec précision l'instant où un point
remarquable de la lune quitte la pénombre pour entrer dans l'ombre pure,
ou inversement.]

=288=. Il peut arriver que la lune ne passe pas assez près de l'axe DTS
du cône d'ombre pour entrer dans ce cône, mais qu'elle traverse la
pénombre à côté du cône; alors son éclat se ternit, le disque nous
paraît moins brillant; mais comme aucune de ses parties ne cesse
absolument d'être éclairée par le soleil, il n'y a pas d'éclipse
proprement dite.

=289=. _Les éclipses de lune ne peuvent avoir lieu que vers
l'opposition, à l'époque de la pleine lune; mais il n'y a pas
nécessairement éclipse à toutes les oppositions_.

A l'inspection de la _fig._ 108, on voit aisément qu'il ne peut y avoir
éclipse de lune qu'aux époques où cet astre est assez _rapproché de
l'axe_ STD _du cône d'ombre de la terre, du côté de la terre opposé au
soleil_. Or cette ligne STD qui joint le centre du soleil à celui de la
terre n'est autre que la ligne ST de la _fig._ 98, sur laquelle nous
avons indiqué approximativement les positions relatives que prend
successivement la lune dans sa révolution autour de la terre. A
l'inspection de cette figure 98, on voit que les deux conditions
ci-dessus exprimées ne peuvent être remplies que vers l'époque où la
luné arrive à la position (E), c'est-à-dire à l'_opposition_.

Si la lune se mouvait exactement dans le plan de l'écliptique, comme
nous le supposons dans la _fig._ 98, il suffirait évidemment, pour qu'il
y eût éclipse à chaque opposition, que la distance T_l_ qui sépare en ce
moment la lune de la terre fût moindre que la longueur TD du cône
d'ombre; de plus, pour que l'éclipse fût totale, il suffirait que T_l_
fût assez notablement inférieur à TD pour que la lune arrivât dans une
partie du cône d'ombre suffisamment large pour la contenir tout entière,
à l'instant où son centre arriverait sur l'axe STD. _Ces deux conditions
sont toujours remplies_; car la longueur TD, du cône d'ombre de la terre
est, en moyenne, d'environ 216 rayons terrestres, tandis que la
distance, T_l_ de la lune à la terre est en moyenne de 60 rayons
terrestres (au maximum 63,9). De plus, à cette distance 60_r_ de la
terre, le diamètre de la section circulaire du cône d'ombre est beaucoup
plus grand que celui de la lune. Tout cela se vérifie par la géométrie
la plus simple[105]. _Il est donc certain que si la lune se mouvait dans
le plan même de l'écliptique, il y aurait éclipse de lune à chaque
opposition ou pleine lune_.

[Note 105: LONGUEUR DU CÔNE D'OMBRE DE LA TERRE. Il s'agit de comparer
cette longueur DT au rayon de la terre TB = _r_. Les triangles
rectangles semblables DSB', DTB donnent:

SD / DT = SB' / TB'; d'ou (SD-DT) / TD, ou ST / TD = (SB'-TB) / TB.

La distance, ST, du soleil à la terre, vaut moyennement 24000 _r_; le
rayon SB' du soleil vaut 112_r_; donc SB'-TB = 112r-r = 111_r_. En
mettant ces valeurs dans la dernière égalité, on trouve 24000_r_ / DT =
111_r_ / _r_ = 111.

D'où on déduit DT = 24000_r_ / 112 ou 216_r_, à moins d'un rayon
terrestre.

_A la distance moyenne de la lune à la terre, et même au maximum de
cette distance, 63 à 64_r_, le diamètre de la section circulaire du cône
d'ombre de la terre est beaucoup plus grand que le diamètre de la lune;
il en est plus que le double_.

À moitié chemin de la terre T au sommet D du cône d'ombre, c'est-à-dire
à la distance 108_r_, le diamètre de la section circulaire du cône est
évidemment là moitié du diamètre de la terre. Or le diamètre de la lune
est égal aux 3/11 du diamètre de la terre, â peu près le quart. Le
diamètre de la section circulaire à la distance 108_r_ étant presque le
double du diamètre de la lune, on en conclut qu'à la distance 60_r_, le
premier diamètre est _à fortiori_ beaucoup plus grand que le second. Si
on veut avoir leur rapport exactement, il suffit, en appelant _x_ le
diamètre de la section à la distance 60_r_, de résoudre cette équation
très simple:

_x_/2_r_ = (216_r_-60_r_)/216_r_ = 156/216 = 13/18; à peu près 8/11.]


Nous pouvons donc dire en toute certitude:

_S'il n'y a pas d'éclipses de lune à toutes les oppositions, cela tient
à ce que cet astre ne se meut pas sur le plan même de l'écliptique, mais
dans un plan incliné à celui-là d'environ_ 5° 9'.

Il résulte de là, en effet, qu'au moment de l'opposition la lune ne se
trouve pas, en général, sur le plan de l'écliptique; qu'elle peut, par
suite, ne pas rencontrer l'axe ST du cône d'ombre, et même passer assez
loin de cette ligne pour ne pas entrer, même partiellement, dans le
cône; dans ce cas, il n'y a pas d'éclipse du tout. (V. dans les notes,
p. 228, ce qui concerne la prédiction des éclipses.)

=290=. INFLUENCE DE L'ATMOSPHÈRE TERRESTRE SUR LES ÉCLIPSES DE LUNE. Les
circonstances d'une éclipse de lune ne sont pas tout à fait telles que
nous les avons indiquées; elles sont un peu modifiées par l'influence de
l'atmosphère qui entoure la terre. Dans les explications précédentes,
nous n'avons tenu compte, en fait de rayons solaires arrivant sur la
lune, que de ceux qui y arrivent en _ligne droite_, sans avoir été
brisés; il n'a donc été nullement question des rayons lumineux qui
arrivent à la lune après avoir traversé l'atmosphère; car ceux-là, comme
on l'a vu, nº 107, sont _brisés_ et déviés par la réfraction
atmosphérique. Nous allons réparer cette omission volontaire[106].

Il résulte de la réfraction qu'éprouvent les rayons solaires qui
traversent l'atmosphère, _sans être arrêtés par la terre_, que tel de
ces rayons qui, en entrant, avait la direction SA (_fig._ 109), sort de
l'atmosphère, dans la direction AS"[107], après une série de déviations
éprouvées toutes dans le même sens par rapport à la direction primitive
SA. On conçoit bien qu'il peut résulter de cette déviation des rayons
solaires, que le rayon brisé AS" atteigne le cône d'ombre situé du même
côté de la terre que lui (V. la _fig._ 110).

[Note 106: Nous agissons dans l'explication des éclipses comme dans
celle des mouvements propres du soleil ou de la lune; nous avons divisé
notre explication pour la rendre plus claire. Nous exposons d'abord les
circonstances et les causes principales du phénomène, en omettant à
dessein certaines circonstances moins importantes; c'est là une première
approximation. Puis nous complétons cette première explication par
l'examen de ce qui a été omis.]

[Note 107: Voici, avec un peu plus de détail, ce qui se passe quand un
rayon lumineux traverse l'atmosphère, _sans être arrêté par le soleil_.

[Illustration: 218, Fig. 109]

L'extrémité mobile de ce rayon, se rapprochant d'abord de la terre,
commence par traverser une série de couches d'air de plus en plus
denses; chaque fois qu'elle entre dans une nouvelle couche, la direction
de ce rayon éprouve une déviation telle que son prolongement s'abaisse
de plus en plus vers la terre. Au bout d'un certain temps, cette
direction déviée devient tangente à la couche atmosphérique qu'elle
vient d'atteindre; elle est devenue, par exemple, S'AS'(1) (_fig._ 109).
La déviation totale depuis l'entrée du rayon dans l'atmosphère est, par
exemple, l'angle S(1)AS'(1) (SAS(1) est une parallèle à la direction
primitive du rayon). A partir de ce contact, l'extrémité mobile de notre
rayon lumineux, s'éloignant du centre de la terre, traverse des couches
d'air de moins en moins denses; à son entrée dans chaque couche, la
direction de ce rayon éprouve une déviation telle, que son prolongement
s'abaisse encore de plus en plus du côté de la terre. Quand il sort, il
a éprouvé depuis son passage en A une nouvelle déviation S'(1)AS" =
S(1)AS'(1); ce qui fait en tout, depuis son entrée dans l'atmosphère,
une déviation S(1)AS" double de S(1)AS'(1) (AS" est une parallèle à la
direction définitive du rayon quittant l'atmosphère). A l'inspection de
la figure 110, on voit qu'il peut résulter de la réfraction que le rayon
dévié AS" atteigne le cône d'ombre DBC de la terre, située précisément
du même côté que lui. Il suffit pour cela que le point A ne soit pas
trop éloigné de la surface de la terre.

Si on considère, en effet, un rayon qui traverse l'atmosphère terrestre
en passant tout près du sol de la terre, la déviation qu'il éprouve
jusqu'à son arrivée en A est d'environ 33" (nº 108); quand il sort, la
déviation doublée, S(1)AS", dépasse 1º dans les circonstances
ordinaires. Cette déviation totale qu'éprouve un rayon lumineux qui
traverse l'atmosphère sans s'arrêter à la terre est d'ailleurs plus ou
moins grande, suivant que ce rayon s'approche plus ou moins de la
surface du sol; elle présente tous les états de grandeur, depuis la
déviation de 1°,6 relative aux rayons qui pénètrent dans les couches les
plus basses de l'atmosphère, jusqu'à la déviation nulle du rayon qui
touche l'atmosphère sans y pénétrer.

REMARQUE. On conçoit aisément qu'à l'entrée d'un rayon dans
l'atmosphère, la réfraction rapprochant le prolongement de ce rayon de
la normale intérieure à la couche, ce prolongement s'abaisse
progressivement du coté de celle-ci. Pour concevoir ce qui se passe dans
la seconde période, depuis le point A, il faut se transporter à la
sortie du rayon et faire le chemin en sens inverse; dans ce mouvement
inverse, le rayon considéré S"A, revenant vers des couches plus denses,
doit continuellement se relever; en se relevant ainsi, il revient à la
position AS'_(1); donc, réciproquement, il s'est abaissé de AS'_(1), à
sa sortie dans la direction AS". Les deux cônes D et I n'ont pas tout à
fait la même base; nous l'avons, supposé pour ne pas compliquer la
figure; le sommet I étant donné, le lecteur voit bien où doit être la
base du petit cône.]

[Illustration: 218, Fig. 110]

C'est, en effet, ce qui arrive; une partie du cône d'ombre pure, DBC,
est atteinte et détruite par les rayons solaires réfractés qui y
apportent de la lumière.

[Illustration: 219, Fig. 111]

Comme tout se passe de la même manière autour de ST et de la terre, les
rayons solaires réfractés, les plus rapprochés de celle-ci, parmi ceux
qui sortent de l'atmosphère, forment un cône IBC (_fig._ 111) tangent à
la terre, et dont l'axe est aussi dirigé suivant ST; ce cône IBC est le
véritable cône d'ombre pure de la terre; _la nuit_ _est absolue dans son
intérieur_. Mais ce qui dépasse la surface de IBC, dans le cône DBC, par
exemple, est atteint et éclairé par un nombre de rayons solaires
réfractés de plus en plus grand, à mesure qu'on s'éloigne du sommet I,
ou de la surface IBC; cette partie excédante DIBC du cône d'ombre est
littéralement détruite par ces rayons réfractés. La lumière que ceux-ci
y apportent croît insensiblement, depuis l'obscurité absolue, à partir
de la surface IBC, ou bien du sommet I.

À l'aide du calcul on peut déterminer la distance du sommet I au centre
de la terre; cette distance est en moyenne de 42 rayons terrestres. On
voit donc que la lune ne peut jamais pénétrer dans l'espace IBC
complètement privé de lumière; au moment d'une éclipse totale, cet astre
se trouve tout entier dans la partie du cône DBC, où pénètrent les
rayons réfractés. _Dans une éclipse totale la lune ne perd donc pas
complètement sa lumière; elle est faiblement éclairée par les rayons
réfractés_.

On a observé que cette faible lumière que la lune conserve dans les
éclipses totales, présente une teinte rougeâtre très-prononcée. Cet
effet est dû à un mode d'action de l'air sur les rayons solaires qui le
traversent; il se produit une décomposition de la lumière solaire que
nous ne pouvons expliquer ici.

Nous n'avons pas besoin de dire que dans une éclipse partielle
l'intensité de l'éclipse est de même diminuée par l'effet des mêmes
rayons réfractés.

=291=. REMARQUE. On ne peut voir une éclipse de lune que si cet astre et
le cône d'ombre de la terre, ou au moins une partie de cette ombre, se
trouvent ensemble au-dessus de l'horizon; ce qui ne peut avoir lieu que
lorsque le soleil est au-dessous; _on ne peut donc voir des éclipses de
lune que pendant la nuit_. Cependant il peut arriver quelquefois que la
réfraction atmosphérique permette d'observer une éclipse un peu après le
coucher du soleil, et un peu avant son lever; cela se comprend aisément.
(V. le complément, page 228).

=292=. ÉCLIPSES DE SOLEIL. Une éclipse de soleil n'a jamais lieu qu'à
l'époque d'une conjonction, ou nouvelle lune. La lune se trouvant alors
entre le soleil et la terre, cache à certains lieux de celle-ci une
partie ou la totalité du disque du soleil. Ce phénomène s'explique de la
même manière que les éclipses de lune.

[Illustration: 221, Fig. 114.]

=293=. EXPLICATION DES ÉCLIPSES DE SOLEIL, TOTALES, ANNULAIRES,
PARTIELLES. Dans la fig. 114, à laquelle s'applique tout ce que nous
avons dit nº 284 relativement à la fig. 108, le corps lumineux S est
toujours le soleil, mais le corps opaque est la lune, _l_, qui, de même
que notre globe, a un cône d'ombre DBC, et une pénombre PEHQ, qui
l'accompagnent dans sa révolution autour de la terre. À l'époque d'une
conjonction ou nouvelle lune, il peut arriver que, la lune se trouvant
entre le soleil et la terre, celle-ci soit atteinte en partie par le
cône d'ombre et la pénombre lunaire, comme l'indique la fig. 114, ou
seulement par la pénombre comme on le voit sur la fig. 115
ci-après[108]. (V. la note).

[Note 108: _Longueur du cône d'ombre pure de la lune_. On détermine la
longueur _l_D du cône d'ombre pure de la lune de la même manière que la
longueur de l'ombre de la terre (page 211, en note); il suffit de
remplacer le rayon TB de la terre par le rayon _l_B de la lune dans les
formules trouvées. En remplaçant dans ces formules la distance du soleil
à la lune par ses valeurs extrêmes, on trouve que la longueur du cône
d'ombre pure de la lune varie entre 57r,76 et 59r,76 (_r_ rayon de la
terre); on sait que la distance _l_T, de la terre à la lune, varie entre
55r,95 et 63r,80. Il peut arriver que la longueur de l'ombre étant à son
maximum ou près de ce maximum, 59r,76, la distance de la terre soit à
peu près au minimum, 55r,95; dans ce cas, si la ligne S_l_ n'est pas
trop écartée de la ligne ST (V. nº 296), le cône d'ombre pure de la lune
peut atteindre (_fig._ 114) et même traverser la terre; il y a alors
éclipse totale de lune pour une certaine région de la terre. Les nombres
ci-dessus nous apprennent également qu'il arrivera le plus souvent qu'au
moment d'une conjonction la longueur _l_D sera plus petite que la
distance _l_T-_r_, auquel cas il n'y a nulle part éclipse totale du
soleil. On peut calculer le diamètre de la section de l'ombre pure de la
lune à la distance minimum de la surface terrestre; on sait ainsi dans
quelle étendue de cette surface on peut cesser de voir complètement le
soleil _à un moment donné_. Cette étendue est relativement très-petite.]

ÉCLIPSE TOTALE. Quand une partie _ab_ de la terre est atteinte par
l'ombre pure de la lune, chaque lieu de cette région _ab_ cesse de voir
le soleil et d'être éclairé par ses rayons; il y a pour ce lieu _éclipse
totale_ du soleil. Chaque lieu M simplement atteint par la pénombre de
la lune cesse de voir une certaine partie, GE', du soleil; il n'en
reçoit plus de lumière; il y a pour ce lieu éclipse partielle de soleil.
En même temps qu'il y a éclipse totale pour les lieux de la région _ab_,
et _éclipse partielle_ pour les lieux tels que M, _il n'y a pas
d'éclipse de lune_ pour d'autres lieux, tels que N, situés sur la terre,
en dehors de l'ombre et de la pénombre de la lune.

ÉCLIPSES PARTIELLES. Il peut arriver, avons-nous dit, que la terre soit
atteinte par la pénombre seule de la lune (_fig._ 115); alors il n'y a
éclipse totale pour aucun lieu de la terre; il y a seulement éclipse
partielle pour chaque lieu M, atteint par la pénombre.

[Illustration: 222, Fig. 115]

Il y a deux espèces d'éclipses partielles de soleil; les éclipses
_annulaires_, et les éclipses partielles proprement dites. L'éclipse est
_annulaire_, quand, au milieu du phénomène, le disque solaire nous
présente l'aspect d'un cercle noir entouré d'un anneau ou couronne
lumineuse (_fig._ 116). L'éclipse _partielle ordinaire_ est celle dans
laquelle il se forme simplement une échancrure plus ou moins étendue sur
un côté du disque solaire (_fig._ 117).

[Illustration: 223, Fig. 116]

[Illustration: 223, Fig. 117]

[Illustration: 223, Fig. 118]

Il y a éclipse annulaire pour tous les points de la terre qui sont
atteints par la seconde nappe du cône d'ombre de la lune, prolongé au
delà du sommet D (_fig._ 115 et 118). La _fig._ 118 montre que pour
chacun de ces points _p_ le disque du soleil se partage en deux zones;
la plus avancée, _ef_, comprenant le centre du disque est cachée par la
lune; c'est elle qui fait l'effet d'un cercle noir. Le reste du disque
déborde, pour ainsi dire, la lune, et fait l'effet d'un anneau lumineux,
entourant le cercle noir. L'éclipse annulaire est centrale, l'anneau est
régulier pour les lieux de la terre successivement atteints par le
prolongement de l'axe S_l_D du cône d'ombre; il est moins régulier pour
ceux qui sont seulement atteints par les bords de la seconde nappe du
cône.

Dans l'éclipse partielle ordinaire, l'échancrure du disque solaire est
d'autant plus grande que le lieu de la terre est plus rapproché de la
limite de l'ombre pure ou de son prolongement; comme la pénombre dépasse
aussi bien la seconde nappe du cône d'ombre que la première, il peut
arriver que la terre ne soit atteinte que par cette partie excédante de
la pénombre; alors il n'y a pour aucun lieu de la terre ni éclipse
totale, ni éclipse annulaire, mais seulement une éclipse partielle pour
les lieux atteints par la pénombre. Il peut arriver, encore qu'à
l'époque d'une opposition l'ombre pure et la pénombre de la lune
n'atteignent ni l'une ni l'autre aucun lieu de la terre (nº 296).

=294.= EXPLICATION DES PHASES D'UNE ÉCLIPSE DE SOLEIL. Dans le cas d'une
éclipse totale pour un lieu _a_ de la terre, _fig._ 114, ce lieu est
d'abord atteint par le côté oriental HQ de la pénombre lunaire; le
disque du soleil s'échancre à l'occident (vers B'); l'échancrure
augmente à mesure que l'ombre pure approche. Quand le premier côté, DC,
de cette ombre atteint le lieu _a_, le disque solaire est devenu tout à
fait invisible. Il reparaît quand le côté occidental DB, du cône
d'ombre, étant passé à son tour en _a_, ce lieu est atteint par la
seconde partie PED de la pénombre. A mesure que celle-ci passe en _a_,
l'échancrure du disque solaire diminue du côté occidental et finit par
s'anéantir quand la pénombre a fini de passer.

On se rend compte de la même manière des phases d'une éclipse partielle.

On peut encore expliquer les phases (sans figure) comme il suit: Le
disque lunaire, dans le mouvement propre de l'astre, atteint en face de
nous le disque solaire, et passe progressivement devant lui. Si le
mouvement de la lune est dirigé de manière que le centre de son disque
doit passer sur le centre du soleil, ou très-près de ce centre,
l'éclipse est totale ou annulaire, suivant que, à l'époque du phénomène,
le diamètre apparent de la lune est plus grand ou plus petit que celui
du soleil[109]. Considérons le premier cas: le bord oriental du disque
lunaire atteignant, puis dépassant le bord occidental du disque solaire,
celui-ci s'échancre progressivement de plus en plus; quand le centre de
la lune passe sur le centre du disque solaire, ou très-près, le disque
solaire recouvert en entier est devenu invisible. Bientôt la lune
continuant son mouvement vers l'orient, le bord occidental du soleil
reparaît; l'échancrure du disque diminue de plus en plus et s'anéantit
quand la lune quitte le soleil, le laissant à l'ouest.

[Note 109: _V._ nº 239, les limites respectives des demi-diamètres
apparents des deux astres.]

On s'explique de même les phases d'une éclipse annulaire, ou d'une
éclipse partielle ordinaire; cette dernière a lieu quand le centre de la
lune passe trop loin de celui du soleil[110].

[Note 110: Dans cette explication nous parlons comme si le soleil était
immobile en face de nous; il n'en est pas ainsi. La lune atteint et
dépasse le soleil en vertu de l'excès de vitesse de son mouvement
propre, qui est 13 fois-1/3 plus rapide que celui du soleil. Tout se
passe, en apparence, comme si le soleil était immobile en face de nous,
la lune se mouvant de l'ouest à l'est avec une vitesse égale à 12
fois-1/3 la vitesse du mouvement propre apparent du soleil.]

=295=. _Les éclipses du soleil n'ont lieu qu'à l'époque de la
conjonction ou nouvelle lune_.

En effet, pour que l'ombre ou la pénombre de la lune atteignent la
terre, il faut évidemment que la lune se trouve entre le soleil et la
terre, et que l'axe S_l_ de l'ombre et de la pénombre lunaires fasse un
angle nul pu très-petit avec la ligne ST qui va du soleil à la terre.
Or, la _fig._ 98 nous montre que cette double condition n'est remplie
qu'à l'époque de la conjonction.

=296=. _Il n'y a pas d'éclipses de soleil à toutes les conjonctions_,
par la raison déjà donnée à propos des éclipses de lune; _c'est que la
lune ne circule pas sur le plan de l'écliptique, mais sur un plan
incliné à celui-là d'environ 5° 9'_. Il résulte, en effet, de cette
circonstance qu'à l'époque de la conjonction, les intersections de ces
deux plans avec le cercle de latitude du soleil, qui sont précisément
les lignes ST et S_l_, font entre elles en général un angle d'une
certaine grandeur. On conçoit que cette divergence des deux lignes
puisse quelquefois être assez grande pour que l'ombre et la pénombre de
la lune, qui entourent leur axe S_l_, n'atteignent ni l'une ni l'autre
aucun lieu de la terre[111]. (V. la note, page 228.)

[Note 111: On conçoit également qu'il dépend de la grandeur de cet angle
qu'une partie plus ou moins grande de l'ombre ou de la pénombre lunaire
atteigne une partie plus ou moins grande de la terre.]

=297=. _Phénomènes physiques des éclipses totales de soleil_[112].
Plaçons-nous sur le parcours de l'ombre pure, en un des points où
l'éclipse est totale et même centrale. L'éclipse commence; le bord
occidental[113] du soleil paraît entamé par la lune; celle-ci avance de
plus en plus sur le disque qu'elle échancre et où elle se projette en
noir. La clarté du jour diminue peu à peu; les objets environnants
prennent une teinte blafarde; mais tant que le soleil n'est pas
entièrement masqué, il fait encore jour. Enfin le soleil, réduit à un
croissant extrêmement mince, disparaît, et aussitôt les ténèbres
succèdent au jour. Les étoiles et les planètes, auparavant, effacées par
l'éclat du soleil, deviennent visibles. La température a baissé comme la
lumière; une brusque impression de froid se fait sentir, et bientôt une
rosée abondante viendra prouver que tous les corps de la surface de la
terre ont participé à l'abaissement de la température. Les plantes
sensibles à l'action de la lumière se replient, comme pendant la nuit;
les animaux éprouvent de l'effroi; les hommes eux-mêmes ne peuvent se
soustraire à un sentiment pénible qui rappelle et explique la terreur
profonde que ces phénomènes grandioses ont inspirée autrefois. Cependant
la nuit n'est pas complète; il se forme autour du disque noir de la lune
une auréole de lumière (_la couronne_) qui répand une faible clarté sur
les objets environnants. Cette auréole encore inexpliquée, sur laquelle
la lune se dessine comme un grand cercle noir à contours tranchés, a
produit souvent un effet extraordinaire sur les spectateurs de ce
magnifique phénomène; en 1842, à Pavie, vingt mille habitants battirent
des mains à son apparition. Mais l'éclipse totale dure peu; au bout de
5m _au plus_, un jet de lumière jaillit à l'orient du disque noir de la
lune et ramène subitement la clarté du jour. C'est le soleil qui
reparaît pour présenter, en ordre inverse, toutes les phases qui ont
précédé l'obscurité totale. Ce premier rayon dissipe à la fois les
ténèbres et l'espèce d'anxiété à laquelle l'astronome lui-même ne
saurait échapper.

[Note 112: D'après M. Faye.]

[Note 113: C'est toujours par le bord oriental de la lune que commencent
les éclipses de soleil ou de lune, car c'est par l'excès de vitesse de
la lune sur le soleil, ou sur l'ombre terrestre, que la lune atteint,
soit le disque solaire, soit le cône d'ombre pure de la terre; elle les
traverse de l'ouest à l'est, et finalement elle les dépasse. En prenant
deux disques, dont l'un représentera la lune L et l'autre le soleil ou
l'ombre de la terre, S ou O, il suffit de placer L à droite (à l'ouest)
de S et de le faire marcher de droite à gauche pour figurer assez bien
les phases des éclipses. On verra que la première impression sera faite
par le bord oriental de la lune sur le bord occidental du soleil ou de
l'ombre, en sorte que l'échancrure aura lieu à peu près au bord
occidental du soleil dans les éclipses de soleil, ou au bord oriental de
la lune, dans les éclipses de lune.]

=298=. _Occultation des étoiles par la lune._ Ces phénomènes sont
analogues aux éclipses du soleil; seulement une étoile n'a pas de
mouvement propre, son diamètre apparent n'a pas d'étendue appréciable,
et sa distance à la lune est excessivement grande. L'ombre de la lune
relativement à une étoile a sensiblement la forme d'un cylindre
parallèle à la ligne qui joint l'étoile au centre de la lune. Ce
cylindre, qui se déplace avec la lune, venant à atteindre la terre,
passe successivement sur une certaine partie de sa surface et y produit
le phénomène de l'occultation. Connaissant le mouvement de la lune et de
la terre, les astronomes peuvent suivre la marche du cylindre d'ombre
d'une étoile donnée quelconque, et prédire le commencement et la fin de
chaque occultation pour un lieu donné de la terre. Nous avons dit, nº
277, que la durée de l'occultation fournie par le calcul est précisément
celle qui résulte de l'observation du phénomène.

=299=. DÉTERMINATION DES LONGITUDES TERRESTRES PAR LES DISTANCES
LUNAIRES. Le bureau des longitudes de France fait calculer et insérer à
l'avance, dans la _Connaissance des temps_, les distances angulaires qui
doivent exister entre le centre de la lune et les étoiles principales
qui l'avoisinent, de trois heures en trois heures, pour tous les jours
de chaque année. Ces distances sont calculées en supposant l'observateur
placé au centre de la terre, et les heures sont données en temps vrai de
Paris.

L'observateur qui veut connaître la longitude d'un lieu où il se trouve
cherche à déterminer l'heure qu'il est à Paris à un certain moment de la
nuit. Pour cela, il mesure la distance angulaire d'une étoile principale
au bord du disque de la lune; il en déduit la distance au centre même du
disque, à l'aide du diamètre apparent. En corrigeant son observation des
effets de la parallaxe et de la réfraction, l'observateur détermine la
distance angulaire précise de l'étoile au centre de la lune, pour un
observateur placé au centre de la terre. Cette distance angulaire
connue, il cherche dans la _Connaissance des temps_ à quelle heure de
Paris elle correspond dans les tables: si cette distance ne se trouve
pas exactement, elle est comprise entre deux distances angulaires des
tables; alors il détermine l'heure de Paris par une proportion. Il
possède d'ailleurs un chronomètre réglé sur le temps solaire du lieu où
il est. La différence entre l'heure locale et celle de Paris donne la
longitude cherchée.


APPENDICE AU CHAPITRE IV.

NOTE I.

_Sur les noeuds de l'orbite lunaire._

=300.= LIGNE DES NOEUDS. On appelle LIGNE DES NOEUDS de la lune
l'intersection _nn'_ de l'écliptique et du plan de l'orbite lunaire
(_fig._ 99 ci-après); les _noeuds_ sont les points où la lune, dans son
mouvement de révolution, rencontre l'écliptique. Le _nœud ascendant_,
_n_, est celui où passe la lune quittant l'hémisphère austral pour
l'hémisphère boréal; l'autre _n_', est le _nœud descendant_.

On s'aperçoit que la lune a passé par un de ses nœuds quand la latitude,
d'australe qu'elle était, est devenue boréale, et _vice versa_. On
détermine l'heure du passage de la lune à un nœud, et la longitude de ce
point, de la même manière qu'on détermine l'instant précis d'un
équinoxe, et l'ascension droite relative du droit équinoxial (nº 135).
Si on fait cette opération à un certain nombre de passages consécutifs,
on trouve que la longitude de chaque nœud varie continuellement d'un
passage à l'autre. En étudiant cette variation on arrive à ce résultat:

=301=. RÉTROGRADATION DES NŒUDS. _La ligne_ nOn' (_fig._ 99) _des nœuds
de la lune tourne sur l'écliptique d'un mouvement _rétrograde_, avec une
vitesse angulaire constante d'environ 3' 10"-2/3 par jour solaire moyen.
Chacun des nœuds fait ainsi le tour de l'écliptique en 18 ans-2/3
environ_. C'est là un mouvement tout à fait analogue à la rétrogradation
des points équinoxiaux, mais beaucoup plus rapide.

[Illustration: 228, Fig. 99]

=302=. Il résulte de ce mouvement des nœuds que la lune ne décrit pas
précisément, sur la sphère céleste, le cercle que nous avons indiqué;
elle ne décrit pas même une courbe fermée; puisque, après une révolution
sur cette sphère, elle ne revient pas couper l'écliptique au même point.
Néanmoins, si on considère un certain nombre de positions consécutives
quelconques de la lune sur le globe céleste, elles sont
très-sensiblement sur un même grand cercle du globe; incliné de 5° 9'
sur l'écliptique. Si on considère plusieurs séries semblables de
positions consécutives on trouve des grands cercles qui ne sont pas tous
absolument les mêmes, mais qui, se succédant d'une manière continue et
régulière, font tous avec l'écliptique le même angle de 5° 9'. Ce n'est
donc que par approximation que nous avons dit que la lune décrivait un
grand cercle de la sphère céleste. Tenant compte de l'observation
précédente et du mouvement de la ligne des nœuds, on approche plus de la
vérité en définissant comme il suit le mouvement propre de la lune:

Par deux positions observées, _l_', _l_", de la lune (_fig._ 99),
concevons un grand cercle de la sphère céleste, rencontrant l'écliptique
suivant la ligne _n_O__n', et faisant avec ce plan un angle de 5° 9'.
Puis imaginons, à partir du moment où la lune se projette en _l_", ce
cercle _l_'O_l_" animé d'un mouvement uniforme et continu de révolution
autour de l'axe de l'écliptique, tel que l'inclinaison de ce cercle sur
l'écliptique restant la même, son diamètre _n_O_n_' tourne sur ce plan,
dans le sens rétrograde, avec une vitesse constante de 3' 10"-2/3 par
jour solaire moyen. La projection de la lune sur la sphère céleste,
c'est-à-dire le point où on voit son centre sur cette sphère, ne quitte
pas cette circonférence mobile _nl'l"_... _n'_ et la parcourt d'une
manière continue, dans le sens direct, exactement comme le soleil
parcourt l'écliptique (nº 116).

La lune parcourt en réalité dans ce plan mobile l'ellipse dont nous
avons parlé; c'est à cette ellipse mobile que se rapporte tout ce que
nous avons dit de l'_orbite lunaire_.

=303=. Ce mouvement de révolution du plan de l'orbite lunaire correspond
à un mouvement conique de révolution, uniforme et rétrograde, d'une
perpendiculaire au plan de cet orbite, qui, faisant avec une
perpendiculaire à l'écliptique un angle constant de 6° 9', tournerait
autour de cette ligne avec une vitesse angulaire de 3' 10"-2/3 par jour
solaire moyen. Ce mouvement conique, analogue à celui de l'axe de
rotation de la terre (précession des équinoxes), s'explique de même; il
est dû à l'action de la terre sur le renflement du sphéroïde lunaire.
L'analogie est d'ailleurs complète, car ce mouvement est aussi affecté
de l'irrégularité que nous avons désigné sous le nom de _nutation_.

=304=. NUTATION. Il y a aussi pour la lune un mouvement de nutation de
l'axe de son orbite. La perpendiculaire OR au plan de l'orbite lunaire
(c'est-à-dire l'axe de cet orbite), décrit continuellement un cône
ORR'R" à base _circulaire_ (_fig._ 100); ce cône se meut de lui-même
tout d'une pièce, de telle sorte que son axe O_r_ a précisément le
mouvement conique que dans l'approximation précédente, nous avons
attribué à l'axe de l'orbite lunaire. L'axe OR, dans son mouvement sur
le cône ORR'R", tantôt se rapproche, tantôt s'éloigne de l'axe ON de
l'écliptique; de sorte que l'angle qu'il fait avec cet axe varie entre
5º et 5° 17' 1/2; or, cet angle mesure l'inclinaison de l'orbite lunaire
sur l'écliptique.

L'inclinaison de l'orbite lunaire sur l'écliptique varie donc entre 5°
et 5° 17' 1/2; 5° 9' n'est qu'une valeur moyenne.

[Illustration: 229, Fig. 100]

De plus le point R de l'axe, OR, de l'orbite lunaire qui décrit le
cercle RR'R", étant sur la sphère céleste, tantôt en avant, tantôt en
arrière du centre _r_ de cette base, lequel tourne autour de ON avec la
vitesse constante de 3' 10" 1/3 par jour, il en résulte que le
_mouvement de chaque nœud_ qui est le même que celui de R, _n'est pas
uniforme; ce nœud oscille de part et d'autre de la position qu'il
devrait avoir suivant la loi indiquée nº 301, comme étant celle de son
mouvement sur l'écliptique_.

=305=. MOUVEMENT DU PÉRIGÉE LUNAIRE. Le périgée lunaire se déplace en
tournant autour de la terre dans le plan de l'orbite, de manière à faire
une révolution entière dans l'espace de 3232j,57 (un peu moins de 9
ans).

Ainsi l'ellipse que la lune décrit n'est pas fixe dans son plan mobile;
comme l'orbite terrestre elle tourne dans ce plan autour de son foyer;
il n'y a de différence dans les deux mouvements que dans la vitesse,
beaucoup plus grande pour le périgée lunaire que pour l'autre.

Il y a encore d'autres irrégularités du mouvement lunaire moins
considérables que les précédentes; il nous serait très-difficile d'en
rendre compte. La mécanique céleste se fondant sur le principe de la
gravitation universelle les explique et les laisse prévoir, de manière
que les astronomes peuvent prédire à l'avance les mouvements de la lune
avec une très-grande précision.

NOTE II.

[Illustration: 230, Fig. 102]

=306=. EXPLICATION DE LA LIBRATION EN LONGITUDE. Le mouvement de
rotation de la lune est uniforme; le mouvement de translation de son
centre sur son orbite ne l'est pas; il a lieu conformément aux principes
des aires; _les aires parcourues par le rayon vecteur_ T_l sont
proportionnelles aux temps employés à les parcourir_. L'orbite de la
lune étant elliptique (_fig._ 102), il arrive que des aires égales
parcourues ne correspondent pas à des mouvements angulaires égaux du
rayon vecteur T_l_; cela devient évident si l'on divise, par exemple,
chacune des demi-ellipses _l_L_l''_, _l''l'''_L'_l_ en deux aires
équivalentes par un rayon vecteur T_l'_ ou T_l''_; les deux angles
_l'_T_l_, _l'_T_l''_; correspondant à deux aires équivalentes, diffèrent
très-sensiblement l'un de l'autre. Cela posé, suivons la lune à partir
du périgée _l_, durant une révolution synodique, en observant la tache
_m_ qui se voit au centre du disque. Quand la lune est arrivée en _l'_,
comme le rayon vecteur T_l_ a décrit une aire égale au quart de
l'ellipse, nous sommes au _quart_ de la révolution. La tache _m_, qui
doit décrire uniformément 360° dans une révolution, se trouve en _m_ à
90° de _m'_, qui serait alors sa position si la lune ne tournait pas.
Mais le centre du disque est en _n_ sur la ligne T_l'_; celle-ci a
tourné d'un angle _l'_T_l_ plus grand que 90°; le centre a été plus vite
que la tache; celle-ci doit nous paraître avoir rétrogradé de l'arc
_nm_; il est bien entendu que cet écart s'est produit progressivement.
Quand la lune, au milieu de sa révolution, arrive à l'apogée _l"_, la
tache _m_ ayant décrit 180° depuis la première position, doit se trouver
en _m_ (distant de _m"_ de 180°). Le point _m_ est précisément le centre
du disque. La tache, après être restée en arrière du centre, est donc
revenue à ce point; son mouvement de libration est devenu direct. Quand
la lune arrive en _l'''_, le rayon vecteur a décrit 3/4 de l'ellipse; la
tache qui a décrit les 3/4 de 360°, ou 270° depuis _m'''_, dans le sens
_m'''nm_, est arrivé en _m_; tandis que le centre du disque est en _n_
sur le rayon vecteur, T_l'''_, qui n'a pas tourné de 270° depuis le
périgée; il s'en faut de l'arc _nm_; le centre _n_ du disque ayant
tourné moins vite que la tache, celle-ci a pris l'avance et nous a paru
tourner, par continuation, dans le sens direct. Enfin, la lune étant
revenue au périgée _l_, la tache est revenue au centre; elle a
rétrogradé vers ce point. Comme la lune tourne tout d'une pièce dans le
même sens, en expliquant la libration de la tache _m_, nous avons
expliqué généralement la _libration en longitude_.

=307.= EXPLICATION DE LA LIBRATION EN LATITUDE. Cette libration a lieu
parce que l'axe de rotation de la lune n'est pas perpendiculaire au plan
de son orbite, mais fait avec une perpendiculaire à ce plan un angle
_mlp_ d'environ 6° 1/2 (nº 268).

[Illustration: 231, Fig. 103]

Soient _l_T_l'_ (_fig._ 103) le grand axe de l'orbite lunaire, _mm'_ une
perpendiculaire à l'orbite, _pp'_ l'axe de la lune, T le centre de la
terre. La lune occupant la position _l_, l'observateur, placé en T,
verra l'hémisphère _mp'm'_; il ne verra donc pas le pôle _p_, qui est de
l'autre côté du bord visible, à la distance sphérique _mp_; tandis qu'il
verra au delà du pôle _p'_, à une distance _p'm'_. Quand la lune, après
une demi-révolution, sera arrivée en _l'_, l'axe _p'p_ étant resté
parallèle à lui-même, l'observateur verra le pôle _p_, et les points
situés au delà, à la distance sphérique _pm_, autour de ce point; il ne
verra plus que le pôle _p'_, ni aucun des points qu'il voyait
précédemment autour de ce point, à la distance _p'm'_. Il y a donc eu,
dans l'intervalle, un mouvement du pôle _p_ qui s'est rapproché du bord
supérieur, a reparu, puis s'est avancé à quelque distance de ce bord sur
la partie visible du disque, tandis que le pôle _p'_ se rapprochant du
bord inférieur, a fini par disparaître de l'autre côté de ce bord. La
lune tournant tout d'une pièce dans l'un ou l'autre sens, ceci explique
en général la libration en latitude.

[Illustration: 232, Fig. 104]

=308.= _Explication de la libration diurne._ Du centre T de la terre,
_abstraction faite des autres librations_, on voit toujours la même
partie de la surface de la lune, ni plus ni moins, quelque position que
prenne cet astre. Cela posé, suivons (_fig._ 104) la lune d'un point A
de la surface de la terre, depuis son lever en _l_ jusqu'au méridien en
_l'_ puis de là jusqu'à son coucher en _l"_. Quand la lune est au
méridien en _l'_, l'observateur A voit précisément la partie de l'astre
que l'on aperçoit du centre T. Au lever _l_, il aperçoit, près du bord
_occidental_, un fuseau _ac_ invisible du centre T, tandis qu'il ne voit
pas, près du bord _oriental_, un fuseau _bd_, visible de T. Au coucher
_l'_, au contraire, l'observateur voit, près du bord oriental, un fuseau
_d'b'_ invisible du centre T, et ne voit plus près du bord occidental le
fuseau _c'a'_, visible du point T. Or les points de la surface de la
lune, invisibles du centre T dans l'une des positions de la lune, sont
invisibles du même point dans toute autre position; donc, par l'effet du
mouvement diurne, l'observateur A voit d'abord près du bord occidental
un fuseau _ac_, puis au bord oriental un fuseau _b'd'_ qu'il ne verrait
pas sans ce mouvement. Comme d'ailleurs tout arrive progressivement, du
lever de la lune à son coucher, les taches du fuseau _ac_, qui auront
disparu en _l'_, se rapprochent successivement du bord occidental et
disparaissent les unes après les autres, tandis que les taches du fuseau
_bd_ reparaissent les unes après les autres au bord oriental, s'avançant
progressivement à une petite distance sur le disque. Du méridien au
coucher on voit apparaître au bord oriental, et successivement, les
lâches du fuseau _b'd'_ qui s'avancent un peu sur le disque; enfin, on
voit celles du fuseau _a'c'_, près du bord occidental, s'avancer vers le
bord et disparaître successivement. C'est dans l'apparition et la
disparition successive de ces fuseaux que consiste la libration diurne.

Chacun des fuseaux _ac_, _b'd'_, _bd_, _a'c'_, a environ 1° de large. En
effet, l'angle _alc_ par exemple est égal à l'angle A_l_T, qui est
précisément la parallaxe horizontale de la luné, laquelle varie, comme
on sait, de 54' à 1°.

NOTE III.

_Complément du chapitre des éclipses._

=309.=. PRÉDICTION DES ÉCLIPSES DE LUNE. Les anciens, qui étaient loin
de connaître les lois du mouvement du la lune aussi bien qu'on les
connaît aujourd'hui, étaient cependant parvenus à prédire les éclipses
avec une assez grande exactitude; c'est qu'ils avaient remarqué qu'après
une certaine période fixe les éclipses de lune se reproduisent dans le
même ordre et sensiblement dans les mêmes circonstances. Cette période,
connue des Chaldéens sous le nom de _saros_, se compose de 223 lunaisons
formant environ 18 ans 11 jours; elle comprend en général 70 éclipses,
dont 41 éclipses de soleil et 29 de lune. Cela admis, il suffit de tenir
compte par ordre et par date, d'une manière précise et à partir d'un
certain jour, des éclipses de lune qui se produisent dans l'espace de 18
ans 11 jours, pour connaître, à très-peu près:, l'époque et même les
circonstances de chacune des éclipses qui se produiront dans la période
suivante de 18 ans 11 jours; de même pour une troisième période, et
ainsi de suite. C'est ainsi que faisaient les anciens.

Maintenant qu'on sait comment et pourquoi les mêmes ellipses se
reproduisent ainsi périodiquement, on sait aussi que cette ancienne
méthode de prédire les éclipses n'est pas tout à fait exacte, et ne
permet de prédire ces phénomènes qu'avec une certaine approximation.
Nous l'indiquons néanmoins parce qu'elle est encore de quelque utilité,
et qu'elle est d'ailleurs intéressante par le rôle qu'elle a joué bien
longtemps.

=309= _bis_. Voici comment on explique la reproduction périodique des
éclipses. On démontre aisément, et nous l'expliquons même un peu plus
loin (nº 311), que la reproduction d'une éclipse dépend de la position
relative, au moment de l'opposition, du soleil et des nœuds de la lune;
cela admis, on comprendra aisément, après les explications suivantes, la
reproduction périodique des éclipses telle que nous venons de
l'indiquer.

On appelle _révolution synodique des noeuds de la lune_ le temps qui
s'écoule entre deux rencontres consécutives du soleil et de l'un de ces
points. Si les noeuds de la lune étaient fixes sur l'écliptique, la
durée de cette révolution serait précisément l'_année sidérale_ (nº
218). Mais à cause du mouvement rétrograde des nœuds (nº 265), en vertu
duquel ces points vont constamment à la rencontre du soleil, leur
révolution synodique est plus courte et ne dure que 346j,619; 19 de ces
révolutions synodiques font 6585j,76, ou 18 ans 11 jours environ; d'un
autre côté, 223 lunaisons font 6585j,32. Donc 19 révolutions synodiques
de la lune font à peu près 223 lunaisons; c'est lu période chaldéenne.
Supposons un instant que l'on ait exactement 18 ans 11 jours = 19
révolutions synodiques des nœuds de la lune = 223 lunaisons; puis, qu'à
une certaine époque il y ait éclipse de lune. En ce moment la lune est à
l'opposition, et le soleil et les nœuds de la lune occupent certaines
positions relatives; après 18 ans et 11 jours, comme il se sera écoulé
223 lunaisons, la lune se trouvera encore à l'opposition; comme il se
sera écoulé 19 révolutions synodiques des nœuds, ces points et le soleil
seront revenus aux mêmes positions relatives; la même éclipse se
reproduira donc exactement.

Dans notre hypothèse, la méthode des anciens serait donc parfaitement
exacte; si elle ne l'est pas, cela tient aux faibles différences qui
existent entre les nombres 6585j,76, 6585j,32 et 18 ans 11 jours; ces
différences sont à peine sensibles, et la méthode réussit à très-peu
près quand on passe d'une période à la période suivante, ou même à
quelques périodes consécutives; mais elles le deviendraient si, à partir
d'une première observation réelle des éclipses, on voulait faire un
tableau de prédictions pour un grand nombre de périodes suivantes. Il
faut donc, au bout d'un certain temps, recommencer le premier travail
d'observation.

=310.= Aujourd'hui les astronomes connaissent parfaitement les lois du
mouvement de la lune, et peuvent calculer à l'avance pour un temps
quelconque les positions de cet astre relativement au soleil et à la
terre; ils le font pour tous les jours de chaque année, et même pour des
époques plus rapprochées; les résultats de leurs calculs sont insérés
dans la _Connaissance des temps_ de chaque année prochaine. A l'aide de
ces tables on peut prédire les éclipses et leurs principales
circonstances; le lecteur peut voir dans les ouvrages spéciaux comment
on arrive à un pareil résultat.

[Illustration: 234, Fig. 112]

=311.= Nous essayerons seulement ici de faire comprendre comment on peut
savoir s'il y aura ou s'il n'y aura pas éclipse de lune à une opposition
donnée. Considérons la terre, son cône d'ombre, et la lune au moment
d'une opposition; imaginons alors une sphère ayant son centre au centre
T de la terre, _fig._ 112, et pour rayon la distance T_l_ qui sépare en
ce moment les centres des deux globes. Cette sphère coupe la lune
suivant un de ses grands cercles, cercle _l_, et le cône d'ombre suivant
un cercle, cercle O_c_, qu'on appelle le _cercle d'ombre de la lune_; ce
cercle O_c_ a son centre O sur l'axe de ce cône, c'est-à-dire sur les
prolongement de la ligne ST qui va du soleil à la terre. La même sphère
coupe le plan de l'écliptique suivant un cercle, cercle ON'S, et le plan
de l'orbite lunaire suivant un autre grand cercle, cercle N'_l_N, qui se
confond sensiblement avec cette orbite elle-même (dans la partie _l_N);
enfin, le grand cercle de cette sphère qui passe par ST et le centre _l_
de la lune, cercle O_ls_, n'est autre que le cercle de latitude de la
lune, puisque, à l'opposition, ce dernier cercle doit passer par le
soleil; ce grand cercle O_ls_ (qui est vu de face), tout en passant par
les centres _l_ et O, de circ. _l_ et cir. O_c_, rencontre ces
circonférences elles-mêmes sur la sphère. De cette exposition il résulte
qu'à l'époque considérée, _l_O est la latitude de la lune, _li_ son
demi-diamètre apparent, O_c_ le demi-diamètre apparent du cercle
d'ombre, TN' la direction de la ligne des nœuds. Rappelons-nous aussi
(page 211) que le diamètre réel du cercle d'ombre est, à la distance
moyenne, 60_r_, de la lune à la terre, à peu près égal aux 8/11 du
diamètre de la terre, tandis que le diamètre réel de la lune n'est que
3/11 du même diamètre; ces deux cercles, cercle O_c_ et cercle _li_,
étant toujours vus à la même distance, leurs diamètres apparents doivent
être dans le même rapport moyen de 8 à 3.

Les deux circonférences, cir. _l_ et circ. O_c_, étant tracées sur la
même sphère, tout se passe exactement, quant à leurs situations
relatives, comme si elles étaient tracées sur le même plan, les arcs ou
distances sphériques O_l_, _li_, O_c_, remplaçant exactement _la
distance des centres et les rayons des circonférences_. Nos deux
circonférences seront sur la sphère: intérieures, sécantes, tangentes,
extérieures, dans des conditions remplies par les arcs _l_O, _li_, O_c_,
parfaitement identiques avec les conditions relatives aux mêmes
situations indiquées dans notre _Géométrie_ (2e livre). Dès que cercle
_l_ et cercle O_c_ auront une partie commune, la lune entrera dans le
cône, et il y aura éclipse; quand il y aura seulement contact extérieur,
ou que les deux cercles seront extérieurs l'un à l'autre, il n'y aura
pas d'éclipse. D'après cela, ayant égard à la signification astronomique
ci-dessus indiquée de _l_O, _li_, O_c_, et au IIe livre de _Géométrie_,
nous pouvons établir les propositions suivantes:

1º Il y aura éclipse de lune à une opposition donnée, si pour cette
époque on a _l_O < O_c_ + _li_, c'est-à-dire si la latitude de la lune
est moindre que la somme des demi-diamètres apparents de la lune et de
son cercle d'ombre terrestre.

2º Il n'y aura pas d'éclipse de lune à une opposition donnée si, pour
cette époque, on a _l_O = O_c_ + _li_ ou _l_O > O_c_ + _li_,
c'est-à-dire si la latitude de la lune est égale ou supérieure à la
somme des demi-diamètres apparents de la lune et de son cercle d'ombre
terrestre.

On peut, dans l'expression des conditions précédentes, introduire, au
lieu de la latitude _l_O, l'arc ON, ou son égal N'S qui mesure la
distance angulaire STN' du soleil au second nœud N' de la lune. En
effet, le triangle sphérique ON_l_, rectangle en O, fournit une relation
très-simple entre _l_O, ON, et l'angle aigu ON_l_ (qui n'est autre que
l'inclinaison connue de l'orbite lunaire sur l'écliptique; en moyenne 5°
9'; tang _l_O = sin ON tg. ON_l_ = sin N'S tg. ON_l_). Supposons que
l'on ait remplacé _l_O par ON et l'inclinaison ON_l_ dans chacune des
relations citées tout à l'heure. On connaît la limite inférieure et la
limite supérieure du demi-diamètre apparent de la lune; on peut
déterminer les mêmes limites du demi-diamètre apparent de son cercle
d'ombre terrestre (_V._ le nº suivant); cela fait, on peut remplacer
convenablement ces demi-diamètres par leurs limites dans les égalités ou
les inégalités dont nous nous occupons; on arrive ainsi à établir les
propositions suivantes:

1º Si à l'époque d'une pleine lune, la distance angulaire du centre du
soleil à l'un des nœuds de la lune est plus petite que 9° 31', il y a
certainement éclipse. 2º Si à une pareille époque la distance du soleil
au nœud le _plus voisin_ surpasse 12° 3', il ne peut y avoir éclipse. 3º
Enfin, si la distance du soleil au nœud le plus voisin est comprise
entre 9° 31' et 12° 3', l'éclipse est douteuse; l'examen détaillé des
circonstances de cette éclipse montrera seulement si elle aura lieu
réellement.

[Illustration: 236, Fig. 113]

_Détermination du demi-diamètre du cercle d'ombre_. Nous avons supposé
connu, dans ce qui précède, le demi-diamètre apparent du cercle d'ombre
terrestre de la lune; voici comment on peut le calculer: La _fig._ 113
représente une section de la sphère (circ. T_l_, ou circ. T_c_, dont
nous venons de faire usage) et une section du cône d'ombre de la lune,
par un même plan central conduit par ST; on voit sur cette figure l'arc
_cc'_ qui mesure précisément le diamètre apparent du cercle d'ombre;
_c_T est la distance de la lune à la terre 1/2_c_T_c'_ ou _c_TD est égal
à l'angle B_c_T, qui est la parallaxe de la lune (nº 197), diminué de
l'angle _c_DT (_c_TD = B_c_T-_c_DT); mais l'angle _c_DT est lui-même
égal à l'angle B'TS, demi-diamètre apparent du soleil, diminué de
l'angle BB'T, parallaxe du même astre.

2/1_c_T_c'_ = B_c_T - _c_DT = B_c_T - (B'TS - BB'T)

1/2_c_T_c'_ = B_c_T + BBT - B'TS.[114]

[Note 114: 1/2_c_T_c'_ est l'arc O_c_ des égalités ou des inégalités
précédentes (1º et 2º). On peut remplacer O_c_ par B_c_T + BB'T = B'TS
dans l'égalité et dans les deux inégalités.]

_Le demi-diamètre apparent du cercle d'ombre terrestre de la lune
s'obtient en ajoutant la parallaxe du soleil à celle de la lune, et
retranchant de la somme le demi-diamètre apparent du soleil_. Or ces
trois derniers angles sont donnés dans la _Connaissance des temps_. Le
diamètre apparent du cercle d'ombre varie entre 1° 15' 32" et 1° 31'
36". En raison de l'ombre et de la pénombre de l'atmosphère, l'ombre
terrestre sur la lune paraît avoir un diamètre un peu plus grand que
celui qu'on obtient ainsi; les astronomes augmentent pour cette raison
d'un soixantième la valeur calculée.

=312.= DE LA FRÉQUENCE RELATIVE DES ÉCLIPSES DE LUNE ET DE SOLEIL. La
période chaldéenne de 18 ans 11 jours, au bout de laquelle la lune
reprend la même position relativement au soleil et à ses nœuds, joue le
même rôle pour les éclipses du soleil que pour les éclipses de lune
quand on considère les premières d'une manière générale, _et
indépendamment des lieux de la terre pour lesquels elles se produisent_.
Les éclipses de soleil qui ont eu lieu dans une pareille période se
produisent en même nombre et à des époques correspondantes dans la
période suivante. Il y a cependant quelques changements à cause des
différences entre les valeurs de 223 lunaisons et de 19 révolutions
synodiques des nœuds (V. nº 309 _bis_). L'observation a appris que, dans
18 ans 11 jours, il y a, en moyenne, 70 éclipses, dont 41 de soleil et
29 de lune. Il n'y a jamais plus de 7 éclipses, et moins de 2 dans la
même année; quand il n'y en a que deux, ce sont deux éclipses de soleil.

=313.= Pour comprendre pourquoi il y a plus d'éclipses de soleil que de
lune, il suffit de jeter les yeux sûr cône tangent extérieur DB'C' qui
enveloppe à la fois la terre et le soleil (_fig._ 119). Pour qu'il y ait
éclipse de lune, il faut que la lune entre dans la partie DBC de ce
cône, vers le point _a_, par exemple; pour qu'il y ait éclipse de
soleil, en quelque lieu de la terre, il faut et il suffit que la lune
entre vers _b_ dans la partie BCC'B' de ce cône, située entre la terre
et le soleil. Or les dimensions transversales du cône étant plus grande
vers _b_ que vers _a_, il doit arriver plus souvent que la lune pénètre
dans le cône vers le point _b_ que vers le point _a_; c'est-à-dire qu'il
doit y avoir plus d'éclipses de soleil que de lune.

[Illustration: 237, Fig. 119]

=314.= Observons tout de suite qu'il n'est vrai de dire que le nombre
des éclipses de soleil, observées durant une certaine période, surpasse
le nombre des éclipses de lune, observées dans le même temps, que s'il
s'agit de la terre en entier et non d'un lieu déterminé. Quand la
totalité ou une portion quelconque de la lune est éclipsée, en cessant
d'être éclairée par le soleil, elle devient invisible pour tous les
points de l'espace à la fois. Une éclipse de lune est donc visible, et
avec les mêmes apparences, de tous les lieux de la terre qui ont cet
astre à leur horizon, et même de quelques autres, par l'effet de la
réfraction (nº 291); ces lieux composent plus de la moitié de la terre;
une éclipse de soleil, au contraire, n'est visible que dans une partie
d'hémisphère et quelquefois dans une partie assez restreinte. Cette
circonstance fait que le nombre des éclipses de lune _visibles en un
lieu donné_ est plus grand que le nombre des éclipses de soleil qu'on y
peut observer, malgré la plus grande fréquence de celles-ci quand on ne
spécifie aucun lieu de la terre[115].

[Note 115: Ajoutons qu'à la distance de la lune l'ombre de la terre a un
diamètre apparent à peu près triple de celui du soleil (page 211, en
note); un observateur doit donc voir la lune passer plus souvent devant
ce cercle d'ombre que devant le disque du soleil.]

=315.= Les éclipses totales de soleil sont excessivement rares en un
lieu donné de la terre; on le comprend aisément quand on voit sur la
_fig._ 114 la petitesse de l'ombre pure portée par la lune sur la terre.
La partie de la terre atteinte par cette ombre n'est évidemment qu'une
très-petite partie de l'espace atteint par la pénombre, d'où le
phénomène d'éclipse peut être observé. A Paris il n'y a eu qu'une
éclipse totale dans le dix-huitième siècle, en 1724. Il n'y en a pas eu
encore dans le dix-neuvième siècle, et il n'y en aura pas d'ici à sa
fin. A Londres, on a été 575 ans sans en observer aucune, depuis 1140
jusqu'en 1715; depuis l'éclipse de 1715, on n'en a pas observé d'autre
dans cette ville.

=316.= PRÉDICTION DES ÉCLIPSES DE SOLEIL. La période chaldéenne, qui
servait aux anciens à prédire les éclipses de lune, ne peut pas servir à
prédire les éclipses de soleil. En effet, la prédiction d'une éclipse
est relative à un lieu déterminé, ou à une région restreinte de la
terre. Or, comme nous l'avons déjà dit, la période chaldéenne, si l'on
parvenait à observer toutes les éclipses qui se produisent pendant sa
durée, ce que les anciens ne pouvaient pas faire, nous apprendrait tout
au plus qu'à telle époque d'une période suivante il doit y avoir une
éclipse de soleil, mais sans nous faire connaître ni les lieux de la
terre desquels elle serait visible, ni les circonstances de l'éclipse
relativement à ces lieux. Or c'est là justement ce qui intéresse dans la
prédiction des éclipses.

Il n'y a donc que les travaux des astronomes, dont nous avons parlé nº
310, qui puissent servir à prédire exactement les éclipses de soleil et
de lune. Les astronomes déterminent, pour des époques successives et
rapprochées, les positions relatives précises du soleil, de la terre et
de la lune; ils connaissent donc aussi précisément la position de chacun
des cônes d'ombre de la lune et de la terre, et de leur pénombre. Ils
peuvent d'après cela, en combinant tous ces éléments, savoir l'instant
précis où les conditions nécessaires pour une éclipse seront remplies
pour tel ou tel lieu de la terre. Ils peuvent prédire les éclipses, et
même les circonstances pour un lieu donné; car les phases dépendent des
mêmes éléments. Nous ne pouvons entrer ici dans aucun détail sur les
calculs auxquels nous venons de faire allusion. Il nous suffit que le
lecteur, édifié sur la cause des éclipses, comprenne la possibilité de
les prédire exactement.



                               CHAPITRE V.

            DES PLANÈTES ET LEURS SATELLITES, ET DES COMÈTES.


=317.= Le soleil et la lune ne sont pas les seuls corps célestes qui
nous paraissent se déplacer au milieu des constellations; il y a encore
d'autres astres qui ont un mouvement presque analogue: ce sont les
planètes avec leurs satellites, et les comètes. Nous nous occuperons
d'abord des _planètes_.

Les _planètes_ nous offrent à très-peu près le même aspect que les
étoiles fixes; ce qui les en distingue principalement, c'est leur
_mobilité_.

Pour reconnaître si un astre que l'on observe, et qui ressemble à une
étoile, est une planète, il suffit de se rendre compte d'une manière
précise de la position que cet astre occupe par rapport aux étoiles
voisines; puis quelques jours après on voit si cette position est restée
la même, ou bien si elle a varié d'une manière sensible; dans ce dernier
cas, l'astre est une planète.

Les étoiles sont en général marquées sur les cartes célestes; les
planètes, vu leur mobilité, n'y sont pas indiquées. Si donc on aperçoit
dans le ciel un astre qui ressemble à une étoile et qui n'est pas marqué
sur les cartes, il est très-probable que cet astre est une planète;
c'est alors le cas d'employer le précédent moyen de vérification.

Nous dirons de plus qu'observées au télescope les principales planètes
nous offrent des diamètres apparents sensibles, qui augmentent avec la
puissance de l'instrument, tandis que les étoiles, observées de même,
nous font toujours l'effet de simples points lumineux. Cette différence
tient évidement à ce que les planètes sont infiniment plus rapprochées
de nous que les étoiles.

PLANÈTES PRINCIPALES; LEURS DISTANCES MOYENNES AU SOLEIL.

=318=. On distingue huit planètes principales, y compris la terre; qui
est une véritable planète (V. nº 322). Voici les noms de ces planètes et
leurs distances moyennes au soleil. Nous indiquons les planètes dans
l'ordre croissant de ces distances, que nous exprimons en rayons moyens
de l'orbite terrestre (c'est-à-dire la distance moyenne de la terre au
soleil étant prise pour unité).

Outres ces huit planètes, on en connaît un certain nombre d'autres plus
petites dont nous parlerons plus tard.

PLANÈTES  SIGNES   DISTANCES       PLANÈTES  SIGNES  DISTANCES
                   moyennes                          moyennes
                   au soleil                         au soleil

Mercure    ☿     0,387          Jupiter       ♃        5,203
Vénus      ♀      0,723         Saturne        ♄        9,539
La Terre   ♁     1,000          Uranus        ♅        19,182
Mars       ♂      1,524         Neptune        ♆        30,04

La terre à part, les anciens connaissaient cinq planètes, savoir:
_Mercure, Vénus, Mars, Jupiter, Saturne_; ces planètes, visibles à l'œil
nu, ont été connues de toute antiquité. _Uranus_ a été découverte en
1781 par Williams Herschell; _Neptune_, annoncée par M. Leverrier le 1er
juin 1846, fut aperçue le 23 septembre suivant par M. Galle, astronome
prussien.

Les petites planètes ont toutes été découvertes depuis l'an 1800; le
plus grand nombre d'entre elles l'ont été depuis quelques années.

=319=. MOUVEMENTS DES PLANÈTES VUS DE LA TERRE. On peut évidemment
étudier le mouvement propre de chaque planète, de la même manière qu'on
a étudié le mouvement apparent du soleil et celui de la lune. Il suffit
d'observer chaque jour l'ascension-droite et la déclinaison de cette
planète, d'en déduire sa longitude et sa latitude, et de se servir de
ces angles pour figurer sur un globe céleste les positions apparentes
successives de l'astre sur la sphère céleste. Ce travail constate
d'abord l'existence du mouvement propre de la planète; il nous fait
connaître de plus les particularités suivantes:

La courbe qui décrit la position apparente d'une planète sur un globe
céleste dont le centre représente la terre, ne ressemble pas à celles
que l'on obtient pour le soleil et pour la lune; cette courbe est
sinueuse et revient sur elle-même, allant tantôt de l'ouest à l'est
(sens direct), revenant de l'est à l'ouest (sens rétrograde), puis
retournant vers l'est. Si on observe une planète durant une longue suite
de jours, et que sa marche sur la sphère céleste soit d'abord directe,
c'est-à-dire que sa longitude augmente, on voit, au bout d'un certain
temps, ce mouvement en longitude se ralentir, puis s'arrêter pendant
quelques jours; on dit alors qu'il y a _station_. Après cela il y a
_rétrogradation_; le mouvement, de direct qu'il était, devient
_rétrograde_; la longitude de la planète diminue; elle précède chaque
jour au méridien les étoiles qu'elle y accompagnait la veille; cela dure
un certain temps; puis le mouvement rétrograde se ralentit à son tour,
et s'arrête. Après cette nouvelle station le mouvement redevient direct,
la planète se dirige de nouveau vers l'est, et ainsi de suite; ces
alternatives de mouvement direct, station, rétrogradation, se
reproduisent indéfiniment dans le même ordre. Néanmoins les
accroissements de la longitude, c'est-à-dire la somme des mouvements
directs de l'ouest à l'est, l'emportant sur la somme des chemins de sens
contraire, la planète finit par faire le tour de la sphère céleste. On
comprend, d'après cela, la forme irrégulière de la courbe dessinée sur
le globe céleste dont nous avons parlé d'abord. Cette courbe tantôt
s'élève vers le nord de l'écliptique, tantôt descend au sud,
c'est-à-dire que la latitude de la planète varie comme la longitude;
mais la latitude ne varie que dans des limites généralement peu
étendues.

Les planètes principales s'écartent très-peu de l'écliptique; pour
aucune d'elles la latitude boréale ou australe, dans ses variations, ne
dépasse 8°, c'est-à-dire que ces planètes ne quittent pas la zone
céleste que nous connaissons sous le nom de _zodiaque_ (n° 123). Deux de
ces planètes, Mercure et Vénus (V. plus loin les planètes inférieures),
en se mouvant ainsi le long de l'écliptique, semblent accompagner le
soleil dans son mouvement de translation. Chacune d'elles allant et
venant, tantôt à l'ouest, tantôt à l'est du soleil, ne s'en écarte
jamais au delà de certaines limites. Les trois autres planètes, tout en
s'écartant peu de l'écliptique au nord et au sud, et allant tantôt vers
l'ouest, tantôt vers l'est, ne se maintiennent pas ainsi dans le
voisinage du soleil; la différence entre la longitude de chacune d'elles
et la longitude du soleil passe par tous les états de grandeur de 0° à
360°.

Ces irrégularités, ces apparences singulières des mouvements des
planètes ont longtemps embarrassé les astronomes; on en a donné diverses
explications. Ce n'est qu'en rapportant ces mouvements au soleil, au
lieu de les rapporter à la terre, qu'on est parvenu à les expliquer
d'une manière tout à fait satisfaisante.

=320=. MOUVEMENTS DES PLANÈTES VUS DU SOLEIL. On sait maintenant que
cette complication du mouvement des planètes n'est qu'apparente, qu'elle
est due uniquement à ce que la terre est éloignée du centre de ces
mouvements. Chaque planète, en effet, décrit autour du soleil une courbe
plane à peu près circulaire (une ellipse très-peu allongée dont cet
astre occupe un foyer). Si l'observateur était placé au centre du
soleil, il verrait chaque planète tourner autour de lui, toujours dans
le même sens, d'occident en orient, à peu près comme il voit la lune se
mouvoir autour de la terre. La distance de la terre au soleil, centre
des mouvements planétaires, explique d'une manière tout à fait
suffisante, comme nous le verrons bientôt, les apparences que ces
mouvements présentent à l'observateur terrestre. Il nous faut d'abord
faire connaître d'une manière précise les lois générales des mouvements
planétaires.

LOIS DE KÉPLER.

=321=. Toutes les planètes sont soumises dans leurs mouvements à trois
lois générales, qui portent le nom de Képler qui les a découvertes. En
voici l'énoncé:

PREMIÈRE LOI. _Chaque planète se meut autour du soleil dans une orbite
plane, et le rayon vecteur (ligne idéale qui va du centre du soleil au
centre de la planète) décrit des aires égales en temps égaux._

DEUXIÈME LOI. _La courbe décrite par chaque planète autour du soleil est
une ellipse dont le soleil occupe un foyer._

TROISIÈME LOI. _Les carrés des temps des révolutions de deux planètes
quelconques autour du soleil sont entre eux comme les cubes de leurs
moyennes distances au soleil._

Ces lois ont été découvertes par l'observation. C'est en étudiant
spécialement le mouvement de Mars qui décrit une ellipse plus allongée
que les autres, c'est en comparant un nombre considérable d'observations
faites sur cet astre par Tycho-Brahé et par lui-même, que Képler est
arrivé à trouver les deux premières lois, lesquelles ont été ensuite
vérifiées pour les autres planètes et pour la terre elle-même. Toutes
les circonstances du mouvement de ces corps par rapport au soleil se
trouvent être des conséquences de ces lois. La comparaison des distances
moyennes des planètes au soleil avec les durées de leurs révolutions
sidérales a fait découvrir la troisième loi. Ces travaux de Képler ont
duré dix-sept ans [116].

[Note 116: Nous ne pouvons exposer ici d'une manière précise les
méthodes d'observation employées par les astronomes pour étudier le
mouvement d'une planète quelconque, de Mars par exemple, par rapport au
soleil. L'observateur est sur la terre; on conçoit qu'il peut déterminer
d'une manière précise, comme il a été dit pour le soleil et la lune, une
série de positions successives de la planète par rapport au centre de la
terre; il connaît aux mêmes époques la position précise du soleil par
rapport à ce même centre. Avec ces éléments il détermine la série des
positions correspondantes de la planète par rapport au soleil. C'est le
rapprochement de ces dernières positions qui peut conduire l'astronome à
la connaissance de la loi suivant laquelle elles se succèdent,
c'est-à-dire à la loi du mouvement de la planète par rapport au soleil.]

=322=. LA TERRE EST UNE PLANÈTE. Nous avons déjà eu l'occasion d'énoncer
les deux premières lois de Képler à propos du mouvement apparent du
soleil par rapport à la terre. Nous avons dit plus tard que ce mouvement
de translation du soleil n'est qu'une apparence due à un mouvement réel
tout à fait identique de la terre autour du soleil. Ainsi donc _le
mouvement de translation de la terre autour du soleil a lieu suivant les
deux premières lois de Képler_. La troisième loi établit une liaison
entre les mouvements des diverses planètes comparés les uns aux autres;
or, si on compare le mouvement de la terre autour du soleil à celui
d'une planète _quelconque_, on trouve que cette troisième loi est
vérifiée par ces deux mouvements. Cette triple coïncidence ne permet pas
de douter que _la terre ne soit une planète, tournant comme les autres
autour du soleil_.

PRINCIPE DE LA GRAVITATION UNIVERSELLE.

=323=. L'examen attentif des lois de Képler a conduit Newton à la
connaissance des causes qui agissent sur les planètes et les font se
mouvoir suivant ces lois générales. C'est à Newton qu'on doit la
découverte de ce principe fondamental qui régit tout le monde solaire:

PRINCIPE DE LA GRAVITATION UNIVERSELLE. _Deux points matériels placés
comme on voudra dans l'espace gravitent l'un vers l'autre, c'est-à-dire
tendent à se rapprocher comme s'ils s'attiraient mutuellement. Les
forces qui se développent ainsi entre les deux corps sont égales entre
elles, et agissent en sens contraires, suivant la ligne droite qui joint
les deux corps, avec une intensité proportionnelle à leurs masses, et
inversement proportionnelle au carré de la distance qui les sépare._

Le soleil et les planètes, et en général tous les corps célestes, ne
sont pas de simples points, mais des grands corps à peu près sphériques.
En admettant que leurs molécules s'attirent mutuellement les unes les
autres, Newton est encore parvenu à démontrer cette proposition:

_Si les corps qui attirent ont la forme sphérique, l'attraction est
exactement la même que si la masse de chacun était ramassée à son
centre, chaque sphère attirant ainsi comme un seul point matériel qui
aurait une masse égale à la sienne._

L'attraction que le soleil, d'après ce principe, exerce sur chaque
planète, combinée avec une vitesse initiale de projection imprimée à
cette planète, doit la faire tourner autour du soleil; les lois de ce
mouvement, déduites de l'analyse mathématique de ces causes, sont
précisément celles que Képler a découvertes par l'observation.

=324=. Un grand nombre de mouvements qu'on observe dans l'univers sont
conformes au principe de la gravitation universelle. Ainsi suivant ce
principe, la lune, soumise à l'attraction prépondérante de la terre,
doit tourner autour de celle-ci comme les planètes autour du soleil;
c'est en effet ce qui a lieu; son mouvement est conforme aux lois de
Képler.

Différents globes analogues à la lune tournent suivant les mêmes lois
autour de quelques-unes des planètes principales; ce sont les
_satellites_ de ces planètes, dont nous parlerons plus tard.

Enfin dans diverses régions de l'espace indéfini, à des distances
immenses, on remarque des étoiles tournant autour d'autres étoiles
(étoiles doubles); ceux de ces mouvements qu'on a pu suffisamment
étudier, ont lieu suivant les lois de Képler, c'est-à-dire conformément
au principe de la gravitation.

=325=. Plus près de nous, nous voyons les corps abandonnés à eux-mêmes
dans le voisinage de la terre, tomber à sa surface en se dirigeant vers
le centre, paraissant attirés par notre globe exactement comme il a été
dit à propos de l'attraction des corps sphériques. La chute des corps
sur la terre est donc un effet de la gravitation universelle. Le nom de
pesanteur donné à la force qui fait ainsi tomber les corps n'est qu'un
synonyme du mot de gravitation.

=326=. Le lecteur a maintenant une idée générale assez précise de la
nature des mouvements planétaires; nous ne pouvons guère aller plus loin
sur ce sujet. Nous entrerons cependant dans quelques détails au sujet
des planètes principales, que nous considérerons bientôt en particulier,
l'une après l'autre.

=327=. Les plans dans lesquels ces planètes circulent autour du soleil
sont très-peu inclinés sur l'écliptique. Voici d'ailleurs ces
inclinaisons (d'après M. Faye).

Inclinaison de l'orbite de Mercure, 7° 10' 13"; de Vénus, 3° 23' 31"; de
Mars, 1° 51' 6"; de Jupiter, 1° 18' 42"; de Saturne, 2° 29' 30";
d'Uranus, 0° 46' 29"; de Neptune, 1° 47'.

D'après cela, pour plus de simplicité dans l'étude des principales
circonstances du mouvement de chaque planète, nous ferons abstraction de
la faible inclinaison de son orbite sur l'écliptique, et nous
supposerons que la planète tourne autour du soleil, sur ce dernier plan,
en même temps que la terre[117]. De plus, comme les orbites des
principales planètes sont à peu près circulaires, nous les considérerons
comme des cercles ayant le soleil pour centre. On se fait aisément ainsi
une idée à peu près exacte du mouvement des planètes par rapport à la
terre et au soleil.

[Note 117: Cela revient à remplacer chaque orbite par sa projection sur
le plan de l'écliptique, et à considérer le mouvement de la planète
projetée sur cette orbite. La projection de la planète ayant même
longitude que la planète elle-même, on arrive ainsi à des résultats
exacts quand ces résultats ne dépendent pas de la latitude.]

D'ailleurs, en rétablissant ensuite l'inclinaison de chaque orbite, et
tenant compte de sa forme réelle, ceux qui le voudront arriveront, de
l'approximation qu'ils auront obtenue avec nous, à connaître exactement
les faits étudiés, plus aisément que s'ils avaient voulu arriver tout de
suite à ce dernier résultat.

=328=. Cela posé, terminons les généralités par la définition de
quelques termes astronomiques.

On distingue les planètes en planètes _inférieures_, et en planètes
_supérieures_ (on dit quelquefois aussi planètes _intérieures_ et
planètes _extérieures_). Les premières sont celles qui sont plus
rapprochées que nous du soleil; il n'y en a que deux: MERCURE et VENUS.
Toutes les autres planètes connues sont supérieures, c'est-à-dire plus
éloignées que nous du soleil.

=329=. Les orbites de Mercure et de Vénus ont donc chacune par rapport à
celle de la terre la position qu'indique la figure 122 (circ SP).
L'orbite d'une planète _supérieure_ entoure l'orbite de la terre comme
l'indique la figure 123.

Comme on le voit, une planète inférieure circule, pour ainsi dire, à
l'intérieur de l'orbite terrestre (d'où le nom de planète _intérieure_
qu'on lui donne quelquefois). Une planète supérieure circule à
l'extérieur de l'orbite terrestre (d'où le nom de planètes _extérieures_
au lieu de planètes _supérieures_).

[Illustration: 248, Fig. 122]

[Illustration: 248, Fig. 123]

=330.= Une planète est dite en _conjonction_ quand sa longitude céleste
et celle du soleil (par rapport à la terre) sont les mêmes. La planète
est alors sur le même cercle de latitude que le soleil. (Voyez les
positions T, P, S, et T, S, P', _fig._ 122, et les positions T, S, P',
fig. 123.)

=331.= Une planète est dite en _opposition_ quand sa position céleste et
celle du soleil diffèrent de 180°. La planète est alors sur le
prolongement du cercle de latitude du soleil. (_V._ les positions P, T,
S, _fig._ 123.)[118].

[Note 118: Il s'agit dans ces définitions de la longitude comptée par
rapport à la terre, à la manière ordinaire, nº 211.

Ainsi que nous l'avons déjà dit, quand les astronomes veulent se faire
une idée nette de l'ensemble des positions successives d'une planète,
comparées les unes aux autres, et non plus comparées à celle de la
terre, ils rapportent directement au soleil ces positions successives,
en faisant usage d'un système de coordonnées célestes différentes de
celles que nous avons considérées jusqu'ici. Regardant le soleil comme
le centre de l'écliptique céleste, ils supposent l'observateur examinant
de ce point de vue le mouvement des planètes sur leurs orbites; ils font
de ce point le centre de nouvelles coordonnées angulaires, qu'ils
appellent, à cause de cela, longitudes et latitudes _héliocentriques_.
Choisissant pour origine des nouvelles longitudes un point de
l'écliptique, ils joignent ce point au centre du soleil.

Cela posé, on appelle _longitude héliocentrique_ d'une planète, ou d'une
étoile, l'arc d'écliptique compris entre l'origine adoptée et la
projection sur l'écliptique du rayon vecteur qui va du centre du soleil
à la planète, cet arc étant compté à partir de l'origine dans le sens du
mouvement direct, de l'ouest à l'est.

Il résulte de là que le mouvement d'une planète en longitude
héliocentrique est justement son mouvement angulaire autour du soleil,
quand on la fait circuler sur son orbite projetée.

On appelle _latitude héliocentrique_ d'un astre l'angle que fait le
rayon vecteur, qui va du soleil à cet astre, avec la projection de ce
même rayon sur l'écliptique. La latitude héliocentrique d'une planète
est toujours très-petite; car elle varie depuis 0° jusqu'à l'inclinaison
de l'orbite (nº 327) C'est justement de cette petite latitude que nous
faisons abstraction quand nous faisons circuler la planète sur son
orbite projetée.

Une planète est dite en _conjonction_ par rapport à une étoile quand les
deux astres ont la même longitude héliocentrique; en _opposition_, quand
leurs longitudes diffèrent de 180°; en _quadrature_, quand elles
diffèrent de 90° ou de 270°.

On nomme _révolution sidérale_ d'un astre le temps qui s'écoule entre
deux de ses conjonctions consécutives avec une même étoile.

Pour distinguer la longitude et la latitude, considérées par rapport à
la terre (celles que nous avons considérées jusqu'ici), on les appelle
longitude et latitude _géocentriques_.]

=332.= A l'époque de la _conjonction_, le soleil et la planète sont du
même côté de la terre (_V._ les positions indiquées tout à l'heure). A
l'_opposition_, la planète et le soleil sont de différents côtés de la
terre (_V._ la _fig._ 123). A l'opposition une planète est donc plus
éloignée du soleil que la terre.

=333.= Il résulte de là qu'une planète inférieure ne peut jamais se
trouver en opposition. Mais elle a deux _conjonctions_: une conjonction
_inférieure_, quand la planète se trouve entre le soleil et la terre
(positions T, P, S, _fig._ 122); une conjonction _supérieure_ quand la
planète est de l'autre côté du soleil par rapport à la terre (positions
T, S, P', même figure).

=334.= La distance angulaire entre une planète et le soleil, vus de la
terre, s'appelle _élongation_.

=335.= On appelle _nœuds_ d'une planète les points où son orbite coupe
le plan de l'écliptique.

Les _nœuds_ d'une planète sont des points tout à fait analogues aux
nœuds de la lune; on distingue le nœud _ascendant_, par où passé la
planète quittant l'hémisphère austral pour l'hémisphère boréal, et le
nœud _descendant_. Les nœuds d'une planète ont, comme ceux de la lune,
un mouvement lent de révolution sur l'écliptique; on reconnaît qu'une
planète est à l'un de ces nœuds quand la latitude céleste de cet astre
est nulle. Le moment de ce passage se détermine donc de la même manière
que les équinoxes (nº 135).

=336.= On appelle _révolution périodique_ d'une planète le temps qui
s'écoule entre deux retours consécutifs de la planète au même _nœud_.
Pendant cette révolution, la planète fait le tour de son orbite.

=337.= On nomme _révolution sidérale_ d'une planète le temps qui
s'écoule entre deux retours consécutifs de cet astre au cercle de
latitude d'une étoile, ce cercle de latitude ayant pour centre le
soleil, et non la terre.

La révolution sidérale diffère de la révolution périodique à cause du
mouvement du nœud sur l'écliptique. (Ceci est analogue à la précession
des équinoxes).

=338.= On appelle révolution _synodique_ d'une planète le temps qui
s'écoule entre deux conjonctions _de même nom_, ou deux oppositions de
cette planète, son mouvement étant vu de la terre.

PLANÈTES INFÉRIEURES.

=339.= On appelle planètes _inférieures_, ou _intérieures_, avons-nous
dit, les planètes qui sont plus rapprochées que nous du soleil, ou, ce
qui revient au même, les planètes dont les orbites sont intérieures à
l'orbite de la terre (_fig._ 122).

Nous avons remarqué (nº 333) qu'une planète inférieure ne peut se
trouver en opposition, parce qu'une planète en opposition est plus
éloignée du soleil que la terre.

Il n'y a que deux planètes inférieures: MERCURE et VÉNUS. Nous allons
nous en occuper particulièrement.

MOUVEMENT APPARENT D'UNE PLANÈTE INFÉRIEURE (vue de la terre); SES
DIGRESSIONS ORIENTALES ET OCCIDENTALES.

=340.= Pour plus de précision dans la description de ces mouvements, au
lieu de dire la planète, en général, nous parlerons de Vénus. Tout ce
que nous dirons ici de Vénus est vrai pour Mercure; il n'y a qu'à
changer le nom dans l'exposition.

(V. la _fig._ 124 ci-après; la planète se meut sur son orbite PP'P"P, à
partir de la conjonction inférieure P; l'observateur terrestre occupe la
position _relative_ T). VÉNUS, à l'époque de la conjonction inférieure,
n'est pas visible; située pour nous précisément dans la direction du
soleil, elle se perd dans les rayons de cet astre, qu'elle accompagne
tout le jour au-dessus de l'horizon, et la nuit au-dessous: Quelque
temps après on aperçoit cette planète, le matin, à l'orient, un peu
avant le lever du soleil. Les jours suivants, dans les mêmes
circonstances, c'est-à-dire un peu avant le lever du soleil, on
l'aperçoit de plus en plus élevée au-dessus de l'horizon; elle nous
paraît donc s'écarter de plus en plus du soleil vers l'ouest[119]. Au
bout d'un certain temps, cet écart cesse de croître; la planète nous
paraît stationnaire par rapport au soleil. Quelques jours après, elle
paraît se rapprocher de cet astre; car le matin, quand le soleil se
lève, elle est de moins en moins élevée au-dessus de l'horizon.

[Note 119: De deux astres voisins, c'est le plus occidental qui précède
l'autre dans le mouvement diurne de la sphère céleste, c'est-à-dire se
lève avant lui, etc.]

Le lever de la planète se rapprochant ainsi de celui du soleil, les deux
astres finissent par se rejoindre; la planète se perd de nouveau dans
les rayons du soleil, et nous cessons de la voir pendant quelques jours.
C'est l'époque d'une conjonction, et c'est évidemment la conjonction
supérieure. Quelques jours après, l'astre reparaît, mais cette fois le
soir, à l'occident, un peu après le coucher du soleil. Les jours
suivants, dans les mêmes circonstances, c'est-à-dire un peu après le
coucher du soleil, nous le voyons de plus en plus élevé au-dessus de
l'horizon; son coucher retarde de plus en plus sur celui du soleil; la
planète nous paraît donc s'écarter du soleil, mais cette fois vers
l'est[120]. Au bout d'un certain temps, la planète semble de nouveau
stationnaire par rapport au soleil; puis, après quelques jours de
station, nous paraît revenir vers lui; car de jour en jour nous la
voyons de moins en moins élevée au-dessus de l'horizon quand le soleil
se couche. Enfin elle arrive à se coucher en même temps que cet astre,
et alors nous cessons de la voir: il y a alors une nouvelle conjonction,
et c'est évidemment la conjonction inférieure. A partir de là, les
apparences que nous venons de décrire se reproduisent indéfiniment, et
dans le même ordre.

[Note 120: _V._ la note précédente.]

=341.= _Mouvement de la planète sur la sphère céleste._ En étudiant ce
mouvement par rapport au soleil d'une manière plus précise et avec des
instruments, _à partir de la conjonction inférieure_, on constate ce qui
suit. La longitude de la planète, d'abord égale à celle du soleil,
devient bientôt plus petite; la différence des deux longitudes augmente
dans ce sens pendant un certain nombre de jours; la planète s'éloigne
donc du soleil vers l'ouest. Au bout d'un certain temps, cet écart
angulaire des deux astres cesse de croître; il conserve la même valeur
pendant quelques jours; la planète paraît _stationnaire_ par rapport au
soleil. Les jours suivants elle revient vers cet astre; car la
différence des longitudes diminue de plus en plus, et finit par
s'annuler: la planète a rejoint le cercle de latitude du soleil; il y a
donc une nouvelle conjonction, et ce doit être la conjonction
supérieure. Aussitôt après, les longitudes recommencent à différer; mais
cette fois la longitude de la planète est la plus grande; la différence
augmente de plus en plus dans ce sens: la planète nous paraît donc
s'écarter du soleil vers l'est. Après un certain temps, cet écarte cesse
de croître; il reste le même pendant quelques jours; la planète est
stationnaire par rapport au soleil. Puis l'écart diminue, et finit par
s'annuler; les longitudes redeviennent égales. La planète se rapprochant
du soleil, vers l'ouest, a fini par le rejoindre; il y a une nouvelle
conjonction; c'est évidemment la conjonction inférieure. Puis tout
recommence de même.

=342.= DÉFINITIONS. Ces mouvements apparents de va-et-vient de la
planète, tantôt à l'ouest du soleil, tantôt à l'est, sont ce qu'on
appelle des _digressions_.

Une planète inférieure s'éloignant du soleil vers l'ouest fait une
_digression occidentale_; quand elle s'en éloigne vers l'est, la
_digression_ est _orientale_.

Plus précisément, la digression _occidentale_ d'une planète inférieur
est l'écart de cette planète à l'ouest du soleil, parvenu à son maximum.
La digression orientale est l'écart de la planète à l'est du soleil,
parvenu à son maximum.

Dans son état variable, entre 0° et son maximum, la distance angulaire
entre la planète et le soleil se nomme _élongation_.

_Les digressions de_ MERCURE _ne dépassent jamais 28°; celles de_ VÉNUS
48°.

[Illustration: 253, fig. 124]

=343=. EXPLICATION DU MOUVEMENT APPARENT D'UNE PLANÈTE INFÉRIEURE.
Figurons-nous les orbites de la planète et de la terre (cercle SP et
cercle ST, _fig._ 124); les mouvements du ces deux corps ont lieu dans
le sens indiqué par la flèche[121]. La terre, plus éloignée du soleil
que la planète, met plus de temps que celle-ci à faire le tour de son
orbite (3e loi de Képler). La vitesse circulaire moyenne de la planète
est donc plus grande que celle de la terre. Dès lors, pour étudier les
positions relatives de la terre et de la planète, nous pouvons
considérer la terre comme immobile en T (_fig._ 124), tandis que la
planète circule sur son orbite avec une vitesse précisément égale à
l'excès de sa vitesse réelle sur la vitesse de la terre. Eu égard à la
symétrie des orbites, le mouvement angulaire de la planète, _par rapport
au soleil_, vu de la terre, sera précisément le même dans cette
hypothèse que celui qui a lieu réellement. Rappelons-nous donc, d'après
cela, que l'observateur est supposé immobile en T[122].

[Note 121: Ces mouvements, vus du soleil, ont lieu d'occident en orient,
c'est-à-dire de la droite à la gauche du spectateur.]

[Note 122: Pour bien comprendre ce que nous disons ici, à propos du
mouvement apparent de la planète par rapport à l'observateur terrestre
et au soleil, il suffit de considérer un instant le mouvement simultané
de la terre T et de la planète P autour du soleil S sur la _fig._ 124
_bis_. A la conjonction inférieure, la terre

[Illustration: 254, Fig. 124 bis.]

est en T et la planète en P. Quelque temps après, la terre étant arrivée
en T_(1) la planète est en _p__(1); comme la planète a tourné plus vite
que la terre autour du soleil, elle n'est plus en ligne droite avec la
terre et le soleil; l'observateur placé en T_(1) voit la planète et le
soleil sous un angle ST_(1)_p__(1), que nous appelons la distance
angulaire du soleil et de la planète, ou plus simplement l'_élongation_.
Dans l'intervalle que nous considérons, cette distance angulaire a varié
de 0° à sa valeur actuelle ST_(1)_p__(1); les longitudes des astres S et
P, d'abord égales entre elles et à γ_p_, sont devenues différentes
(γ_s_-γ_p_(1) = _p_(1)_s_). Cette distance angulaire varie durant le
mouvement simultané de la terre et de la planète; on pourrait l'étudier
en considérant sur cette figure 124 _bis_ une série de positions
simultanées de ces deux corps, et faisant la même construction que nous
avons faite pour T_(1) et _p__(1); nous aurions une série d'angles, tels
que ST_(1)_p__(1), à comparer les uns aux autres. Pour les comparer plus
aisément, nous les avons transportés de manière qu'ils aient tous un
côté commun ST (_fig._ 124) et nous avons considéré à partir de là les
divers écarts du second côté S_p__(1); nous n'avons pas fait autre chose
dans le texte.]

Pendant que la planète, à partir de la conjonction inférieure, va de P
en P', l'écart angulaire de cet astre et du soleil vus de la terre T, se
forme et croît de 0° à STP'.

La projection de la planète sur la sphère céleste (sa position
apparente), allant de _p_ en _p'_, s'écarte _vers l'ouest_ de celle du
soleil, qui, dans notre hypothèse, est fixe en _p_. C'est pourquoi la
planète nous paraît s'écarter d'abord du soleil vers l'ouest. Cet écart
de la projection de la planète, qui est _la différence des longitudes
des deux astres_, croît de 0° à _pp'_. La figure montre que l'écart
entre le soleil et la planète doit croître d'abord avec une certaine
rapidité, puis plus lentement à mesure que la planète se rapproche de la
position P'. Les points de l'orbite, voisins de P', étant à très-peu
près sur la direction de la tangente TP', se projettent à très-peu près
en _p'_; pendant que la planète occupe ces positions voisines de P', un
peu avant et un peu après son arrivée en ce point, la projection de cet
astre sur la sphère doit nous paraître stationnaire (en _p'_) par
rapport à celle du soleil, c'est-à-dire que la différence des longitudes
des deux astres doit rester la même. Le mouvement de la planète vers
l'ouest est arrêté; il y a _station_. Un peu plus tard, la planète ayant
dépassé sensiblement le point P', en allant de P' à P", la distance
angulaire des deux astres diminue de STP' à 0; la projection de l'astre
se meut vers l'est, de _p'_ en _p_, la différence des longitudes diminue
de _pp'_ à 0; la planète doit donc nous paraître se rapprocher du soleil
vers l'est; elle le rejoint à la conjonction supérieure en P". Après
cette conjonction, la planète passe à l'est du soleil et s'en écarte
continuellement, en allant de P" en P(1); les longitudes des deux
astres redeviennent différentes, mais la planète étant passée à l'est du
soleil, sa longitude est plus grande; la différence croît de 0° à
_pp_(1). L'écart angulaire des deux astres croit d'abord avec rapidité,
puis se ralentit pour cesser de croître quand la planète est tout près
de P(1). Arrivée en cet endroit, la planète semble de nouveau
_stationnaire_ par rapport au soleil, comme en P'. Quand elle a dépassé
ce point, tandis qu'elle va de P(1) à P, l'écart angulaire des deux
astres diminue avec une rapidité de plus en plus grande, la différence
des longitudes décroît de _pp_(1) à 0°. La planète est de nouveau en
conjonction inférieure; puis tout recommence delà même manière. Ainsi se
trouvent expliquées toutes les circonstances du mouvement apparent.

=344.= VÉNUS. _Détails particuliers_. Cette planète n'est autre que
l'astre brillant connu de tout le monde sous le nom d'étoile du soir
(Vesper), et d'étoile du matin ou étoile du berger (Lucifer). A une
certaine époque on la voit, près de l'horizon, à l'orient, un peu avant
le lever du soleil; c'est alors l'étoile du berger; plus tard, l'astre
cesse de nous apparaître pendant quelques jours, puis nous le revoyons,
mais le soir, au coucher du soleil, quelquefois même auparavant: c'est
alors l'étoile du soir (Vesper). Il a fallu que l'astronomie fit des
progrès pour qu'on pût reconnaître un seul et même astre dans l'étoile
du soir et l'étoile du berger.

DIGRESSIONS DE VÉNUS. Nous venons de les décrire au nº 340; V. ce
paragraphe.

Nous avons dit, nº 342, que Vénus ne s'écarte jamais de plus de 48° soit
à l'est, soit à l'ouest du soleil.

=345.= _Phases de Vénus_. Aux diverses époques de sa révolution
synodique (338), Vénus se présente à nous sous des aspects différents
tout à fait analogues aux phases de la lune; aussi les a-t-on nommés
_phases de Vénus_ (V. _fig._ 125)[123]. Ces phases sont
très-caractérisées; à la conjonction supérieure, nous voyons la planète
sous la forme d'un petit cercle lumineux parfaitement arrondi; c'est
qu'alors la partie éclairée par le soleil est entièrement tournée du
côté de la terre, _fig._ 124. A la conjonction inférieure, au contraire,
placée entre le soleil et la terre, la planète tourne de notre côté sa
partie obscure, et disparaît entièrement, à moins-qu'on ne la voie, ce
qui arrive très-rarement, se projeter sur le disque solaire sous la
forme d'un petit-cercle noir (nº 349). Entre les deux conjonctions, elle
nous présente un croissant très-sensible dont la convexité regarde
toujours le soleil, et qui va continuellement en augmentant jusq'au
demi-cercle, à la quadrature (position P', _fig._ 124), puis du
demi-cercle au cercle entier, en P"; et _vice versa_, de P' en P(1) et
en P[124].

[Note 123: On reconnaît qu'il doit en être ainsi en considérant, sur la
_fig._ 124, l'hémisphère de la planète éclairée par le soleil et
l'hémisphère visible de la terre T, comme on l'a fait pour la lune,
_fig._ 98. Seulement le corps éclairant est ici dans l'intérieur de
l'orbite et l'observateur T en dehors.]

[Note 124: On explique ces phases exactement de la même manière que
celles de la lune, en ayant égard aux positions du corps éclairant S, du
corps éclairé mobile P, et de l'observateur T relativement fixe (nº
343).]

=346.= Vénus est quelquefois tellement brillante, qu'on la voit en plein
jour à l'œil nu; mais ce phénomène n'arrive pas au moment où l'astre
nous présente un disque parfaitement arrondi, parce qu'il est alors
_trop loin de nous_, et se trouve d'ailleurs à peu près sur la même
ligne que le soleil. A mesure que l'astre se rapproche de la terre, le
fuseau brillant diminue quant à l'écartement angulaire des deux cercles
qui le limitent, mais le _diamètre apparent_ augmente rapidement; on
conçoit qu'il puisse exister une distance intermédiaire entre les deux
conjonctions, où la partie du disque à la fois visible et éclairée soit
la plus grande; alors, c'est-à-dire vers la quadrature, l'astre brille
de son plus vif éclat.

=347.= REMARQUE. La distance de Vénus à la terre T varie
considérablement depuis son minimum à la conjonction inférieure
(position P, _fig._ 124), jusqu'à son maximum, à la conjonction
supérieure en P", où elle est cinq ou six fois plus grande qu'en P. De
là résultent des variations également considérables dans le diamètre
apparent de l'astre. La planète nous paraît d'autant plus grande que son
croissant est plus étroit. Les variations de la grandeur apparente de
l'astre, dans ses phases successives, sont représentées
proportionnellement sur la _fig._ 125 ci-après.

_Diamètre apparent de Vénus._ Minimum 9",6; à la distance moyenne 18",8;
maximum 61",2; à la distance du soleil à la terre 16",9. C'est cette
dernière valeur que l'on compare au diamètre apparent de la terre vue du
soleil (double de la parallaxe solaire) qui est 17",14. On conclut de là
que le rayon de Vénus vaut à peu près 0,98 de celui de la terre.

[Illustration: 257, Fig. 125]

=348.= L'observation de certaines taches que l'on aperçoit sur le disque
de Vénus, montre que cette planète tourne sur elle-même, comme la terre,
d'occident en orient. Elle fait un tour entier en 23h 21m 19s. La durée
du jour est donc à peu près la même à la surface de Vénus que sur la
terre. L'année y est de 225 jours environ (révolution périodique). Les
saisons y sont beaucoup plus tranchées que sur la terre, c'est-à-dire
que les variations de la température y sont beaucoup plus considérables;
il en est de même des variations des durées des jours et des nuits[125].

[Note 125: Cela tient à ce que l'inclinaison de l'orbite de la planète
sur son équateur, laquelle correspond à l'inclinaison de l'écliptique
sur l'équateur terrestre, est très-grande, 75° au lieu de 23° 28'.]

Vénus présente d'ailleurs de grandes analogies avec la terre. Nous
venons de voir que la durée du jour est à peu près le même sur les deux
planètes; elles ont d'ailleurs à peu près le même rayon; le même volume,
la même masse et la même densité moyenne. (Le rayon de Vénus égale 0,985
_r._ terrestre; volume de Vénus = 0,957 volume de la terre.) On n'a pas
pu vérifier si Vénus était aplatie vers les pôles comme la terre.

Vénus est environnée d'une atmosphère analogue à la nôtre[126]. On a
reconnu qu'il existait à la surface de cette planète des montagnes
beaucoup plus hautes que celles de la terre. La hauteur de quelques
montagnes de Vénus atteint la 144e partie du rayon de la planète, tandis
que pour la terre cette plus grande hauteur ne dépasse pas 1/740 du
rayon.

[Note 126: L'existence de cette atmosphère est indiquée par un phénomène
crépusculaire analogue à celui qui se produit sur la terre. _V._ la note
de la page 205.]

=349.= PASSAGES DE VÉNUS SUR LE SOLEIL. Si Vénus circulait sur
l'écliptique à l'intérieur de l'orbite terrestre, comme nous l'avons
supposé, nous pourrions observer à chaque conjonction inférieure en P
(_fig._ 124), un phénomène curieux. L'astre se projetterait sur le
disque solaire dans la direction TS; comme le diamètre de Vénus, bien
qu'alors à son maximum, n'est cependant que de 1' environ, tandis que
celui du soleil est environ 32', le disque solaire ne serait pas éclipsé
comme il le serait par la lune en pareille circonstance; mais la planète
se projetterait au centre de ce disque sous la forme d'un petit cercle
noir de 1' de diamètre. De plus, pendant que l'astre, dans son mouvement
de translation, passerait devant le soleil, ce petit cercle noir nous
semblerait se mouvoir sur le disque, de gauche à droite[127], suivant un
diamètre. Ce phénomène durerait un certain temps; car pendant sa durée
la longitude de Vénus varierait de 32' environ.

[Note 127: C'est le sens du mouvement de Vénus à la conjonction
inférieure (_fig._ 124).]

Comme Vénus ne circule pas en réalité sur l'écliptique, mais sur un plan
incliné à celui-là d'environ 3° 25' 31", le phénomène que nous venons de
décrire n'a pas lieu à toutes les conjonctions inférieures; il s'en faut
de beaucoup; il arrive cependant quelquefois. Quand la planète, à la
conjonction inférieure, arrive sur le cercle de latitude du soleil, la
ligne TS et la ligne TV (qui va de la terre à Vénus), au lieu de
coïncider comme nous l'avons supposé, font un angle qui varie de 0° à 3°
23' 31". Quand cet angle, qui mesure alors la latitude de Vénus, est
nul, c'est-à-dire quand la lune, à la conjonction inférieure, arrive à
l'un de ses nœuds _sur l'écliptique_, les circonstances étant à très-peu
près celles que nous avons supposées tout à l'heure, le phénomène en
question a lieu: _Vénus passe sur le soleil_ et décrit à très-peu près
un diamètre du disque solaire: c'est ce qu'on appelle un passage
central; il dure plus de 7 heures. Quand, à l'époque de la conjonction,
l'angle VTS (latitude de Vénus), sans être nul, est moindre que le
demi-diamètre apparent du soleil, il est évident que la planète doit
passer sur le soleil; mais alors le petit cercle noir, au lieu d'un
diamètre du disque, parcourt une corde plus ou moins éloignée du centre.
Enfin quand la latitude de Vénus à la conjonction inférieure est plus
grande que le demi-diamètre apparent du soleil, il n'y a pas de
_passage_. Tout cela se comprend aisément.

Ces _passages_ de Vénus sur le soleil se reproduisent périodiquement; on
en calcule les époques comme celles des éclipses de soleil et de lune.
Ces passages sont rares; les derniers ont eu lieu en 1761 et 1769. Après
un passage il s'écoule 8 ans avant qu'il s'en présente un second; puis
le troisième ne revient qu'après 113-½ ± 8 ans, et ainsi qu'il suit: 8
ans, 121 ans-½, 8, 105ans-½ etc...[128]. Les deux passages prochains
auront lieu le 8 décembre 1874 et le 6 décembre 1882. Le phénomène a
lieu en décembre ou en juin, époques auxquelles les longitudes du soleil
sont 255° ou 75°, c'est-à-dire celles des nœuds de la planète.

[Note 128: Si les nœuds de Vénus étaient fixes sur l'écliptique, cet
astre ayant passé une fois sur le soleil, y passerait ensuite tous les 8
ans; car 8 fois 365 jours = 5 fois 584 jours ou 5 fois la durée de la
révolution synodique de Vénus; de sorte que si Vénus se trouve à l'un
des noeuds au moment d'une conjonction inférieure, elle s'y retrouverait
8 ans après, à la 5e conjonction suivante. Mais les nœuds de Vénus ne
sont pas fixes; de là l'irrégularité de la période des passages.]

Tout ce que nous venons de dire à propos des passages de Vénus sur le
soleil, à cela près des nombres indiqués, s'applique évidemment à
_Mercure_ (nº 350), qui passe aussi sur le soleil.

(_V._ à la fin du chapitre la détermination de la parallaxe du soleil
par l'observation d'un passage de Vénus.)

=350=. MERCURE. Cet astre a beaucoup d'analogie avec Vénus; seulement,
il est beaucoup plus petit, plus loin de nous, plus rapproché du soleil,
dont il s'écarte beaucoup moins dans ses disgressions (nº 342). Engagé
dans les rayons solaires, il est difficile à distinguer à la vue simple
dans nos climats; cependant quelque-fois, avec de bons yeux, on le
découvre le soir un peu après le coucher du soleil, et d'autres fois le
matin avant le lever de cet astre.

Le diamètre apparent de Mercure varie de 5" à 12"; sa distance moyenne
au soleil est 0,3871 ou environ les 2/5 de celle de la terre au même
astre. Ses plus grandes élongations (342) varient de 16° 12' à 28° 48',
et la durée de sa révolution synodique de 106 à 130 jours. Sa révolution
sidérale dure 87 jours 23 heures 15m 44s. Son orbite est une ellipse
assez allongée, l'excentricité surpasse le 5e de la distance moyenne
ci-dessus; nous avons dit que cette orbite est inclinée de 7° sur
l'écliptique.

Ce que nous avons dit des digressions, nº 340 et 341, s'applique en
entier à Mercure.

Cette planète a aussi ses phases, qui, bien que moins apparentes que
celles de Vénus, prouvent qu'elle est opaque et ne brille que par la
lumière solaire. Elle a des passages comme Vénus; ils sont même plus
fréquents que ceux-ci, mais ne présentent pas le même intérêt; la trop
grande proximité de Mercure et du soleil ne permet pas de tirer parti de
ces passages pour déterminer la parallaxe du soleil.

Le rayon de Mercure = 2/5, et son volume un 16e environ, du rayon et du
volume de la terre. La chaleur et la lumière y sont sept fois plus
intenses qu'à la surface de notre globe. Le vif éclat dont brille cette
planète par suite de son peu de distance au soleil n'a pas permis d'y
apercevoir aucune tache; mais, par l'observation suivie des variations
des _cornes_ de ses phases, on est parvenu à reconnaître qu'elle tourne
sur elle-même en 24 heures 5m 28s, autour d'un axe constamment parallèle
à lui-même. Le plan de l'équateur de Mercure fait un angle très-grand
avec celui de l'orbite, et par suite la variation des températures,
autrement dit des saisons, doit y être très-considérable. Plusieurs
astronomes attribuent à Mercure des montagnes très-élevées et une
atmosphère très-dense. Cependant des observations très-délicates de
passages de la planète sur le soleil n'ont révélé a Herschell père
aucune trace de l'existence de montagnes à la surface de cet astre.

PLANÈTES SUPÉRIEURES.

MARS, JUPITER, SATURNE, URANUS, NEPTUNE:

=351.= Nous avons appelé planètes _supérieures_ ou _extérieures_ celles
qui sont plus éloignées du Soleil que la terre; on les nomme quelquefois
_extérieures_ parce que leur mouvement autour du soleil a lieu à
l'extérieur de l'orbite de la terre. L'orbite de la planète (P), et
l'orbite de la terre (T) ont à peu près les positions relatives
indiquées par la _fig._ 126, ci-dessous.

Les principales planètes extérieures sont: _Mars_, _Jupiter_, _Saturne_,
_Uranus_, _Neptune_, dont nous allons nous occuper particulièrement.

=352.= MOUVEMENT APPARENT (c'est-à-dire vu de la terre) D'UNE PLANÈTE
SUPÉRIEURE. _Progressions ou mouvement direct, stations,
rétrogradations._ Une planète supérieure étant plus éloignée du soleil
que la terre, se trouve alternativement en opposition (en P, _fig._ 123
ou _fig._ 126 ci-après) et en conjonction en P' (_fig._ 123). Suivons-la
à partir de l'opposition, c'est-à-dire à partir de l'époque où elle
passe au méridien à minuit[129]. Elle se trouve alors toute la nuit au
dessus de l'horizon. A partir de l'opposition, la planète se déplace
dans le ciel, vers l'occident; son mouvement est rétrograde[130]; son
passage au méridien a lieu avant minuit et se rapproche de plus en plus
de 6 heures du soir[131]. Au bout d'un certain temps, le mouvement
rétrograde se ralentit, puis s'arrête; durant quelques jours la planète
nous paraît _stationnaire_ au milieu des étoiles[132]; elle passe au
méridien à 6 heures du soir[133]. Après cette station, la planète se
remet en mouvement, mais cette fois vers l'est; son mouvement est devenu
_direct_[134]; son passage au méridien continue à se rapprocher de celui
du soleil; quand on peut l'apercevoir le soir vers 6 heures, par
exemple, on la voit au couchant de moins en moins élevée au-dessus de
l'horizon[135]. En se rapprochant ainsi du soleil (en longitude), elle
finit par se perdre dans ses rayons, et devient invisible pendant un
certain nombre de jours; elle se trouve alors en conjonction, passe au
méridien avec le soleil, se lève et se couche en même temps que
lui[136]. Au bout de quelques jours, la planète reparaît, mais du côté
de l'orient, le matin, un peu avant le lever du soleil. Puis son lever
précède de plus en plus le lever du soleil; quand celui-ci parait, la
planète est de plus en plus élevée au-dessus de l'horizon; en même
temps, elle continue à se déplacer dans le ciel, toujours dans le sens
direct, c'est-à-dire vers l'est[137]. Au bout d'un certain temps, ce
mouvement direct se ralentit et finit par s'arrêter; la planète fait une
seconde station de quelques jours parmi les étoiles; à cette époque,
elle passe au méridien à 6 heures du matin[138]. Après cette seconde
station, le mouvement reprend, mais vers l'ouest; il est devenu
rétrograde[139]; en même temps, le passage de la planète au méridien se
rapproche de minuit[140]; le séjour de l'astre au-dessus de l'horizon
durant la nuit devient de plus en plus long, et enfin l'astre arrive à
passer au méridien à minuit, c'est-à-dire se retrouve de nouveau en
_opposition_. A partir de là, les mêmes apparences que nous avons
décrites se reproduisent dans le même ordre.

[Note 129: A l'opposition, le cercle horaire de la planète P' (vue de la
terre) (_fig._ 126), et celui du soleil, S (également vu de la terre),
sont évidemment opposés (_V._ les définitions, nº 30).]

[Illustration: 261, Fig. 126]

[Note 130: Ce mouvement rétrograde est mis en évidence par la _figure_
126. Nous avons supposé, en construisant cette figure, la planète P
immobile sur son orbite, et la terre en mouvement sur la sienne, mais
seulement animée d'une vitesse circulaire (ou angulaire) égale à l'excès
de sa vitesse réelle sur celle de la planète (_V._ la 2e note, p. 248).
Eu égard à la symétrie des orbites, les positions apparentes de trois
corps pour l'observateur terrestre, sont absolument les mêmes que dans
la réalité durant la révolution synodique de l'astre (d'une opposition à
la suivante). Ceci admis, on voit qu'après l'opposition, la terre allant
de T en T', la projection de la planète sur la sphère céleste se déplace
vers _l'ouest_ de _p_ en _p'_; le mouvement apparent est donc
_rétrograde_.]

[Note 131: Si, durant ce mouvement de la terre, de T à T', on joint
chacune de ses positions à S aussi bien qu'à P, et si on prolonge la
ligne TS jusqu'à l'écliptique γ_p'p_... en _s_, on verra la projection
_p_ de la planète et la projection du soleil se rapprocher
continuellement; la différence en longitude de ces deux astres diminuant
de 180° à 90°, leurs passages au méridien se rapprochent. (Il faut se
rappeler que les longitudes se comptent à partir du point γ, dans le
sens γ_p'p_.)]

[Note 132: En suivant le mouvement de la projection _p_ de la planète,
tandis que la terre va de T en T', on voit bien que le mouvement
rétrograde de cette projection, d'abord assez rapide aux environs de
l'opposition, doit se ralentir quand la terre approche de la position
T'; car aux environs de T', les lignes projetantes tendent de plus en
plus à se confondre; les points voisins de T', un peu avant et un peu
après, sont sensiblement sur la direction de la tangente T'P; quand la
terre passe par ces positions, la projection de la planète ne s'écarte
pas de _p'_; l'astre nous paraît arrêté en ce point du ciel.]

[Note 133: La terre étant en T', l'angle _p'_T'S = 90°; le point _p'_ se
trouve à 90° de la projection _s_ du soleil sur l'écliptique (prolongez
T'S par la pensée).]

[Note 134: La terre ayant dépassé le point T' et allant de T' en T", la
projection de la planète sur l'écliptique revient évidemment de _p'_
vers _p_.]

[Note 135: Si, durant ce mouvement de la terre de T' en T", on joint
quelques positions de la terre au soleil et à la planète, en prolongeant
les lignes, si on veut, jusqu'à l'écliptique, on voit l'angle des deux
lignes, TS, TP, diminuer de 90° à 0; cet angle est la différence des
longitudes des deux astres; ceci explique comment leurs passages au
méridien se rapprochent l'un de l'autre.]

[Note 136: Cela est évident, puisque la planète se trouve en face de
nous sur le prolongement de la ligne TS qui va du soleil à la terre, et
qui détermine le cercle horaire du soleil.]

[Note 137: La figure montre bien que la terre, après la conjonction en
T", allant de T", en T_(1), la position apparente de la planète va de
_p_ à _p__(1), vers l'est.]

[Note 138: Si, durant ce mouvement de la terre, de T" en T(1), on joint
chacune de ses positions (T) au soleil comme à la planète, on voit la
distance angulaire PTS (différence de leurs longitudes) varier' de 0° à
90° (_p_ étant à l'ouest de _s_).]

[Note 139: Ce mouvement rétrograde se voit sur la figure pendant que la
terre va de T_(1) en T, la projection revient de _p__(1) à _p_.]

[Note 140: Enfin, dans cette dernière période, l'angle variable PTS
(formez-le) varie de 90° à 180°.]

=353.= MARS. Cette planète est la première des planètes supérieures dans
l'ordre des distances croissantes au soleil; moins brillante que Vénus,
elle se reconnaît à sa couleur d'un rouge ocreux très-prononcé: diamètre
apparent de 4 à 18"; distance de la terre de 0R,52 à 1R,52.

Nous désignerons dans ce qui va suivre par R le rayon mobile de l'orbite
terrestre, et par _r_ le rayon de la terre. L'orbite de Mars est une
ellipse très-allongée: demi-axe moyen, 1R,523; excentricité, 0,14 de cet
axe; révolution sidérale, 687j.

Mars est très-brillant dans les oppositions; quand il se rapproche du
soleil, son éclat diminue, et aux environs de la conjonction il n'est
visible qu'au télescope. Les phases de cet astre sont moins sensibles
que celles de Vénus et de Mercure; il nous présente un ovale plus ou
moins allongé. Plus un astre s'éloigne du soleil, moins ses phases sont
sensibles. Les phases encore appréciables pour Mars ne le sont plus pour
les autres planètes supérieures. Les taches découvertes à la surface de
Mars ont permis de constater que cet astre tourne sur lui-même en 24h
39' 22" autour d'un axe incliné de 61° 18' sur le plan de son orbite. Il
en résulte que la succession des saisons doit y être sensiblement la
même que sur la terre dont l'axe de rotation est incliné sur l'orbite de
67°-½ environ. La forme de Mars est celle d'un sphéroïde aplati; l'axe
polaire est à l'axe équatorial dans le rapport de 187 à 194.

Le rayon moyen de Mars égale 0,52 de celui de la terre, et par
conséquent son volume est égal à 0,14 environ de celui de notre globe.
La chaleur et la lumière n'y sont que les 4/9 de ce qu'elles sont sur la
terre.

On distingue aux pôles de rotation de Mars des taches brillantes que
l'on suppose formées par des amas de neige et de glace; ce qui s'accorde
en effet avec les changements observés dans les grandeurs absolues de
ces taches. Enfin, diverses observations de changements sensibles
survenus dans différentes bandes au milieu des taches permanentes de
Mars accusent à la surface de cette planète une atmosphère d'une densité
considérable.

=354.= JUPITER. C'est la planète la plus importante de notre système,
tant par son éclat qui surpasse quelquefois celui de Vénus, et par son
volume à peu près égal à 1500 fois celui de la terre, que par l'utilité
que nous tirons de ses quatre lunes ou _satellites_.

Sa distance de la terre varie entre 3R,98 et 6R,42; la moyenne est de
5R,20. A la distance moyenne, son diamètre apparent est de 37"; il
serait de 3' 17", si nous voyions Jupiter à la distance du soleil.

Pour un habitant de Jupiter, la terre n'aurait que 4" de diamètre et le
soleil 6'; le disque solaire lui paraîtrait 27 fois plus petit qu'à
nous; la chaleur et la lumière y sont 27 fois moindres qu'à la surface
de la terre.

L'orbite de Jupiter est inclinée sur l'écliptique de 1° 18' 54". La
durée de sa révolution sidérale est de 11ans 315j 12h. Les phases de
Jupiter sont à peu près insensibles à cause de sa trop grande distance
du soleil.

ROTATION. Les taches observées à la surface de Jupiter ont permis de
constater qu'il tourne sur lui-même en 9h 55m 40s, autour d'un axe
presque perpendiculaire au plan de son orbite (86° 54'); d'où il résulte
que les variations des jours et des nuits, et celles de la température,
doivent y être très-peu considérables.

ATMOSPHÈRE ET BANDES. Le disque de Jupiter présente des bandes ou zones
parallèles à son équateur; on les attribue à l'existence de vents
réguliers analogues à nos vents alisés, dont l'effet principal est de
disposer, de réunir les vapeurs équatoriales en bandes parallèles; ce
qui suppose Jupiter entouré d'une _atmosphère_ considérable.

APLATISSEMENT. On a aussi constaté que l'aplatissement de Jupiter est
beaucoup plus grand que celui de la terre; cet aplatissement est
d'environ 1/16, tandis que celui de la terre n'est que de 1/300 environ.

=355.= SATELLITES DE JUPITER. On nomme _satellites_ des planètes
secondaires qui circulent autour d'une planète principale et
accompagnent celle-ci dans sa révolution autour du soleil. La lune, par
exemple, est le satellite de la terre. Mercure, Vénus, Mars n'ont point
de satellites; Jupiter en a 4. Nous verrons que Saturne en a 7 et Uranus
6; Neptune au moins 1.

Invisibles à l'œil nu, les satellites de Jupiter, inconnus aux anciens
astronomes, ont été découverts par Galilée en 1618, peu après
l'invention des lunettes. En observant Jupiter avec un télescope, on
aperçoit ces satellites sous la forme de petits points brillants qui se
déplacent assez rapidement, par rapport à la planète, tantôt à l'orient,
tantôt à l'occident de celle-ci, allant et venant, sensiblement sur une
ligne droite dirigée à peu près suivant l'écliptique. (En réalité, ces
satellites tournent autour de la planète comme celle-ci autour du
soleil; mais leurs orbites sont dans des plans qui coïncident presque
avec l'équateur du Jupiter, et, par suite, nous font l'effet de lignes
droites le long desquelles les satellites semblent osciller). Voici, en
considérant les satellites dans l'ordre de leurs distances moyennes à
Jupiter (_fig._ 129), quelques nombres tournis par l'observation.

[Illustration: page 265, fig. 129]

              DURÉES         DISTANCES MOYENNES      INCLINAISONS
SATELLITES.   de leurs       au centre de Jupiter    des orbites
              révolutions    en rayons               sur l'équateur
              synodiques.    de cette planète.       de Jupiter.

1er satellite    1,77            6,05                0°  0'  0"

2°  _Id._        3,55            9,62                0° 21' 49",2

3e  _Id._        7,15            15,35               0° 12' 20"

4e  _Id._       16,69            27,00               2°

De même que la lune, les satellites de Jupiter font un tour entier sur
eux-mêmes dans le même temps qu'ils emploient à effectuer une révolution
autour de la planète.

=356.= _Éclipses des satellites de Jupiter._ En appliquant à Jupiter le
raisonnement géométrique du nº 284, on conclut que cette planète doit
projeter derrière elle, par rapport au soleil, un cône, d'ombre pure,
beaucoup plus large et plus long que celui de la terre, puisque le rayon
de Jupiter est à peu près 11 fois celui de notre globe, et sa distance
au soleil, 5 fois plus considérable. (V. la _fig._ 130 ci-après). Il en
résulte que les satellites de Jupiter, quand ils passent derrière la
planète, sont _éclipsés_ par elle exactement comme la lune est éclipsée
par la terre. On les voit aussi, par intervalles, se projeter sur le
disque de la planète et en éclipser de petites parties.

La longueur de l'axe du cône d'ombre de Jupiter est égale à 47 fois le
rayon de l'orbite du satellite le plus éloigné, c'est-à-dire du 4e.
Aussi tous les satellites s'éclipsent-ils à chacune de leurs
révolutions, excepté le 4e qui, à cause de l'inclinaison de son orbite
sur celle de Jupiter, n'est pas toutes les fois atteint par le cône
d'ombre.

=357.= DÉTERMINATION DES LONGITUDES, GÉOGRAPHIQUES _par l'observation
des éclipses des satellites de Jupiter._

Les éclipses des satellites de Jupiter étant visibles de tous les lieux
de la terre qui ont la planète au-dessus de leur horizon, et se répétant
souvent, peuvent servir à la détermination des longitudes terrestres.
L'heure d'une éclipse est indiquée en temps de Paris dans la
_Connaissance des temps_, que possède l'observateur; il détermine
l'heure qu'il est au moment de l'éclipse à l'endroit où il est. La
différence de l'heure locale et de l'heure de Paris fait connaître la
longitude du lieu par rapport au méridien de Paris (nº 69).

Il faut des lunettes puissantes pour observer nettement, avec précision,
les éclipses des satellites de Jupiter. La méthode des distances
lunaires, expliquée nº 298, est plus commode, plus praticable pour les
marins, et donne des résultats plus exacts.

=358.= VITESSE DE LA LUMIÈRE. L'observation des éclipses des satellites
de Jupiter a encore servi à Roëmer, astronome suédois, pour déterminer
la vitesse avec laquelle la lumière traverse l'espace. Voici comment on
peut arriver à trouver cette vitesse.

[Illustration: page 267, fig. 130]

Considérons le premier satellite, qui pénètre dans le cône d'ombre à
chacune de ses révolutions, au moment où il sort de ce cône en _s_
(_fig._ 430). A partir de cette émersion dont on a noté l'heure, cet
astre fait une révolution autour de Jupiter (dans le sens indiqué par la
flèche), à la fin de laquelle il s'éclipse de nouveau en _s'_, puis sort
du cône en _s_. On note l'heure de cette nouvelle émersion; il s'est
écoulé entre les deux émersions 42h 28m 48s; ce temps doit être la durée
de la révolution qui vient d'avoir lieu (nous le supposerons). La durée
d'une révolution du satellite est toujours la même (lois de Képler); il
devrait donc toujours s'écouler le même temps entre deux observations
d'émersions consécutives. Il n'en est pas ainsi; si on observe une série
de ces éclipses dans un certain ordre, par exemple, à partir d'une
position T' de la terre, voisine de l'opposition de Jupiter, on remarque
que l'intervalle de deux éclipses consécutives croît à mesure que la
terre s'éloigne de la planète, en s'avançant vers l'endroit où elle sera
à la conjonction suivante (en T"). Puis, de la conjonction à
l'opposition, la terre se rapprochant de Jupiter, l'intervalle des
éclipses diminue avec la distance de la terre à la planète. Cet
accroissement peu sensible, quand on compare deux intervalles
consécutifs, devient manifeste quand on considère deux éclipses séparées
par un assez grand nombre de ces intervalles.

Une éclipse observée actuellement est, par exemple, la centième après
celle qui a été observée de la position, T', de la terre; il devrait
s'être écoulé 100 fois 42h 28m 48s depuis l'émersion observée de T'. Il
n'en est pas ainsi: l'intervalle trouvé entre ces deux émersions a une
valeur sensiblement plus grande que celle-là. En résumé si on considère,
en opérant comme nous venons de le dire, l'intervalle compris entre une
émersion qui a été observée à une époque aussi voisine que possible de
l'opposition, en T, et une autre aussi voisine que possible de la
conjonction, en T"[141], on trouve que cet intervalle surpasse d'environ
16m 36s la valeur qu'il devrait avoir, qui est le produit de 42h 28m 36s
par le nombre des éclipses qui ont eu lieu entre les deux observations,
extrêmes dont nous parlons. Si au contraire oh procède de même de la
conjonction, en T", à l'opposition, en T, l'intervalle remarqué est plus
faible qu'il ne devrait l'être de la même quantité, de 16m 36s environ.

[Note 141: Nous disons, _aussi voisin que possible de l'opposition_,
parce qu'il est évident qu'à l'époque de l'opposition, la terre étant en
T, l'observateur ne voit pas le cône d'ombre de Jupiter, qui lui est
caché par la planète; il ne peut alors voir le satellite au moment d'une
émersion. Nous disons de même, aussi _voisine que possible de la
conjonction_, parce qu'à l'époque de la conjonction, quand la terre est
en T", Jupiter et son cône d'ombre sont cachés à l'observateur derrière
le soleil S. Maintenant, comme le retard des émersions varie
proportionnellement avec la distance, on a pu, connaissant ce retard
pour une portion notable du chemin fait par la terre, connaître celui
qui a lieu de l'opposition, (en T) à la conjonction en T".]

Évidemment il n'en serait pas ainsi si nous revoyions chaque fois le
satellite à l'_instant précis_ où il sort du cône d'ombre; l'intervalle
entre deux émersions consécutives, se confondant absolument avec la
durée d'une révolution de l'astre autour de Jupiter, ne varierait pas
plus que cette durée. Mais si la lumière réfléchie par le satellite,
vers la terre, au moment de l'émersion, et qui nous le fait voir, ne
nous parvient pas instantanément, mais _emploie un certain temps_ à
parcourir la distance qui nous sépare de l'astre, l'intervalle entre
deux éclipses doit croître ou décroître avec la distance de la terre à
Jupiter, et l'accroissement du temps doit être proportionnel à
l'augmentation de cette distance; _c'est ce qui a lieu en effet_[142].

[Note 142: Admettons que la lumière ne se transmette pas à nous
instantanément, mais parcoure l'espace avec une certaine vitesse de
grandeur finie. A une certaine époque, une émersion du satellite de
Jupiter a lieu à 1h du matin, par exemple; il faut alors _a_ minutes à
la lumière pour nous arriver de la planète; nous ne verrons l'astre
sorti du cône d'ombre qu'à 1h + _a_(m). Nous observons plus tard une
autre émersion: c'est la centième éclipse, je suppose, après la première
observée. Le moment précis de la dernière émersion est séparé du moment
où a eu lieu la première par la durée de cent révolutions du satellite,
c'est-à-dire par un intervalle de 100 fois 42h 28m 48s; ce qui nous
conduit, par exemple, à 3h du matin du jour de la dernière observation.
Si la terre était restée à la même distance de Jupiter, la lumière
réfléchie par le satellite mettant toujours _a_ minutes à nous parvenir,
le phénomène d'émersion serait observé par nous à 3h + _a_ minutes du
matin. L'intervalle entre les deux époques d'observation serait
précisément le même qu'entre les époques réelles des deux émersions,
c'est-à-dire 42h 28m 48s × 100. De sorte que nous n'apprendrions rien
sur la vitesse de la lumière. Mais si la terre s'est éloignée de Jupiter
de telle sorte qu'il faille à la lumière _b_ minutes pour parcourir ce
surcroît de chemin, c'est-à-dire en tout (_a_ + _b_) minutes pour nous
arriver de Jupiter, la dernière émersion ne doit être observée qu'à 3h +
(_a_ + _b_) minutes du matin; de sorte que l'intervalle entre les deux
observations est 100 fois (42h 28m 48s) + _b_ minutes. Il doit donc y
avoir une différence de _b_ minutes entre l'intervalle des éclipses,
donné par l'observation, et la durée totale des révolutions de l'astre
qui ont eu lieu entre les deux émersions observées.]

L'intervalle de deux éclipses qui ont lieu l'une à l'époque d'une
opposition, quand la terre est en T, l'autre à l'époque de la
conjonction, quand la terre est en T", étant plus grand de 16m 36s qu'il
ne devrait être si la lumière réfléchie par le satellite nous arrivait
instantanément, on conclut de là que 16m 36s composent le temps employé,
par la lumière qui nous vient du satellite, à parcourir _en plus_, lors
de la dernière émersion, la distance TT" qui sépare ces deux positions
de la terre, c'est-à-dire à parcourir le grand axe de l'orbite
terrestre, ou 76000000 lieues (de 4 kilomètres). La lumière, parcourant
76000000 lieues en 16m 36s, parcourt environ 77000 lieues par seconde.

La distance TS de la terre au soleil est la moitié de TT"; la lumière
emploie donc la moitié du 16m 36s, c'est-à-dire 8m 18s à nous venir du
soleil.

CONCLUSION. _La lumière parcourt environ 77000 lieues de 4 kilomètres
par seconde. Celle du soleil nous arrive en 8m 18s._

L'étoile la plus rapprochée étant à une distance de la terre qui
surpasse 206265 fois le rayon de l'orbite terrestre, on en conclut que
sa lumière met à nous parvenir plus de 8m 18s × 206265; ce qui fait plus
de 3 ans. Une étoile cessant d'exister nous la verrions encore 3 ans
après. Et nous ne parlons ici que des étoiles les plus rapprochées de la
terre (V. nº 51).

=359.= SATURNE, qui vient immédiatement après Jupiter dans l'ordre des
distances au soleil, le suit aussi dans l'ordre des grandeurs
décroissantes; c'est un globe 730 fois plus gros que la terre. (Le rayon
de Saturne = 9r,022). Malgré cette grosseur, il ne nous envoie qu'une
lumière pâle et comme plombée; cela tient probablement à sa grande
distance du soleil, qui est d'environ 360 millions de lieues. Saturne
circule sur une orbite inclinée sur l'écliptique de 2° 1/2 environ; sa
révolution sidérale dure 10759 jours. Il tourne sur lui-même autour d'un
axe central incliné de 72° environ sur le plan de l'écliptique; il fait
un tour entier en 10h 1/2 environ. Son aplatissement est de 1/10
environ. La chaleur et la lumière qui y arrivent du soleil y sont
environ 80 fois moindres que sur la terre.

Saturne offre cinq bandes sombres, parallèles à son équateur, à peu près
semblables à celles de Jupiter; plus larges, mais moins bien marquées.

Cette planète se montre à l'œil nu comme une étoile brillante. Son éclat
est cependant bien inférieur à celui de Jupiter; il présente une teinte
terne et comme plombée.

=360.= ANNEAU DE SATURNE (_fig._ 127). Saturne est entouré d'une espèce
d'anneau, large et mince, à peu près plan, sans adhérence avec la
planète, qu'il entoure par le milieu. Cet anneau, que Galilée découvrit
peu après l'invention des lunettes, s'offre à nous sous la forme d'une
ellipse qui s'élargit peu à peu, puis se rétrécit considérablement, et
finit par disparaître, pour reparaître quelque temps après. La partie
antérieure de l'anneau se projette sur la planète; la partie postérieure
nous est cachée par celle-ci; tandis que les deux parties latérales
débordent des deux côtés de manière à former ce qu'on nomme les _anses_
de Saturne.

[Illustration: 271, Fig. 127]

Les divers aspects que nous offre successivement cet anneau sont dus aux
diverses positions relatives qu'occupent Saturne, le soleil et la terre.
Le plan de l'anneau se transporte parallèlement à lui-même avec la
planète en mouvement sur son orbite; l'obliquité de ce plan, par rapport
à la ligne qui va de la terre à la planète, varie donc d'une époque à
une autre. Quand le plan prolongé de l'anneau laisse d'un même côté le
soleil et la terre, nous voyons la face éclairée de l'anneau sous forme
d'une partie d'ellipse plus ou moins rétrécie, suivant que nous la
voyons plus ou moins obliquement.

Si le plan passe par le soleil, en le laissant toujours entre lui et
nous, nous avons devant nous la tranche de l'anneau; on n'en voit alors,
et avec de fortes lunettes, que les deux anses, faisant l'effet de deux
lignes droites lumineuses des deux côtés du disque de Saturne. Enfin, si
le plan prolongé de l'anneau passe entre la terre et le soleil (ce qui
arrive à peu près tous les 15 ans), la face obscure de cet anneau étant
tournée vers nous, nous ne le voyons plus, et Saturne nous offre alors
l'apparence d'un globe isolé comme les autres planètes.

C'est en 1848 que l'anneau a disparu pour la dernière fois; maintenant
il nous montre sa face australe, qui a eu sa plus grande largeur en
1855. Il disparaîtra de nouveau en 1863; puis on verra sa face boréale
sous des angles divers.

DIMENSIONS DE L'ANNEAU. On a pu, dans des circonstances favorables,
mesurer l'angle sous lequel on voit la largeur de l'anneau, et les
distances de ses bords intérieur et extérieur au bord de la planète. En
combinant ces éléments avec la distance de Saturne et l'inclinaison des
diamètres réels, on est arrivé au résultat suivant, relativement aux
dimensions de l'anneau (d'après M. Faye):

_Rayon équatorial de Saturne_ = 64000 kilom. ou 16000 lieues.
_Rayon intérieur de l'anneau_ = 94000 kilom. ou 23500 lieues.
_Rayon extérieur de l'anneau_ = 142000 kilom. ou 35500 lieues[143].

[Note 143: En prenant approximativement 16000, 24000 et 36000, on a pour
représenter ces 3 rayons les nombres simples 1, 1 1/2 et 2 1/4.]

Ainsi la largeur de l'anneau est de 12000 lieues, à peu près les 3/4 du
rayon équatorial de la planète. L'anneau laisse un espace vide de 30000
kilomètres ou 7500 lieues entre Saturne et lui; on peut apercevoir des
étoiles à travers ce vide. Quant à l'épaisseur de l'anneau, on ne la
connaît pas; mais on suppose qu'elle ne dépasse pas 30 lieues.

SUBDIVISION DE L'ANNEAU. En observant l'anneau de Saturne avec des
instruments puissants, on a reconnu que cet anneau n'est pas simple; il
se compose de plusieurs anneaux concentriques dont les lignes de
séparation sont visibles, principalement vers les anses. On a même
aperçu tout récemment un anneau obscur, situé à l'intérieur des autres,
comme on le voit sur la figure. Ces anneaux tournent ensemble dans leur
plan, qui coïncide à peu près avec l'équateur de la planète, achevant
une révolution dans 10h 1/2 environ, c'est-à-dire qu'ils tournent avec
la même vitesse que la planète elle-même.

SATELLITES DE SATURNE. Saturne a 7 _satellites_; mais ceux-ci ne nous
sont pas si utiles que ceux de Jupiter; ils sont si petits et si
éloignés de nous qu'il faut pour les voir des télescopes d'une grande
puissance. Le premier, c'est-à-dire le plus rapproché de la planète, met
22h 37m 1/2 à exécuter sa révolution autour de celle-ci, tandis que le
dernier emploie 7j 7h 53m. Ce dernier est le seul sur lequel on ait pu
constater qu'il tourne sur lui-même dans le même temps qu'il emploie à
tourner autour de la planète.

=361.= URANUS, relégué à l'extrémité de notre système planétaire, n'a
que l'apparence d'une étoile de 6° ou 7° grandeur, rarement visible à
l'œil nu. Cette planète a été découverte par Herschell en 1781. Sa
distance au soleil est 19 fois plus grande que celle de la terre; son
diamètre apparent est d'environ 4"; à la distance du soleil, il serait
de 75"; le rayon d'Uranus = 4r,34. Le plan de son orbite est incliné sur
l'écliptique de 0° 46' 1/2. La durée de sa révolution sidérale est
d'environ 84 ans. La lumière du soleil, qui nous arrive en 8m 18s, met
près de 2h 3/4 à arriver à Uranus. L'intensité de la lumière et celle de
la chaleur doivent y être 400 fois moindres que sur la terre; le soleil
ne doit être vu de cette planète que comme une étoile de 1re grandeur.

Uranus a six _satellites_ découverts par Herschell; ils se meuvent
autour de la planète dans des orbites presque circulaires et
perpendiculaires au plan de l'écliptique; ce qui porte à croire que
l'équateur de la planète a la même inclinaison.

Les satellites d'Uranus sont encore plus difficiles à voir que ceux de
Saturne; deux seulement, le 2e et le 4e, ont été observés avec
précision. Par une exception unique le mouvement de ces satellites
paraît rétrograde, c'est-à-dire a lieu de l'orient vers l'occident.


=362.= NEPTUNE. Cette planète, découverte par M. Leverrier, en 1846 (V.
plus loin, nº 363), n'est pas visible à l'œil nu; vue dans une lunette
d'un faible grossissement, elle fait l'effet d'une étoile de 8e
grandeur. Avec un grossissement plus fort, elle offre des dimensions
sensibles, et se montre sous la forme d'un disque circulaire. Son
diamètre apparent n'est que de 2",7. À la distance du soleil, ce
diamètre apparent serait de 8"; d'où on conclut que le rayon de Neptune
= 4r,72 (_r_ étant le rayon de la terre). Cette planète est 30 fois plus
éloignée du soleil que la terre (à 1100 millions de lieues à peu près).
La chaleur et la lumière n'y doivent être qu'environ la millième partie
de ce qu'elles sont à la surface de la terre.

=363.= CIRCONSTANCES DE LA DÉCOUVERTE DE NEPTUNE. PERTURBATIONS DES
MOUVEMENTS PLANÉTAIRES. Si les planètes n'étaient soumises qu'à
l'attraction du soleil, leurs mouvements seraient absolument conformes
aux lois de Kepler; elles décriraient exactement des ellipses autour du
centre du soleil, comme foyer. Mais, conformément au principe de
gravitation, les planètes s'attirent mutuellement. Le mouvement de
chacun de ces astres ainsi attirés non-seulement par le soleil, mais par
les autres planètes, est un peu plus compliqué que nous ne l'avons
dit[144]. La masse du soleil étant très-grande par rapport à celle des
planètes, son action est prépondérante; de sorte que le mouvement de la
planète diffère très-peu du mouvement elliptique que le soleil seul lui
imprimerait. Les modifications du mouvement elliptique, causées par les
actions mutuelles que les planètes exercent les unes sur les autres,
sont ce qu'on appelle les _perturbations_ des mouvements planétaires.

[Note 144: De même la lune n'est pas seulement attirée par la terre,
elle l'est encore par les autres corps célestes faisant partie de notre
système planétaire, notamment par le soleil; l'attraction de la terre
est prépondérante; cependant l'attraction du soleil est assez forte pour
altérer le mouvement elliptique de la lune; cette attraction est la
cause de la perturbation que nous avons indiquée sous le nom de
_nutation de l'axe de la lune_.]

Lors donc que les astronomes veulent connaître avec précision les
positions successives des planètes par rapport au soleil et à la terre,
c'est-à-dire déterminer exactement le mouvement relatif de ces astres,
ils sont obligés d'avoir égard à cette action mutuelle des planètes les
unes sur les autres. Ils sont ainsi parvenus à rendre compte, avec une
très-grande précision, des mouvements des planètes, tels qu'on les
observe réellement.

Ce résultat, obtenu d'abord pour les planètes anciennement connues, ne
l'a pas été pour Uranus aussitôt après sa découverte. En appliquant au
mouvement de cette planète les méthodes qui avaient réussi pour les
autres, afin de déterminer les perturbations que devaient lui faire
éprouver Saturne et Jupiter (les seules planètes connues qui pouvaient
avoir sur elle une action appréciable), on a trouvé constamment, pendant
quarante ans, le calcul en désaccord croissant avec les observations.
Comme on était sur qu'aucune erreur ne s'était glissée dans ces calculs,
il fallait admettre que ce désaccord était dû à une action perturbatrice
inconnue. M. Bouvard songea le premier à attribuer cette action à une
planète encore inconnue; mais comment trouver cette planète? M.
Leverrier y parvint en renversant le problème ordinaire, qui consiste à
déterminer les perturbations du mouvement d'une planète dues à
l'attraction d'une autre planète de masse et de position connues. Il se
mit à calculer quelles devaient être la masse et la position d'une
planète inconnue pour que son action sur Uranus, combinée avec les
autres influences déjà connues, produisît exactement les perturbations
observées du mouvement de cette planète. Il parvint à résoudre ce
difficile problème. Le 31 août 1846, il annonça à l'Académie des
Sciences que la planète cherchée devait se trouver par 326° 32' de
longitude héliocentrique, au milieu des étoiles de la XXIe heure. Moins
d'un mois après, M. Galle, directeur de l'Observatoire de Berlin, trouva
la planète à la place que lui avait assignée le géomètre français; il
n'y avait pas un degré de différence entre le résultat du calcul et
celui de l'observation. C'est là certainement un résultat admirable,
glorieux pour celui qui l'a trouvé, et qui atteste à la fois
l'exactitude des méthodes astronomiques et la vérité du principe de la
gravitation universelle.

=364.= LOI DE BODE. Il existe entre les distances des principales
planètes au soleil une loi assez remarquable qui permet de retenir assez
aisément ces distances dans leur ordre. Voici en quoi consiste cette loi
qui porte le nom de l'astronome _Bode_, qui l'a publiée en 1778.

Écrivons la suite des nombres:

0          3          6         12         24         48         96

dans laquelle chaque nombre, à partir du troisième, est double du
précédent. A chacun de ces nombres ajoutons 4; nous obtiendrons une
nouvelle série qui est la suite de Bode:

4          7         10         16         28         52        100.

Ces derniers nombres sont sensiblement proportionnels aux distances au
soleil des planètes anciennement connues. En effet, si au lieu de
représenter par 1 la distance de la terre au soleil, nous la
représentons par 10, nous aurons, en multipliant conséquemment par 10
les six premières distances du tableau de la page 236, le résultat
suivant:

Mercure.   Vénus.   La Terre.   Mars.  ...  Jupiter.   Saturne.
  3,9       7,2        10       15,2   ...     52        95,4

Ces nombres sont à peu près ceux, de la suite de Bode, à l'exception du
dernier, pour lequel il y a une différence plus sensible, moins
négligeable. On remarquera de plus que le terme 28 de la série de Bode
n'a pas de correspondant parmi les distances indiquées.

Quand Herschell, en 1781, découvrit Uranus, on continua la suite de
Bode. Le 8e terme de cette suite est 200. Or la distance d'Uranus au
soleil est 191,8, celle de la terre étant 10; ce nombre se rapproche
encore assez de son correspondant 200 pour qu'on regarde la loi comme
continuant à s'appliquer.

Plus tard, on essaya la même vérification pour Neptune; le 9e terme de
la suite de Bode est 396; or la distance de Neptune au soleil est 304
quand celle de la terre est 10. La différence est ici trop grande, et on
ne peut pas dire que la loi s'applique jusqu'à Neptune.

Cette loi de Bode ne se rapporte à aucun fait pratique; elle doit être
considérée comme un moyen simple d'aider la mémoire à retenir les
distances en question.

Quoi qu'il en soit, elle s'applique d'une manière assez satisfaisante
jusqu'à Uranus, sauf une lacune qu'on remarque jusque-là dans la
correspondance; au nombre 28 de la suite de Bode ne correspond aucune
distance de planète au soleil. Cette lacune a été comblée par la
découverte des petites planètes dont nous allons parler. Pour en finir
avec la série de Bode, nous dirons que la moyenne des distances au
soleil de ces petites planètes qui se placent toutes sous ce rapport
entre Mars et Jupiter, est 26, ce qui n'est pas trop éloigné du terme 28
de cette série.

PETITES PLANÈTES.

=365.= On a découvert depuis le commencement de ce siècle un assez grand
nombre de planètes, toutes situées dans la même région du ciel, entre
Mars et Jupiter. On les désigne sous le nom de _petites planètes_, parce
qu'elles sont beaucoup plus petites que les huit dont nous nous sommes
occupé jusqu'à présent; Elles ont l'apparence des étoiles de 8e ou de 9e
grandeur, et par conséquent sont invisibles à l'œil nu; aussi leur
a-t-on encore donné le nom de _planètes télescopiques_.

Découverte par:

_Cérès_,       M. Piazzi,        à Palerme,          1er janv.  1801.

_Pallas_,         Olbers,        à Brême,             28 mars   1802.

_Junon_,          Harding,       à Gœttingue,        1er sept.  1804.

_Vesta_,          Olbers,        à Brême,             29 mars   1807.

_Astrée_,         Hencke,        à Driessen,           8 déc.   1845.

_Hébé_,           Hencke,        à Driessen,         1er juill. 1847.

_Iris_,           Hind,          à Londres,           13 août   1847.

_Flore_,          Hind,          à Londres,           18 oct.   1847.

_Métis_,          Grahan,        à Maskré (Irlande),  26 avril  1848.

_Hygie_,          de Gasparis,   à Naples,            14 avril  1849.

_Parthénope_,     de Gasparis,   à Naples,            11 mai    1850.

_Victoria_,       Hind,          à Londres,           13 sept.  1850.

_Égérie_,         de Gasparis,   à Naples,            29 juill. 1851.

_Irène_,          Hind,          à Londres,           19 mai    1851.

_Eunomia_,        de Gasparis,   à Naples,            29 juill. 1851.

_Psyché_,         de Gasparis,   à Naples,            17 mars   1852.

_Thétis_,         Luther,        (près Dusseldorf),   17 avril  1852.

_Melpomène_,      Hind,          à Londres,           24 juin   1852.

_Fortuna_,        Hind,          à Londres,           22 août   1852.

_Massalia_,     ¦ de Gasparis,   à Naples,            19 sept.  1852.
                ¦ Chacornac,     à Marseille,         20 sept.  1852.

_Lutétia_,        Goldsmith,     à Paris,             15 nov.   1852.

_Calliope,_       Hind,          à Londres,           16 nov.   1852.

_Thalie_,         Hind,          à Londres,           15 déc.   1852.

_Phocéa_,         Chacornac,     à Marseille,          6 avril  1853.

_Thémis_,         de Gasparis,   à Naples,             6 avril  1853.

_Proserpine_,     Luther,        (près Dusseldorf),    5 mai    1853.

_Euterpe_,        Hind,          à Londres,            8 nov.   1853.

_Amphitrite_,     Albert Marth,  à Londres,            4 févr.  1854.

_Bellone_,        Luther,        à Blick, près Dusseldorf.

_Urania_,         Hind,          à Londres,           22 juill. 1854.

_Euphrosine_,     Ferguson,      à Washington,       1er sept.  1854.

_Pomone_,         Goldsmith,     à Paris,             28 oct.   1854.

_Polymnie_,       Chacornac,     à Paris,             28 oct.   1854.

A ces planètes il faut ajouter dans l'ordre des découvertes: _Circé_,
_Leucothoé_, _Atalunte_, _Fides_, découvertes en 1855 par MM. Luther et
Chacornac; _Léda_, _Lætitia_, _Harmonia_, _Daphné_, _Isis_, découvertes
en 1856; _Ariane_, _Nysa_, _Eugénie_, _Hestia_,....., _Aglaïa_, _Boris_,
_Palès_, _Virginie_, _Nemausa_, découvertes en 1857; _Europa_,
_Calypso_, _Alexandra_,....., découvertes en 1858.

Comme on le voit, le plus grand nombre de ces petites planètes ont été
découvertes dans ces dernières années. M. Lescarbaut, médecin à Orgères,
en Normandie, en a encore découvert récemment une nouvelle
très-rapprochée du soleil.

Nous n'entrerons pas dans de plus grands détails au sujet de ces
planètes. Nous indiquons les éléments astronomiques d'un certain nombre
d'entre elles dans un tableau placé à la fin de ce chapitre. V. pour les
autres le dernier Annuaire du bureau des longitudes.

=366.= SYSTÈME PLANÉTAIRE. _Concordance des mouvements des planètes._
Les planètes qui tournent autour du soleil forment avec cet astre un
système complet qui doit être particulièrement distingué dans l'espace,
surtout par nous dont le globe fait partie de ce système. Les planètes
se meuvent toutes autour du soleil, en restant à peu près dans un même
plan passant par le centre de cet astre; excepté quelques petites
planètes dont les orbites font des angles assez grands avec le plan de
l'écliptique (_V._ le tableau ci-après). Tous ces mouvements des
planètes autour du soleil s'effectuent dans le même sens, d'Occident en
Orient. Les planètes principales sont accompagnées de satellites, qui, à
l'exception de ceux d'Uranus, se meuvent aussi dans des plans assez peu
inclinés à l'écliptique, et dans le même sens que les planètes autour du
soleil, c'est-à-dire d'Occident en Orient. Le soleil tourne sur lui-même
_dans le même sens_, autour d'un axe qui est presque perpendiculaire au
plan de l'écliptique. Enfin les planètes dont on a pu constater le
mouvement de rotation, tournent aussi d'Occident en Orient. La lune
tourne dans le même sens autour de la terre.

Voilà un concours de circonstances très-remarquable que nous nous
contenterons de signaler au lecteur sans indiquer les inductions qu'on
en tire; cela nous mènerait trop loin.

Nous faisons suivre tous ces détails sur les planètes et leurs
satellites de tableaux renfermant les éléments du système solaire; on y
trouvera réunis tous les nombres disséminés dans ce chapitre. Ces
tableaux sont empruntés à l'ouvrage de M. Faye.

Planètes.

NOMS.    S   RÉVOLUTION SIDÉRALE  DISTANCE   EXCENTRICITÉ,  INCLINAISON
         I   -------------------  moyenne    la distance    de l'orbite
         G    Nombre    En jours  du soleil. moyenne        sur le plan
         N    rond      moyens.              étant 1.       de
         E    d'années.                                     l'écliptique.


Mercure  ☿      »       87,969   0,38710     0,20562      7°  0' 13"
Vénus    ♀       »      224,701   0,72333     0,00682      3  23  31
La Terre ♁      1      365,256   1,00000     0,01678      »   »   »
Mars     ♂       2      686,980   1,52369     0,09325      1  51   6
Petites planètes.
Jupiter  ♃      12     4332,485   5,20277     0,04822      1  18  42
Saturne  ♄      29    10759,220   9,53885     0,05603      2  29  30
Uranus   ♅      84    30686,821  19,18239     0,04660      0  46  29
Neptune  ♆     165    60127      30,04        0,009        1  47

         _Petites planètes situées entre Mars et Jupiter_.
Flore             3     1193       2,202       0,157        5° 53'
Melpomène         3     1270       2,296       0,216       10  11
Victoria          4     1303       2,335       0,218        8  23
Euterpe           4     1317       2,348       0,171        1  36
Vesta             4     1326       2,362       0,089        7   8
Massilia          4     1338       2,376       0,134        0  41
Iris              4     1346       2,385       0,232        5  28
Métis             4     1347       2,387       0,183        5  36
Phocéa            4     1350       2,391       0,246       21  43
Hébé              4     1380       2,425       0,202       14  47
Fortuna           4     1397       2,446       0,156        1  33
Parthénope        4     1399       2,448       0,098        4  37
Thétis            4     1442       2,498       0,137        5  36
Amphitrite        4     1500       2,564       0,080        6   6
Astrée            4     1511       2,577       0,189        5  19
Irène             4     1515       2,582       0,170        9   6
Égérie            4     1516       2,582       0,086       16  33
Lutetia           4     1542       2,612       0,115        3   5
Thalie            4     1571       2,645       0,240       10  13
Eunomie           4     1576       2,651       0,189       11  44
Proserpine        4     1578       2,653       0,086        3  36
Junon             4     1593       2,669       0,256       13   3
Cérès             5     1681       2,767       0,076       10  37
Pallas            5     1686       2,723       0,239       34  37
Bellone           5     1724       2,814       0,175       10   5
Calliope          5     1815       2,912       0,104       13  45
Psyché            5     1828       2,926       0,136        3   4
Hygie             6     2043       3,151       0,101        3  47
Thémis            6     2047       3,160       0,123        0  50


Satellites.


   NOMS.                    DURÉE           DISTANCE,         MASSE,
                             de             le rayon          celle
                         la révolution.   de la planète    de la planète
                           (jours)           étant 1.         étant 1.

Satellite       ¦
                ¦ la Lune.    27,32166         60,2729         0,01234
de la Terre.    ¦

                ¦ 1er          1,7691           6,0485         0,000017
Satellites      ¦ 2e           3,5512           9,6235         0,000023
de Jupiter.     ¦ 3e           7,1546          15,3502         0,000088
                ¦ 4e           6,6888          26,9983         0,000043

                ¦ 1er          0,943            3,35
                ¦ 2e           1,370            4,30
                ¦ 3e           1,888            5,28
Satellites      ¦ 4e           2,739            6,82
de Saturne.     ¦ 5e           4,517            9,52
                ¦ 6e          15,945           22,08
                ¦ 7e          22,945           27,78
                ¦ 8e          79,330           64,36

                ¦ 1er          5,893           13,12
                ¦ 2e           8,707           17,02
Satellites[145] ¦ 3e          10,961           19,85
d'Uranus.       ¦ 4e          13,456           22,75
                ¦ 5e          38,075           45,51
                ¦ 6e         107,694           91,01

Satellite       ¦
                ¦ 1er          5,880            8,9
de Neptune.     ¦

[Note 145: Les satellites d'Uranus ont été découverts par Herschel; le
2e et le 4e ont seuls été réobservés par d'autres astronomes. Ils ne
peuvent être vus qu'avec l'aide des plus puissants télescopes.]

Éléments physiques du système solaire.

NOMS         DURÉE       APLATISSEMENT    DIAMÈTRE    VOLUME    MASSE
             de la                        ---------------------------
             rotation                     Ceux de la terre étant pris
             en temps                             pour unités.
             moyen.
             j. h. m. s.
-------------------------------------------------------------------------
Soleil       25 12 «  «    insensible     112        1415000    359600
Mercure         24  5 «    insensible       0,39       1/17       1/81
Vénus           23 21 21   insensible       0,98         1         1
Terre           23 56  4     1/299          1            1         1
Mars            23 37 22       «            0,52       1/7        1/8
Vesta           «  «  «    insensible       0,004    1/17700       «
Pallas          «  «  «        «            0,0084   1/1660        «
Jupiter          9 55 26     1/16          11,64      1491        342
Saturne         10 29 17     1/10           9,02       772        103
Uranus          «  «  «      1/9            4,34        87         87
Neptune         «  «  «        «            4,8         77         77

Lune         La durée de   insensible       0,2724    1/50        1/81
             rotation est
             égale à celle
Satellites   de la révolution
de Jupiter   autour de la
1er          planète           «            0,31      1/32       1/170
2º           centrale          «            0,21      1/47       1/128
3º                             «            0,45      1/11       1/33
4º                             «            0,39      1/17       1/70

2º partie

NOMS       DENSITÉ MOYENNE          PESANTEUR        INTENSITÉ
          rapportée à celle           à la        de la lumiere et
         ---------------------       surface       de la chaleur
         de la terre  de l'eau                        solaire
--------------------------------------------------------------------

Soleil       0,26       1,4            29                «
Mercure      1,23       6,8            1/2              6,7
Vénus        0,91       5,1             1               1,9
Terre        1          5,5             1               1
Mars         0,97       5,4            1/2              0,4
Vesta         «          «              «               0,2
Pallas        «          «              «               0,2
Jupiter      0,23       1,3           2 1/2             0,04
Saturne      0,13       0,7             1               0,01
Uranus       0,17       0,9            1/3              0,003
Neptune      0,32       1,8           1 1/3             0,001

Lune         0,62       3,4            1/6              1

Satellites
de Jupiter
1er          0,20       1,1            1/15             0,04
2º           0,37       2,0            1/10             0,04
3º           0,23       1,3            1/7              0,04
4º           0,25       1,4            1/19             0,04

DES COMÈTES.


=367.= Les comètes sont des astres qui, de même que les planètes, ont un
mouvement propre au milieu des constellations. Ce mouvement propre des
comètes s'étudie comme les autres, et si on le rapporte au soleil, on
trouve qu'il est _soumis aux lois de Képler_ comme celui des planètes.

[Illustration: 282, Fig. 132]

=368.= Cependant les comètes se distinguent des planètes sous plusieurs
rapports: d'abord par l'aspect qui n'est pas le même (_V._ nº 370), puis
par les circonstances de leurs mouvements. Tandis que les orbites des
planètes sont des ellipses presque circulaires, celles des comètes sont
des ellipses excessivement allongées, dégénérant presque en paraboles
(_fig._ 132), dont le soleil occupe un foyer. Tandis que les plans des
orbites planétaires sont en général peu inclinés sur le plan de
l'écliptique, celles des comètes admettent toutes les inclinaisons
possibles. Enfin, tandis que les mouvements de toutes les planètes sont
_directs_, les mouvements de la moitié à peu près des comètes observées
sont rétrogrades.

=369.= Vu l'extrême allongement des orbites des comètes, ces astres s'en
vont à de très-grandes distances du soleil, et par conséquent de notre
globe. C'est pourquoi nous les perdons de vue dans la plus grande partie
de leur révolution, nous ne les voyons que lorsqu'elles sont le plus
rapprochées du soleil. Comme à cette distance minimum leur vitesse
angulaire est la plus grande (en vertu de la loi des aires), elles
passent assez rapidement à portée de notre vue, et en général nous ne
les voyons pas longtemps comparativement aux planètes.

=370.= ASPECT DES COMÈTES; NOYAU, CHEVELURE, QUEUE. Une comète, consiste
habituellement en un point plus ou moins brillant, environné d'une
nébulosité qui s'étend sous forme de traînée lumineuse dans une
direction particulière (_fig._ 131). Le point brillant est le _noyau_ de
la comète; la traînée lumineuse qui accompagne ce noyau, de l'autre côté
de la comète par rapport au soleil, se nomme la _queue_; la nébulosité
qui environne la comète, abstraction faite de la queue, se nomme la
_chevelure_. On donne aussi le nom de _tête_ de la comète à l'ensemble
du noyau et de la chevelure.

[Illustration: 283, Fig. 131]

Les comètes ne se présentent pas toutes sous la forme que nous venons
d'indiquer; il y en a qui n'ont pas de queue, et qui alors ressemblent à
des planètes; il y en a qui ont l'apparence de nébulosités, sans noyaux.
Il y en a qui ont un noyau et une chevelure sans queue; enfin on en a vu
qui avaient au contraire plusieurs queues disposées en éventail.

=371.= Les queues des comètes prennent les formes les plus variées; les
unes sont droites, d'autres sont recourbées; les unes ont partout la
même largeur, d'autres s'épanouissent en éventail. On a vu des comètes
ayant plusieurs queues divergentes partant toutes du noyau. Ces queues
atteignent parfois des longueurs immenses; la queue de la comète de 1680
couvrit une étendue du ciel d'environ 70°, et Newton a calculé qu'elle
avait à peu près 17500000 myriamètres de longueur. La queue de la comète
de 1779 en avait 6237000, et celle de la fameuse comète de 1811 plus de
14000000. La queue suit ordinairement le prolongement du rayon qui va du
soleil à la comète; quelquefois elle dévie de cette direction.

=372.= PETITESSE DE LA MASSE DES COMÈTES. La densité dès comètes (leur
masse sous l'unité de volume) est excessivement faible; leur matière est
disséminée à un point dont aucune substance terrestre ne peut donner
l'idée. La plus légère fumée, un brouillard sont incomparablement plus
denses; car ils affaiblissent et éteignent toujours en partie les rayons
de la lumière qui les traversent; quelques centaines ou quelques
milliers de mètres d'épaisseur transforment la brume la plus légère en
un voile opaque. Mais une comète dont le volume énorme est plutôt
comparable à celui du soleil qu'à ceux des planètes, laisse passer la
lumière; on voit briller les étoiles, comme à l'ordinaire, à travers des
épaisseurs de matière cométaire de plusieurs milliers de lieues. La
masse des comètes sous l'unité de volume est donc excessivement faible,
comme nous l'avons dit tout d'abord. On voit par là combien peu les
effets mécaniques du choc d'une comète contre la terre ou toute autre
planète sont à craindre. La comète de 1770, qui passa auprès de Jupiter
et au milieu de ses satellites, n'exerça aucun effet appréciable; mais
il paraît que l'effet de ce voisinage sur la comète a été fort sensible;
elle a été grandement détournée de son orbite. On aurait dû, d'après
Lexell, la revoir 5 ans après, et depuis on ne l'a plus revue. Ce fait
prouve bien la petitesse relative de la masse des comètes.

Néanmoins, la matière des comètes existe; elle obéit aux lois de la
gravitation; elle est plus dense dans la partie qu'on appelle noyau;
aussi c'est le centre du noyau qu'on considère comme le point principal;
c'est le point dont on étudie le mouvement.

=373.= NATURE DES ORBITES. Nous avons dit que les orbites des comètes
peuvent être sensiblement considérées comme des paraboles dont le centre
du soleil serait le foyer commun (_fig._ 132). Si une comète revient,
son orbite ne doit plus être considérée comme dégénérant en parabole (nº
374).

=374.= COMÈTES PÉRIODIQUES. Il y a, en effet; des comètes qui reviennent
en vue de la terre; ces comètes, qui ont été ainsi vues plusieurs fois,
se nomment _périodiques_; car leurs retours ont lieu à des intervalles
égaux qu'on peut déterminer par le calcul et vérifier par une
observation subséquente, quand une fois on a soupçonné la périodicité.

Nous disons soupçonné; car on ne reconnaît pas qu'une comète est de
celles qui ont déjà été vues à sa forme et à son apparence; celles-ci
sont trop vagues pour qu'on puisse se décider d'après elles[146]. À
chaque comète nouvelle les astronomes s'empressent de calculer les
éléments de l'orbite, et de les comparer à ceux des comètes antérieures.
S'il se trouve qu'une de celles-ci a suivi le même chemin, les deux
comètes ne font très-probablement qu'un seul et même astre. En effet, eu
égard à l'immensité des espaces dans lesquels se meuvent les comètes
autour du soleil, il est peu probable que deux comètes suivent
exactement le même chemin. D'ailleurs avec tous les éléments que l'on
possède, y compris l'intervalle des deux apparitions que l'on compare,
on peut prédire une nouvelle apparition pour une époque précise, et si
cette prédiction se vérifie, on classe la comète au nombre des comètes
périodiques. Les orbites des comètes périodiques doivent être des
ellipses.

[Note 146: L'aspect d'une comète est tout à fait variable; à quelques
jours d'intervalle seulement, une comète est toute différente de ce
qu'elle était d'abord; il est donc absolument impossible de tirer la
moindre induction plausible de ce que deux comètes observées à des
époques différentes ont on n'ont pas le même aspect.]

=375.= COMÈTE DE HALLEY. Halley, astronome anglais du XVIIe siècle,
calcula d'après les méthodes de Newton les orbites d'un grand nombre de
comètes dont on avait conservé les observations. Il fut frappé des
analogies qui existaient entre des comètes observées en 1531, 1607 et
1682. L'intervalle de ces observations successives étant 75 ou 76 ans,
il se hasarda à prédire une nouvelle apparition pour la fin de 1758 ou
le commencement de l'année 1759; l'événement vérifia sa prédiction.
Cette comète, dite de Halley, devait reparaître vers 1834 ou 1835; on
l'a revue en effet en 1835; c'est donc décidément une comète périodique.

=376.= COMÈTE D'ENKE. C'est une comète périodique qui revient tous les 3
ans 1/2 environ, tous les 1200 jours: aussi l'appelle-t-on la comète des
1200 jours. Elle fut découverte par M. Pons, à Marseille, en 1818. M.
Enke fut celui qui en calcula tous les éléments et en constata la
périodicité.

=377.= COMÈTE DE BIÉLA. La troisième planète périodique fut découverte
le 27 février 1826, à Johannisberg, par M. Biéla, capitaine autrichien.
La durée de sa révolution est de 6 ans 3/4; elle a été observée en 1846
et en 1852.

SON DÉDOUBLEMENT. La comète de Biéla, qui n'a pas de noyau, a présenté
un singulier phénomène à son apparition en 1846: elle s'est dédoublée.
C'est-à-dire qu'on a vu deux comètes semblables, très-voisines l'une de
l'autre, sans communication apparente, et décrivant sensiblement
l'orbite assignée à la planète primitive. Le dédoublement a persisté à
l'apparition de 1852; on en ignore la cause.

L'orbite de la comète de Biéla coupe le plan de l'écliptique à peu près
à la distance qui nous sépare du soleil. Si la terre s'était trouvée en
1832 au point de rencontre des deux orbites, en même temps que la
comète, il y aurait eu collision; mais la terre était alors assez
éloignée de ce point. Depuis cette époque les perturbations du mouvement
de la comète ont fait disparaître toutes chances de rencontre.

À ce sujet nous remarquerons que la masse des comètes est tellement
faible, qu'une pareille collision n'est pas à craindre. Si la terre
rencontrait une comète, elle la traverserait probablement sans s'en
apercevoir, du moins quant aux effets mécaniques (nº 372).

=378.= COMÈTE DE FAYE. La quatrième comète périodique a été observée par
M. Faye, à Paris, le 22 novembre 1843. La durée de sa révolution est à
peu près 7 ans 1/2.

Dans ces derniers temps on a trouvé plusieurs autres comètes pour
lesquelles les mêmes circonstances (la forme des orbites) font
soupçonner la périodicité. Mais ces comètes ne devront être classées
définitivement parmi les comètes périodiques que lorsqu'on les aura vues
revenir au moins une fois à leur périhélie après avoir fait une
révolution complète autour du soleil.

PHÉNOMÈNE DES MARÉES.

=379.= DESCRIPTION DU PHÉNOMÈNE. _Flux et reflux_; _haute et basse mer_.
Abstraction faite des ondulations accidentelles plus ou moins fortes que
l'action des vents produit à sa surface, la mer n'est jamais
complètement immobile; animée d'un mouvement continu et périodique, elle
s'élève et s'abaisse alternativement; la durée d'une de ces oscillations
est de 12 heures 1/2 environ. Pendant la première moitié de cette
oscillation, la mer monte continuellement à partir d'une certaine
hauteur minimum; en montant elle s'avance vers ses rivages qu'elle tend
à envahir, refoulant l'eau des fleuves à leurs embouchures; c'est le
_flux_ ou le _flot_. Parvenue à une certaine hauteur maximum, la mer
cesse de monter; on dit alors qu'elle est _haute_ ou _pleine_. À partir
de là, elle se met à descendre durant 6 heures 1/4; en descendant, elle
se retire des rivages jusqu'à une assez grande distance; c'est le
_reflux_. Arrivée ainsi à un certain niveau minimum, la mer cesse de
descendre; on dit alors qu'elle est _basse_. Puis elle recommence à
monter.

PÉRIODE DES MARÉES. Nous avons indiqué approximativement la période des
marées; pour être plus exact, nous dirons: la période des marées,
c'est-à-dire l'intervalle de deux hautes mers consécutives est de 12h
25m 44s. Le moment de la basse mer divise cette durée en deux parties
inégales; à Brest, par exemple, la mer met 16 minutes de plus à monter
qu'à descendre; au Havre, la différence est de 2h 8m. La double période
des marées, comprenant deux hautes mers et deux basses mers, est
précisément égale au temps qui sépare deux retours consécutifs de la
lune au méridien supérieur.

=380.= VARIATIONS DE LA HAUTEUR DES MARÉES. L'amplitude de ces
oscillations de la mer varie avec les époques pour le même lieu, et sa
valeur moyenne change quand on passe d'un lieu à un autre. La hauteur de
la pleine mer varie chaque jour en un lieu donné; elle est la plus
grande à l'époque des syzygies, et la plus petite à l'époque des
quadratures. Mais la plus grande hauteur n'a pas lieu précisément au
moment d'une syzygie; elle n'a lieu qu'environ 36 heures après; c'est
aussi 36 heures après une quadrature que se produit la marée la plus
basse.

Plus la mer s'élève lorsqu'elle est pleine, plus elle descend dans la
basse mer qui suit. On nomme _marée totale_ la demi-somme de deux
pleines mers consécutives au-dessus de la basse mer intermédiaire; La
marée totale atteint en moyenne, à Brest, 6mèt.,2490 dans les syzygies,
et 3m,0990 seulement dans les quadratures.

_La grandeur de la marée totale varie avec la distance de la lune à la
terre_; elle augmente quand la lune se rapproche, diminue quand la lune
s'éloigne. La variation de la distance de la lune à la terre au-dessus
et au-dessous de sa valeur moyenne est, comme on l'a vu, d'environ 1/15
de cette valeur moyenne; la variation correspondante de la marée totale,
dans les syzygies, est d'environ 3/26 de sa valeur moyenne. En valeur
absolue, cette variation est à Brest d'environ 0m,883; de sorte que
l'effet du changement de distance de la lune sur les marées totales est
dans ce port de 1m,766.

_La variation de la distance du soleil à la terre exerce aussi une
certaine influence sur la hauteur des marées_; mais elle est bien moins
sensible. Toutes choses égalés d'ailleurs, il résulte de cette variation
que les marées des syzygies sont plus grandes, et celles des quadratures
plus petites en hiver qu'en été. (On sait qu'en hiver le soleil est plus
près de nous qu'en été).

_Les déclinaisons du soleil et de la lune ont aussi de l'influence sur
les marées._ Les marées des syzygies sont d'autant plus fortes, et
celles des quadratures d'autant plus faibles, que la lune et le soleil
sont plus voisins de l'équateur. A Brest, la hauteur de la marée totale,
aux équinoxes, est plus forte qu'aux solstices, de 0m,75 environ; la
marée totale des quadratures est plus petite de la même quantité dans
les mêmes circonstances.

=381.= ÉTABLISSEMENT DU PORT. Aux équinoxes, quand la lune, nouvelle ou
pleine, se trouve à sa moyenne distance de la terre, la pleine mer
n'arrive pas précisément au moment du passage de l'astre au méridien;
elle suit le moment du midi vrai ou de minuit d'un intervalle de temps
qui varie d'un port à un autre, mais qui est constant pour le même port.
Le retard de la pleine mer des syzygies sur le midi vrai ou le minuit, à
l'époque des équinoxes, en un lieu donné, est ce qu'on nomme
l'_établissement du port_. L'établissement du port sert à déterminer les
heures des marées relativement aux phases de la lune.

Nous indiquons dans le tableau suivant la valeur de l'_établissement_
pour un certain nombre de ports de l'Océan et de la Manche. Nous y
joignons l'indication de la hauteur moyenne des marées des syzygies pour
chaque port, afin qu'on voie comment cette hauteur varie avec la
disposition des lieux et la configuration des côtes.

NOMS DES PORTS.                         ÉTABLISSEMENT      HAUTEUR
                                           du port.        moyenne
                                                         de la marée
                                                        aux syzygies.

Bayonne (embouchure de l'Adour)           3h 30m            2m,80

Royan (embouchure de la Gironde)          4  1              4,70

Saint-Nazaire (embouchure de la Loire)    3 45              5,36

Lorient                                   3 30              4,48

Brest                                     3 45              6,25

Saint-Malo                                6  0             11,36

Granville                                 6 30             12,10

Cherbourg                                 7 45              1,64

Le Havre (embouchure de la Seine)         9 15              1,14

Dieppe                                   10 30              1,80

Boulogne                                 10 40              7,92

Calais                                   11 45              6,24

Dunkerque                                11 45              5,36

=382.= RETARD JOURNALIER DES MARÉES. Nous avons dit que la double
période du phénomène des marées, correspondant à une révolution diurne
de la lune, est de 24h 50m 28s (temps solaire moyen). Il résulte de là
que l'heure de la pleine mer doit retarder chaque jour de 50m 28s. Ce
n'est là qu'une moyenne; ce _retard journalier_ de la pleine mer varie
avec les phases de la lune; il est de 39m seulement aux syzygies, et de
75m vers les quadratures.

INFLUENCE DE L'ÉTENDUE DE LA MER. Les marées ne sont sensibles et
considérables que dans les vastes mers, comme les deux océans et les
golfes qu'ils forment. Mais dans les petites mers, intérieures ou à peu
près intérieures, comme la mer Noire et la mer Caspienne, il n'y a pas
de marées. Dans la Méditerranée elle-même, les marées sont fort peu
sensibles.

=383.= CAUSES DES MARÉES. Ce sont les actions combinées de la lune et du
soleil sur les eaux de la mer qui produisent le phénomène des marées.
L'action de la lune est _prépondérante_; c'est ce qui fait qu'il y a une
liaison intime entre les circonstances du phénomène des marées et celles
du mouvement de la lune autour de la terre. Nous allons entrer dans
quelques développements sur ces causes des marées.

=384.= CAUSES DU PHÉNOMÈNE DES MARÉES. Pour nous rendre compte de ces
causes, nous pouvons sans inconvénient considérer la terre comme un
noyau solide sphérique entièrement recouvert par les eaux de la mer.
Celles-ci obéissant à la seule attraction du noyau solide, c'est-à-dire
à la pesanteur terrestre, doivent se disposer autour de ce noyau de
manière que leur surface soit exactement sphérique.

[Illustration: 290, Fig. 133]

Tenons compte maintenant de l'attraction de la lune. Soient T et L les
centres de la terre et de la lune. La figure représente une section du
noyau solide et de son enveloppe liquide par un plan mené par la droite
TL. En vertu du principe de la gravitation universelle (nº 323), la lune
attire toutes les molécules du noyau solide comme si la masse était
ramassée au centre, c'est-à-dire avec une intensité _fm_/_d_² (_f_ est
l'attraction de l'unité de massé à l'unité de distance, _m_ la masse de
la molécule, et la distance TL). La molécule solide _a_ se meut comme si
elle était attirée par cette force _fm_/_d_². La molécule liquide A, qui
est _libre_, est attirée par cette force _fm_/(_d_-_r_)², qui correspond
à sa distance LA = _d — r_ du centre de la lune. Cette force _fm /
(d-r)²_ plus grande que _fm / d²_ peut être considérée comme la somme de
deux forces _fm / d²_, _fm / (d-r)²-fm / d²_ agissant toutes deux dans
le sens AL. La force _fm / d²_ agissant à la fois sur la molécule solide
_a_ et sur la molécule liquide A les fait se mouvoir avec la même
vitesse, et s'il n'y avait que cette force, les molécules _a_ et A se
mouvant avec la même vitesse conserveraient leurs positions relatives.
L'eau A ne s'écarterait pas du fond _a_. Mais il faut tenir compte de
l'autre force _fm / (d-r)²-fm / d²_ qui, n'agissant que sur A, tend à
l'écarter du noyau solide dans le sens AL. Mais cette molécule A est en
même temps sollicitée dans le sens contraire AT par la pesanteur qui est
plus grande que la force _fm / (d-r)²-fm / d²_. Celle-ci a donc pour
effet de diminuer la pesanteur de sa propre valeur.

Si nous considérons de même toutes les molécules liquides de l'arc AC et
de l'arc AC', nous arriverons pour chacun à la même conclusion. L'effet
de l'attraction lunaire se réduit à une diminution de l'effet de la
pesanteur terrestre sur là molécule. Mais cette diminution de la
pesanteur est de plus en plus petite à mesure qu'on s'avance de A vers C
ou de A vers C'; car ces molécules sont de plus en plus éloignées de la
lune, dont l'action est moindre, et l'attraction de la lune au lieu
d'être directement opposée à la pesanteur, fait avec la direction de
celle-ci des angles de plus en plus grands. En résumé, l'effet de
l'attraction lunaire sur les molécules du demi-cercle liquide, est de
diminuer inégalement les effets de la pesanteur. Celle-ci agit sur ces
molécules avec une intensité qui va en diminuant de A vers C et de A
vers C'.

La même chose se passe sur la demi-circonférence CBC'. La molécule _b_
du noyau solide tend à se mouvoir vers la lune comme si elle était
sollicitée par une force égale à _fm / d²_. La molécule liquide B est
sollicitée dans le même sens par une attraction égale à

_fm_/(_d_ + _r_)²

plus petite que

_fm_/_d_².

Mais cette attraction peut être considérée comme la différence de deux
forces, l'une égale à

_fm_/_d_²

agissant dans le sens BL, l'autre égale à

_fm_/_d_² - _fm_/(_d_ + _r_)²


qui agit en sens contraire. La force

_fm_/_d_²

qui agit à la fois sur les molécules _b_ et B dans ce même sens leur
imprime des vitesses égales et ne peut changer la distance qui les
sépare. Cette distance ne peut donc être altérée que par la seconde
force

_fm_/_d_² - _fm_/(_d_ + _r_)²,

qui agit dans le sens de TB prolongée, c'est-à-dire en sens contraire de
la pesanteur. Cette force tend donc à diminuer l'action de la pesanteur
sur la molécule liquide B. Si on considère de même successivement les
molécules du quadrant BC et celles du quadrant BC', on arrive à la même
conclusion. L'attraction de la lune sur ces molécules a pour effet de
diminuer l'effet de la pesanteur; mais elle diminue la pesanteur de
quantités de plus en plus petites à mesure que l'on s'avance de B vers C
ou de B vers C', par les raisons indiquées à propos des quadrants
liquides AC et AC'.

En définitive l'anneau liquide ACBC' est composé de molécules
sollicitées par la pesanteur (force centrale) diminuée par des forces
contraires (forces centrifuges), qui vont en diminuant de A vers C et
vers C', de B vers C et vers C'. Cet anneau liquide peut être comparé à
un anneau d'acier qu'on fait tourner autour d'un axe pour démontrer par
expérience les effets de la force centrifuge. Les molécules de cet
anneau sont aussi sollicitées par des forces centrifuges inégales qui
diminuent de l'équateur vers chaque pôle (extrémité de l'axe). Les deux
anneaux sont exactement dans les mêmes conditions. Or l'anneau d'acier
s'allonge vers les points où la force centrifuge est la plus grande, et
s'aplatit vers les points où cette force est nulle. L'anneau liquide
doit donc s'allonger vers A et vers B et s'aplatir vers C et vers C'.
Mais en A et en B l'anneau s'allonge, l'eau s'éloigne du noyau solide,
c'est-à-dire du fond; elle monte, il y a _marée haute_. En C et en C' où
l'anneau s'aplatit, la surface de l'eau se rapproche du noyau solide,
c'est-à-dire du fond, la mer baisse; elle descend, il y a _basse mer_.

Si la lune restait en place, l'effet serait permanent; la mer serait
toujours haute en A et en B, basse en C et C', moyenne au point
intermédiaire. Mais la lune fait le tour de la terre en C et en C' dans
24h-1/2. De là les variations de niveau. La marée se déplace
progressivement; le flot suit la marche de la lune.

=385.= VALEUR DE LA FORCE QUI SOULÈVE LA MER. Nous avons vu que la force
qui fait monter la mer en A est

_fm_/(_d_ - _r_)² - _fm_/_d_².

Or _fm_/(_d_ - _r_)² - _fm_/_d_² = _fm_[_d_² - (_d_ - _r_)²]/_d_²(_d_ - _r_)²
 = _fm_(2_dr_ - _r_²)/_d_²(_d_ - _r_)²

on sait qu'en moyenne _d_ = 60_r_ ou _r_ = 1/60 _d_; on peut donc, sans
trop grande erreur, négliger r² vis-à-vis de 2_dr_ au numérateur, et _r_
vis-à-vis de _d_ au dénominateur (d'autant plus que les effets de cette
modification se compensent en partie); en agissant ainsi on trouve, par
approximation, que la force en question a pour expression

2_fmdr_/_d_⁴ = 2_fmr_/_d_³.

De même en B, nous avons la force

_fm_/_d_² - _fm_/(_d_ + _r_)² = _fm_[(_d_ + _r_)² - _d_²]/_d_²(_d_ + _r_)²
 = _fm_(2_dr_ + _r_²)/_d_²(_d_ + _r_)²

qui, d'après les mêmes considérations, peut être exprimée
très-approximativement par le même nombre

2_fmr_/_d_³.

_La force qui soulève la mer en A et en B est proportionnelle à la
masse_ m _de la lune; et varie en raison inverse du cube de la distance
de cet astre à la terre_.

=386.= EFFETS DE LA ROTATION DE LA TERRE SUR ELLE-MÊME ET DU MOUVEMENT
DE TRANSLATION DE LA LUNE AUTOUR DE LA TERRE.

Nous avons supposé la terre et la lune immobiles dans une de leurs
positions relatives. Si cette hypothèse était vraie, la surface des eaux
prendrait d'une manière permanente la forme elliptique que nous venons
d'indiquer, et se maintiendrait en équilibre dans cette position. Mais,
comme on le sait, la terre tourne sur elle-même en 24 heures dans le
sens de la flèche (latérale), et la lune tourne dans le même sens autour
de la terre en 27 jours 1/2. De là un certain mouvement _résultant_ de
la lune par rapport à la terre; tout se passe exactement comme si la
lune partant de la position L (_fig._ 133) tournait d'occident en orient
(dans le sens de la flèche) autour du centre T de la terre, faisant une
révolution en 24h 50m 28s. Nous pouvons, pour plus de simplicité,
supposer que la déclinaison de la lune étant nulle, celle-ci tourne
autour de la terre, sur le plan de l'équateur, qui serait par exemple le
plan de la figure 133. En considérant cet astre dans chacune de ces
positions successives, on voit que le grand axe de l'ellipse liquide
doit toujours être dirigé suivant LT; ce grand axe et par suite
l'ellipse elle-même tourneront donc avec la lune. Par suite, quand cet
astre, au bout de 6h 12m 37s, ayant tourné de 90°, se trouvera au
méridien de C sur la direction TG prolongée, ce sera en C et en D que
l'ellipse sera allongée, tandis qu'elle sera aplatie en A et en B. Il y
aura marée haute en C et en D, et marée basse en A et en B. Comme tout
cela est arrivé progressivement, la mer a monté pendant ces 6h 12m 37s
en C et en D, tandis qu'elle descendait en A et en B.

De plus, dans cet intervalle, la pleine mer a eu lieu successivement
pour tous les lieux situés entre A et C, ou entre B et D, quand la lune
a passé au méridien supérieur des uns et au méridien inférieur des
autres. Après un nouvel intervalle de 6h 12m 37s la lune arrive au
méridien supérieur de B qui est le méridien inférieur de A; il y a de
nouveau haute mer en B et en A, et basse mer en C et en D: la mer a
monté aux premiers lieux et baissé dans les derniers; la pleine mer a eu
lieu dans l'intervalle successivement pour les lieux situés entre C et B
et entre D et A. Dans les 6h 12m 37s suivantes, la lune se rend du
méridien de B au méridien de D; on voit ce qui arrive; puis de même
quand la lune va du méridien de D au méridien de A. Ceci explique
comment l'intervalle de deux hautes mers consécutives, en chaque lieu de
la terre, est précisément de 12h 25m 14s; en même temps se trouve
expliquée l'ascension progressive des eaux de la mer, de la basse mer à
la haute mer.

=387.= ACTION DU SOLEIL SUR LES EAUX DE LA MER. Nous avons supposé que
la lune agissait seule de l'extérieur sur les eaux de la mer; mais
évidemment le soleil, qui se trouve vis-à-vis de la terre dans des
conditions analogues à celles que nous venons de considérer quant à la
lune, doit attirer les eaux de la mer et produire sur leur masse un
effet tout à fait analogue à celui que produit la lune. Nos explications
des nº 384 et 385 s'appliquent de point en point au soleil; il suffit de
remplacer la masse _m_ de la lune et la distance _d_ = TL par la masse M
du soleil et la distance D = ST de ce dernier astre à la terre. Le
soleil, se trouvant au méridien d'un lieu A, tendra à y soulever la mer
avec une force que l'on peut évaluer très-approximativement à 2_fmr_/D³.
En considérant spécialement le soleil vis-à-vis de la terre, nous
trouvons donc qu'il doit y avoir une marée solaire de même qu'il y a une
marée lunaire. Il faut de même avoir égard au changement des positions
du soleil par rapport à la terre.

=388.= Si on compare la force avec laquelle la lune, se trouvant au
méridien d'un lieu, y soulève les eaux, à la force analogue pour le
soleil, on trouve le rapport:

(2_fmr_/_d_³) / (2_f_M_r_/D³) = (_m_/_d_³)/ (M/D³) = (_m_/M) · (D³/_d_³).

Or la masse de la terre étant prise pour unité, on a vu que la masse

M = 355000 (nº 201) et _m_ = 1/81 (nº 265); d'ailleurs D = 400 _d_,

d'où D/_d_ = 400. Donc le rapport ci-dessus des forces que nous
comparons est approximativement égal à

(1/355000 · 81) · 400³; environ 2,05.

_Ainsi la marée lunaire est environ le double de la marée solaire_.

=389.= ACTIONS COMBINÉES DES DEUX ASTRES; EFFETS RÉSULTANTS.--On
explique en mécanique comment le mouvement total d'un système soumis à
deux forces est la résultante des mouvements partiels que ces forces
considérées l'une après l'autre lui impriment respectivement; donc les
deux flux partiels, produits par la lune et le soleil, se combinent sans
se troubler, et c'est de cette combinaison que résulte le flux réel
qu'on observe dans les ports.

Mais comme les périodes des deux phénomènes ne sont pas les mêmes,
l'instant de la marée solaire n'est pas toujours le même que celui de la
marée lunaire. Si, à une certaine époque, les deux astres passant
ensemble au méridien, les deux marées coïncident, la marée lunaire
suivante retardera sur la marée solaire de l'excès du demi-jour lunaire
sur le demi-jour solaire, c'est-à-dire de 25m 14s. Les retards iront en
s'accumulant, au bout de 7j 1/4 environ, ils seront de 6h 1/4 à peu
près, et la pleine mer lunaire coïncidera avec la basse mer solaire, et
_vice versa_; ce sont ces différences qui produisent les variations des
hauteurs de marées, suivant les phases de la lune. Ainsi, quand à la
conjonction le soleil et la lune passent ensemble au méridien du lieu A
(_fig_. 133), leurs actions s'ajoutent puisqu'elles ont lieu dans le
même sens; c'est ce qui produit les grandes marées des syzygies[147].

[Note 147: On peut encore; si on veut, supposer que les déclinaisons du
soleil et de la lune étant nulles en même temps, ces astres tournent
tous deux autour de la terre sur le plan de l'équateur céleste.]

Lorsque, au contraire, à une quadrature, les deux astres passent au
méridien du lieu A, à 6 heures de distance, l'un d'eux y passant tend à
y déterminer une élévation de la mer, tandis que l'autre qui est, en ce
moment, à 90° de distance en avant ou en arrière, tend à produire une
dépression au même lieu; les deux actions se contrarient le plus
possible l'une l'autre; la résultante est la marée des quadratures, qui
est par conséquent la plus faible de toutes.

Entre une quadrature et une syzygie, la hauteur de la marée doit varier
progressivement du minimum qui correspond à la première au minimum qui
correspond à l'autre; le contraire a lieu d'une syzygie à une
quadrature.

Comme d'ailleurs c'est l'attraction lunaire qui est la plus grande (nº
388), c'est elle qui règle principalement la marée résultante, la marée
effective. C'est ce qui fait que dans un temps donné on observe autant
de marées qu'il y a de passages de la lune, tant au méridien supérieur
du lieu qu'à son méridien inférieur.

=390=. RETARD DES MARÉES Si, comme nous l'avons supposé, la mer
recouvrait partout la terre à une égale profondeur, si elle n'éprouvait
aucun obstacle dans ses mouvements, chaque marée partielle aurait lieu
au moment où l'astre qui la produit a sa plus grande action,
c'est-à-dire quand il passe au méridien du lieu considéré; la marée
résultante (la marée effective) aurait lieu précisément au moment
indiqué par la théorie de la combinaison des deux actions. Par exemple,
aux syzygies, la haute mer aurait lieu au moment même où le soleil et la
lune parviennent ensemble au méridien. Mais comme la mer n'enveloppe pas
la terre de toutes parts, que sa profondeur est loin d'être partout la
même, qu'elle est gênée dans ses mouvements, les choses ne se passent
pas ainsi. L'action de la lune ou du soleil s'exerce principalement avec
une action prépondérante au milieu de l'Océan, là où les eaux sont à peu
près dans les conditions que nous avons supposées dans notre
explication. Le mouvement que cette action détermine, les ondes qui se
produisent en conséquence à la surface des eaux, se propagent de proche
en proche, et le mouvement finit par se faire sentir sur les côtes; mais
il faut pour cela un temps assez long; l'expérience et la théorie
montrent qu'il ne faut pas moins de 36 heures. Ainsi, par exemple, la
haute mer d'une syzygie n'a lieu sur les côtes qu'environ un jour et
demi après le moment où les actions associées des deux astres ont
commencé à imprimer aux eaux de l'Océan le mouvement ondulatoire qui se
manifeste à nous par cette marée, c'est-à-dire _un jour et demi_ après
le moment même de la conjonction. La même chose a lieu pour toutes les
marées.

=391=. ÉTABLISSEMENT DU PORT. Ce que nous venons de dire s'applique à
toute l'étendue des côtes de l'Océan. S'il n'y avait pas d'autre cause
de retard, l'heure de la marée serait la même pour tous les ports de
France situés sur cette mer. Mais il y a encore le retard connu sous le
nom d'établissement du port, dont nous avons parlé nº 381. Ce retard,
constant pour chaque port, mais différent en général d'un port à
l'autre, dépend de la configuration des côtes et de la situation du port
relativement aux côtes de l'Océan sur lesquelles le flot arrive d'abord.

Lorsque la mer devient haute à l'ouest de la France, dans les environs
de Brest, le flot de la pleine mer s'avance peu à peu dans la Manche;
cette petite mer se trouvant brusquement resserrée par la presqu'île de
Cotentin, le flot monte contre la barrière qui s'oppose à sa marche, et
il en résulte des marées extrêmement grandes sur les côtes de la baie de
Cancale, et notamment à Granville. De là le flot continue à s'avancer,
et la pleine mer a lieu successivement à Cherbourg, au Havre, à Dieppe,
à Calais, etc.

L'établissement du port est d'autant plus grand pour l'un de ces ports
que celui-ci est plus éloigné du point de départ du flot dont nous
décrivons la marche progressive. Cette progression est sensible sur le
tableau de la page 284.

Ce que nous venons de dire de la Manche, considéré comme un golfe où les
eaux de l'Océan pénètrent assez largement, s'applique aux ports qui sont
au fond d'une baie ou d'une rade, ou bien à une certaine distance de
l'embouchure d'une rivière, dont le lit est plus ou moins resserré. Le
flot, arrivé à l'entrée de la baie ou à l'embouchure de la rivière, met
un certain temps à arriver successivement à une distance plus ou moins
grande. De là, par exemple, la différence des heures de la haute mer à
Saint-Nazaire, Paimbœuf et Nantes, sur la Loire; à Royan et Bordeaux,
sur la Gironde.

=392=. Pour terminer, nous observerons que les différences entre les
hauteurs moyennes de la marée dans les différents ports sont dues à la
configuration des côtes, aux obstacles qu'éprouvent les ondes pour se
développer librement. (V., par exemple, ce qui arrive pour les marées de
la baie de Cancale.)

=393=. Nous avons encore dit qu'il n'y a pas de marée dans la mer Noire
ni dans la mer Caspienne; que celles qui ont lieu dans la Méditerranée
sont à peine sensibles. Cela tient à ce que ces mers sont pour ainsi
dire isolées et trop petites. Nous avons vu que le phénomène des marées
est un effet de la différence des attractions exercées par la lune et le
soleil sur les diverses parties de la surface des eaux; cette différence
des attractions résulte elle-même de la différence des distances à la
lune des points de la surface liquide. Pour que l'effet en question,
c'est-à-dire la marée, soit sensible sur une mer isolée, il faut
évidemment que la différence des distances relatives aux divers points
de cette mer soit assez considérable, c'est-à-dire que cette mer soit
grande.

NOTE.

_Détermination_ DE LA PARALLAXE DU SOLEIL _par l'observation d'un
passage de Vénus sur cet astre._

=394=. Les passages de Vénus sur le soleil offrent le moyen le plus
exact que nous connaissions de mesurer la parallaxe du soleil, par suite
la distance de cet astre à la terre (nº 200), et enfin les dimensions de
notre système planétaire. Les passages de 1761 et de 1769, surtout le
dernier, ont été observés avec soin par des astronomes de diverses
nations. Ce sont ces observations qui ont fourni la valeur moyenne,
8",57, que nous avons indiquée, nº 199, pour la parallaxe horizontale du
soleil. Nous allons donner un aperçu de la marche qui a été suivie, et
dont la première idée est due à Halley.

Au moment d'un passage, Vénus se trouve deux fois et demie plus
rapprochée de la terre que du soleil,

VS = 21/2VT, ou VS/VT = 2 1/2. (_fig_. 128)

Il en résulte, comme le montre la figure, que deux observateurs, placés
en deux endroits de la terre, A et B, suffisamment éloignés l'un de
l'autre, voient

[Illustration: page 299, fig. 128]

Vénus, V, décrire deux cordes, sensiblement différentes du disque
solaire (MN, PQ); à un même instant, par exemple, ces observateurs
voient respectivement la planète se projeter en deux points différents,
V, V". Supposons, pour fixer les idées, que les lieux d'observation, A
et B, soient situés aux extrémités d'un diamètre de la terre, et faisons
abstraction du mouvement de rotation de celle-ci. Chaque observateur
peut mesurer la corde qu'il voit décrire à l'ombre de la planète sur le
disque solaire (le mouvement angulaire de la planète étant parfaitement
connu, le temps du passage fait connaître l'espace parcouru sur le
disque). Les deux cordes étant connues, on trouve aisément leur distance
V'V". Connaissant cette distance V'V", on détermine l'angle sous lequel
elle serait vue de la terre[148]. On a trouvé 43" à peu près pour la
valeur de cet angle. (La distance V'V", est très-exagérée dans notre
figure; en réalité elle est vue de la terre sous un angle de 43"
environ, tandis que le diamètre du disque est vu sous un angle de 32'.)

[Note 148: On sait le temps qu'il faut à Vénus, à l'époque de la
conjonction inférieure, pour faire vis-à-vis de la terre un chemin
angulaire égal au demi-diamètre apparent du soleil: En comparant à ce
temps la durée du passage de Vénus pour chaque observateur, on a le
rapport qui existe entre la corde qu'il voit décrire à l'ombre et le
diamètre du disque solaire. Imaginons qu'on construise un cercle
représentant ce disque; on pourra y représenter proportionnellement les
deux cordes MN, PQ, à l'aide de leurs rapports au diamètre. La distance
de ces deux cordes sur la figure étant comparée au diamètre du cercle,
on aurait le rapport de la distance angulaire des points V, V", vus de
la terre, au diamètre apparent du soleil; d'où on déduit cette distance
angulaire (43"). Comme cette distance vaut précisément 5 fois la
parallaxe du soleil (V. le texte), on connaîtrait cette parallaxe. En
faisant des calculs correspondant à ces constructions, les astronomes
sont arrivés à un résultat plus précis.]

Cela posé, observons que les triangles semblables VV'V", AVB donnent:

V'V"/AB ou V'V"/2r = VV'/AV = VS/VT.

Or, nous savons que VS/VT = 2 1/2 = 5/2,

donc V'V"/2r = 5/2 ou V'V"/r = 5.

On conclut de là que l'angle de 43" sous lequel la droite V'V" est vue
d'une distance égale à celle qui sépare la terre du soleil est égal à 5
fois l'angle sous lequel le rayon _r_ de la terre serait vu de la même
distance. Mais ce dernier angle n'est autre chose que la parallaxe du
soleil; donc la parallaxe du soleil est égale au 5e de la valeur connue
43"; P = 43"/5, à peu près.

APPENDICE.

EXPLICATION DES ALTERNATIVES DE JOUR ET DE NUIT, DES INÉGALITÉS DES
JOURS ET DES NUITS, ETC., DANS L'HYPOTHÈSE DU MOUVEMENT RÉEL DE LA
TERRE.

=395=. La réalité du double mouvement de la terre devient encore plus
évidente quand on explique dans cette hypothèse tous les faits, tous les
phénomènes dont nous nous sommes occupé dans ce chapitre; les autres
raisons que nous avons de croire à ce mouvement ont alors toute leur
valeur (nº 223). Nous ne pouvons entreprendre ici cette explication
détaillée; cela nous mènerait trop loin; nous expliquerons seulement les
phénomènes qui nous ont principalement occupé.

Nous avons établi que le mouvement diurne du soleil et son mouvement
apparent de translation sur une orbite elliptique, peuvent fort bien
n'être que des apparences dues à la rotation de la terre et à son
mouvement annuel de translation. Nous allons montrer que les
alternatives du jour et de la nuit, leurs durées variables et inégales,
aussi bien que les variations de la température, s'expliquent
parfaitement dans l'hypothèse d'un mouvement réel de la terre tel que
nous venons de l'indiquer.

=396=. 1º ALTERNATIVES DE JOUR ET DE NUIT. _La rotation diurne de la
terre autour d'un axe central PP', en face du soleil supposé fixe,
explique parfaitement les alternatives de jour et de nuit, telles
qu'elles se produisent en chaque lieu de la terre._

Cette proposition est mise en évidence par l'expérience suivante.
Prenons un globe opaque et une bougie allumée; maintenons la bougie en
place, et faisons tourner le globe autour d'un de ses diamètres comme
axe; un point quelconque _marqué_ sur le globe est, en général, éclairé
durant une partie de la révolution, et reste dans l'obscurité durant
l'autre partie. On peut répéter cette expérience en donnant
successivement à l'axe de rotation du globe, par rapport au point
éclairant S, l'une des trois positions qu'indiquent les figures 83, 84,
85 ci-après.

On retrouve ainsi toutes les circonstances qui peuvent se présenter
relativement à l'alternative du jour et de la nuit en un lieu de la
terre.

Ceux qui tiennent à une plus grande précision peuvent lire ce qui suit.

=397=. Pour justifier la proposition précédente, il suffit de jeter les
yeux sur l'une quelconque des figures 83, 84, 85 ci-après, représentant
chacune une des positions que la terre, dans son mouvement annuel,
occupe successivement vis-à-vis du soleil S.

Dans la première position (_fig_. 83), le soleil est dans le plan E'E de
l'équateur terrestre, et la ligne TS qui joint le centre de la terre à
celui du soleil est perpendiculaire à l'axe PP' de rotation de la terre.
P est le pôle boréal de la terre; P' le pôle austral.

Dans la deuxième position de la terre (_fig_. 84), le soleil S est
manifestement au-dessus de l'équateur E'E, du côté du pôle boréal P; sa
déclinaison Es est boréale; l'angle PTS de l'axe PP' et de la ligne TS,
du côté du pôle boréal P, est aigu.

Dans la troisième position (_fig_. 85), le soleil est sous l'équateur
EE', du côté du pôle austral P'; la déclinaison Es est australe; l'angle
PTS est obtus.

Ce sont évidemment les seuls cas qui peuvent se présenter en général.
Quelle que soit la position de la terre en un jour donné, on peut
concevoir un grand cercle, B'I'BI, perpendiculaire à la ligne TS, au
point T, et que l'on regarde comme fixe ainsi que TS et PP' durant une
révolution diurne de la terre, c'est-à-dire pendant le jour considéré.
Il est clair qu'il fera jour pour un lieu M de la terre quand ce lieu,
par l'effet de la rotation diurne, viendra en avant de ce cercle fixe,
B'I'BI, par rapport au soleil S, et qu'il fera nuit pour ce lieu quand
il passera derrière ce cercle B'I'BI. On appelle ce cercle B'I'BI
_cercle d'illumination_. Or chaque lieu M de la terre décrit dans
l'espace de vingt-quatre heures un cercle entier tel que ABA'B'
perpendiculaire à l'axe PP': pendant que le lieu M décrit l'arc
antérieur B'AB, dans le sens indiqué par ces lettres, il est éclairé par
le soleil, il y fait jour; pendant qu'il parcourt l'arc postérieur
BA'B', il est dans l'obscurité, il y fait nuit. Le mouvement de rotation
de la terre explique donc parfaitement les alternatives de jour et de
nuit[149].

[Note 149: On peut remarquer, dans la seconde position de la terre, une
zone boréale, IPN, dont chaque point est éclairé durant toute la
révolution actuelle de la terre; chacun de ces lieux jouit pour cette
position de la terre d'un jour de plus de vingt-quatre heures. Sur la
zone terrestre I'P'N', au contraire, il y a pour cette position de la
terre une nuit de plus de vingt-quatre heures. Remarque analogue pour la
troisième position. Mais cette remarque doit être reportée au paragraphe
suivant.]

2º _Les variations périodiques qu'éprouvent les durées des jours et des
nuits en un même lieu de la terre s'expliquent très-bien par le
mouvement annuel de translation de la terre autour du soleil S,
relativement fixe._

Pour fixer les idées, considérons un point M de l'hémisphère boréal.

[Illustration: page 302, fig. 83]

En jetant les yeux sur les figures 83, 84, 85, on verra facilement que
les variations dans la durée des jours et des nuit pour ce lieu
quelconque M de la terre, sont dues aux variations de la hauteur du
soleil, au-dessus ou au-dessous de l'équateur terrestre; autrement dit,
aux variations de la déclinaison du soleil résultant du mouvement de
translation de la terre sur son orbite elliptique.

Dans chacun, le cercle PAEP'E'A', que l'on voit de face, est
l'intersection de la terre, supposée sphérique, par le plan qui passe
par le centre, S, du soleil et l'axe de rotation PP', considéré dans
l'une de ses positions successives; _s_ étant l'intersection de la ligne
TS avec cette circonférence, l'arc _s_E est la D du soleil, boréale dans
la _fig_. 84, australe dans la _fig_. 85, et nulle dans la _fig_. 83.

1er _cas général_. Considérons d'abord cette dernière, le soleil étant
dans le plan de l'équateur, le cercle d'illumination BII'B' coupe le
plan SPP' suivant l'axe PP' lui-même; il résulte de là que chaque
parallèle diurne, B'ABA', ayant son centre C sur le cercle
d'illumination, est divisé par celui-ci en deux parties égales B'AB,
BA'B'. _A l'époque où le soleil est dans le plan de l'équateur quand la
déclinaison est nulle, c'est-à-dire à chaque équinoxe_, la durée du jour
égale celle de la nuit pour tous les lieux de la terre.

[Illustration: page 103, fig. 84]

2e _cas général_ (_fig_. 84). Le soleil est au-dessus de l'équateur du
côté du pôle boréal P; la déclinaison _s_E est boréale. La figure montre
immédiatement que, dans ce cas, pour tout lieu M de l'hémisphère boréal,
la durée du jour surpasse celle de la nuit, et que cet excès du jour sur
la nuit augmente ou diminue avec la ligne CK, par suite avec l'angle ITP
= _s_TE = Déclinaison. Ainsi, quand la déclinaison du soleil est
boréale, le jour dure plus que la nuit pour tout lieu de l'hémisphère
boréal, et d'autant plus que cette déclinaison boréale est plus grande.

Le contraire a évidemment lieu à la même époque pour chaque lieu _m_ de
l'hémisphère terrestre austral.

3e _cas général_ (_fig_. 85). Le soleil est au-dessous de l'équateur
DE'; sa déclinaison E_s_ est australe.

[Illustration: page 304, fig. 85]

La figure montre qu'alors le jour dure moins que la nuit pour chaque
lieu M de l'hémisphère boréal, et dure d'autant moins que CK est plus
grand, ou bien que l'angle ITP, qui mesure la déclinaison australe E_s_
du soleil, est plus grand.

Ainsi, quand la déclinaison du soleil est australe, le jour dure moins
que la nuit sur l'hémisphère boréal, et d'autant moins que cette
déclinaison australe est plus grande.

Or ces conclusions sont identiquement celles que nous avons déduites de
la considération du mouvement annuel apparent du soleil.

Il reste maintenant à montrer comment le mouvement de translation de la
terre, dans son orbite elliptique dont le soleil occupe constamment un
des foyers, fait varier la déclinaison du soleil.

Pour cela, il est bon de remarquer: 1º (_fig_. 84) que l'angle PTS de la
ligne ST avec le segment TP de la ligne des pôles, qui va au pôle
boréal, est aigu quand la déclinaison, _s_E, du soleil est boréale; et
réciproquement; que, de plus, la déclinaison, _s_E, est alors le
complément de l'angle PTS; 2º (_fig_. 83) que si la déclinaison est
nulle, PTS = 90°. et enfin (_fig_. 85) que la déclinaison E_s_, étant
australe, l'angle PTS est obtus, et réciproquement; la déclinaison,
E_s_, étant alors égale à PTS--90°.

Étudier les variations de la D revient donc à étudier celles de l'angle
PTS.

Soit T_(1)T_(2)T_(3)T_(4) (_fig_. 87) l'orbite de la terre dont le
soleil S occupe un foyer; elle est tracée dans le plan de l'écliptique
céleste, Soit SN l'axe de l'écliptique, et SO la direction fixe à
laquelle l'axe PP' de la terre, mobile avec celle-ci, doit rester
sensiblement parallèle durant tout le mouvement annuel de la terre
(l'angle NSO = 23° 28')[150]; soient T_(2)T_(4) l'intersection du plan
NSO avec celui de l'écliptique auquel il est perpendiculaire, et
T_(1)T_(3) une perpendiculaire à T_(2)T_(4), menée sur l'écliptique;
T_(1)T_(3) est perpendiculaire au plan NSO, et par suite aux deux lignes
fixes SN et SO. Supposons que la terre, T, se meuve sur l'ellipse dans
le sens T_(1)T_(2)T_(3)T_(4) à partir de T_(1). Dans la 1re position
T_(1) l'angle OST_(1) étant droit, son supplément PT_(1)S l'est aussi;
le soleil est dans un plan perpendiculaire à l'axe PP', c'est-à-dire
dans le plan de l'équateur; alors D = 0, et le jour égale la nuit pour
toute la terre; c'est l'époque d'un équinoxe, celui du printemps, comme
nous allons le voir. En effet, la terre continuant à se mouvoir sur
l'arc d'ellipse T_(1)T_(2), le rayon vecteur ST se meut sur le quadrant
T_(1)TT_(2); or la géométrie montre qu'alors, partant de la valeur
OST_(1) = 90° pour aller à la valeur OST_(2) = 90° + NSO = 90° + 23°28',
l'angle OST, toujours obtus, augmente continuellement[151]; il en
résulte que son supplément PTS, _toujours_ _aigu_, diminue
continuellement de PT(1)S = 90 à PTS(2) = 90° — (23° 28') = 66° 32'. Il
en résulte que la déclinaison _s_E = 90° — PTS (_fig._ 84), constamment
boréale, va en augmentant de 0 à 23° 28', maximum qu'elle atteint quand
la terre arrive en T(2).

[Note 150: La direction de l'axe de rotation de la terre n'est pas
constante; mais le changement de direction que nous avons indiqué nº 231
est si lent, que nous pouvons, sans inconvénient sensible quand nous
suivons la terre dans une de ses révolutions autour du soleil,
considérer la direction de cet axe comme ne variant pas durant cette
révolution.]

[Illustration: 305, Fig. 87]

[Note 151:

[Illustration 305, Fig. 86]

Soit SO (_fig._ 86) une ligne oblique au plan MN, ayant pour projection
sur ce plan, ST(4); menons, dans le plan, T(1)T(3) perpendiculaire à
T(2)T(4). Comme le plan projetant OST_(4) est perpendiculaire au plan
MN, T(1)T(3) est perpendiculaire au plan OST(4) et par suite à SO;
OST(1) est droit ainsi que OST(3). Nous voulons comparer entre eux les
angles que fait SO avec les lignes qui passent par son pied dans le plan
MN. Le plus petit de ces angles est par hypothèse OST(4); supposons-le
égal à 90° — 23° 28' = 66° 32'. Considérons les diverses lignes ST qui
s'éloignent de ST(4) dans l'angle droit T(4)ST(1); du point O
abaissons OD perpendiculaire à MN, et du point D une perpendiculaire DI
à chacune de ces lignes ST. Si on mène OI, chaque ligne OI sera
perpendiculaire à ST. Cela posé, à mesure que la ligne ST s'éloignera de
ST(4) vers ST, dans l'angle T(4)TT(1), l'angle DSI du triangle
rectangle DSI, à hypothénuse fixe SD, augmentant, son complément SDI
diminue; d'où il résulte que le côté SI diminue continuellement de SD à
O. En même temps dans chaque triangle OIS, à hypoténuse constante OS,
rectangle en I, le côté SI diminuant, le côté OI augmente et avec lui
l'angle aigu opposé OSI ou OST; donc de la position ST_(4) à ST(1) (ou
à ST(3), ce qui revient au même) ces angles OST augmentent de 66° 32' à
90°; et _vice versa_, de ST(1) à ST(4) ou de ST(3) à ST(4), ces
angles OST diminuent de 90° à 66° 32'. Par suite, les angles OST pour
les lignes situées dans l'angle T(2)ST(3) ou T(1)ST(2) étant les
suppléments de ceux que nous venons de considérer, on peut dire que de
la position ST(1) à la position ST(2) les angles OST, toujours obtus,
augmentent de 90° à 90° + 23° 28'; de la position ST(2) à la position
ST(3), ces angles toujours obtus diminuent de 90° + 23° 28' à 90°.]

Durant le mouvement de la terre sur l'arc T(1)TT(2) le soleil doit
donc nous paraître s'élever de plus en plus au-dessus de l'équateur du
côté du pôle boréal[152], jusqu'à ce que sa D, toujours boréale,
atteigne un maximum de 23° 28'. La saison qui s'écoule alors est donc le
printemps; durant cette saison, le jour, constamment plus long que la
nuit pour les habitants de l'hémisphère boréal, doit augmenter
continuellement avec la D du soleil jusqu'à un maximum qu'il atteint
alors que la terre arrive en T(2). Cette dernière position de la terre
est donc celle qui correspond au solstice d'été. La terre continuant à
se mouvoir sur l'arc T(2)T(3), le rayon vecteur se mouvant dans le
quadrant T(2)ST(3), l'angle OST, toujours obtus, diminue depuis la
valeur OST(2) = 90° + 23° 28' jusqu'à OST(3) = 90°; son supplément
PTS, toujours aigu, augmente depuis son minimum 90° — 23° 28' = 66° 32'
jusqu'à 90°. La déclinaison _s_E (_fig._ 84) du soleil, toujours
boréale, diminue depuis 23° 28' jusqu'à 0°, valeur qu'elle atteint quand
la terre arrive on T(3), où l'angle PT(3)S = 90°.

[Note 152: C'est l'équateur terrestre ou contraire qui s'abaisse
au-dessous du rayon vecteur TS.] Durant ce mouvement de la terre sur
l'arc d'ellipse, T(2)TT(3), le soleil, toujours situé au-dessus du
plan de l'équateur terrestre, du côté du pôle boréal P, doit nous
paraître s'abaisser continuellement jusqu'à ce qu'il se retrouve de
nouveau sur l'équateur alors que la terre arrive en T(3). Durant cette
période du mouvement de la terre, les jours, pour les habitants de
l'hémisphère boréal, constamment plus longs que les nuits, diminuent
avec la déclinaison du soleil, et l'excès du jour sur la nuit s'annule
alors que la terre arrive en T(3) (_fig._ 87). La saison qui vient de
s'écouler est donc celle que nous avons nommée l'_été_, et la terre
arrivant en T(3), on est à l'équinoxe d'automne. La terre continuant
son mouvement sur l'arc T(3)TT(4), l'angle OST passant de OST(3) =
90° à OST(4) = 90° — NSO = 90° — 23° 28' reste toujours aigu; son
supplément PTS, _toujours obtus_, varie dans cet intervalle de PT(3)S =
90° à PT(4)S = 90° + 23° 28'. Le soleil passe au-dessous de l'équateur;
car sa déclinaison _s_E = PTL — 90° (V. la _fig._ 85) devient négative
ou australe et varie de 0° à — 23° 28', valeur qu'elle atteint quand la
terre arrive en T(4).

Durant ce mouvement de la terre de T(3) en T(4), le soleil doit donc
nous sembler s'abaisser au-dessous de l'équateur, _e'e_, du côté du
pôle austral, P'. Pour les habitants de l'hémisphère boréal, le jour
dure moins que la nuit, et sa durée diminue à mesure que la déclinaison
australe augmente pour atteindre son maximum, alors que la terre arrive
en T(4) (_fig._ 87).

Cette dernière époque du mouvement de la terre est donc le solstice
d'hiver, et la saison qui vient de s'écouler est l'automne.

Enfin la terre allant de T_(4) en T_(1), l'angle OST augmentant de 90° —
23° 28' à 90°, son supplément PTS diminue de 90° + 23° 28' à 90°, et la
déclinaison toujours australe varie de — 23° 28' à 0°.

Le soleil doit nous sembler se rapprocher de l'équateur terrestre,
_e_'_e_, pour y arriver alors que la terre est revenue en T_(1). Le jour
constamment moindre que la nuit, augmente néanmoins de son minimum à
douze heures, valeur qu'il atteint quand la terre est revenue en T_(1) à
l'époque d'un nouvel équinoxe du printemps. On vient de passer l'hiver.

Les variations périodiques des durées du jour et de la nuit s'expliquent
donc très-bien par le mouvement de la terre autour du soleil.

Nous n'avons pas besoin d'insister sur toutes les autres parties de la
discussion que nous avons faite à propos de la durée du jour à la même
époque pour des lieux différents de la terre.

Il suffit de jeter les yeux sur les _fig._ 84 et 85 pour voir que les
mêmes conséquences déduites du mouvement du soleil résultent de celui de
la terre. Plus la latitude boréale d'un lieu est élevée, plus la ligne
TC et la ligne CK sont grandes pour la même position de l'axe PP',
c'est-à-dire à la même époque de l'année[153]. Donc plus la latitude
boréale d'un lieu, est élevée, plus la durée du jour à une époque donnée
de l'année diffère de celle de la nuit.

[Note 153: CK = TC. tang. ITP; ITP est fixe dans cette comparaison; TC
varie avec la latitude.]

On remarque le jour de plus de vingt-quatre heures pour les lieux de la
zone terrestre IPN (_fig._ 84), et la nuit de plus de vingt-quatre
heures pour les lieux de la zone I'P'N'. Les limites de cette zone, à
partir du pôle, varient avec l'angle ITP jusqu'à 23° 28'.

[Illustration: 308, CARTE DES PRINCIPALES CONSTELLATIONS VISIBLES au
dessus de l'Horizon DE PARIS]

6º _Les variations périodiques de la température générale qui ont lieu
pour chaque lieu de la terre d'une saison à l'autre s'expliquent
très-bien par le mouvement de la terre autour du soleil._

En effet, ces variations de la température nous ont paru résulter des
variations de la déclinaison du soleil telles que nous les avons
déduites du mouvement apparent du soleil; mais, ainsi que nous venons de
le constater, ces variations de la déclinaison s'expliquent aussi bien
par le mouvement de la terre autour du soleil; il résulte de là que les
variations de la température s'expliquent aussi par le mouvement réel de
la terre.



FIN.


Paris.--Imprimé par E. THUNOT et Ce, rue Racine, 26.





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